Isolement psychiatrique : évaluation et maintien justifiés par l’état de santé du patient

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Isolement psychiatrique : évaluation et maintien justifiés par l’état de santé du patient

L’Essentiel : Mme [W] [M] a été admise le 14 décembre 2024 à l’EPSM en raison d’agressions liées à une addiction sévère à la cocaïne et des troubles psychiques. Le 17 décembre, elle a été transférée à son secteur d’origine, avec une hospitalisation complète ordonnée par le préfet. Le 6 janvier 2025, elle a été placée en isolement, une mesure justifiée par son état de santé et ses comportements agressifs. Après un appel de Mme [M] concernant cette décision, le tribunal a confirmé le maintien de l’isolement le 11 janvier 2025, considérant la mesure adaptée et nécessaire.

Admission sous contrainte

Mme [W] [M] a été admise le 14 décembre 2024 à l’EPSM [4] en raison d’agressions envers des infirmières et des gendarmes, liées à une addiction sévère à la cocaïne, des troubles bipolaires, de la paranoïa et un délire de persécution. Cette admission a été décidée par un arrêté préfectoral.

Transfert et poursuite des soins

Le 17 décembre 2024, Mme [M] a été transférée à l’EPSM de [Localité 1], son secteur psychiatrique d’origine. Le 18 décembre 2024, le préfet du Morbihan a ordonné la poursuite des soins sous forme d’hospitalisation complète.

Mesure d’isolement

Le 6 janvier 2025, Mme [M] a été placée en isolement. Le directeur de l’établissement a saisi le magistrat en charge du contentieux des isolements le 9 janvier 2025 pour obtenir l’autorisation de maintenir cette mesure.

Ordonnance et appel

Le 10 janvier 2025, le magistrat a autorisé le maintien de l’isolement. Mme [M] a fait appel de cette ordonnance le même jour à 16 h 40.

Arguments de Mme [M]

Dans sa demande de mainlevée, Mme [M] a soutenu l’absence de certificat médical entre le 3 et le 5 janvier 2025, des certificats de complaisance, son souhait de changer de pavillon, son intolérance au Loxapac, son attente d’un changement d’unité et des douleurs dues à une sciatique.

Recevabilité de l’appel

L’appel de Mme [M] a été jugé recevable, ayant été formé dans le délai légal de vingt-quatre heures après la notification de l’ordonnance.

Évaluations médicales

Mme [M] a contesté la régularité des évaluations médicales, arguant qu’il n’y avait pas eu de certificats entre le 3 et le 5 janvier 2025. Cependant, des évaluations régulières ont été effectuées, respectant les prescriptions du code de la santé publique.

Justification de l’isolement

L’isolement a été justifié par l’état de santé de Mme [M], qui présentait des comportements hétéroagressifs et des idées délirantes. La mesure a été considérée comme adaptée, nécessaire et proportionnée au risque encouru.

Décision finale

Le tribunal a confirmé l’ordonnance de maintien de l’isolement, laissant les dépens à la charge du trésor public. Cette décision a été rendue le 11 janvier 2025.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’article R. 3211-42 du code de la santé publique précise que « L’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel ou son délégué, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification. »

Dans le cas présent, Mme [M] a formé un appel le 10 janvier 2025 à 16 h 40, concernant une ordonnance rendue le même jour à 14 h 45.

Cet appel, régulier en la forme, respecte donc les délais et les procédures établis par la loi.

Il sera donc déclaré recevable, permettant ainsi à la cour d’examiner le fond de l’affaire.

Sur la régularité des évaluations médicales

L’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique stipule que « La mesure d’isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l’état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d’une durée totale de quarante-huit heures, et fait l’objet de deux évaluations par vingt-quatre heures. »

Dans cette affaire, Mme [M] a été placée à l’isolement le 6 janvier 2025 à 18 h 05.

Étant donné que cette mesure a duré plus de 12 heures, elle devait être contrôlée par deux évaluations dans les 24 heures suivantes.

Les enregistrements montrent que des évaluations ont été effectuées régulièrement, confirmant le maintien de l’isolement à plusieurs reprises.

Ainsi, il est établi que les évaluations médicales ont été conformes aux exigences de l’article L. 3222-5-1, justifiant le maintien de la mesure d’isolement.

Sur le fond de la mesure d’isolement

L’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique précise que « L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. »

Dans le cas de Mme [M], son isolement a été justifié par des comportements hostiles, des menaces et des idées délirantes.

Ces éléments indiquent un risque immédiat pour elle-même et pour autrui, ce qui est conforme aux conditions posées par la loi pour justifier une telle mesure.

Le juge a donc correctement appliqué la loi en maintenant l’isolement, considérant que l’état mental de la patiente nécessitait cette mesure exceptionnelle.

Sur les dépens

Concernant les dépens, il est stipulé que « Les dépens seront laissés à la charge du trésor public. »

Cette disposition est conforme aux pratiques habituelles en matière de contentieux, où les frais de justice sont souvent pris en charge par l’État, surtout dans des affaires touchant à la santé mentale.

Ainsi, la décision de laisser les dépens à la charge du trésor public est justifiée et conforme à la législation en vigueur.

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 25-08

N° RG 25/00022 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VRFR

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

article L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique

Ordonnance statuant sur les recours en matière d’isolement et de contention mis en oeuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement

Véronique VEILLARD, Présidente de chambre à la cour d’appel de RENNES, délégué(é) par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L 3222-5-1 du code de la santé publique, assistée de Sandrine KERVAREC, greffière,

Vu l’ordonnance du magistrat en charge des hospitalisations sous contrainte du tribunal judiciaire de LORIENT rendue le 10 Janvier 2025, autorisant le maintien de la mesure d’isolement de :

Mme [W] [M]

née le 04 Septembre 1977 à [Localité 2]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Actuellement hospitalisée au Centre hospitalier de EPSM [3] de [Localité 1]

Vu la déclaration d’appel formée par Mme [M] [W] contre cette ordonnance et transmise au greffe de la cour d’appel 10 Janvier 2025 à 16 h 40

Vu les articles L 3222-5-1 et suivants du code de la santé publique,

Vu le dossier de la procédure ;

Vu les observations sollicitées auprès du ministère public, du centre hospitalier, du patient ;

Vu les observations du ministère public, pris en la personne de Mme DEWAILLY et de M. DELPERIE, avocats généraux à la Cour d’appel de Rennes, en date du 10 janvier 2025, lequelles ont été communiquées aux parties ;

Vu les observations de la patiente, transmises par le centre hospitalier le 11 janvier 2025 ;

A mis l’affaire en délibéré et ce jour par mise à disposition au greffe a rendu la décision a suivante :

EXPOSÉ DE L’AFFAIRE

Sur la base du certificat médical du Dr [F] [E], Mme [W] [M] a été admise le 14 décembre 2024 en hospitalisation sous contrainte à l’EPSM [4] dans le cadre de l’arrêté préfectoral du même 14 décembre 2024 pris au motif d’agressions envers les infirmières et les gendarmes sous l’empire d’une addiction sévère à la cocaïne sur fond de troubles bipolaires, de paranoïa et de délire de persécution sur le voisinage accompagnés de décompensation.

Par arrêté du 17 décembre 2024, elle a été transférée à l’EPSM de [Localité 1] dans son secteur psychiatrique d’origine d’où elle était précédemment sortie le 5 décembre 2024. Par arrêté du 18 décembre 2024, le préfet du Morbihan a décidé de poursuivre les soins psychiatriques sous la forme de l’hospitalisation complète.

Mme [M] a fait l’objet d’une mesure d’isolement le 6 janvier 2025 à 18 h 05, ce qui a conduit le directeur de l’établissement de santé à saisir le magistrat en charge du contentieux des isolements du tribunal judiciaire de Lorient par requête du 9 janvier 2025 réceptionnée à 12 h 02 d’une autorisation de maintien de Mme [M] à l’isolement.

Par ordonnance du 10 janvier à 14 h 45, le magistrat en charge du contentieux des isolements du tribunal judiciaire Lorient a autorisé le maintien de la mesure d’isolement de Mme [M].

Par déclaration du 10 janvier 2025 à 16 h 40, Mme [M] a fait appel de cette ordonnance.

