COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A ————————– ARRÊT DU : 21 SEPTEMBRE 2022 PRUD’HOMMES N° RG 19/05917 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LJX2 Monsieur [N] [T] c/ SA FRANCE TELEVISIONS Nature de la décision : AU FOND Grosse délivrée le : à : Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 octobre 2019 (R.G. n°F 16/02732) par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de BORDEAUX, Section Encadrement, suivant déclaration d’appel du 08 novembre 2019, APPELANT : Monsieur [N] [T] né le 08 Février 1971 à [Localité 1] de nationalité Française Profession : Chef monteur, demeurant [Adresse 2] représenté par Me Jessica SANCHEZ, avocat au barreau de BORDEAUX, assisté de Me Camille BONHOURE, avocat au barreau de PARIS substituant Me Frédéric CHHUM, avocat au barreau de PARIS, INTIMÉE : SA France Télévisions, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social [Adresse 4] N° SIRET : 432 766 947 représentée par Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX, assistée de Me Pascal SAINT GENIEST, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 16 mai 2022 en audience publique, devant la cour composée de : Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente Madame Sylvie Hylaire, présidente Madame Sophie Masson, conseillère qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière, ARRÊT : – contradictoire – prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. – prorogé au 21 septembre 2022 en raison de la charge de travail de la cour. * EXPOSÉ DU LITIGE Monsieur [N] [T] a été engagé par la société anonyme France Télévisions par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 novembre 1998 – avec reprise d’ancienneté au 21 août 1996 – en qualité de chef monteur affecté à la région Limousin Poitou Charentes. Le 3 juin 2013, M. [T] a été déclaré inapte par le médecin du travail en ces termes : « Salarié définitivement inapte à son poste dans le cadre de l’article R424-31 du code du travail, en une seule visite du fait du danger immédiat pour le salarié à retourner sur son lieu de travail. aucun reclassement à aucun poste de France 3 préconisé, même après aménagement de poste ou création de poste – apte au même poste dans les autres entreprises.» Par lettre datée du 27 novembre 2013, M. [T] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 9 décembre suivant ; il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre datée du 12 décembre 2013. M. [T] a, le 28 octobre 2016, saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux en contestation de son licenciement et paiement de diverses sommes. Par jugement de départage prononcé le 15 octobre 2019, le conseil de prud’hommes a statué ainsi qu’il suit : – rejette l’ensemble des demandes principales, accessoires et au titre de l’exécution provisoire soutenues par Monsieur [N] [T] ; – rejette la demande formée par la société anonyme Société Nationale de Télévision France au titre de ses frais irrépétibles ; – met les dépens de la présence instance à la charge de Monsieur [N] [T] ; l’y condamne si nécessaire. Par déclaration du 8 novembre 2019, M. [T] a relevé appel de cette décision. Par dernières conclusions communiquées le 14 avril 2022 par voie électronique, M. [T] demande à la cour de : Vu les articles L.1226-2 et L.4121-1 du code du travail ; – rabattre l’ordonnance de clôture du 14 avril 2022 et la fixer au jour de l’audience publique du 16 mai 2022 ; – infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bordeaux du 15 octobre 2019 ; Statuant à nouveau, – constater que le manquement de France Télévisions à son obligation de sécurité de résultat a entraîné l’inaptitude de Monsieur [T] à son emploi ; – constater que France Télévisions n’a pas recherché de manière sérieuse et loyale des possibilités de reclassement de Monsieur [T] ; En conséquence, – condamner France Télévisions à payer à Monsieur [T] les sommes suivantes : – 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité (article L.4121-1 du code du travail) ; – 9.982,38 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis ; – 998,23 euros bruts au titre des congés payés afférents ; – 80.