Licenciement et conditions de validité des motifs invoqués dans le cadre d’une relation de travail.

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Licenciement et conditions de validité des motifs invoqués dans le cadre d’une relation de travail.

L’Essentiel : La société Verde Distribution Services, spécialisée dans le nettoyage pour les professionnels, a licencié Mme [C] pour faute grave le 10 juillet 2020, en raison de son comportement agressif et de l’absence de justification de son titre de séjour. Bien qu’elle ait saisi le conseil de prud’hommes, celui-ci a reconnu une cause réelle et sérieuse pour le licenciement, mais pas de faute grave. En appel, la cour a infirmé cette décision, concluant que le comportement de Mme [C] constituait effectivement une faute grave, et a condamné Mme [C] aux dépens.

Présentation de la société Verde Distribution Services

La société Verde Distribution Services est une SASU immatriculée au RCS de Versailles, spécialisée dans le nettoyage des bâtiments et infrastructures pour les professionnels. Elle emploie plus de 11 salariés.

Engagement de Mme [C]

Mme [C] a été engagée par la société le 13 juin 2012 en tant qu’agent de service à temps partiel. Son contrat a été transformé en CDI à temps partiel le 2 septembre 2013, avec une durée de travail de 119,07 heures par mois et un salaire brut moyen de 1 238,33 euros.

Problèmes de titre de séjour

Le titre de séjour de Mme [C] a expiré le 2 septembre 2017. Elle a régulièrement transmis des récépissés de demande de renouvellement à son employeur, mais à partir du 13 septembre 2019, elle n’a plus fourni de justificatifs.

Licenciement de Mme [C]

Le 23 juin 2020, la société a notifié à Mme [C] une mise à pied conservatoire et l’a convoquée à un entretien préalable au licenciement. Le 10 juillet 2020, elle a été licenciée pour faute grave, en raison de son comportement agressif et de l’absence de justification de son titre de séjour.

Procédure judiciaire

Mme [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Versailles le 15 octobre 2020, demandant la requalification de son licenciement. Le jugement du 19 mai 2022 a reconnu une cause réelle et sérieuse pour le licenciement, mais pas de faute grave, et a condamné la société à verser plusieurs indemnités à Mme [C].

Appel de la société Verde Distribution Services

La société a interjeté appel le 17 juin 2022, contestant la décision du conseil de prud’hommes. Mme [C] n’ayant pas constitué avocat, l’affaire a été jugée par défaut.

Analyse de la faute grave

La cour a examiné les éléments de preuve fournis par la société concernant le comportement de Mme [C]. Bien que l’absence de titre de séjour soit une cause objective de licenciement, la cour a retenu que le comportement agressif de Mme [C] constituait une faute grave.

Décision de la cour

La cour a infirmé le jugement du conseil de prud’hommes, déclarant que le licenciement de Mme [C] reposait sur une faute grave. Elle a également débouté la société de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné Mme [C] aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique du licenciement pour faute grave selon le Code du travail ?

Le licenciement pour faute grave est encadré par plusieurs articles du Code du travail, notamment l’article L.1232-1 et l’article L.1235-1.

L’article L.1232-1 stipule que :

« Tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. »

Cela signifie que l’employeur doit prouver que le licenciement repose sur des faits objectifs et vérifiables.

De plus, l’article L.1235-1 précise que :

« En cas de litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur. »

Il est important de noter que la charge de la preuve incombe à l’employeur, qui doit démontrer que les faits reprochés au salarié justifient la rupture immédiate du contrat de travail.

La faute grave, quant à elle, est définie comme celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, justifiant ainsi une rupture sans préavis.

Comment la jurisprudence interprète-t-elle la notion de faute grave ?

La jurisprudence a établi que la faute grave doit être caractérisée par des comportements qui rendent impossible la poursuite de la relation de travail.

Dans le cas présent, la cour a retenu que le comportement de Mme [C] était effectivement constitutif d’une faute grave.

Les éléments de preuve fournis par l’employeur, tels que les attestations de collègues, ont été jugés suffisants pour établir que Mme [C] avait eu des comportements agressifs et insultants envers ses supérieurs.

La cour a ainsi considéré que :

« La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. »

Cela implique que les comportements reprochés doivent être suffisamment graves pour justifier une rupture immédiate du contrat de travail.

Quelles sont les conséquences d’un licenciement pour faute grave sur les indemnités dues au salarié ?

En cas de licenciement pour faute grave, l’article L.1234-1 du Code du travail précise que le salarié n’a pas droit à l’indemnité de préavis ni à l’indemnité de licenciement.

