Inopérabilité des demandes en matière de procédure civile

·

·

Inopérabilité des demandes en matière de procédure civile

L’Essentiel : Le 10 janvier 2008, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE a conclu un bail commercial de 12 ans avec TM FAST FOOD pour des locaux à [Adresse 2] et [Adresse 4]. Le 22 novembre 2010, TM FAST FOOD a cédé son fonds à la SARL YHO, qui l’a ensuite transféré à la SARL ACAK en 2016, puis à la SARL DATH en 2022. Le 5 septembre 2023, la SCI a signifié un commandement de payer pour des indemnités impayées et a assigné les sociétés devant le Tribunal judiciaire de BOBIGNY, demandant la nullité de la cession et la résiliation du bail.

Constitution du bail commercial

Par acte authentique du 10 janvier 2008, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE [Adresse 6] a signé un bail commercial avec la société TM FAST FOOD pour une durée de 12 ans, concernant des locaux situés à [Adresse 2] et [Adresse 4] à [Localité 5].

Cessions de fonds de commerce

Le 22 novembre 2010, la société TM FAST FOOD a cédé son fonds de commerce à la société en formation SARL YHO. Par la suite, le 22 juillet 2016, la SARL YHO a transféré ce fonds à la SARL ACAK, qui l’a ensuite cédé à la SARL DATH le 17 février 2022.

Commandement de payer et assignation

Le 5 septembre 2023, la SCI [Adresse 6] a signifié un commandement de payer à M. [E] [O] [B] pour des indemnités d’occupation impayées. Le 20 avril 2023, la SCI a assigné la SARL ACAK, M. [E] [O] [I] en tant que liquidateur de la société ACAK, et la SARL DATH devant le Tribunal judiciaire de BOBIGNY, demandant la nullité de la cession du fonds de commerce et la résiliation judiciaire du bail commercial.

Conclusions d’incidents

Le 28 mars 2024, la SARL ACAK, M. [E] [O] [B] et la SARL DATH ont déposé des conclusions d’incident, contestant l’assignation et demandant son rejet pour inopérance. En réponse, la SCI [Adresse 6] a formulé des conclusions le 23 avril 2024, demandant le déboutement des demandes des défendeurs et la recevabilité de l’assignation.

Décision du juge de la mise en état

Lors de l’audience du 14 novembre 2024, le juge a constaté que la SARL ACAK et ses co-défendeurs n’avaient pas formulé de demande dans leurs conclusions d’incident. En conséquence, le juge a décidé de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure pour les conclusions au fond et a réservé les dépens, déboutant la SCI [Adresse 6] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la compétence du juge de la mise en état selon le Code de procédure civile ?

Le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 du Code de procédure civile, ainsi que sur les incidents mettant fin à l’instance et les fins de non-recevoir.

L’article 789 du Code de procédure civile précise :

« Le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 du même code et les incidents mettant fin à l’instance ainsi que sur les fins de non-recevoir. »

Ainsi, dans le cas présent, le juge de la mise en état a le pouvoir exclusif de traiter les questions procédurales soulevées par les parties.

Quelles sont les conséquences de l’absence de demande dans les conclusions d’incident ?

L’absence de demande dans les conclusions d’incident a pour conséquence que le juge de la mise en état ne peut pas se prononcer sur des points qui n’ont pas été formellement soumis à son appréciation.

L’article 5 du Code de procédure civile stipule :

« Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et uniquement sur ce qui est demandé. »

Dans cette affaire, la SARL ACAK et son liquidateur n’ont pas formulé de demande claire dans leurs conclusions d’incident, se limitant à une affirmation sur l’inopérance de l’assignation. Cela a conduit le juge à constater qu’il n’était saisi d’aucune demande, rendant ainsi leur position irrecevable.

Comment le principe dispositif influence les demandes des parties ?

Le principe dispositif impose que les demandes des parties soient clairement formulées dans le dispositif de leur assignation ou de leurs conclusions.

Ce principe est fondamental en droit français et est énoncé dans l’article 5 du Code de procédure civile, qui précise que :

« Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et uniquement sur ce qui est demandé. »

Dans le cas présent, la SARL ACAK et son liquidateur n’ont pas respecté ce principe en ne présentant aucune demande formelle, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de leurs prétentions devant le juge de la mise en état.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

Cet article dispose que :

« Dans toutes les instances, le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans cette affaire, la SCI [Adresse 6] a demandé des dommages-intérêts sur le fondement de cet article. Cependant, en raison de l’irrecevabilité des demandes de la SARL ACAK et de son liquidateur, le juge a débouté la SCI de sa demande, réservant ainsi les dépens sans accorder de somme au titre de l’article 700.

Tribunal judiciaire de Bobigny
Chambre 5/Section 2
AFFAIRE N° RG : N° RG 23/06684 – N° Portalis DB3S-W-B7H-X5HE
Ordonnance du juge de la mise en état
du 14 Novembre 2024

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE BOBIGNY
ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
DU 16 JANVIER 2025

Chambre 5/Section 2
Affaire : N° RG 23/06684 – N° Portalis DB3S-W-B7H-X5HE
N° de Minute : 25/25

DEMANDEUR

SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE [Adresse 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Aurore FAROIGI, avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : B1202

C/

DEFENDEURS

S.A.R.L. ACAK
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Abir BEN CHEIKH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,
vestiaire : 137

S.A.R.L. DATH
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Abir BEN CHEIKH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,
vestiaire : 137

Monsieur [E] [O] [B] en qualité de liquidateur de la société ACAK
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Me Abir BEN CHEIKH, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,
vestiaire : 137

JUGE DE LA MISE EN ÉTAT :

Madame Géraldine HIRIART, Juge de la mise en état assistée aux débats de Zahra AIT, Greffier.

