Interdiction de séjour et régularité des procédures administratives en matière de rétention.

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Interdiction de séjour et régularité des procédures administratives en matière de rétention.

L’Essentiel : La cour d’appel d’Aix-en-Provence a rendu une décision le 5 avril 2023 concernant la rétention administrative de Monsieur [Z] [E]. Le 12 décembre 2024, le préfet des Bouches-du-Rhône a ordonné son placement en rétention, mais l’absence de mise à jour du registre de rétention a soulevé des irrégularités. Lors de l’audience, le représentant préfectoral était absent, remettant en question la procédure. Finalement, la cour a infirmé l’ordonnance du magistrat, déclarant irrecevable la requête préfectorale et ordonnant la mise en liberté de Monsieur [Z] [E], avec possibilité de pourvoi en cassation.

Contexte Juridique

Les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) encadrent la procédure de rétention administrative des étrangers en France. Dans ce cadre, une décision a été rendue le 5 avril 2023 par la chambre correctionnelle de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, ordonnant l’interdiction du territoire français pour un individu.

Placement en Rétention

Le 12 décembre 2024, le préfet des Bouches-du-Rhône a pris une décision de placement en rétention administrative, notifiée le même jour. Par la suite, le 11 janvier 2025, un magistrat a ordonné le maintien de Monsieur [Z] [E] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, en attendant l’examen de sa situation.

Déclarations de l’Individu

Monsieur [Z] [E] a comparu et a déclaré être libyen, tout en affirmant qu’il n’y aurait pas de problème s’il devait être renvoyé en Algérie. Les autorités ont demandé des informations au consulat algérien pour confirmer sa nationalité. Son avocate a soulevé des préoccupations concernant la délivrance des documents de voyage, notant qu’aucun laissez-passer n’avait été émis à ce jour.

Absence de Représentation Préfectorale

Lors de l’audience, le représentant de la préfecture n’était pas présent, ce qui a soulevé des questions sur la procédure suivie pour prolonger la rétention de Monsieur [Z] [E].

Recevabilité de l’Appel

L’appel interjeté par Monsieur [Z] [E] contre l’ordonnance du magistrat a été jugé recevable. Les éléments du dossier n’ont pas révélé d’irrégularité dans la procédure de rétention. La question de l’irrecevabilité de la requête préfectorale a été examinée, notamment en ce qui concerne la délégation de signature du préfet.

Problèmes de Registre de Rétention

Il a été constaté que le registre de rétention, qui doit mentionner l’état civil des personnes retenues et les conditions de leur placement, n’avait pas été mis à jour. Les décisions relatives au renouvellement de la rétention de Monsieur [Z] [E] n’y figuraient pas, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de la requête du préfet.

Décision Finale

En conséquence, la cour a infirmé l’ordonnance du magistrat et a déclaré irrecevable la requête du préfet des Bouches-du-Rhône visant à prolonger la rétention de Monsieur [Z] [E]. La cour a ordonné sa mise en liberté, tout en informant les parties de leur droit de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure de placement en rétention administrative selon le CESEDA ?

Le placement en rétention administrative d’un étranger est régi par les articles L 740-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

L’article L 741-1 précise que l’autorité compétente pour ordonner ce placement est le préfet de département, ou, dans certaines localités, le Préfet de police.

Il est important de noter que si le signataire d’un arrêté préfectoral n’est pas le préfet lui-même, il doit agir en vertu d’une délégation de signature.

Dans le cas présent, il a été établi que M. [G] [M] [R], signataire de la saisine du juge, avait bien une délégation de signature, ce qui valide la procédure de placement en rétention.

Quelles sont les obligations de l’administration concernant le registre de rétention ?

L’article L 744-2 du CESEDA impose à l’administration de tenir un registre dans tous les lieux de rétention. Ce registre doit mentionner l’état civil des personnes retenues ainsi que les conditions de leur placement ou maintien en rétention.

Il doit également inclure les informations concernant les enfants mineurs accompagnant ces personnes.

L’administration est tenue de fournir, sur demande, des éléments d’information relatifs aux dates et heures de placement, ainsi que le lieu exact de la rétention.

Cela garantit la transparence et le respect des droits des personnes retenues.

Quelles sont les conditions de recevabilité d’une requête en prolongation de rétention ?

L’article R. 743-2, alinéa 2, du CESEDA stipule que toute requête en prolongation de la rétention administrative doit être accompagnée de pièces justificatives, notamment une copie du registre mentionné à l’article L 744-2.

De plus, l’article L 743-9 précise que le juge doit s’assurer que l’étranger a pu faire valoir ses droits depuis sa précédente présentation.

Dans l’affaire en question, il a été constaté que la copie du registre n’avait pas été actualisée, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de la requête du préfet des Bouches-du-Rhône.

Quelles sont les conséquences d’une décision d’irrecevabilité de la requête préfectorale ?

Lorsque la requête du préfet est déclarée irrecevable, comme cela a été le cas dans cette affaire, cela entraîne l’infirmation de la décision de prolongation de la rétention.

