L’Essentiel : La SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE a consenti une promesse de vente à M. [R] [Y] pour trois lots de copropriété, devant être réalisée avant le 20 septembre 2019. Après expiration, M. [R] [Y] a mis en demeure la SCI, mais celle-ci ne s’est pas présentée à la signature, entraînant un procès-verbal de carence. M. [R] [Y] a alors assigné la SCI en justice pour obtenir réparation. Le tribunal a reconnu la responsabilité de la SCI, lui ordonnant de verser 1 353,92 euros à M. [R] [Y] pour divers préjudices, ainsi que 4 000 euros pour les frais irrépétibles.
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Contexte de l’affaireLa SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE a consenti, par acte authentique du 26 juin 2019, une promesse unilatérale de vente à M. [R] [Y] concernant trois lots de copropriété. Cette promesse devait être réalisée au plus tard le 20 septembre 2019. Mise en demeure et carenceAprès l’expiration de la promesse, M. [R] [Y] a mis en demeure la SCI de signer l’acte de vente par lettre recommandée le 4 octobre 2019. Un acte d’huissier a ensuite été délivré pour convoquer la SCI à une signature le 6 novembre 2019, mais aucun représentant de la SCI ne s’est présenté, entraînant un procès-verbal de carence. Procédures judiciairesM. [R] [Y] a assigné la SCI devant le tribunal judiciaire de Paris le 17 janvier 2020 pour obtenir réparation de son préjudice. En parallèle, la SCI et certains de ses associés ont assigné un autre associé pour obtenir une garantie contre d’éventuelles condamnations. Décès d’un associé et jonction des instancesLe décès de l’un des associés, M. [B] [I], a été constaté en janvier 2021, et le juge a ordonné la jonction des instances en novembre 2021. En janvier 2024, le juge a constaté le désistement d’un autre associé et a décidé que l’instance se poursuivrait entre M. [R] [Y] et la SCI. Demandes de M. [R] [Y]Dans ses conclusions de mars 2023, M. [R] [Y] a demandé des dommages et intérêts pour divers préjudices liés à la non-réalisation de la vente, incluant des frais de notaire, des loyers, et un préjudice moral, ainsi que des sommes spécifiques pour des dépenses engagées. Réponses de la SCI et de M. [S] [I]La SCI et M. [S] [I] ont contesté les demandes de M. [R] [Y], arguant que la vente avait été simplement reportée et que les préjudices allégués n’étaient pas justifiés. Ils ont également demandé à ce que M. [R] [Y] soit débouté de ses demandes. Décision du tribunalLe tribunal a reconnu que la SCI avait manqué à son obligation de signer l’acte de vente, entraînant un préjudice pour M. [R] [Y]. Il a condamné la SCI à verser des dommages et intérêts pour les cotisations d’assurance, les frais de notaire, et un préjudice moral, tout en rejetant d’autres demandes de M. [R] [Y]. Conséquences financièresLa SCI a été condamnée à payer un total de 1 353,92 euros à M. [R] [Y] pour les préjudices reconnus, ainsi qu’une somme de 4 000 euros pour les frais irrépétibles. Les autres demandes des parties ont été rejetées. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la promesse unilatérale de vente et ses implications juridiques ?La promesse unilatérale de vente est un contrat par lequel une partie, le promettant, s’engage à vendre un bien à une autre partie, le bénéficiaire, qui a la faculté d’accepter ou non cette vente dans un délai déterminé. Selon l’article 1589 du Code civil, « la promesse de vente est un contrat par lequel l’une des parties s’engage à vendre et l’autre à acheter ». Dans le cas présent, la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE a consenti à M. [R] [Y] une promesse unilatérale de vente, qui a expiré le 20 septembre 2019. Cette promesse stipule que la réalisation de la vente doit se faire soit par la signature de l’acte authentique, soit par la levée d’option par le bénéficiaire dans le délai imparti. La levée d’option, si elle est effectuée, transforme la promesse en vente définitive. Il est donc essentiel que le bénéficiaire respecte les conditions de la promesse pour pouvoir revendiquer ses droits en cas de non-exécution par le promettant. Quelles sont les conséquences de l’inexécution de la promesse de vente ?L’inexécution de la promesse de vente entraîne des conséquences juridiques importantes. Selon l’article 1231-1 du Code civil, « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ». Dans cette affaire, M. [R] [Y] a constaté que la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE n’a pas signé l’acte de vente malgré la mise en demeure et la sommation de se présenter chez le notaire. Cette carence constitue une inexécution contractuelle, permettant à M. [R] [Y] de demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Il