L’article L.1234-1 dispose que :

« En cas de licenciement pour faute grave, le salarié ne peut prétendre à aucune indemnité de licenciement. »

De plus, la mise à pied conservatoire, qui précède souvent le licenciement, ne donne pas droit à rémunération, comme le stipule l’article L.1232-3.

Ainsi, dans le cas de Mme [C], le licenciement pour faute grave a conduit à la perte de ses droits à indemnités, ce qui a été confirmé par la cour.

Quels sont les droits du salarié en matière de contestation de licenciement ?

Le salarié a le droit de contester son licenciement devant le conseil de prud’hommes, comme le prévoit l’article L.1235-1 du Code du travail.

Cet article précise que :

« Le salarié peut saisir le juge pour contester la régularité et le bien-fondé de son licenciement. »

Il est également important de noter que le juge doit apprécier les motifs invoqués par l’employeur et, en cas de doute, celui-ci doit profiter au salarié.

Dans le cas de Mme [C], bien que le conseil de prud’hommes ait initialement jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la cour d’appel a finalement infirmé cette décision en requalifiant le licenciement en faute grave.

Quelles sont les implications de la non-représentation du salarié à l’entretien préalable ?

La non-représentation du salarié à l’entretien préalable peut avoir des conséquences sur la procédure de licenciement, mais ne constitue pas en soi un motif de licenciement.

L’article L.1232-2 du Code du travail stipule que :

« L’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable avant de prendre une décision de licenciement. »

Cependant, l’absence du salarié à cet entretien ne prive pas l’employeur de son droit de licencier, mais peut être prise en compte dans l’appréciation des faits.

Dans le cas de Mme [C], son absence à l’entretien préalable a été mentionnée dans la notification de licenciement, mais cela n’a pas empêché la cour de considérer les autres éléments de preuve pour établir la faute grave.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

Chambre sociale 4-3

ARRÊT N°

PAR DEFAUT

DU 06 JANVIER 2025

N° RG 22/01919 –

N° Portalis DBV3-V-B7G-VIMI

AFFAIRE :

S.A.S.U. VERDE DISTRIBUTION SERVICES – VDS

C/

[N] [C]

Décision déférée à la cour : Jugement rendue le 19 Mai 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VERSAILLES

N° Section : C

N° RG : 20/00704

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Cécilia ARANDEL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S.U. VERDE DISTRIBUTION SERVICES – VDS

N° SIRET : 351 203 005

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Cécilia ARANDEL de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107

Substitué : Me Clara BELLEST, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Madame [N] [C]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

INTIMÉE – Défaillante, déclaration d’appel signifiée par acte de commissaire le 03 août 2022 PV 659

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 28 Novembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseillère chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence SINQUIN, Présidente,

Mme Florence SCHARRE, Conseillère,

Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseillère,

Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

FAITS ET PROCÉDURE

La société Verde Distribution Services est une société par actions simplifiée à associé unique (SASU) immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) de Versailles sous le n° 351 203 005.

La société Verde Distribution Services a pour activités l’exécution de prestations de nettoyage des bâtiments et des infrastructures destinées aux professionnels et aux entreprises.

Elle emploie plus de 11 salariés.

Par contrat de travail à durée déterminée en date du 13 juin 2012, Mme [N] [C] a été engagée par la société Verde Distribution Services en qualité d’agent de service AS 1A, à temps partiel et à compter du même jour.

Par avenant au contrat de travail en date du 2 septembre 2013, la relation de travail de Mme [C] a été transformée en contrat de travail à durée indéterminée, à temps partiel.

Au dernier état de la relation de travail, Mme [C] était soumise à une durée du travail de 119,07 heures mensuelles, réparties sur deux sites d’intervention, et percevait un salaire moyen brut de 1 238,33 euros par mois.

Les relations contractuelles étaient régies par les dispositions de la convention collective nationale des entreprises de propreté.

Le 2 septembre 2017, le titre de séjour de Mme [C], valant autorisation de travail, est arrivé à son terme et la salariée a régulièrement transmis à son employeur les récépissés de demande de renouvellement de son titre de séjour, afin de proroger son autorisation de travail.

A compter du 13 septembre 2019, Mme [C] n’a plus communiqué de justificatifs de ses demandes de renouvellement de son titre de séjour ni de titres valant autorisation de travail.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 juin 2020, la société Verde Distribution Services a notifié à Mme [C] sa mise à pied à titre conservatoire et l’a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, prévu le 2 juillet 2020.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 10 juillet 2020, la société Verde Distribution Services a notifié à Mme [C] son licenciement pour faute grave, en ces termes :

« Madame,

Par courrier recommandé avec accusé de réception et par courrier simple en date du 23 juin 2020, nous vous avons convoquée à un entretien préalable prévu le 02 juillet 2020 à 18h00 et ce afin de vous faire part des motifs qui nous amenaient à envisager votre licenciement. Nous vous avons notifié, dans le même temps, une mise à pied à titre conservatoire dans l’attente de la décision à venir.