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; – 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ; Dans tous les cas, – condamner France Télévisions à payer à Monsieur [T] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; – ordonner les intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil de prud’hommes du 25 juin 2014 ; – ordonner la remise de bulletins de paie rectificatifs par France Télévisions, sous astreinte de 50 euros pour jour de retard à compter de la notification de la décision ; – condamner France Télévisions au paiement des dépens éventuels. Par dernières écritures communiquées le 3 mai 2022 par voie électronique, la société France Télévisions demande à la cour de : – confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; – débouter M. [T] des fins de son appel et de l’ensemble de ses demandes ; – condamner M. [T] à payer à la Société France Télévisions une indemnité de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; – condamner M. [T] aux dépens. L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 mai 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 16 mai 2022. À l’audience, avant le déroulement des débats, à la demande conjointe des parties, l’ordonnance de clôture a été révoquée et la procédure a été de nouveau clôturée. Pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées. MOTIFS DE LA DÉCISION Il est constant que M. [T] a été licencié le 12 décembre 2013 dans les termes suivants : « A la suite de la visite de reprise après arrêt maladie du 3 juin 2013, le Médecin du Travail a constaté votre inaptitude « salarié définitivement inapte à son poste dans le cadre de l’Article R 4624-31 du code du Travail, en une seule visite du fait du danger immédiat pour le salarié à retourner sur son lieu de travail. Aucun reclassement à aucun poste de France 3 préconisé, même après aménagement de poste ou création de poste. Apte au même poste dans les autres entreprises ». Après examen de ces propositions, échanges avec le Médecin du Travail, par courrier du 8 juillet 2013, nous vous avons proposé le poste suivant : – Intitulé du poste : Chef Monteur – Lieu de travail : FTV [Localité 3] – Temps de travail : temps plein. Vous avez refusé cette proposition par courrier du 12 juillet 2013. Nous constations qu’il nous est malheureusement impossible de vous reclasser dans l’entreprise dans un poste adapté à vos capacités actuelles en raison de votre refus du reclassement proposé et de l’absence d’autres postes susceptibles de répondre aux préconisations émises par le Médecin du Travail. En raison de cette impossibilité de reclassement, nous ne pouvons maintenir votre contrat de travail et nous sommes donc contraints de procéder à votre licenciement pour cause réelle et sérieuse ». Monsieur [T] fait grief au jugement déféré d’avoir rejeté sa demande en requalification de son licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse et soutient d’une part que son inaptitude est la conséquence, d’une part du défaut de respect par son employeur de son obligation de sécurité, d’autre part de l’absence de recherches loyales et sérieuses de reclassement. 1. Sur le respect de l’obligation de sécurité L’article L.4121-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, dispose: « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d’information et de formation ; 3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.» Au visa de ce texte, M. [T] fait valoir que la persistance de son état dépressif est la conséquence des manquements de la société France Télévisions en ce qui concerne sa santé physique et mentale et sa sécurité. Il mentionne en particulier, l’allongement du journal télévisé quotidien proposé par la rédaction locale de Brive d’une durée initiale de 7 minutes à 10 minutes à compter de l’année 2008, le sentiment d’abandon ressenti par le personnel de la rédaction locale de Brive à compter de l’année 2009, la sédentarisation de son poste avec la suppression de la participation d’un chef monteur en tournage extérieur et la cessation de l’élaboration du magazine « Mag du dimanche » à compter de 2010, son sentiment d’isolement puisqu’il était seul en salle de montage, enfin le refus de renouvellement du bénéfice de son temps partiel. La cour observe que le personnel de la rédaction locale de Brive a, le vendredi 28 janvier 2011, alerté le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la direction régionale de France Télévisions sur sa situation de danger imminent et qu’il y a été répondu dès le lundi suivant par la mise en oeuvre de la procédure prévue par l’article L.4614-10 du code du travail alors en vigueur. A la suite de cette alerte, une enquête a été diligentée par le CHSCT – dont les conclusions ont été restituées le 31 janvier suivant- et des visites et entretiens ont été réalisés par le contrôleur du travail (observations du 7 février puis du 16 mars 2012) . A la suite de la réunion extraordinaire du CHSCT le 4 mai 2011, la direction régionale de France Télévisions a pris plusieurs engagements, dont en particulier celui de faire procéder à la