L’Essentiel : La SCI CNK a signé un bail commercial avec Gourmet Burger le 12 mai 2023 pour un local à Arcueil. Après un incendie causé par une friteuse, Gourmet Burger a demandé des injonctions pour des travaux de 3 487 euros et la suspension des loyers. En réponse, la SCI CNK a contesté ces demandes, évoquant des loyers impayés de 30 616,10 euros. Le tribunal a finalement rejeté les demandes d’injonction et de suspension des loyers, chaque partie supportant ses propres frais. La décision est exécutoire de plein droit, soulignant la responsabilité de Gourmet Burger dans l’incendie.
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Contexte de l’affaireLa SCI CNK a signé un bail commercial le 12 mai 2023 avec la société Gourmet Burger pour un local situé à Arcueil. Cette dernière, spécialisée dans la restauration rapide, a pris possession des lieux, mais un incendie survenu deux mois plus tard a causé des dommages importants. Demande d’injonction de faireLe 3 décembre 2024, Gourmet Burger a assigné la SCI CNK et son assureur, la MUDETAF, en demandant des injonctions pour réaliser des travaux estimés à 3 487 euros, ainsi que l’autorisation de la mairie pour des travaux relatifs à un conduit d’extraction de fumées. La suspension du recouvrement des loyers a également été sollicitée jusqu’à la reprise de l’activité. Réponse de la SCI CNKLa SCI CNK a contesté les demandes de Gourmet Burger lors de l’audience du 17 décembre 2024, demandant le rejet des demandes et la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, avec une provision de 30 616,10 euros pour loyers impayés. Travaux et responsabilitéL’incendie, causé par une friteuse laissée sur le feu, a été pris en charge par la MUDETAF pour un montant total de 136 731 euros. Les travaux ont été achevés le 6 août 2024, à l’exception du revêtement mural, objet de la demande d’injonction. La responsabilité de l’incendie incombe à Gourmet Burger, sauf preuve de cas fortuit ou de force majeure. Conditions de la clause résolutoireLa SCI CNK a délivré un commandement de payer le 5 juin 2024 pour des loyers impayés, mais la bailleresse a reconnu des travaux de réfection. Les conditions pour invoquer la clause résolutoire ne sont pas remplies, car l’impossibilité d’exploiter le fonds de commerce a duré plus d’un an. Décision du tribunalLe tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu à référé sur les demandes d’injonction de faire et de suspension des loyers. Les demandes accessoires ont été rejetées, et chaque partie a conservé la charge des dépens. La décision est exécutoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour obtenir une injonction de faire selon les articles 834 et 835 du code civil ?L’article 834 du code civil stipule que : « Le créancier peut, en cas d’inexécution d’une obligation, demander en justice l’exécution forcée de celle-ci, sauf s’il est établi que cette exécution est impossible. » L’article 835 précise quant à lui que : « L’injonction de faire peut être ordonnée même en cas d’inexécution d’une obligation de faire, à moins que le débiteur ne prouve qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter son obligation. » Dans le cas présent, la société Gourmet Burger a demandé une injonction de faire à l’encontre de la SCI CNK pour réaliser des travaux de revêtement mural et d’extraction des fumées. Cependant, il a été établi que les travaux de revêtement mural ne relèvent plus de l’urgence, et que la responsabilité de l’incendie incombe à la preneuse, sauf preuve du contraire. Ainsi, les conditions d’urgence et d’impossibilité d’exécution ne sont pas remplies, ce qui justifie le rejet de la demande d’injonction de faire. Quelles sont les conditions d’application de la clause résolutoire selon l’article L. 145-41 du code de commerce ?L’article L. 145-41 du code de commerce dispose que : « Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. » Pour qu’une clause résolutoire soit applicable, le bailleur doit prouver sa créance et le défaut de paiement doit être manifestement fautif. Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit si les conditions suivantes sont remplies : 1. Le défaut de paiement est manifestement fautif. Dans cette affaire, la SCI CNK a délivré un commandement de payer pour des loyers dus, mais la question de la responsabilité pour l’incendie n’est pas tranchée. Cela signifie que les conditions d’application de la clause résolutoire ne sont pas remplies, ce qui conduit à un rejet de la demande de constatation de la clause résolutoire. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du code de procédure civile stipule que : « La partie qui succombe dans ses prétentions peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. » Dans le cas présent, aucune des parties n’a succombé dans ses demandes, ce qui signifie que chacune conserve la charge des dépens qu’elle a exposés. Les considérations d’équité ont également conduit à rejeter les demandes formées au titre de l’article 700. Ainsi, les parties doivent assumer leurs propres frais, et aucune indemnisation ne sera accordée au titre des frais de justice. Cette décision souligne l’importance de la réussite dans les prétentions pour bénéficier d’une éventuelle compensation des frais. |
ORDONNANCE DU : 30 Janvier 2025
DOSSIER N° : N° RG 24/01779 – N° Portalis DB3T-W-B7I-VUL7
CODE NAC : 54G – 9A
AFFAIRE : Société GOURMET BURGER C/ S.C.I. CNK, Compagnie d’assurance MUDETAF
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL
Section des Référés
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
LE JUGE DES REFERES : Madame Isabelle KLODA, Première vice-présidente
LE GREFFIER : Madame Stéphanie GEULIN, Greffier
PARTIES :
DEMANDERESSE
Société GOURMET BURGER, immatriculée au RCS de CRETEIL sous le n° 949 386 874, dont le siège social est sis 59 rue Berthollet – 94110 ARCUEIL
représentée par Me Yahia DENIDENI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1736
DEFENDERESSES
S.C.I. CNK, immatriculée au RCS de CRETEIL sous le n° 848 412 441, dont le siège social est sis 71 avenue Aristide Briand – 94110 ARCUEIL
représentée par Me Kévin HU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 0190
MUTUELLE CONFEDERALE D’ASSURANCE DES BURALISTES DE FRANCE – MUDETAF, SIRET : 350 403 804 00049, dont le siège social est sis 23-25 rue Chaptal – 75009 PARIS
représentée par Me Nicolas BARETY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0041
Débats tenus à l’audience du : 17 Décembre 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 23 Janvier 2025
Prorogé au 30 Janvier 2025
Ordonnance rendue par mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2025
Par acte sous seing privé du 12 mai 2023, la SCI CNK, assurée auprès de la Mutuelle confédérale d’assurance des buralistes de France (la MUDETAF), a donné à bail un local commercial situé au 59, rue Berthollet à Arcueil (94110) à la société Gourmet Burger, qui exploite une activité de restauration rapide.