Bien que régulièrement convoquée, vous ne vous êtes pas présentée à votre entretien préalable. Par la présente, nous vous rappelons le déroulement des faits suivants :

Le jour de votre embauche, vous nous avez présenté votre titre de séjour.

Celui-ci a été renouvelé, à plusieurs reprises, sans aucune difficulté, jusqu’en juin 2019.

Afin de vous permettre de renouveler, à nouveau, vos papiers d’identité, nous vous avons adressé, comme d’habitude, une attestation de présence. Ce document n’étant visiblement pas suffisant, nous avons établi un CERFA n° 15186*03, puis une lettre à l’intention de la Préfecture.

Nous nous sommes régulièrement enquis de votre situation. A chaque fois, vous nous indiquiez que la procédure était en cours, et vous nous en apportiez la preuve (courrier de la Préfecture, courrier du syndicat en charge de vous aider dans vos démarches’). Connaissant la lenteur de l’administration française, et convaincus de votre bonne foi, nous avons permis de mener à bien vos démarches sereinement, nous vous avons même proposé notre aide.

Aujourd’hui, nous constatons que votre situation n’a pas du tout évolué en un an et que vous n’êtes plus en mesure de justifier de vos démarches auprès de la préfecture. Vous conviendrez que nous ne pouvons plus accepter cette situation qui n’a que trop duré.

Par ailleurs, nous constatons que votre comportement n’est plus en adéquation avec celui que nous sommes en droit d’attendre d’une de nos salariées.

Ainsi, depuis que vous n’êtes plus en mesure de justifier de vos démarches auprès de la Préfecture, votre comportement a changé.

En effet, à chaque fois que la chef d’équipe se présente sur votre site, pour vous donner votre fiche de paie, des produits, des consignes’ vous êtes agressive, vous la pointez du doigt, vous criez et finissez vos phrases par un tonitruant  » connasse  ». Il en est de même avec le responsable de secteur. Cette situation est tout à fait inadmissible. Ils ne sont nullement responsables de votre situation.

Ne vous étant pas présentée à votre entretien préalable, notre appréciation des faits reste donc inchangée.

En conséquence, nous sommes contraints de vous licencier pour faute grave pour les motifs susmentionnés (non présentation des papiers d’identité à jour malgré toute l’aide que nous vous avons apportée, comportement déplacé vis-à-vis de votre hiérarchie). Votre licenciement prend effet immédiatement.

Votre mise à pied à titre conservatoire était, quant à elle, parfaitement justifiée et ne vous sera donc pas payée. [‘] »

Par requête introductive reçue au greffe le 15 octobre 2020, Mme [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Versailles d’une demande tendant à ce que son licenciement pour faute grave soit requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse et à obtenir le versement d’une indemnité forfaitaire due au titre de sa période d’emploi illicite.

Par jugement rendu le 19 mai 2022, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Versailles a :

– dit et jugé que le licenciement de Mme [N] [C] par la société Verde Distribution Services est fondé par une cause réelle et sérieuse mais que la notion de faute grave n’est pas retenue ;

En conséquence,

– condamné la société Verde Distribution Services au paiement des somme suivante :

* 668,16 euros au titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire.

* 68,16 euros au titre des congés payés s’y rapportant.

* 64,11 euros au titre de rappel sur la prime annuelle conventionnelle.

* 6,41 euros au titre des congés payés s’y rapportant.

* 2 569,28 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.

* 256,92 euros au titre des congés payés s’y rapportant.

* 2 649,57 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement.

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– rappelé qu’en application de l’article R. 1454-28 du code du travail, sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :

1) Le jugement qui n’est susceptible d’appel que par suite d’une demande reconventionnelle ;

2) Le jugement qui ordonne la remise des certificats de travail, de bulletin de paye, ou de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;

3) Le jugement qui ordonne le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2ème alinéa de l’article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mois de salaires calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.

– débouté Mme [C] de sa demande d’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile ;

– rappelé que les intérêts légaux sont de droit sur les créances prud’homales et commencent à courir à compter de la saisine pour les sommes portant sur des rappels de salaires et à compter du prononcé de la présente décision pour les sommes ayant le caractère de dommages et intérêts.

– condamné la partie défenderesse au paiement des entiers dépens.

Par déclaration d’appel reçue au greffe le 17 juin 2022, la société Verde Distribution Services a interjeté appel de ce jugement.