est donc fondé à réclamer une indemnisation pour les pertes financières et morales résultant de cette inexécution. Quels préjudices M. [R] [Y] peut-il revendiquer en raison de l’inexécution de la promesse de vente ?M. [R] [Y] peut revendiquer plusieurs types de préjudices en raison de l’inexécution de la promesse de vente. L’article 1231-1 du Code civil précise que le débiteur doit indemniser le créancier pour les dommages causés par l’inexécution de l’obligation. Dans ce cas, M. [R] [Y] a allégué des préjudices tels que : – Les frais liés au déblocage de ses plans d’épargne salariale, Cependant, il lui incombe de prouver que ces préjudices sont directement liés à la défaillance de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE. Le tribunal a examiné chaque demande et a statué sur leur recevabilité et leur lien de causalité avec l’inexécution contractuelle. Comment la levée d’option a-t-elle été validée dans cette affaire ?La levée d’option est un acte par lequel le bénéficiaire de la promesse de vente manifeste son intention d’acheter le bien. Selon les stipulations de la promesse, la levée d’option doit être effectuée dans le délai imparti et accompagnée du versement des sommes dues. Dans cette affaire, M. [R] [Y] a levé l’option en versant les sommes nécessaires au notaire avant la date limite du 20 septembre 2019. Le tribunal a constaté que M. [R] [Y] avait bien respecté les conditions de la promesse, comme l’indiquent les relevés de compte et le procès-verbal de carence. Ainsi, la levée d’option a été jugée valide, transformant la promesse en vente définitive, ce qui engageait la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE à signer l’acte de vente. Quelles sont les implications de la carence de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE ?La carence de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE, qui n’a pas signé l’acte de vente malgré la mise en demeure, a des implications juridiques significatives. Selon l’article 1103 du Code civil, « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». En ne respectant pas son obligation contractuelle, la SCI a manqué à ses engagements, ce qui ouvre la voie à des demandes d’indemnisation de la part de M. [R] [Y]. Le procès-verbal de carence, établi par le notaire, atteste de cette défaillance et permet à M. [R] [Y] de revendiquer des dommages et intérêts pour les préjudices subis. La SCI est donc responsable des conséquences de son manquement, ce qui justifie la condamnation à indemniser M. [R] [Y]. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :
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2ème chambre civile
N° RG 20/02883 –
N° Portalis 352J-W-B7E-CR4FB
N° MINUTE :
Assignation du :
17 Janvier 2020
JUGEMENT
rendu le 09 Janvier 2025
DEMANDEUR
Monsieur [R] [Y]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Maître Carole MESSECA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C1157
DÉFENDEURS
S.C.I. DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE
[Adresse 2]
[Localité 5]
Monsieur [S] [I]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Tous les deux représentés ensemble par Maître Dominique JAMOIS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B0525
Décision du 09 Janvier 2025
2ème chambre civile
N° RG 20/02883 – N° Portalis 352J-W-B7E-CR4FB
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Claire ISRAEL, Vice-Présidente, statuant en juge unique.
Assistée de Madame Adélie LERESTIF, Greffière à l’audience et de Madame Audrey HALLOT, Greffier lors de la mise à disposition,
DÉBATS
A l’audience du 18 Novembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu le 09 Janvier 2025.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au Greffe
Contradictoire et en premier ressort
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Par acte authentique du 26 juin 2019, la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE, dont les associés étaient MM. [T] [I], [S] [I] et [B] [I], lequel était également son gérant, a consenti à M. [R] [Y] une promesse unilatérale de vente expirant le 20 septembre 2019 à 16h portant sur 3 lots de copropriété situés [Adresse 1] et [Adresse 4] (92).
Par lettre recommandée avec avis de réception du 4 octobre 2019, le conseil de M. [R] [Y] a mis en demeure la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE de signer l’acte de vente, cette mise en demeure ayant également été dénoncée au gérant et à chacun des associés.
Par acte d’huissier du 22 octobre 2019, M. [R] [Y] a sommé la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE, représentée par son gérant, d’avoir à comparaître le 6 novembre 2019 en l’étude de Maître [K], notaire, aux fins de signer l’acte authentique de vente.