En conséquence, le juge ordonne la mise en liberté de la personne concernée, ici Monsieur [Z] [E].

Cette décision souligne l’importance du respect des procédures légales et des droits des étrangers en matière de rétention administrative.

Les parties ont également la possibilité de se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de deux mois, conformément aux dispositions légales.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 13 JANVIER 2025

N° RG 25/00076 – N° Portalis DBVB-V-B7J-BOGWZ

Copie conforme

délivrée le 13 Janvier 2025 par courriel à :

-l’avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention de Marseille en date du 11 Janvier 2025 à 11h25.

APPELANT

Monsieur [Z] [E]

né le 29 Mai 1985 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Algérienne

Comparant en visioconférence depuis le centre de rétention administrative de [Localité 6] en application des dispositions de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024.

Assisté de Maître Olivia STROZZI,

avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, commis d’office.

et de Monsieur [I] [S], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

INTIMÉ

PREFET DES BOUCHES DU RHONE

Avisé, non représenté

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 13 Janvier 2025 devant Monsieur Pierre LAROQUE, Président à la cour d’appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Carla D’AGOSTINO, Greffier,

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2025 à 16h20,

Signée par Monsieur Pierre LAROQUE, Président et Mme Carla D’AGOSTINO, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu la décision rendue le 05 avril 2023 par la chambre correctionnelle de la cour d’appel d’Aix-en-Provence ordonnant l’interdiction du territoire français ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 12 décembre 2024 par PREFET DES BOUCHES DU RHONE notifiée le même jour à 18h28 ;

Vu l’ordonnance du 11 Janvier 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [Z] [E] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;

Vu l’appel interjeté le 11 Janvier 2025 à 17h26 par Monsieur [Z] [E] ;

Monsieur [Z] [E] a comparu et a déclaré être libyen, mais que s’il devait être renvoyé en Algérie, il n’y aurait pas de soucis. Ils n’ont pas confirmé si j’étais algérien. Ils ont demandé des renseignements au consulat algérien.

Son avocate a été entendue et a fait valoir que l’administration ne sait pas si les documents de voyage seront délivrés à bref délai ; qu’il y aurait une réservation de vol le 25.01.2025 mais que pour l’instant aucun laissez-passer n’avait été délivré à l’intéressé qui a indiqué s’appeler [Z] [N] et qui souhaiterait être assigné à résidence

Le représentant de la préfecture n’a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.

– Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale :

L’article R 741-1 du CESEDA dispose que l’autorité compétente pour ordonner le placement en rétention administrative d’un étranger est le préfet de département et, à [Localité 8], le Préfet de police.

Il en résulte que le signataire d’un arrêté préfectoral, s’il n’est le préfet en personne, doit avoir agi en vertu d’une délégation de signature.

En l’espèce, il résulte du recueil des actes administratifs spécial n°13-2024-005 publié le 4 janvier 2025 que M. [G] [M] [R], qui est le signataire de la saisine du juge délégué du tribunal judiciaire de Marseille, bénéficie bien d’une délégation de signature à cette fin en sa qualité d’attaché, adjoint à la cheffe du BECA.

Il s’ensuit que le moyen tiré de l’absence de délégation de signature manque en fait.

L’article L. 744-2 du CESEDA, dispose qu’il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil.

L’autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d’information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

L’article R. 743-2, alinéa 2, du CESEDA dispose que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L744-2 susvisé.

Il résulte par ailleurs de l’article L743-9 du CESEDA que le juge s’assure, lors de l’examen de chaque demande de prolongation d’une mesure de rétention d’un étranger que, depuis sa précédente présentation, celui-ci a été placé en mesure de faire valoir ses droits,notamment d’après les mentions du registre de rétention prévu à l’article L744-2 du CESEDA.

En l’espèce, il résulte des pièces de la procédure que la copie du registre n’a pas été actualisée, les décisions relatives au premier renouvellement de la rétention administrative de M. [E] n’y étant pas mentionnées.

Il convient en conséquence de déclarer la requête du préfet des Bouches-du-Rhône irrecevable et d’infirmer la décision rendue par le premier juge.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

– Infirmons l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention en date du 11 Janvier 2025.

Et statuant à nouveau,

– Déclarons irrecevable la requête du préfet des Bouches-du-Rhône tendant à voir prolonger la rétention administrative de M. [Z] [E] ;

– Ordonnons la mise en liberté de M. [Z] [E] ;

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [Z] [E]

Assisté d’un interprète

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 7]

Téléphone : [XXXXXXXX02] – [XXXXXXXX03] – [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 13 Janvier 2025

À

– PREFET DES BOUCHES DU RHONE

– Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

– Monsieur le procureur général

– Monsieur le greffier du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale de MARSEILLE

– Maître Olivia STROZZI

NOTIFICATION D’UNE ORDONNANCE

J’ai l’honneur de vous notifier l’ordonnance ci-jointe rendue le 13 Janvier 2025, suite à l’appel interjeté par :

Monsieur [Z] [E]

né le 29 Mai 1985 à [Localité 4] (MAROC)

de nationalité Algérienne

Je vous remercie de m’accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu’il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.


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