DÉBATS :

Audience publique du 14 novembre 2024.

ORDONNANCE :

Prononcée en audience publique, par ordonnance contradictoire et en premier ressort par Madame Géraldine HIRIART, juge de la mise en état, assistée de Sakina HAFFOU, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 10 janvier 2008, la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE [Adresse 6], ci-après désignée SCI [Adresse 6], a conclu avec la société TM FAST FOOD un bail commercial portant sur les locaux désignés COMMERCE 4 sis [Adresse 2] et [Adresse 4] à [Localité 5] pour une durée de 12 ans à compter du 10 janvier 2008.

Par acte sous signature privée du 22 novembre 2010, la société TM FAST FOOD a cédé le fonds de commerce qu’elle exploitait dans les locaux loués à la société en formation SARL YHO.

Par acte sous signature privée du 22 juillet 2016, la SARL YHO a cédé ce fonds de commerce à la SARL ACAK, qui elle-même l’a cédé à la SARL DATH par acte sous signature privée du 17 février 2022.

Par acte de commissaire de justice du 05 septembre 2023, la SCI [Adresse 6] a signifié à M. [E] [O] [B] un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur des indemnités d’occupation impayées.

Par acte de commissaire de justice du 20 avril 2023, la SCI [Adresse 6] a assigné la SARL ACAK, M. [E] [O] [I] en qualité de liquidateur de la société ACAK et la SARL DATH devant le Tribunal judiciaire de BOBIGNY aux fins de nullité de la cession du fonds de commerce conclue le 10 février 2022 entre la société ACAK et la SARL DATH et de résiliation judiciaire aux torts de la société ACAK du bail commercial conclu le 10 janvier 2008.

Par conclusions d’incident, improprement intitulées « conclusions incidente », notifiées par le RPVA le 28 mars 2024, la SARL ACAK, M. [E] [O] [B] en qualité de liquidateur de la société ACAK et la SARL DATH demandent au Juge de la mise en état de :

« Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

I) In limine litis

L’assignation délivrée à l’encontre de la société ACAK et monsieur [O] [B] est inopérante,

En conséquent, toutes demandes confirmées à leur encontre seront frappées de nullité. ».

Par conclusions d’incident notifiées par le RPVA le 23 avril 2024, la SCI [Adresse 6] demande au Juge de la mise en état de :

« DEBOUTER la société ACAK, son liquidateur Monsieur [O] [B], la société DATH de l’intégralité de leurs demandes

JUGER que l’exception de nullité doit à peine d’irrecevabilité être soulevée simultanément et avant toute défense au fond.

JUGER irrecevable la demande de nullité de l’assignation délivrée à la société ACAK et à Monsieur [O] [B] DEBOUTER cette demande ayant été formée postérieurement à la défense au fond.

JUGER recevable l’assignation délivrée à l’encontre de la société ACAK et M. [O] [B]

CONDAMNER in solidum la SARL ACAK, Monsieur [O] [B] [E] et la SARL DATH à payer à la SCI [Adresse 6] 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ».

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige et des prétentions des parties aux conclusions susvisées.

A l’audience incident du 14 novembre 2024, à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 16 janvier 2024 et la décision sera rendue par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l’article 467 du code de procédure civile, la présente décision est contradictoire.

L’article 789 du code de procédure civile prévoit que le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 du même code et les incidents mettant fin à l’instance ainsi que sur les fins de non-recevoir.

De plus, l’article 5 du code de procédure civile dispose que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et uniquement sur ce qui est demandé.

En outre, en vertu du principe dispositif, les demandes des parties sont constituées par celles formulées dans le dispositif de leur assignation ou de leurs conclusions.

En l’espèce, la SARL ACAK, M. [E] [O] [B] en qualité de liquidateur de la société ACAK et la SARL DATH n’ont saisi le Juge de la mise en état d’aucune demande dans le dispositif de leurs conclusions d’incident notifiées par le RPVA le 28 mars 2024, d’aucune exception de procédure ni fin de non-recevoir, en se limitant à lui demander « Rejetant  toutes fins, moyens et conclusions contraires ».

L’affirmation « L’assignation délivrée à l’encontre de la société ACAK et monsieur [O] [B] est inopérante, En conséquent, toutes demandes confirmées à leur encontre seront frappées de nullité. » ne constitue pas une demande.

En conséquence, il y a lieu de constater que le Juge de la mise en état n’est saisi d’aucune demande dans le cadre de la présente instance d’incident.

Il y a donc lieu de réserver les dépens et il y a lieu de débouter la SCI [Adresse 6] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Géraldine HIRIART, juge de la mise en état, par ordonnance contradictoire insusceptible d’appel immédiat conformément à l’article 795 du code de procédure civile,

Constatons que dans leurs conclusions d’incident notifiées par le RPVA le 28 mars 2024, la SARL ACAK, [E] [O] [B] en qualité de liquidateur de la société SARL ACAK et la SARL DATH n’ont saisi le Juge de la mise en état d’aucune demande ;

Renvoyons l’affaire à l’audience de mise en état du vendredi 21 février 2025 à 10 heures pour les conclusions au fond de la SARL ACAK, de [E] [O] [B] en qualité de liquidateur de la société SARL ACAK et de la SARL DATH ;

Réservons les dépens ;

Déboutons la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE [Adresse 6] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait au Palais de Justice, le 16 janvier 2025

La minute de la présente décision a été signée par Madame Géraldine HIRIART, Juge de la mise en état, assistée de Madame Sakina HAFFOU, greffière, présente lors du prononcé.

LA GREFFIERE LA JUGE DE LA MISE EN ETAT

S. HAFFOU G. HIRIART


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon