L’Essentiel : L’isolement et la contention, selon l’article L3222-5-1 du code de la santé publique, doivent être des mesures de dernier recours, réservées aux patients hospitalisés sans consentement. Leur application nécessite une décision motivée d’un psychiatre et doit être proportionnée au risque. En cas de renouvellement, le médecin doit informer la famille et le directeur de l’établissement, tout en saisissant le magistrat compétent. Dans le cas concret, le patient, soumis à l’isolement depuis le 7 janvier 2025, n’avait pas été admis en hospitalisation complète, entraînant une irrégularité. Le juge a ordonné la levée de la mesure de contention.
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MOTIFS DE LA DECISIONL’article L3222-5-1 du code de la santé publique stipule que l’isolement et la contention doivent être des mesures de dernier recours, réservées aux patients en hospitalisation complète sans consentement. Ces mesures ne peuvent être appliquées que pour prévenir un danger immédiat pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre, et doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées au risque évalué. De plus, leur mise en œuvre doit être strictement surveillée par des professionnels de santé, avec des évaluations régulières consignées dans le dossier médical. RENOUVELLEMENT DES MESURESLe même article précise que, dans des cas exceptionnels, un médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées maximales de 48 heures et 24 heures respectivement, à condition d’informer un membre de la famille du patient et le directeur de l’établissement. Le magistrat compétent doit également être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration des délais fixés, afin de statuer sur la nécessité de prolonger ces mesures. DEFINITIONS DES MESURESIl est également indiqué qu’une nouvelle mesure d’isolement ou de contention est considérée comme telle si elle est prise plus de quarante-huit heures après une précédente mesure. En revanche, si elle est prise dans ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures antérieures. L’information et la saisine du juge doivent suivre les mêmes modalités en cas de mesures cumulées sur une période de quinze jours. INFORMATION ET DROITS DES FAMILLESL’article R3211-31-1 stipule que l’information sur le renouvellement des mesures doit être communiquée à un membre de la famille ou à une personne pouvant agir dans l’intérêt du patient. Cette personne a le droit de saisir le juge pour demander la levée de la mesure d’isolement ou de contention. CONTROLE JUDICIAIRELe juge, dans le cadre de son contrôle, ne peut pas se substituer à l’autorité médicale pour évaluer le consentement du patient ou le diagnostic. Son rôle se limite à vérifier la conformité des motifs de la mesure avec les critères établis par la loi. CAS CONCRETDans cette affaire, il est noté que le patient a été soumis à une mesure d’isolement depuis le 7 janvier 2025, suivie d’une mesure de contention à partir du 8 janvier 2025. Cependant, le Directeur du CH Le Vinatier n’a pas pris de décision d’admission en hospitalisation complète pour le patient, qui était en attente de transfert. Cela a conduit à une non-conformité avec les prescriptions légales, rendant la mesure entachée d’un vice initial. DECISION DU JUGEEn conséquence, la procédure a été jugée irrégulière, et il a été ordonné la mainlevée de la mesure de contention concernant le patient. L’ordonnance a été notifiée au Directeur du Centre Hospitalier Le Vinatier et au procureur de la République. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de mise en œuvre de l’isolement et de la contention selon l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ?L’article L3222-5-1 du code de la santé publique précise que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Ces mesures ne peuvent être appliquées qu’à des patients en hospitalisation complète sans consentement. Elles doivent être justifiées par la nécessité de prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui. La décision doit être motivée par un psychiatre et doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient. De plus, la mise en œuvre de ces mesures doit faire l’objet d’une surveillance stricte, tant somatique que psychiatrique, qui est confiée à des professionnels de santé désignés par l’établissement. Cette surveillance doit être tracée dans le dossier médical, incluant deux évaluations par 24 heures pour l’isolement et une évaluation toutes les 12 heures pour la contention. Quelles sont les obligations d’information relatives au renouvellement des mesures d’isolement et de contention ?Le paragraphe II de l’article L3222-5-1 stipule que, dans des cas exceptionnels, le médecin peut renouveler les mesures d’isolement ou de contention au-delà des durées initiales de 48 heures pour l’isolement et de 24 heures pour la contention. Ce renouvellement doit être effectué sous les mêmes conditions que celles initialement requises. Il est impératif d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt concernant le renouvellement envisagé. En outre, le directeur de l’établissement doit informer le magistrat du siège du Tribunal judiciaire compétent. Cette information doit être faite avant l’expiration de la soixante-douzième heure pour l’isolement et de la quarante-huitième heure pour la contention. Le juge doit statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure pour l’isolement ou de la soixante-douzième heure pour la contention. Quel est le rôle du juge dans le contrôle des mesures d’isolement et de contention ?L’article R3211-31-1 précise que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contention doit être délivrée à un membre de la famille ou à une personne agissant dans l’intérêt du patient. Cette personne a le droit de saisir le juge pour demander la mainlevée de la mesure. Cependant, le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale concernant l’évaluation du consentement du patient, le diagnostic ou les soins. Son rôle se limite à un contrôle des motifs de la mesure au regard des critères établis dans le paragraphe I de l’article L3222-5-1. Il ne s’agit donc pas d’une appréciation de l’opportunité médicale, mais d’une vérification de la conformité des mesures aux dispositions légales. Quelles conséquences en cas de non-respect des prescriptions de l’article L3222-5-1 ?Dans le cas présent, il a été constaté que le Directeur du CH Le Vinatier n’avait pas pris de décision d’admission en hospitalisation complète pour le patient M. [K] [J]. Cela signifie que les prescriptions de l’article L3222-5-1 n’ont pas été respectées. En conséquence, la mesure d’isolement et de contention est entachée d’un vice initial qui ne peut être régularisé, peu importe l’opportunité médicale des motifs ayant conduit à cette mesure. Ainsi, la procédure est jugée irrégulière, ce qui entraîne l’ordonnance de la mainlevée de la mesure de contention. Cette décision souligne l’importance du respect des procédures légales dans le cadre des mesures de contrainte en milieu hospitalier. |
