Licenciement économique contesté : motifs et conséquences sur les droits du salarié

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Licenciement économique contesté : motifs et conséquences sur les droits du salarié

L’Essentiel : Mme [B] [R] a été embauchée par la SAS Magellium en tant que responsable des ressources humaines le 13 décembre 2010. Après des difficultés financières, elle a été licenciée pour motif économique le 10 décembre 2020. Suite à cela, elle a saisi le conseil de prud’hommes, qui a reconnu que son licenciement n’était pas fondé sur une cause réelle et sérieuse. En appel, la cour a confirmé cette décision, augmentant les dommages et intérêts à 23.000 € et ordonnant le remboursement des indemnités chômage. La SAS Magellium a été condamnée aux dépens d’appel.

Embauche et évolution de Mme [R]

Mme [B] [R] a été embauchée par la SAS Magellium en tant que responsable des ressources humaines à temps plein le 13 décembre 2010. Son contrat stipulait une rémunération basée sur 35 heures hebdomadaires, avec des heures supplémentaires. En juillet 2017, son temps de travail a été réduit à 37 heures, tout en lui permettant d’acquérir des jours de RTT.

Situation de l’entreprise

La SAS Magellium a traversé des difficultés financières, ayant été soumise à une procédure de sauvegarde judiciaire en mars 2015, suivie d’un plan de sauvegarde arrêté en juillet 2016. En novembre 2017, la procédure a été clôturée. En 2020, l’entreprise a envisagé une réorganisation, incluant la suppression de plusieurs postes, dont celui de Mme [R], ce qui a suscité un avis défavorable du comité social et économique.

Licenciement de Mme [R]

Le 10 décembre 2020, Mme [R] a été licenciée pour motif économique, après avoir été convoquée à un entretien préalable. Elle a adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle peu après. La société lui a versé une indemnité de licenciement de 12.815,15 €.

Actions en justice

Le 3 mai 2021, Mme [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse, demandant des dommages et intérêts pour licenciement injustifié et d’autres indemnités. Le jugement du 27 mars 2023 a reconnu que son licenciement n’était pas fondé sur une cause réelle et sérieuse, tout en déboutant Mme [R] de ses demandes de dommages et intérêts pour comportement fautif.

Appel de Mme [R]

Mme [R] a interjeté appel le 4 mai 2023, demandant la confirmation de certains aspects du jugement tout en contestant d’autres. Elle a sollicité des dommages et intérêts plus élevés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que pour comportement fautif.

Réponse de la SAS Magellium

La SAS Magellium a également interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement concernant les indemnités accordées à Mme [R] et la confirmation des autres décisions. Elle a soutenu que le licenciement était justifié par des motifs économiques.

Décision de la cour

La cour a confirmé le jugement en ce qui concerne l’absence de cause réelle et sérieuse pour le licenciement, mais a modifié le montant des dommages et intérêts à 23.000 €. Elle a également accordé à Mme [R] une prime de vacances et ordonné le remboursement des indemnités chômage versées à hauteur de six mois. La SAS Magellium a été condamnée aux dépens d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quels sont les fondements juridiques du licenciement économique de Mme [R] ?

Le licenciement économique est encadré par plusieurs articles du Code du travail, notamment les articles L 1233-2, L 1233-3, L 1233-16 et L 1235-1.

Ces articles stipulent que tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L’article L 1233-2 précise que le licenciement pour motif économique peut être fondé sur des motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d’une suppression ou d’une transformation d’emploi, ou d’une modification refusée par le salarié d’un élément essentiel du contrat de travail.

Les motifs économiques peuvent inclure des difficultés économiques, des mutations technologiques, ou une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise.

Il est également important de noter que la cause économique doit être appréciée au moment du licenciement, et que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige.

Si un doute persiste, il profite au salarié, ce qui a été le cas dans le jugement rendu par le conseil de prud’hommes, qui a jugé que le licenciement de Mme [R] n’était pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Quelles sont les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

En vertu de l’article L 1235-3 du Code du travail, si un licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, le juge peut octroyer au salarié une indemnité comprise entre un montant minimal et un montant maximal, selon un barème établi.

Pour une salariée ayant 10 ans d’ancienneté, comme Mme [R], cette indemnité peut varier entre 3 et 10 mois de salaire brut.

De plus, l’article L 1235-4 stipule que si le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et que le salarié a au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise d’au moins 11 salariés, l’employeur doit rembourser aux organismes concernés tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié, dans la limite de six mois d’indemnités.

Dans le cas de Mme [R], le tribunal a accordé des dommages et intérêts de 23.000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en tenant compte de son ancienneté et de son salaire.

Quels sont les droits de Mme [R] concernant la prime de vacances et les jours de RTT ?

