Liberté individuelle et hospitalisation sous contrainte : enjeux et limites.

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Liberté individuelle et hospitalisation sous contrainte : enjeux et limites.

L’Essentiel : Le débat contradictoire a eu lieu conformément aux articles L 3211-12-2 du code de la santé publique. Le juge a annoncé que la décision serait rendue dans l’après-midi. L’hospitalisation sans consentement doit respecter la liberté individuelle, mais peut être limitée pour la sécurité de la personne et des tiers. Selon l’article L. 3212-1, une hospitalisation sans consentement est justifiée si les troubles rendent impossible le consentement ou nécessitent des soins immédiats. Après une semaine, l’état de Madame [U] [S] s’est amélioré, et son hospitalisation n’est plus jugée nécessaire. La décision du juge a levé l’hospitalisation avec effet différé.

Débat contradictoire et décision judiciaire

Il a été procédé au débat contradictoire conformément aux articles L 3211-12-2 du code de la santé publique. Le juge a informé les parties que la décision serait rendue dans l’après-midi.

Principes de l’hospitalisation sans consentement

L’hospitalisation sans consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux doit respecter le principe de la liberté individuelle, tel que stipulé par l’article 66 de la Constitution. Cette liberté peut être limitée pour protéger la sécurité de la personne concernée et des tiers.

Conditions d’hospitalisation en soins psychiatriques

Selon l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne ne peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement que si ses troubles rendent impossible son consentement ou si son état nécessite des soins immédiats avec une surveillance médicale constante ou régulière.

Contrôle judiciaire des décisions d’hospitalisation

Le juge doit contrôler la régularité des décisions administratives relatives à l’hospitalisation complète. Il doit s’assurer que les restrictions aux libertés individuelles sont adaptées, nécessaires et proportionnées à l’état mental du patient, sans se substituer à l’autorité médicale pour l’évaluation du consentement ou des soins.

Profil de la patiente

Madame [W] [U] [S], originaire de Colombie, a été admise le 26 décembre 2024 en soins psychiatriques. Âgée de 31 ans et assistante de vie, elle traverse une période difficile, notamment une séparation et le placement de son enfant en famille d’accueil.

État de santé et comportements observés

Le certificat initial indique des troubles du comportement, tels que l’agitation et l’agressivité. Un suivi de 72 heures révèle un état de désorganisation et des convictions délirantes. La patiente a connu une rechute après une rupture de traitement, exacerbée par des difficultés socio-économiques.

Évaluation de la situation et avis du Ministère public

L’avis préalable à la saisine du juge souligne que la patiente est dans une situation stressante. Malgré des comportements inadaptés, le Ministère public soutient le maintien de l’hospitalisation en raison de son instabilité clinique.

Demande de main-levée et réponse de la patiente

Maître HUET demande la main-levée de l’hospitalisation, soulignant le manque de précisions sur sa nécessité. Lors de l’audience, Madame [U] [S] conteste son hospitalisation, expliquant qu’elle ne comprend pas pourquoi elle est là, bien qu’elle se montre prête à poursuivre un traitement à l’extérieur.

Amélioration de l’état de la patiente

Plus d’une semaine après son admission, le comportement de Madame [U] [S] s’est calmé. Bien que des éléments de fragilité persistent, son hospitalisation complète n’est plus jugée nécessaire, et son état psychique ne la rend plus dangereuse pour autrui.

Décision finale du juge

La requête est accueillie comme recevable, et l’hospitalisation est levée avec effet différé à 24 heures. Les dépens sont laissés à la charge du Trésor Public, et la décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’hospitalisation sans consentement selon le Code de la santé publique ?

Selon l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement que si deux conditions sont remplies :

1° Ses troubles rendent impossible son consentement ;

2° Son état impose des soins immédiats, assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme.

Ces dispositions visent à protéger la liberté individuelle tout en garantissant la sécurité de la personne concernée et celle des tiers.

Il est donc essentiel que l’hospitalisation sans consentement soit justifiée par des éléments clairs et précis, notamment en ce qui concerne l’état mental du patient et la nécessité des soins.