Tribunal judiciaire de Lyon
Cabinet de Daphné BOULOC
N°RG 25/00101 – JLD hospitalisation
Mme [K] [J] née le 28/10/1989
ORDONNANCE RELATIVE A UNE MESURE DE CONTENTION
(1e demande)
rendue le 10 janvier 2025 à 16H20
Par, Daphné BOULOC, juge des libertés et de la détention au Tribunal judiciaire de Lyon, statuant sans audience selon la procédure écrite de principe prévue aux articles L3211-12-2 et L3222-5-1 du Code de la santé publique ;
Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants, L3222-5-1, R3211-34 et suivants du Code de la santé publique ;
Vu les pièces du dossier relatif à la mesure de contention dont M. [K] [J] fait l’objet depuis le 8 janvier 2025 à 16h ;
Vu les informations délivrées aux tiers en application du premier alinéa du II de de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique ;
Vu la saisine du juge par le Directeur du CH Le Vinatier le 10 janvier 2025, enregistrée le même jour à 8h54, aux fins de maintien de la mesure de contention sans demande de comparution du patient,
Vu l’avis du Ministère public ;
L’article L3222-5-1 du code de la santé publique dispose, dans son premier alinéa, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; qu’enfin, leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical, comportant notamment deux évaluations par 24 heures (isolement)/12heures(contention);
Il dispose aussi, dans son paragraphe II, qu’à titre exceptionnel, le médecin peut renouveler sous les mêmes conditions, au-delà des durées totales de 48 heures pour la mesure d’isolement et de 24 heures pour la mesure de contention, la mesure d’isolement ou de contention avec l’obligation d’informer au moins un membre de la famille du patient ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de celui-ci, du renouvellement qui est envisagé ; que cette même information doit être délivrée par le directeur d’établissement au magistrat du siège du Tribunal judiciaire compétent, ce dernier devant être saisi d’une demande de maintien de la mesure avant l’expiration de la soixante-douzième heure d’isolement et de la quarante-huitième heure de contention si l’état de santé du patient rend le renouvellement de la mesure nécessaire au delà de ces durées, et statuer avant l’expiration de la quatre-vingt seizième heure d’isolement ou la soixante-douzième heure de contention.
Il est aussi précisé à cet article qu’une mesure d’isolement ou de contention est regardée comme une nouvelle mesure lorsqu’elle est prise au moins quarante-huit heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention et qu’en-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent et qu’en outre, l’information susvisée et la saisine du juge doivent être effectuées selon les mêmes modalités lorsque le médecin prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de quarante-huit heures pour l’isolement et de vingt-quatre heures pour la contention sur une période de quinze jours.
L’article R3211-31-1 dispose que l’information relative au renouvellement de la mesure d’isolement ou de contention est délivrée par tout moyen à au moins un membre de la famille du patient, ou une personne susceptible d’agir dans son intérêt. Cette personne a le droit de saisir le juge aux fins de mainlevée d’une mesure d’isolement ou de contention.
Dans le cadre de son contrôle, le juge ne peut se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins. Il n’opère pas une appréciation de l’opportunité médicale de la mesure mais un contrôle de ses motifs au regard des critères posés au paragraphe I de l’article L3222-5-1 susvisé.
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L3222-5-1 du code de la santé publique que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours qui ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète ;
Qu’il convient en l’espèce de relever que le patient a fait l’objet d’une mesure d’isolement depuis le 7 janvier 2025 à 13 h puis d’une mesure de contention à compter du 8 janvier 2025 à 16h ;
Que cependant, le Directeur du CH Le Vinatier n’a pris aucune décision portant admission en hospitalisation complète de M. [K] [J], le patient étant en attente de transfert dans une autre structure hospitalière ;
Qu’il en résulte que les prescriptions impératives posées par l’article susmentionné n’ont pas été respectées, de sorte que la présente mesure est entachée d’un vice initial non susceptible de régularisation, quelle que soit par ailleurs l’opportunité médicale, par la suite avérée, des motifs ayant présidé au renouvellement de cette mesure;
Qu’il résulte de ces développements que la procédure est irrégulière.
Qu’en conséquence, il y a lieu d’ordonner la mainlevée de la mesure de contention de M.[K] [J] ;
Ordonnons la mainlevée de la mesure de contention concernant M. [K] [J] ;
LE PRESIDENT
Daphné BOULOC
– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au Directeur du Centre Hospitalier Le Vinatier pour notification à M. [K] [J] le 10 janvier 2025,
Le Greffier,
– Copie de l’ordonnance notifiée par courriel au directeur du Centre Hospitalier Le Vinatier le 10 janvier 2025,
Le Greffier,
– Avis de la présente ordonnance a été donné au procureur de la République le 10 janvier 2025
Le Greffier,
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