Concernant la prime de vacances, Mme [R] a réclamé sa prime de vacances 2020 au prorata de 11/12e.

La direction avait précédemment informé les salariés que ceux quittant l’entreprise entre juillet et décembre ne percevraient plus cette prime.

Cependant, le tribunal a jugé que la perte de cette prime était imputable à la SAS Magellium, qui avait notifié un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ainsi, Mme [R] a été allouée la somme de 419,13 € bruts pour sa prime de vacances.

Pour ce qui est des jours de RTT, Mme [R] a également demandé le paiement de 4,7 jours de RTT acquis et non pris.

L’avenant du 1er juillet 2017 stipulait qu’elle bénéficiait de RTT, mais ni cet avenant ni la convention collective ne prévoyaient d’indemnisation pour les jours de RTT non pris.

Néanmoins, le tribunal a confirmé que la perte de la possibilité de prendre ces RTT était également imputable à la SAS Magellium, et a donc alloué à Mme [R] la somme de 805,85 € bruts pour ces jours de RTT.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge d’allouer une somme à titre de frais irrépétibles exposés par une partie dans le cadre d’une instance.

Dans le cas de Mme [R], le tribunal a accordé 1.500 € en première instance et 2.000 € en appel, en raison des frais engagés pour sa défense.

Cette disposition vise à compenser les frais non récupérables par la partie qui a gagné le procès, et elle est souvent utilisée dans les litiges du travail pour aider les salariés à faire face aux coûts juridiques.

La SAS Magellium, en tant que partie perdante, a été condamnée à payer ces frais, ce qui souligne l’importance de l’article 700 dans la protection des droits des salariés dans le cadre de litiges liés à l’emploi.

17/01/2025

ARRÊT N°25/23

N° RG 23/01632

N° Portalis DBVI-V-B7H-PNNT

FCC/ND

Décision déférée du 27 Mars 2023

Conseil de Prud’hommes

Formation paritaire de [Localité 5]

(21/00665)

M.PICCARDI

SECTION ENCADREMENT

[B] [R]

C/

S.A.S. MAGELLIUM

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT » CINQ

***

APPELANTE

Madame [B] [R]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuelle DESSART de la SCP SCP DESSART, avocat POSTULANT au barreau de TOULOUSE et par Me Pauline GELBER de la SELARL LUMIO AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE

INTIM »E

S.A.S. MAGELLIUM

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Laurent NOUGAROLIS de la SELAS MORVILLIERS SENTENAC & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Novembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme F. CROISILLE-CABROL conseillère chargée du rapport, et AF. RIBEYRON, conseillère. Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

AF. RIBEYRON, conseillère

Greffière, lors des débats : M. TACHON

Greffière, lors du prononcé : C.DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BRISSET, présidente, et par C.DELVER, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [B] [R] a été embauchée selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein (38h30 par semaine) à compter du 13 décembre 2010 en qualité de responsable ressources humaines, statut cadre, par la SAS Magellium, ayant pour objet notamment les études et observations de la terre et la géo-information ; il était stipulé une rémunération sur une base de 35 heures hebdomadaires outre 3h30 supplémentaires.

Suivant avenant à compter du 1er juillet 2017, le temps de travail de Mme [R] a été réduit à 37 heures, avec une rémunération sur une base de 35 heures hebdomadaires et une acquisition de jours de RTT.

La convention collective applicable est celle des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (Syntec).

La SAS Magellium a fait l’objet de plusieurs décisions du tribunal de commerce de Toulouse, et notamment :

– d’un jugement du 3 mars 2015 ouvrant une procédure de sauvegarde judiciaire ;

– d’un jugement du 26 juillet 2016 arrêtant le plan de sauvegarde ;

– d’une ordonnance du 13 novembre 2017 de clôture de la procédure.

La SAS Magellium, qui envisageait une réorganisation entraînant la suppression de plusieurs postes dont celui de Mme [R], a consulté le comité social et économique auquel elle a soumis une note d’information du 13 octobre 2020 ; le 13 novembre 2020, le comité social et économique a émis un avis défavorable à la réorganisation du service RH.

Entre-temps, par LRAR du 16 octobre 2020 adressé à M. [F] le président de la SAS Magellium, Mme [R] a estimé que le motif économique n’était qu’un prétexte pour l’évincer dans un contexte de mise à l’écart.

Par LRAR du 5 novembre 2020, la SAS Magellium a proposé à Mme [R] un reclassement sur un poste d’assistant RH, statut ETAM, à temps partiel (17h30), en son sein ; Mme [R] n’a pas répondu.