nécessaire rénovation des locaux. Or la sécurisation et la rénovation des lieux ont été commencées immédiatement – ce que relève le contrôle du travail dans ses observations du 16 mars 2012 – et les travaux les plus importants ont été achevés à l’été 2012. Enfin, un rédacteur en chef pérenne a été nommé à la tête de la rédaction de Brive en mai 2011. L’argument fondé sur l’abandon de la rédaction locale est donc contredit par les faits. Par ailleurs, la surcharge de travail alléguée par M. [T] n’est démontrée par aucun élément ; cet argument est d’ailleurs contredit par le fait que la rédaction locale a cessé de produire le magazine hebdomadaire « Mag du dimanche » en 2010. De plus, M. [T] ne discute pas le fait que l’octroi du bénéfice d’un temps partiel relevait d’une simple faculté pour l’employeur puisqu’il ne pouvait plus prétendre au temps partiel de droit prévu par les articles L.1225-47 et suivants du code du travail ; or le refus, le 15 mars 2013, de renouveler le temps partiel de l’intéressé était parfaitement motivé par la société France Télévisions en considération des nécessités de l’organisation du travail des chefs monteurs au sein de l’agence locale de Brive ; il s’agissait au surplus de passer de 89 % à 100 % et l’appelant n’étaye pas sérieusement la relation entre ce refus et le choc psychologique qui l’aurait conduit à bénéficier d’un arrêt de travail le 21 mars suivant. Enfin, les photographies des lieux au sein desquels le personnel de la rédaction locale de Brive exerçait sa mission -photographies produites par M. [T] lui-même- mettent en évidence la réalité d’un espace ouvert commun qui contredit les affirmations de l’appelant quant à son sentiment d’isolement professionnel. La cour relève par ailleurs que la société France Télévisions produit aux débats les Documents uniques d’évaluation des risques professionnels élaborés en 2010 puis affinés en 2011 et 2012 et portant sur l’ensemble des risques envisageables au sein de la direction régionale de l’entreprise et en particulier de l’agence de Brive. Or ce DUP, très complet, prend en considération l’ensemble des risques pouvant affecter les activités de la totalité du personnel administratif, technique, et spécialisé, en ce compris les monteurs, pour lesquels les risques psychosociaux sont également examinés, en particulier le stress lié au principe de l’heure limite de remise des sujets entièrement montés aux fins de diffusion quotidienne dans le journal (à l’exception des sujets destinés au « marbre »), le monteur étant nécessairement le dernier intervenant pour la complétude du reportage et donc nécessairement davantage soumis à cette pression. C’est donc par des motifs pertinents, qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le premier juge, après avoir retenu qu’aucun des manquements à l’obligation de sécurité allégués par le salarié contre l’employeur n’était caractérisé ni en relation avec son inaptitude pour dépression, a d’une part écarté ce moyen comme étant soutenu à l’appui de la demande en requalification du licenciement, d’autre part débouté M. [T] de sa demande en paiement de dommages et intérêts à ce titre. Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef. 2. Sur les recherches de reclassement L’article L.1226-2 du code du travail dispose : « Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.» Au visa de ce texte, M. [T] fait grief au jugement déféré d’avoir écarté le moyen, qu’il soutenait, tiré de l’absence de recherche sérieuse et loyale de reclassement et fait valoir qu’il ne lui a été fait qu’une seule proposition de reclassement et que l’envoi d’un message impersonnel aux autres antennes régionales de France Télévisions ne peut être qualifié de recherche sérieuse et loyale. La cour observe que M. [T] a été déclaré inapte par le médecin du travail le 3 juin 2013 en ces termes : « Salarié définitivement inapte à son poste dans le cadre de l’article R424-31 du code du travail, en une seule visite du fait du danger immédiat pour le salarié à retourner sur son lieu de travail. aucun reclassement à aucun poste de France 3 préconisé, même après aménagement de poste ou création de poste – apte au même poste dans les autres entreprises.» L’employeur a toutefois interrogé le médecin du travail le 10 juin suivant, sur ses préconisations pour une recherche de reclassement au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail ; France Télévisions a précisé au docteur [B] que l’Accord Handicap du groupe France télévisions permettait de mobiliser des moyens importants d’aide aux travailleurs handicapés qui pouvaient contribuer au maintien de