Le 6 novembre 2019, le notaire a dressé un procès-verbal de carence en l’absence de tout représentant de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE.
Par exploit d’huissier en date du 17 janvier 2020, M. [R] [Y] a fait assigner la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins qu’elle soit condamnée à l’indemniser de son préjudice.
Par exploit d’huissier en date du 29 octobre 2020, la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE, M. [B] [I] et M. [T] [I] ont fait assigner M. [S] [I] aux fins qu’il soit condamné à les relever et garantir de toutes condamnations à leur encontre dans la première instance.
[B] [I] est décédé le 13 janvier 2021.
Le 29 novembre 2021, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de cette dernière instance à l’instance principale.
Par ordonnance du 17 octobre 2022, le juge de la mise en état a constaté le décès d’[B] [I], le désistement de M. [T] [I] de l’instance engagée à l’encontre de M. [S] [I] et l’extinction de l’instance entre eux et dit que l’instance se poursuit entre M. [R] [Y] d’une part et M. [S] [I] et la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIÈRE d’autre part.
Par ordonnance du 18 janvier 2024, le juge de la mise en état a rejeté une demande de communication de pièces de M. [S] [I] et de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE et a ordonné la clôture partielle de l’instruction à leur égard.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 20 mars 2023, M. [R] [Y] demande au tribunal de :
– RECEVOIR Monsieur [R] [Y] en l’intégralité de ses fins, demandes et conclusions,
– JUGER que le fait pour la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE de ne pas avoir libéré le bien promis à la vente et de ne pas s’être présentée aux rendez-vous fixés en vue de la signature de l’acte de vente constitue une inexécution contractuelle en application de l’acte authentique du 26 juin 2019,
– JUGER que cette inexécution contractuelle a causé à Monsieur [Y] divers préjudices justifiant le versement de dommages et intérêts,
EN CONSEQUENCE,
– CONDAMNER la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE à verser à Monsieur [R] [Y] les sommes suivantes :
2.291,76 euros, au titre du déblocage des plans d’épargne salariale, 401,10 euros, au titre des échéances du prêt, 169,54 euros, au titre des cotisations d’assurance du prêt, 723,04 euros, au titre des sommes versées aux notaire et huissier de justice, 15.455,64 euros, au titre des loyers assumés par le bénéficiaire de la promesse après la non-réalisation de la vente, 25.000 euros au titre du préjudice moral,
– ORDONNER la capitalisation des intérêts légaux de la décision à intervenir à compter de son prononcé,
– CONDAMNER solidairement la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE et Monsieur [S] [I] à verser à Monsieur [R] [Y] la somme de 4.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– CONDAMNER la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 13 février 2023, M. [S] [I] et la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE demandent au tribunal de :
– DEBOUTER Monsieur [R] [Y] de l’ensemble ses demandes, fins, conclusions et prétentions contraires aux présentes conclusions ;
– CONSTATER le désistement de Monsieur [T] [I] quant aux demandes qu’il avait formées à l’encontre de Monsieur [S] [I], précédemment appelé en garantie ;
– DEBOUTER Monsieur [R] [Y] de l’intégralité de ses demandes au titre de la condamnation de la SCI DU 33 RUE DU CAMPAGNE PREMIERE au paiement de sommes diverses, autant que de dommages et intérêts ;
– CONDAMNER Monsieur [R] [Y] à payer à la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
– CONDAMNER Monsieur [R] [Y] à payer à Monsieur [S] [I] la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
– CONDAMNER Monsieur [R] [Y] aux entiers dépens, et DIRE que Maître Dominique JAMOIS, représentant la SELARL CABINET MARS VIGILA, Avocat, pourra recouvrer lesdits dépens conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 février 2024 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 18 novembre 2024.
Il sera rappelé à titre liminaire que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile dès lors qu’elles ne confèrent pas de droits spécifiques à la partie qui les requiert. Elles ne donneront en conséquence pas lieu à mention au dispositif.
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Sur la demande de dommages et intérêts
M. [R] [Y] demande sur le fondement des dispositions de l’article 1231-1 du code civil, la condamnation de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE à lui verser les sommes suivantes :
– 2 291,76 euros, au titre du déblocage des plans d’épargne salariale,
– 401,10 euros, au titre des échéances du prêt,
– 169,54 euros, au titre des cotisations d’assurance du prêt,
– 723,04 euros, au titre des sommes versées aux notaire et huissier de justice,
– 15 455,64 euros, au titre des loyers assumés par le bénéficiaire de la promesse après la non-réalisation de la vente,
– 25 000 euros au titre du préjudice moral.