Par LRAR du 18 novembre 2020, la SAS Magellium a convoqué Mme [R] à un entretien préalable à un éventuel licenciement économique fixé le 27 novembre 2020, lors duquel elle a reçu la notification du motif économique et les documents relatifs au contrat de sécurisation professionnelle. Mme [R] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 8 décembre 2020. La société lui a notifié son licenciement économique par LRAR du 10 décembre 2020 et le contrat de travail a pris fin au 18 décembre 2020. Elle lui a versé une indemnité de licenciement de 12.815,15 €.

Le 3 mai 2021, Mme [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins notamment de paiement de dommages et intérêts pour comportement fautif et vexatoire pendant l’exécution du contrat de travail, de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, de l’indemnité compensatrice de préavis, de la prime de vacances et du solde de RTT.

Par jugement du 27 mars 2023, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

– fixé le salaire mensuel à 3.715 €,

– dit et jugé que la rupture du contrat de travail pour motif économique en date du 18 décembre 2020 n’est pas fondée sur une cause réelle et sérieuse,

– dit et jugé que la société Magellium n’a pas adopté un comportement fautif et vexatoire pendant l’exécution du contrat de travail,

– condamné la SAS Magellium à payer à Mme [R] les sommes suivantes :

* 11.145 € bruts pour l’indemnité compensatrice de préavis,

* 1.114 € bruts pour les congés payés afférents,

* 11.145 € pour les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 805,85 € bruts pour le solde de JRTT,

* 1.500 € pour l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté Mme [R] du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

– condamné la société Magellium aux entiers dépens d’instance,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit.

Mme [R] a interjeté appel de ce jugement le 4 mai 2023, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 8 mars 2024, auxquelles il est fait expressément référence, Mme [R] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que la rupture du contrat de travail pour motif économique n’est pas fondée sur une cause réelle et sérieuse, en ce qu’il a condamné la société Magellium au paiement des sommes de 11.145 € bruts d’indemnité compensatrice de préavis, outre 1.114 € bruts pour les congés payés afférents, 805,85 € bruts pour le solde de JRTT et 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Magellium au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 11.145 € et en ce qu’il a débouté Mme [R] du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

Faire droit à l’appel incident, et statuant à nouveau :

– condamner la société Magellium au paiement des sommes suivantes :

* 22.290 € à titre de dommages et intérêts pour comportement fautif et vexatoire pendant l’exécution du contrat de travail,

* 37.150 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 419,13 € bruts au titre de la prime de vacances,

* 3.000 € au titre de l’article 700 en cause d’appel, outre les entiers dépens,

– débouter la société de l’ensemble de ses demandes incidentes devant la cour.

Par conclusions n° 4 notifiées par voie électronique le 27 mai 2024, auxquelles il est fait expressément référence, la SAS Magellium demande à la cour de :- infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée au paiement de sommes au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, du licenciement sans cause réelle et sérieuse, des RTT et de l’article 700 du code de procédure civile, et l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– confirmer l’ensemble des autres chefs de jugement à savoir en ce qu’il a débouté Mme [R] des demandes de dommages et intérêts pour comportement fautif et vexatoire durant l’exécution du contrat de travail, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de prime de vacances,

Et statuant à nouveau,

Sur les demandes au titre de l’exécution du contrat de travail :

– juger qu’aucun comportement fautif et/ou vexatoire n’a été adopté par la SAS Magellium durant l’exécution du contrat de travail, et que la SAS Magellium a respecté ses obligations en matière de versement de la prime de vacances et de JRTT,

– débouter Mme [R] de toutes ses demandes à ces titres,

Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail :

À titre principal,

– juger que la rupture d’un commun accord du contrat de travail de Mme [R] intervenue le 18 décembre 2020 est fondée sur un motif économique et une cause économique réelle et sérieuse,

– débouter Mme [R] de toutes ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail,

A titre subsidiaire,

– juger que les demandes indemnitaires formulées par Mme [R] au titre d’un prétendu licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exorbitantes,

– réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires formulées par Mme [R] au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et dans la limite de 3 mois de salaire, soit 11.145 € bruts, En tout état de cause,

– débouter Mme [R] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance,

– condamner Mme [R] au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 29 octobre 2024.

MOTIFS

1 – Sur les dommages et intérêts pour comportement fautif et vexatoire de la SAS Magellium pendant l’exécution du contrat de travail :

L’article L 1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi. Il appartient à Mme [R], qui se fonde sur ce texte, de démontrer l’exécution déloyale du contrat de travail de la part de la SAS Magellium.