Vu l’assignation à heure indiquée délivrée le 3 décembre 2024 par la société Gourmet Burger à la SCI CNK et à la Mutuelle confédérale d’assurance des buralistes de France (la MUTEDAF), sollicitant, au visa des articles 834 et 835 du code civil :
– qu’injonction soit délivrée à la bailleresse, aux frais de l’assureur de celle-ci, de réaliser les travaux correspondant au devis établi par la société ET2B pour un montant de 3 487 euros ;
– qu’injonction soit délivrée à la bailleresse de solliciter des services de la mairie l’autorisation de réaliser les travaux relatifs au conduit et à l’extracteur de fumées ;
– que la suspension du recouvrement des loyers soit ordonnée jusqu’à la reprise effective de son activité ;
Vu les conclusions de la SCI CNK, visées et soutenues à l’audience du 17 décembre 2024, sollicitant le rejet des demandes et, reconventionnellement, le constat de l’acquisition de la clause résolutoire avec toutes conséquences de droit, incluant une provision de 30616,10 euros au titre de la dette locative chiffrée au 4e trimestre inclus ;
Vu les conclusions de la MUTEDAF, visées et soutenues à l’audience du 17 décembre 2024, disant n’y avoir lieu à référé ;
Conformément aux articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l’acte introductif et aux écritures déposées par les parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur les demandes d’injonction de faire formées par la locataire contre la bailleresse :
Vu les articles 834 et 835 du code civil ;
Au cas présent, il est constant que deux mois après la prise de possession des lieux par la société Gourmet Burger, un incendie a eu lieu dans les locaux loués, causé par l’inflammation d’une friteuse laissée sur le feu par les préposés de la preneuse à bail.
La MUTEDAF, assurance de la bailleresse, a pris en charge les travaux, pour une somme totale de 136 731 euros.
Ceux-ci ont été achevés le 6 août 2024, à l’exception, en premier lieu, du revêtement mural, qui fait l’objet de la demande d’injonction de faire selon le devis établi par la société ET2B pour un montant de 3 487 euros.
Il est manifeste que ces travaux ne relèvent plus ni de l’urgence ni d’un dommage imminent au sens des textes susvisés et, au demeurant, que leur prise en charge par la bailleresse se heurte à une contestation sérieuse au regard de l’article 1733 du code civil, dont il ressort que le preneur répond de l’incendie, à moins qu’il ne prouve que l’incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine.
En second lieu, l’installation d’un nouveau système d’extraction des fumées conforme ne se heurte à aucune opposition de la bailleresse et il appartient à la société Gourmet Burger, au regard des articles 13.7, et 16.3 du bail, de réaliser les travaux de mise en conformité du conduit et de l’extracteur après avoir sollicité les autorisations administratives.
Il n’y a donc pas lieu à référé sur les demandes d’injonction de faire formées par la société Gourmet Burger.
Sur la demande relative à l’acquisition de la clause résolutoire et la demande de suspension des loyers :
L’article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Le bailleur, au titre d’un bail commercial, demandant la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire comprise dans le bail doit rapporter la preuve de sa créance.
Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d’une clause contenue à l’acte à cet effet, aux conditions cumulatives suivantes : que le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif ; que le bailleur soit, de toute évidence, en situation d’invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause ; que la clause résolutoire soit dénuée d’ambiguïté et ne nécessite pas interprétation.
Au cas présent, la SCI CNK a fait délivrer à la société Gourmet Burger un commandement de payer visant la clause résolutoire par acte d’huissier du 5 juin 2024, pour une somme de 15 733,77 euros, loyers et charges dus au 28 mai 2024, qui est resté infructueux.
Cependant, la bailleresse argue elle-même de travaux de réfection qui auraient été achevés en août 2024, alors que l’entière imputation du sinistre au preneur n’est pas tranchée et que l’impossibilité au moins partielle d’exploiter le fonds de commerce aura duré plus d’une année sur la période considérée.
Au regard de ces éléments, les conditions d’acquisition de la clause résolutoire en référé ne sont pas remplies.
Les mêmes motifs conduisent à dire qu’il n’y a pas lieu à référé sur la demande de suspension des loyers formée par la société Gourmet Burger.
Sur les demandes accessoires :
Aucune des parties ne succombant à l’instance au sens de l’article 696 du code de procédure civile, chacune d’elle conservera la charge des dépens par elle exposés.
Des considérations d’équité conduisent à rejeter les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant, après débats en audience publique, par ordonnance contradictoire rendue par voie de mise à disposition au greffe et en premier ressort,
DISONS n’y avoir lieu à référé sur l’ensemble des demandes ;
REJETONS les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
LAISSONS à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;
RAPPELONS que la présente décision est exécutoire de plein droit.
FAIT AU PALAIS DE JUSTICE DE CRETEIL, le 23 janvier 2025.
LE GREFFIER, LE JUGE DES REFERES
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