Mme [M] sollicite la mainlevée de son isolement en soutenant qu’il n’y a pas eu de certificat médical entre le 3 janvier 2025 et le 5 janvier 2025, qu’après la levée ordonnée par le juge des libertés et de la détention, les médecins ont fait un certificat de complaisance aux fins de la garder à l’isolement, qu’elle souhaitait changer de pavillon pour aller de [N] à [X] pour obtenir des permissions, qu’elle ne supportait pas le Loxapac qui lui avait été administré, qu’elle était dans l’attente d’un changement d’unité, qu’enfin, en raison d’une sciatique, elle ne pouvait rester allongée dans une salle d’isolement.

Le ministère public a indiqué solliciter la confirmation de l’ordonnance par avis écrit du 10 janvier 2025.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l’appel

L’article R. 3211-42 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que « L’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel ou son délégué, dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa notification. »

En l’espèce, Mme [M] a formé le 10 janvier 2025 à 16 h 40 appel d’une ordonnance rendue le même jour à 14 h 45.

Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.

Sur la régularité

Sur le moyen relatif au séquençage des évaluations médicales

Mme [M] sollicite la mainlevée de son isolement en soutenant qu’il n’y a pas eu de certificat médical entre le 3 janvier 2025 et le 5 janvier 2025. Bien que non étayé, ce moyen s’analyse comme visant une absence d’évaluations médicales conformes aux prescriptions du code de la santé publique.

L’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique dispose notamment que « La mesure d’isolement est prise pour une durée maximale de douze heures. Si l’état de santé du patient le nécessite, elle peut être renouvelée, dans les conditions et selon les modalités prévues au premier alinéa du présent I, dans la limite d’une durée totale de quarante-huit heures, et fait l’objet de deux évaluations par vingt-quatre heures. »

En l’espèce la patiente a fait l’objet d’une mesure d’isolement à compter du 6 janvier 2025 à 18 h 05. Ce placement perdurant au-delà de 12 h, il devait faire l’objet d’un contrôle deux fois par 24 h.

A l’examen du registre du déroulé de la mesure, il s’avère que Mme [M] a fait l’objet d’un examen renouvelant la mesure :

– le 6 janvier 2025 à 21 h 45 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement,

– le 7 janvier 2025 à 9 h 37 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement,

– le 7 janvier 2025 à 19 h 24 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement,

– le 8 janvier 2025 à 10 h 26 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement,

– le 8 janvier 2025 à 21 h 57 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement,

– le 9 janvier 2025 à 9 h 41 avec mention motivée du maintien de la mesure d’isolement.

La saisine du juge des libertés et de la détention est intervenue le 9 janvier 2025 à 10 h 02.

En conséquence Mme [M] a fait l’objet d’évaluations régulières conformes aux prescriptions de l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique sans qu’aucune alternative ait pu permettre de lever la mesure compte tenu de la persistance de ses troubles psychiatriques.

Sur le fond

D’une façon générale, l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique dispose en son 1er alinéa que « L’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. Leur mise en ‘uvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical. »

Il ressort de la décision de placement à l’isolement que Mme [M] a été placé à l’isolement en raison d’une hostilité importante, de menaces, d’idées délirantes avec thématique de persécution à mécanisme interprétatif, nécessitant qu’elle soit prise en charge dans une chambre d’isolement, que l’amélioration de l’état est limité, l’état clinique étant estimé fluctuant avec des comportements hétéroagressifs.

Ces éléments caractérisent le dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui exigé par le texte précité, justifiant pour l’instant le recours à la mesure très exceptionnelle que doit constituer l’isolement laquelle demeure adaptée, nécessaire et proportionnée au risque encouru eu égard à l’état mental de ce patient.

Le juge n’a pas à se substituer à l’autorité médicale et il résulte de ce qui précède que cette mesure exceptionnelle doit être maintenue au regard des symptômes encore présents.

Sur les dépens

Les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

PAR CES MOTIFS

Nous, Véronique Veillard, présidente de chambre, statuant en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,

Recevons Mme [W] [M] en son appel,

Confirmons l’ordonnance entreprise,

Laissons les dépens à la charge du trésor public

Fait à Rennes, le samedi 11 janvier 2025 à 14 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, Véronique Veillard,

Présidente de chambre

Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à [W] [M], au CH

Le greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD

Le greffier


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