Mme [R] allègue une dégradation de ses conditions de travail en raison des éléments suivants :

– une absence d’entretien annuel d’évaluation en 2018, 2019 et 2020) : il est constant que Mme [R] a passé un entretien d’évaluation le 29 juin 2017, qu’un entretien a été prévu le 17 juillet 2018, le document d’évaluation ayant été préparé, mais que l’entretien n’a pas eu lieu, et qu’aucun entretien n’a eu lieu en 2019 et 2020 ; ceci étant, lors de sa réunion du 11 juillet 2019, le comité social et économique indiquait que de nombreux salariés étaient concernés, de sorte qu’il ne s’agissait pas d’une volonté délibérée de la part de la SAS Magellium d’exclure Mme [R] ;

– une rétention d’informations, une mise à l’écart sur certains dossiers RH et une absence de réunions RH : Mme [R] soutient que M. [U] DRH groupe intervenait à sa place sans l’en informer ou lui donnait des informations erronées ou incomplètes ce qui la mettait en difficulté, et n’organisait pas de réunions de coordination, ce qui réduisait les fonctions de la salariée à celles d’une simple exécutante ; or, il ressort de la fiche de poste de RRH que Mme [R] était rattachée au DRH et devait mettre en oeuvre la politique RH définie par la direction générale et le DRH, de sorte que ce n’était pas elle qui définissait la politique RH et qu’elle devait mettre en oeuvre la politique décidée par M. [U] ; elle ne peut donc pas se plaindre de ne pas avoir été associée aux processus de négociation des accords collectifs ; par ailleurs, les mails que Mme [R] verse aux débats, que lui a adressés M. [U], et les autres pièces qu’elle produit, ne mettent pas en lumière, de la part de ce dernier, une mise à l’écart, une rétention d’informations, une absence de communication et de réunions, un retrait de responsabilités ou d’attributions, ou des difficultés dans l’exécution de ses fonctions, et n’établissent pas que M. [U] assurait en lieu et place de Mme [R] tous les aspects opérationnels de son poste et l’aurait cantonnée à des tâches secondaires de suivi administratif ; d’ailleurs, la comparaison entre le support d’entretien annuel 2017 et l’extrait d’audit externe réalisé par le cabinet EXAE en octobre 2019 (pièces n° 18 et 63 versées par la salariée) montre la préservation des tâches de Mme [R], Mme [R] ne pouvant utilement soutenir que, lors de cet audit, elle n’aurait évoqué que ses missions théoriques et non ses missions réelles, ce dont elle ne justifie pas ; ainsi, le conseil de prud’hommes a, par des motifs pertinents que pour le surplus la cour adopte, et que la salariée ne critique pas utilement, caractérisé l’absence de manquement de l’employeur de ce chef ;

– un comportement vexatoire :

* le refus d’une demi-journée de récupération suite à un travail le week end des 25 et 26 mai 2019 : il ressort de l’échange de mails que Mme [R] a, le 28 mai, informé M. [U] qu’elle avait travaillé le week end précédent et qu’elle a demandé à récupérer ses heures, et que le DRH lui a répondu qu’il lui avait communiqué les éléments suffisamment à l’avance, qu’elle ne l’avait pas informée d’une surcharge de travail et d’une nécessité de faire des heures supplémentaires le week end, et qu’en l’état il ne pouvait pas faire droit à sa demande de récupération ; le compte-rendu d’entretien du comité social et économique du 12 juillet 2019, lors duquel Mme [R] se plaignait de l’absence de récupération, d’un sentiment de non-intégration, d’un manque de considération et d’une ‘peur de représailles’, n’établit pas un comportement fautif de la part de la SAS Magellium, en l’absence d’élément autre que les propres dires de la salariée ; la cour note par ailleurs que dans le cadre du présent litige Mme [R] ne réclame le paiement d’aucune heure supplémentaire ;

* un comportement sexiste et injurieux de la part de la direction : Mme [R] verse aux débats trois mails que lui a adressés M. [U] les 31 mars et 21 décembre 2017 et le 23 janvier 2018, traitant une salariée (prénommée [I]) de ‘connasse’ et une autre salariée de ‘grosse feignasse dotée d’un esprit très malsain, gros veau, mocheté qui n’a pas d’équivalent dans la société, sa tête ne nous revient pas’, et un mail que lui a adressé M. [F] président le 31 mars 2017 disant au sujet d’une salariée ‘j’imagine qu’on chopperait une action en discrimination relative aux origines + femme enceinte = gros cartonnasse (ouin ouin je suis mère au foyer et j’ai pas de ressources pour élever mon (mes) enfant(s)’ ; si ces propos sont effectivement déplacés et injurieux, ils ne concernaient pas Mme [R], et celle-ci n’était pas en reste dans ses propres mails des 23 janvier et 15 mars 2018 où, loin de se montrer choquée, elle ironisait sur le licenciement de la prénommée [I] (‘on a tiré le gros lot avec elle…’, ‘…retour de couche…’) ;