Mme [C], intimée, n’ayant pas constitué avocat dans le délai d’un mois à compter de la notification de la déclaration d’appel, cette dernière a été signifiée par acte de commissaire de justice en date du 3 août 2022, suivant procès-verbal de recherches infructueuses dans le délai d’un mois à compter de l’avis du greffe.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 23 octobre 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 9 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la société Verde Distribution Services, appelante, demande à la cour de :

A titre principal,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles en ce qu’il a :

– constaté que le licenciement de Mme [C] n’était pas fondé sur une faute grave mais repose seulement sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

– débouter Mme [C] de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour de céans confirmait le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles qui a écarté la faute grave :

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles en ce qu’il a octroyé à Mme [C] des congés sur préavis ;

En conséquence,

– minorer les indemnités dues à Mme [C] à hauteur de 5 218,85 euros bruts, aucun congé payé sur préavis n’étant prévu à l’article 8252-2 du code du travail ;

En tout état de cause,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a :

– condamné la société Verde Distribution Services à verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à Mme [C] ;

En conséquence,

– condamner Mme [C] à verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les deux instances ;

– condamner Mme [C] aux entiers dépens.

La société Verde Distribution Services, appelante, a fait signifier ses conclusions d’appelant par acte de commissaire de justice en date du 9 septembre 2022, selon procès-verbal de recherches infructueuses, en application de l’article 659 du code de procédure civile.

Mme [C], intimée, n’a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur la procédure

Selon l’article 473 du code de procédure civile, lorsque la décision n’est pas susceptible d’appel et que l’une au moins des parties qui n’a pas comparu n’a pas été citée à personne, le jugement est rendu par défaut.

En l’espèce, l’arrêt étant rendu en dernier ressort et Mme [C] n’ayant pas été citée à sa personne, la déclaration d’appel ayant été fait l’objet d’un procès-verbal pour recherches infructueuses établi le 3 août 2022 par commissaire de justice, le présent arrêt sera rendu par défaut.

En application de l’article 472, en appel, si l’intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés. Il incombe ainsi à la cour d’examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels les premiers juges se sont déterminés.

Selon l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement, est réputée s’en approprier les motifs.

Sur la faute grave

Il résulte de l’article L.1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Le motif inhérent à la personne du salarié doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.

L’article L.1235-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Enfin, la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et qui justifie la rupture immédiate de son contrat de travail, sans préavis. La charge de la preuve pèse sur l’employeur.

En premier lieu, comme relevé par les premiers juges, si l’absence de justification par Mme [C] d’un titre de séjour régulier en France constitue une cause objective de licenciement, elle n’est pas de nature à caractériser une faute grave à l’encontre de la salariée.

En second lieu, la société fonde la faute grave sur l’agressivité et les insultes de Mme [C] à l’égard de la cheffe d’équipe, Mme [Y], ainsi que son agressivité et les insultes proférées à l’encontre du responsable de secteur, M. [F].

La société justifie à l’appui de la faute grave des attestations de Mme [Y] et de M. [F], salariés victimes des faits reprochés à Mme [C]. Le conseil de prud’hommes a considéré que ces deux pièces ne permettaient pas d’établir la faute grave alléguée car elles émanaient des supérieurs hiérarchiques de la salariée.

La cour relève que la société produit également l’attestation de M. [H], agent de service au sein de l’entreprise, qui confirme que le comportement de Mme [C] a changé au printemps 2020, qu’elle a crié à plusieurs reprises sur sa cheffe d’équipe Mme [Y] et que fin mai 2020, il l’a entendue crier sur Mme [Y] et l’insulter de ‘connasse’, puis dire que M. [F] était un ‘con’. Ce salarié ajoute avoir constaté qu’à l’issue de ces faits Mme [Y] était en pleurs. La société verse également l’attestation de Mme [H], agent de service, qui a entendu Mme [C] proférer des insultes envers Mme [Y].

Compte tenu des éléments susvisés, la cour retient que la société Verde Distribution services établit la preuve de la faute grave reprochée à Mme [C] à l’appui du licenciement.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement ayant dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave, et ayant condamné la société à payer à Mme [C] des sommes au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, de l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés s’y rapportant, et de l’indemnité de licenciement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il y a lieu d’infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance. Il convient de condamner en outre Mme [C] aux dépens en cause d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de sorte que la société appelante sera déboutée de sa demande à ce titre en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe, dans les limites de l’appel :

INFIRME le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles du 5 mai 2022 en ce qu’il a :

– dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse mais pas sur une faute grave,

– condamné la société à payer à Mme [C] des sommes au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, de l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés s’y rapportant, de l’indemnité de licenciement, et des frais irrépétibles,

– condamné la société aux dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

DIT que le licenciement de Mme [C] repose sur une faute grave,

DÉBOUTE la société Verde distribution service de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [C] aux dépens de première instance et d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Laurence SINQUIN, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


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