Il développe également des moyens au soutien d’une demande de 1 300 euros de dommages et intérêts au titre d’une étude réalisée en vue de travaux mais dès lors qu’il ne forme aucune demande en ce sens au dispositif de ses conclusions, le tribunal n’en est pas saisi en application des dispositions de l’article 768 du code civil et il n’y sera dès lors pas répondu.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :
– le 18 septembre 2019, soit la veille du rendez-vous de signature de l’acte authentique de vente et avant la date limite du 20 septembre 2021 prévue au contrat, il a levé l’option en versant entre les mains du notaire, les sommes correspondant à son apport personnel et aux sommes empruntées,
– il a assuré le bien après de la société ALLIANZ COURTAGE, avant de constater, le lendemain, lors de la dernière visite jour de la signature, que M. [S] [I] n’avait pas libéré les lieux et entendait s’opposer à la vente,
– malgré un report de la date de signature, une première mise en demeure puis la délivrance d’une sommation de se présenter pour signer l’acte authentique, la vente ne s’est pas réalisée en raison de la carence de la promettante et un procès-verbal de carence a été dressé,
– seul un représentant de la société pouvait signer l’acte de vente, ce qui n’était en tout état de cause pas le cas de M. [Z] [J], mandataire prétendu de M. [S] [I],
– M. [S] [I] est responsable du blocage, alors que le bien devait être libre de toute occupation et la mésentente entre les associés de la société ne le concernait pas,
– le manquement fautif de la promettante lui a causé plusieurs préjudices qui doivent être réparés.
S’agissant des différents préjudices allégués, il précise que :
– il a débloqué ses plans d’épargne salariales (PEE et PERCO) pour financer l’acquisition et a ainsi été assujetti à la somme de 2 291,76 euros de prélèvements sociaux ; il n’a pas acquis un autre bien concomitamment contrairement à ce qu’affirment les défendeurs mais au mois d’octobre 2020 et il a dû louer un appartement entre temps,
– il a obtenu un prêt pour financer l’acquisition et a versé deux mensualités au titre des mois d’octobre et novembre 2019 pour un montant total de 401,10 euros,
– il a également versé des cotisations d’assurance pour le prêt susmentionné pour la période du 9 septembre 2019 au 31 décembre 2019 pour un montant de 169,54 euros,
– il a dû exposer divers frais de notaire et huissier pour un montant de 723,04 euros,
– il a dû continuer d’exposer des loyers pour se loger à compter du mois d’octobre 2019 jusqu’en septembre 2020, pour un montant de 15 455,64 euros,
– enfin, il a consacré du temps et de l’énergie pour ce projet d’acquisition puis dans la procédure, en vain, alors que la promettante s’était engagée à lui vendre le bien, ce qui lui cause un préjudice moral.
La SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE et M. [S] [I] concluent au rejet de ces demandes et font valoir en défense que :
– M. [S] [I] ne s’est pas opposé à la conclusion de la vente laquelle a simplement été reportée car il n’avait pas eu le temps de libérer les lieux,
– M. [R] [Y] ne démontre pas le refus de M. [S] [I] de quitter les lieux et conclure la vente, le procès-verbal de carence étant établi sur les seules affirmations de M. [Y],
– Les conseils de M. [S] [I] ont simplement demandé la suspension de la vente dans l’attente de clarifier la situation spécifique résultant du fait que le procès-verbal d’assemblée générale de la société autorisant la vente, du 4 juin 2019 était un faux en écritures, imitant sa signature,
– Il avait néanmoins l’intention de vendre le bien et avait confié pouvoir à M. [Z] [J] pour le représenter le 6 novembre 2019, lequel s’est présenté ce jour là et a quitté les lieux en l’absence de MM. [T] et [B] [I], la vente ne pouvant être signée,
– M. [R] [Y] n’a pas levé l’option et ne verse aux débats aucun relevé de compte émanant du notaire, prouvant qu’il a versé le prix de vente et les frais,
– le procès-verbal de carence ne mentionne pas la levée d’option,
– la pièce désignée comme étant le « procès-verbal de carence » du 6 novembre 2019 s’apparente plutôt à un brouillon ou projet d’acte et est dénuée de toute valeur probante,
– Les demandes financières sont fantaisistes et les préjudices allégués ne sont pas démontrés,
– M. [R] [Y] a acquis un autre bien immobilier, le déblocage de la participation de M. [Y] étant donc en tout état de cause nécessaire,
– La promesse de vente ne comportait pas de condition suspensive d’obtention d’un prêt, de sorte qu’il ne peut prétendre avoir subi un préjudice en raison du paiement de deux échéances d’un crédit, lequel en tout état de cause a été utilisé pour financer une autre acquisition,
– les sommes demandées au titre des frais d’huissier et notaire sont révélatrices du caractère abusif des demandes de M. [Y], la somme de 500 euros correspondant à la provision sur frais qui lui aura été restituée et non aux frais d’acte du notaire et aucun relevé de compte officiel n’étant produit ; les frais du procès-verbal de carence ne sont pas dus dès lors que M. [Y] mentionne lui-même renoncer à la vente,
– les demandes au titre des loyers ne sont pas justifiées, aucun bail n’étant produit et en tout état de cause, même si la vente avait eu lieu, M. [Y] n’aurait pu entrer immédiatement dans les lieux car il envisageait d’importants travaux,
– la demande au titre du préjudice moral est extravagante et non démontrée.