* une absence d’invitation de Mme [R] à une réunion sur l’organisation de l’activité pendant la crise sanitaire le 30 mars 2020 : elle a toutefois assisté aux réunions des 13 et 16 mars, et la réunion du 30 mars ne concernait que les représentants du groupe de sorte que Mme [R] n’avait pas à y assister, et le 31 mars M. [U] l’a à sa demande informée de l’enjeu de la réunion ;

* le reproche fait par M. [F] à Mme [R] d’avoir créé un compte chômage partiel auprès de la Direccte, par mail ‘incendiaire’ du 1er avril 2020 : Mme [R] indique avoir, lors d’une réunion du 17 mars présidée par M. [U], informé les représentants du personnel de ses démarches pour créer ce compte, sans que M. [U] ne s’y oppose ; par mail du 31 mars, M. [U] a indiqué à Mme [R] que lors de la réunion du 30 mars chaque responsable d’unité avait présenté les conséquences du Covid sur l’activité afin de permettre la préparation d’un dossier de demande d’autorisation d’activité partielle ; par mail du 1er avril, Mme [R] a informé M. [U] qu’elle avait fait la demande de création de compte ‘activité partielle’ le 18 mars ; par mail du 1er avril, M. [F] a indiqué à Mme [R] qu’il venait juste de charger M. [U] de la gestion de l’activité partielle et qu’il regrettait l’initiative solitaire et inacceptable de Mme [R] ; il s’agissait donc, dans le contexte tendu et incertain du début du confinement, d’un problème de communication entre les personnes, et non d’une déloyauté de la part de la société ;

– une dégradation de son état de santé : Mme [R] produit un extrait de son dossier de la médecine du travail où le 28 juillet 2020 elle évoquait son mal-être et son stress ; il s’agit toutefois du ressenti de Mme [R] et le médecin du travail n’a pas alerté la SAS Magellium sur un risque pour la santé de Mme [R] lié à ses conditions de travail.

Ainsi, Mme [R] ne fait pas la preuve d’un comportement déloyal de la part de la SAS Magellium et elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts, par confirmation du jugement.

2 – Sur le licenciement :

En application des articles L 1233-2, L 1233-3 (en sa version issue de la loi du 8 août 2016), L 1233-16 et L 1235-1 du code du travail, tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou d’une transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

– à des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ; une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est caractérisée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à (…) 3 trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins 50 salariés et de moins de 300 salariés ;

– à des mutations technologiques ;

– à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité ;

– à la cessation d’activité de l’entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise s’apprécient au niveau de l’entreprise si elle n’appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient établies sur territoire national, sauf fraude.

La cause économique doit s’apprécier au moment du licenciement. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute persiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement était ainsi motivée :

‘Suite à notre entretien du 27 novembre 2020, au cours duquel vous avez été assistée par [M] [V], salarié de la SAS Magellium, nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique et donc de rompre votre contrat de travail au titre duquel vous occupiez depuis le 13 décembre 2010 le poste de responsable des ressources humaines au sein de la SAS Magellium, après les recherches conduites ayant abouti à une solution de reclassement à laquelle vous n’avez réservé aucune réponse et pour le motif économique ci-après développé.

En 2016, Magellium et Artal se rapprochaient avec pour ambition de faire émerger une ETI européenne, crédible sur plusieurs axes technologiques porteurs et capable de réaliser des équipements complexes en accompagnement ou comme une alternative de grands groupes industriels.

Cette approche reposait sur une politique d’innovation compétitive et avait pour ambition de valoriser nos offres sur un marché international, augmenter de façon significative le chiffre d’affaires, continuer à être référents pour nos clients sur des métiers et des expertises forts.

La situation particulière de Magellium (plan de sauvegarde déterminé sous le contrôle du tribunal de commerce de Toulouse) empêchait dès le rapprochement la fusion des entreprises (et l’empêche encore) de sorte qu’aujourd’hui, le groupe est composé de 4 sociétés juridiquement distinctes :

– FGD : la holding

– MAGELLIUM

– ARTAL TECHNOLOGIES

– ACT 21

Parce que nous savions que le regroupement des entreprises ne pouvait être pleinement fructueux, nous avions très tôt, sous l’empire de cette contrainte, organisé les services « support » de manière à les rendre transverses.

C’est ainsi que les services comptabilité, ressources humaines, contrôle de gestion, qualité ou encore système sont devenus communs à toutes les entreprises du Groupe afin d’adsorber, au mieux, les surcoûts liés à la multiplicité des fonctions supports structurelles de la filiale Magellium, par la mise en ‘uvre de procédures fonctionnelles et hiérarchiques communes aux entités du groupe.

La crise du COVID a mis en lumière tant la fragilité de l’entreprise que celle du groupe et révélé que son organisation n’était pas optimale et peu compatible avec le prolongement de l’organisation, fut-elle transversale et rationnelle, mise en ‘uvre.