Quel est le rôle du juge dans le contrôle des décisions d’hospitalisation ?

Le juge a un rôle crucial dans le contrôle des décisions administratives relatives à l’hospitalisation complète, comme le stipule l’article L. 3216-1 du Code de la santé publique. Cet article précise que le juge doit vérifier la régularité des décisions prises en matière d’hospitalisation.

De plus, l’article L. 3211-3 du même code impose au juge de veiller à ce que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles soient adaptées, nécessaires et proportionnées à l’état mental du patient et à la mise en œuvre du traitement requis.

Il est important de noter que le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale pour évaluer le consentement du patient, le diagnostic ou les soins à administrer.

Ainsi, le contrôle judiciaire est un équilibre entre la protection des droits individuels et la nécessité de soins en cas de troubles mentaux.

Quels sont les droits du patient lors d’une hospitalisation sans consentement ?

Lors d’une hospitalisation sans consentement, le patient conserve certains droits, notamment le droit d’être informé des raisons de son hospitalisation et des soins qui lui sont administrés.

L’article L. 3211-2 du Code de la santé publique stipule que toute personne hospitalisée doit être informée de son état de santé, des soins envisagés et de leur nécessité.

De plus, le patient a le droit de contester la mesure d’hospitalisation. Il peut demander la main-levée de la mesure, comme cela a été fait par Maître HUET dans le cas de Madame [U] [S].

Le respect de ces droits est fondamental pour garantir la dignité et l’autonomie des patients, même en situation de contrainte.

Quelles sont les conséquences d’une décision de main-levée d’hospitalisation ?

La décision de main-levée d’hospitalisation, comme celle rendue dans le cas de Madame [U] [S], a des conséquences immédiates sur la situation du patient.

La main-levée signifie que le patient n’est plus soumis à l’hospitalisation complète, ce qui lui permet de retrouver sa liberté.

Cependant, cette décision peut être assortie d’un effet différé, comme dans ce cas, où la main-levée est effective après 24 heures. Cela permet de garantir une transition en douceur et de s’assurer que le patient est prêt à quitter l’établissement.

Il est également important de noter que la décision est exécutoire de plein droit, ce qui signifie qu’elle doit être appliquée sans délai.

Enfin, le patient a la possibilité de faire appel de cette décision dans un délai de 10 jours, ce qui lui permet de contester la décision si nécessaire.

Cour d’Appel
d’ORLÉANS

Tribunal Judiciaire D’ORLÉANS

CHAMBRE DES LIBERTES

ORDONNANCE SUR REQUÊTE DU DIRECTEUR DE L’ETABLISSEMENT

POURSUITE DE L’HOSPITALISATION COMPLÈTE AVANT L’EXPIRATION D’UN DÉLAI DE DOUZE JOURS À COMPTER DE L’ADMISSION

ADMISSION EN CAS DE PÉRIL IMMINENT

rendue le 03 Janvier 2025

Article L 3211-12-1 du code de la santé publique
N° RG 25/00004 – N° Portalis DBYV-W-B7J-G7NW
Minute n° 25/00006

DEMANDEUR :

M. LE DIRECTEUR DE L’EPSM DU LOIRET [4],
[Adresse 1]
non comparant, non représenté

DÉFENDEUR :

la personne faisant l’objet des soins :

Madame [W] [U] [S]
née le 01 Juillet 1993 à [Localité 5] (COLOMBIE)

Actuellement hospitalisée

Comparante, assistée de Me Romuald HUET, avocat au barreau d’Orléans, commis d’office

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non comparant, ayant donné son avis par mention au dossier en date du 02 janvier 2025.

Nous, Julien SIMON-DELCROS, Juge au tribunal judiciaire d’Orléans, assisté de Simon GUERIN, greffier, statuant en audience publique, à l’Etablissement Public de Santé Mentale du Loiret [4] à [Localité 3].

Il a été procédé au débat contradictoire prévu par les articles L 3211-12-2 du code de la santé publique.

Le Juge a avisé les parties que la décision sera rendue dans l’après-midi.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

L’hospitalisation sans son consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux doit respecter le principe, résultant de l’article 66 de la Constitution, selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit pas nécessaire (Conseil Constitutionnel, décision 2010/71 QPC du 26 novembre 2010). La protection de la liberté individuelle peut notamment trouver sa limite dans la protection de la sécurité de la personne objet des soins et des tiers auquel elle pourrait porter atteinte.

Selon l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement sur la décision du directeur d’un établissement psychiatrique que si :
1° ses troubles rendent impossible son consentement ;
2° son état impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme.

Le juge doit contrôler en application de l’article L3216-1 du code de la santé publique la régularité des décisions administratives prises en matière d’hospitalisation complète. En application de l’article L3211-3 du code de la santé publique il doit aussi veiller, à ce que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles du patient soient adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis. Le juge ne peut dans le cadre de son contrôle se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins.

Madame [W] [U] [S], née en Colombie, a été admise le 26 décembre 2024 en soins psychiatriques en péril imminent à l’établissement de santé mental [2].

Madame [U] [S] est assistante de vie. Elle a 31 ans, en instance de séparation. Son enfant fait l’objet d’une mesure de placement dans une famille d’accueil.

Le certificat initial mentionne des troubles du comportement depuis une dizaine de jours à type d’agitation psycho-motrice, agressivité verbale, menaces de mort, impulsivité…les troubles étant niés.

Le certificat des 24 heures fait état d’une patiente suivie depuis 2 années en état de rechute à la suite d’une rupture de traitement dans un contexte de difficultés socio-économiques. Son discours véhicule une conviction délirante.

Le certificat des 72 heures retient un rationalisme morbide et une banalisation de troubles.

Selon l’avis préalable à la saisine du juge du 31 décembre 2024, Madame [U] [S] s’est retrouvée dans une situation stressante liée à une séparation, le placement de son enfant et une mise à la porte de la famille qui l’hébergeait. 5 jours après le début de son hospitalisation le comportement est inadapté, irrespectueux. La patiente reste très désorganisée, délirante avec un sentiment de grandeur. Si elle peut être auditionnée, les soins sous contrainte sont à maintenir devant son instabilité clinique.

Le Ministère public émet un avis favorable au maintien de la mesure.

Maître HUET sollicite la main-levée de la mesure compte tenu du manque de précision quant aux raisons de l’hospitalisation et, à ce jour, de l’absence d’explications médicales quant à la nécessité de la prolonger.

Au cours de l’audience, Madame [U] [S] explique qu’il s’agit d’un bon établissement où elle avait déjà été admise, mais elle conteste cette fois la nécessité de son hospitalisation. Elle explique avoir eu une infection urinaire et ne comprend pas pourquoi elle se retrouve ici. Son discours reste difficile à comprendre au-delà de la barrière de la langue française.

Néanmoins Madame [U] [S] se situe bien dans le temps, se dit prête à poursuivre un traitement à l’extérieur même si elle refuserait du Valium.

Plus d’une semaine après son admission, son comportement s’est manifestement calmé. S’il persiste des éléments de fragilité liées à sa situation personnelle (mère d’enfant placé en particulier), l ‘hospitalisation complète de Madame [U] [S] n’apparait plus nécessaire. L’amélioration de son état psychique ne parait plus la rendre dangereuse pour autrui.

La requête sera dès lors accueillie comme étant recevable mais l’hospitalisation sera levée avec effet différé à 24 heures.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public.

PAR CES MOTIFS

Après débats en audience publique, statuant par décision contradictoire et en premier ressort,

ORDONNONS la mainlevée à effet différé à 24 heures de l’hospitalisation dont fait l’objet Madame [W] [U] [S]

DISONS que cette ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécutoire provisoire.

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor Public.

RAPPELONS que la présente décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours devant Monsieur le Premier Président de la cour d’appel d’Orléans ou son délégué saisi par une déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel.

Fait à ORLEANS
le 03 Janvier 2025

Le greffier

Le Juge

Simon GUERIN

Julien SIMON-DELCROS

Copie de la décision a été transmise par PLEX avec récépissé au patient, à Monsieur le Directeur de l’EPSM DAUMEZON,à l’avocat, au procureur de la République contre signature du récépissé.
Le greffier,


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