M. [T] dans l’emploi. Par courrier du 4 juillet 2013, le médecin du travail a précisé à l’employeur : « l’état de santé de M. [N] [T] n’est compatible avec aucun poste de travail de votre entreprise et ce même après mutation, transformation de poste ou aménagement de temps de travail » L’employeur a cependant présenté le 8 juillet 2013, d’une part au docteur [B] et d’autre part à M. [T], une proposition de reclassement, compte tenu des postes existants au sein du groupe, au poste de chef monteur à temps complet à [Localité 3], en joignant une fiche descriptive du poste considéré. Le médecin du travail a, le lendemain, indiqué à l’employeur : « selon les données médicales accumulées tout au long des visites, je ne puis que préconiser un départ de l’entreprise. Toute adaptation, mutation ou transformation de poste seraient, selon mon avis, vaines et maintiendraient un risque pour la santé du salarié.» Le salarié a refusé cette proposition le 12 juillet suivant en rappelant que le médecin du travail l’avait déclaré inapte à tout poste dans l’entreprise, en indiquant que ce poste lui avait déjà été proposé dans le cadre d’une mutation interne en mai 2012 et qu’il s’agissait de fonctions à temps plein ; il a enfin souligné qu’il ne s’agissait pas d’une promotion mais d’une mutation à équivalence. Par ailleurs, l’employeur a immédiatement engagé une recherche de reclassement en adressant le 3 juillet suivant un message à 35 interlocuteurs chargés des ressources humaines ou de la direction d’antennes régionales au sein de la société France Télévisions. Il ne peut être sérieusement soutenu qu’il s’agissait d’une recherche de pure forme puisque le poste recherché était précisé et que le curriculum vitae du salarié était joint au message. De plus, la recherche de l’employeur ne s’est pas limitée aux antennes régionales puisque, ainsi, ont été interrogées la direction des sports, la direction fabrication et nouvelles technologies, la direction des programmes, France 4, Franco Ô, France 2 et France 5 numérique et AITV. Enfin, M. [T] n’est pas fondé à soutenir que la société France Télévisions avait l’obligation d’étendre ses recherches auprès de partenaires qui ne font pas partie du groupe France Télévisions mais sont de simples interlocuteurs professionnels. En conséquence, la cour confirmera également le jugement déféré de ce chef. 3. Sur la demande au titre de l’exécution de mauvaise foi du contrat de travail En vertu de l’article L 1222-1 du code du travail, l’employeur est tenu d’une obligation de loyauté dans l’exécution du contrat de travail dont le non respect est de nature à générer un préjudice pour le salarié qui peut prétendre à des dommages-intérêts en réparation de celui-ci. Monsieur [T] excipe d’un manquement de la société France Télévisions résultant de ce que la procédure de licenciement n’a pas été mise en oeuvre dans un bref délai après l’avis d’inaptitude délivré par le médecin du travail. A cet égard, la cour observe que l’employeur a, en tout état de cause, respecté les dispositions de l’article L.1226-4 du code du travail qui lui font obligation, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail et si le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, de lui verser, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Par ailleurs, ainsi qu’il a été détaillé supra, l’employeur a procédé à des recherches approfondies de reclassement et échangé avec sérieux tout renseignement utile avec le médecin du travail. Enfin, c’est par des motifs pertinents, qui ne sont pas remis en cause par les débats en appel et que la cour adopte, que le premier juge a retenu qu’il appartenait à M. [T] de démonter que l’incertitude sur son avenir au sein de la société France Télévisions, à l’horizon assez fermé compte tenu d’une part de l’avis médical délivré et d’autre part de sa propre position adoptée vis-à-vis de l’entreprise, et la durée de la procédure ont engendré des perturbations de sa situation médicale non compensées par la sécurité offerte par la poursuite du paiement de son salaire. Ainsi que l’a souligné le conseil de prud’hommes, le salarié est défaillant dans l’administration de la preuve de son préjudice ; le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef, ainsi qu’en ses chefs dispositifs relatifs aux frais irrépétibles des parties et à la charge des dépens. Y ajoutant, la cour condamnera M. [T] à payer à la société France télévisions une somme de 1.000 euros en indemnisation des frais irrépétibles de celle-ci en appel et à payer les dépens de l’appel. PAR CES MOTIFS La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, Confirme le jugement prononcé le 15 octobre 2019 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux. Y ajoutant, Condamne Monsieur [N] [T] à payer à la société France Télévisions la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Condamne Monsieur [N] [T] à payer les dépens. Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard |
→ Questions / Réponses juridiques
Quel est le contexte de l’affaire présentée devant la Cour d’Appel de Montpellier ?L’affaire concerne Monsieur [J] [E], un technicien monteur expo, qui a été engagé par la société d’économie mixte Enjoy [Localité 2] à partir du 31 mai 2010. Il a travaillé sous des contrats à durée déterminée d’usage, totalisant 128 contrats jusqu’au 17 décembre 2016. Monsieur [J] [E] conteste la nature temporaire de son emploi, arguant qu’il a occupé un poste qui faisait partie de l’activité normale de l’entreprise. Il a saisi le conseil des prud’hommes pour demander la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée (CDI) et a contesté la rupture de son dernier contrat, la qualifiant de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Quelles ont été les décisions du conseil des prud’hommes concernant la demande de requalification des CDD ?Le jugement du 24 janvier 2020 a constaté la prescription des actions liées à la requalification des contrats et à la rupture, déboutant ainsi Monsieur [J] [E] de toutes ses demandes. Le conseil a également condamné Monsieur [J] [E] aux dépens éventuels. Monsieur [J] [E] a ensuite interjeté appel de cette décision, soutenant que son action était recevable et que le délai de prescription avait commencé à courir à la fin de son dernier contrat, soit le 17 décembre 2016. Quels sont les motifs de la Cour d’Appel concernant la prescription de l’action de requalification ?La Cour d’Appel a infirmé le jugement du conseil des prud’hommes sur la question de la prescription. Elle a statué que la demande de requalification des CDD en CDI ne portait pas sur la rupture du contrat, mais sur son exécution. Ainsi, le délai de prescription applicable était de deux ans, commençant à courir à la date de terme du dernier contrat, soit le 17 décembre 2016. Étant donné que Monsieur [J] [E] avait saisi le conseil des prud’hommes le 7 décembre 2018, son action n’était pas prescrite. Quelles conclusions la Cour a-t-elle tirées concernant la nature des contrats à durée déterminée ?La Cour a examiné les éléments justifiant le recours aux contrats à durée déterminée d’usage. Elle a rappelé que, même dans les secteurs où ces contrats sont autorisés, l’employeur doit prouver que l’emploi est par nature temporaire. Dans ce cas, la société [Localité 2] Events n’a pas réussi à établir le caractère temporaire de l’emploi de Monsieur [J] [E], car elle employait également des techniciens permanents. Par conséquent, la Cour a décidé de requalifier les CDD en CDI à compter du 31 mai 2010. Quelles demandes de rappel de salaire ont été formulées par Monsieur [J] [E] ?Monsieur [J] [E] a demandé le paiement de rappels de salaires pour les périodes interstitielles entre ses contrats, ainsi qu’une prime de 13ème mois. Il a réclamé des sommes importantes, incluant 84.887,91 € bruts pour les rappels de salaires et 9.113,54 € bruts pour la prime de 13ème mois. La société [Localité 2] Events a contesté ces demandes, arguant qu’elles étaient prescrites et mal fondées. Quelle a été la décision de la Cour concernant les demandes de rappel de salaire ?La Cour a jugé que la demande de rappel de salaire était soumise à un délai de prescription de trois ans. Elle a conclu que les demandes de rappel de salaire pour les créances salariales postérieures au 17 décembre 2013 étaient recevables, tandis que celles antérieures étaient prescrites. Concernant les périodes interstitielles, la Cour a estimé que Monsieur [J] [E] n’avait pas prouvé qu’il était à la disposition de l’employeur durant ces périodes, le déboutant ainsi de sa demande de rappel de salaire pour ces périodes. Quelles indemnités a obtenu Monsieur [J] [E] suite à la requalification de son contrat ?Monsieur [J] [E] a obtenu plusieurs indemnités suite à la requalification de son contrat. La Cour a accordé une indemnité de requalification de 1.003,62 €, une indemnité compensatrice de préavis de 3.312,47 €, ainsi qu’une indemnité conventionnelle de licenciement de 4.570,47 €. De plus, il a été condamné à recevoir 8.500 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que 2.000 € pour exécution déloyale du contrat, en raison du manquement de l’employeur à son obligation de loyauté. |
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