Au 31 juillet 2020, le chiffre d’affaires du groupe était en repli de 19,2 % par rapport à celui observé à la même époque en 2019 (12,185 M€ vs 15,081 M€ au 31/07/2019).

Le repli est de 14,1 % chez Magellium (8,87 M€ en 2020 vs 10,323 M€ en 2019).

Le résultat d’exploitation au premier semestre 2020 est nul.

Il est donc acquis que les indicateurs économiques de l’activité de Magellium qui influencent plus que majoritairement ceux du groupe, ne sont pas satisfaisants et doivent engendrer, afin de préserver sa compétitivité et plus avant, celle du groupe, des mesures de réorganisation de ses structures de production, autant que des services fonctionnels supports, sans remise en cause de la transversalité des missions portées.

Il nous apparaît donc aujourd’hui nécessaire, pour tendre vers une optimisation tant de la production que des fonctions supports, de modifier le modèle d’organisation de nos entreprises qui passe par une structuration plus simple et plus agile de celui-ci.

Dans la mesure ou les postes de Directeur des Ressources Humaines du groupe et de Responsable des ressources humaines au sein de Magellium, ont trait à des fonctions qui recouvrent l’un l’objet de l’autre, il nous apparaît pertinent de structurer plus simplement cette organisation et de dupliquer le modèle d’organisation d’ARTAL au sein de Magellium dès lors qu’il est observé qu’au sein de la première le poste de Responsable Ressources humaines n’existe pas au profit de celui d’assistant ressources humaines.

Au-delà, votre poste trouvait sa justification lorsque l’entité Magellium était indépendante, justification dont l’importance est sensiblement devenue résiduelle, à raison de l’organisation transversale mise en ‘uvre au sein du groupe, par impossible de pouvoir procéder aux opérations de fusion des entités du groupe, à compter de la fin de l’année 2016.

Par ailleurs, la reconnaissance judiciaire à venir de l’Unité Economique et Sociale entre les deux entreprises du groupe qui sont à ce jour dotées de représentants du personnel, diminuera de facto le nombre de réunions des IRP à préparer et à présider et donc diminue la charge de travail globale du service.

De plus, la suppression de la fonction de coordination et des conséquences sur la fonction RH qu’elle emporte, associée à la fusion des BU, qui participent directement de la contrainte de réorganisation rendue nécessaire pour préserver la compétitivité de notre société et de notre groupe, tend à priver totalement d’objet la spécificité de ce poste sur l’entité Magellium, étant observé que :

– Les processus décisionnels justifiant la sollicitation du Directeur des Ressources Humaines du groupe, par la RRH de Magellium, recouvrent en fait des diligences qui relèvent déjà des attributions du premier,

– Aucune autre des entités du groupe n’est pourvue d’un poste de responsable de ressources humaines, en raison de l’existence du poste transversal de Directeur des Ressources Humaines,

– L’audit externe que nous avions mis en ‘uvre, auquel vous avez participé, procédant de l’analyse objective des taches qui vous étaient confiées et de leur charge respective sur votre temps de travail, confirme et corrobore non seulement l’absence d’objet de votre poste, mais encore la nécessité de procéder à sa suppression.

Le poste de Responsable des ressources humaines que vous occupez est donc supprimé, étant entendu qu’en date du 5 novembre 2020, nous vous faisions parvenir par lettre recommandée avec accusé de réception une proposition de reclassement à laquelle vous n’avez pas donné suite, refusant ainsi cette dernière…’

La lettre de licenciement visait donc comme motif économique la nécessité de sauvegarder la compétitivité de la SAS Magellium et celle du groupe.

Mme [R] affirme qu’il n’existait pas de motif économique sérieux et qu’en réalité il s’agissait d’un licenciement inhérent à sa personne, la direction voulant l’évincer afin de confier ses fonctions de RRH au nouveau DRH groupe.

Dans le cadre du plan de sauvegarde judiciaire de la SAS Magellium arrêté par jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 26 juillet 2017, le groupe Artal est entré au capital de la société ; la SAS Magellium fait donc partie du groupe Artal lequel comprend également la holding FGD, la société Artal technologies et la société Act 21. Le secteur d’activité du groupe Artal est le secteur de l’aéronautique. L’attestation Pôle Emploi mentionnait que l’entreprise comportait 170 salariés au 31 décembre écoulé.

Les seules considérations sur les difficultés générales du secteur de l’aéronautique liées au Covid 19 sont insuffisantes à caractériser la nécessité de sauvegarder la compétitivité, de même que la baisse du chiffre d’affaires et du résultat du groupe Artal et de sociétés en 2020 par rapport à 2019 :

– pour le groupe Artal : – 25 % de chiffre d’affaires et – 48,6 % de résultat ;

– pour la SAS Magellium : – 11,8 % de chiffre d’affaires et – 50,98 % de résultat ;

– pour la société holding FGD : – 11,94 % de chiffre d’affaires et – 62,27 % de résultat ;

d’autant que le groupe demeurait bénéficiaire et le restait fin 2021.

Dans le cadre de la consultation du comité social et économique, la SAS Magellium a établi une note d’information reprenant ces données chiffrées, rappelant que les services comptabilité, RH, contrôle de gestion et système étaient déjà devenus communs à toutes les entreprises du groupe afin d’absorber au mieux les surcoûts liés à la multiplicité des fonctions support structurelles de la filiale Magellium, et estimant que la crise du Covid 19 avait révélé que cette organisation n’était pas optimale et qu’il convenait d’opérer une restructuration dans un but d’agilité et de simplicité, avec modification de 4 postes et suppression de 2 postes (RRH et coordinateur).

Le comité social et économique a désigné le cabinet comptable XPR lequel a rédigé un rapport concluant que :

– l’économie de masse salariale (2 postes) était peu appropriée s’il s’agissait de compenser les effets de la crise sanitaire ;

– la mise en oeuvre de l’unité économique et sociale était imminente et il convenait de patienter jusqu’à la fusion et d’apprécier les effets du renforcement de l’équipe commerciale ;

– ensuite il fallait anticiper la fin de la crise sanitaire ;

– il convenait de tenir compte des plans de relance nationaux et régionaux ;

– le programme Copernicus allait générer d’importantes retombées économiques.

Le 13 novembre 2020, le comité social et économique a rendu :

– un avis favorable à la réorganisation de la force commerciale (développement du service commercial) ;

– un avis défavorable à la réorganisation du service RH au motif que l’évaluation de la charge de travail de la RRH était sous-estimée et que le report de cette charge sur le DRH et l’assistant RH risquait d’engendrer une nette dégradation de la qualité du service RH, dans un contexte de développement du service commercial et de nécessité d’accueil de nouveaux embauchés ;

– un avis défavorable aux modifications de postes et aux suppressions de postes envisagées.

Il a ajouté que la SAS Magellium était une entreprise en bonne santé avec une trésorerie importante et une augmentation des budgets des secteurs du spatial et de la défense malgré la crise sanitaire.

Il a estimé que les critères économiques et de sauvegarde de la compétitivité présentés étaient des prétextes pour ajuster un fonctionnement interne en écartant quelques collaborateurs bien précis.

Par ailleurs, par mail du 30 octobre 2020, soit à une époque où la SAS Magellium engageait une procédure de licenciement économique, M. [F] écrivait à ses salariés : ‘après le 1er confinement, la période qui a suivi a été marquée par une reprise plus forte de nos activités. Cela sera également le cas à la fin de la période actuelle (…) Je suis optimiste sur le moyen terme et confiant sur le court terme pour au moins 3 raisons :

– notre positionnement client : nous sommes faiblement dépendants des secteurs cycliques qui souffrent de la crise comme l’aéronautique ; nos activités sont en pleine diversification ;

– la gestion saine de l’entreprise est adaptée à la situation avec la volonté d’être encore plus effecients ; les fondamentaux, comme disent les économistes, sont bons ;

– la dernière raison – la plus importante : vous avez tous mis beaucoup d’énergie et de coeur à l’ouvrage pendant la 1ère période de confinement, à faire vos tâches, à être créatifs pour de nouvelles offres ou de nouvelles idées, à gérer vos projets dans un souci de qualité et de satisfaction de nos clients…’

La SAS Magellium ne peut utilement soutenir que ce mail serait sans valeur car seulement destiné à rassurer les salariés inquiets et contraire aux éléments comptables.

Il en résulte que la SAS Magellium, sur qui pèse la charge de la preuve du motif économique, ne démontre pas la réalité de la menace sur la compétitivité du groupe, ni en quoi la modification de 4 contrats de travail et la suppression de 2 postes sur un effectif de 170 salariés au sein de la SAS Magellium étaient indispensables à la sauvegarde de la compétitivité de l’unique secteur d’activité du groupe lequel employait 231 salariés.

C’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il résulte de l’attestation Pôle Emploi un salaire de 3.715 € bruts.

En vertu de la convention collective nationale, Mme [R] qui était cadre avait droit à un préavis de 3 mois. La cour confirmera donc le jugement sur l’indemnité compensatrice de préavis de 11.145 € bruts outre congés payés de 1.114 € bruts.

En vertu de l’article L 1235-3 du code du travail, modifié par l’ordonnance du 22 septembre 2017, applicable aux licenciements survenus à compter du 24 septembre 2017, si le licenciement survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, et si l’une des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité comprise entre un montant minimal et un montant maximal figurant dans un tableau. Selon le tableau, pour une salariée ayant 10 ans d’ancienneté au jour de la fin du contrat de travail, dans une entreprise comprenant au moins 11 salariés, cette indemnité est comprise entre 3 et 10 mois de salaire brut.

Née le 16 août 1976, Mme [R] était âgée de 44 ans ; elle justifie avoir perçu des allocations chômage jusqu’en septembre 2021. Il lui sera alloué des dommages et intérêts de 23.000 €, par infirmation du jugement sur le quantum.

En application de l’article L 1235-4 du code du travail, si le licenciement du salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, et si le salarié a une ancienneté d’au moins 2 ans dans une entreprise d’au moins 11 salariés, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de 6 mois d’indemnités. Il convient donc d’office d’ordonner le remboursement par l’employeur à France travail des indemnités chômage à hauteur de 6 mois, sous déduction de la contribution prévue à l’article L 1233-69 du code du travail.

3 – Sur la prime de vacances :

Mme [R] réclame sa prime de vacances 2020 au prorata de 11/12e.

Lors de la réunion du comité social et économique du 17 mai 2019, à laquelle participait Mme [R], la direction a rappelé l’usage lié à la prime de vacances de l’année N-1 versée en juin de l’année N et au fait que, lorsqu’un salarié quittait l’entreprise entre les mois de juillet et de décembre de l’année N, il percevait au moment de son départ une prime de vacances de l’année N au prorata de son temps de travail et de son temps de présence ; la direction a décidé de dénoncer l’usage concernant les salariés quittant l’entreprise à partir du 1er juillet 2019, lesquels ne percevraient plus le reliquat de prime de vacances de l’année en cours.

En sa qualité de RRH, Mme [R] a informé l’ensemble des salariés de cette dénonciation par mail du 3 juin 2019.

Mme [R] soutient que l’usage n’a pas été dénoncé ‘dans les délais requis par la jurisprudence’, le délai de 3 semaines étant selon elle insuffisant.

Toutefois, au-delà de la question de la régularité de cette dénonciation, il demeure que le principe de la prime de vacances n’était pas remis en cause pour les salariés demeurant dans l’entreprise, et que la perte de la possibilité de percevoir cette prime du fait de la dénonciation est imputable à la SAS Magellium qui a notifié à Mme [R] un licenciement qui a été jugé sans cause réelle et sérieuse.

Par infirmation du jugement, il sera donc alloué à Mme [R] la somme de 419,13 € bruts, la SAS Magellium ne contestant pas spécialement le calcul lui-même.

4 – Sur les jours de RTT :

Mme [R] allègue un solde de 4,7 jours de RTT acquis et non pris au 30 novembre 2020, dont elle demande le paiement.

Conformément à l’avenant à effet du 1er juillet 2017, Mme [R] bénéficiait de RTT. Ni cet avenant ni la convention collective nationale ni le code du travail ne prévoyaient toutefois que les jours de RTT non pris pouvaient être indemnisés. Le paiement des jours de RTT non pris par les salariés quittant l’entreprise faisait l’objet d’un usage que la SAS Magellium a également décidé de dénoncer lors de la réunion du comité social et économique du 17 mai 2019, à effet du 1er juillet 2019, ce que Mme [R] a notifié dans le mail du 3 juin 2019. Toutefois, au-delà de la question de la régularité de cette dénonciation, il demeure que la perte de la possibilité de prendre les RTT est imputable à la SAS Magellium qui a notifié à Mme [R] un licenciement qui a été jugé sans cause réelle et sérieuse.

Il sera donc alloué à Mme [R] la somme de 805,85 € bruts, par confirmation du jugement, la SAS Magellium ne contestant pas spécialement le calcul lui-même.

5 – Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile :

L’employeur qui perd au principal supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi que ses propres frais irrépétibles, et ceux exposés par la salariée soit 1.500 € en première instance et 2.000 € en appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement, sauf sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu’il a débouté Mme [B] [R] de sa demande au titre de la prime de vacances,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,

Condamne la SAS Magellium à payer à Mme [B] [R] les sommes suivantes :

– 23.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 419,13 € bruts au titre de la prime de vacances,

– 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Ordonne le remboursement par la SAS Magellium à France travail des indemnités chômage versées à Mme [B] [R] du jour du licenciement au jour du jugement à hauteur de 6 mois, sous déduction de la contribution prévue à l’article L 1233-69 du code du travail,

Condamne la SAS Magellium aux dépens d’appel,

Rejette toute autre demande.

Le présent arrêt a été signé par C. BRISSET, présidente, et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER C. BRISSET

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