Sur ce,
Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L’article 1231-1 du code civil dispose par ailleurs que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
En l’espèce, la promesse unilatérale de vente du 26 juin 2019 était consentie pour une durée expirant le 20 septembre 2019 à 16 heures.
Elle prévoit que sa réalisation aura lieu :
– « Soit par la signature de l’acte authentique constatant le caractère définitif de la vente (…),
– Soit par la levée d’option faite par le BENEFICIAIRE à l’intérieur de ce délai. La levée d’option par le BENEFICIAIRE, si elle est effectuée, transformera la promesse unilatérale de vente en vente. (…) Dans ce dernier cas, la signature de la vente devra intervenir au plus tard dans les quinze jours ouvrés suivant l’expiration de la durée de validité de la promesse, et le transfert de propriété restera reporté au jour de la signature dudit acte de vente et du paiement du prix de vente et des frais. Cette levée d’option sera effectuée par tous moyens auprès du notaire rédacteur par le BENEFICIAIRE et devra être accompagnée du versement par virement sur le compte dudit notaire d’une somme correspondant :
au prix stipulé payé comptant déduction faite de l’indemnité d’immobilisation virtuellement versée en exécution des présentes (étant précisé que, pour la partie du prix payé au moyen d’un emprunt, il convient de justifier de la disponibilité fonds), à la provision sur frais d’acte de vente et de prêt éventuel, emprunt, à l’éventuelle commission d’intermédiaire, et de manière générale de tous comptes et proratas ».
Par ailleurs, il est prévu en page 8 de la promesse qu’en cas de levée d’option valablement effectuée par le bénéficiaire dans le délai d’expiration de la promesse et en l’absence de signature de l’acte de vente dans les quinze jours, la partie la plus diligente mettra l’autre partie en demeure, par acte d’huissier, d’avoir à comparaître en l’étude du notaire chargé de recevoir l’acte de vente à l’effet de signer cet acte et que si, malgré la mise en demeure, l’une des parties refusait ou s’abstenait de régulariser l’acte de vente le jour indiqué dans la mise en demeure, il sera procédé à l’établissement d’un procès-verbal, dans les termes duquel il sera constaté le défaut du promettant ou du bénéficiaire.
Enfin, il est précisé que : « En cas de défaut du PROMETTANT, le BENEFICIAIRE pourra à son choix dans le procès-verbal :
Soit faire part de son intention de poursuivre l’exécution de la vente indépendamment de son droit de réclamer une juste indemnisation ;Soit encore faire constater que la vente n’est pas exécutée, cette constatation résultant du défaut prononcé contre le PROMETTANT dans le procès-verbal, et déclarer sa volonté de considérer la vente comme résolue de plein droit. Le BENEFICIAIRE reprendra alors purement et simplement sa liberté indépendamment de son droit de réclamer une juste indemnisation de son préjudice. »
Il est constant que l’acte authentique de vente n’a pas été signé par les parties.
Aux termes du procès-verbal de carence du 6 novembre 2019, lequel ne constitue nullement un brouillon et est signé tant du notaire que de M. [R] [Y], Maître [C] [K], notaire, relève que :
« Les conditions relatives à la réalisation de la vente sont à ce jour toutes réalisées et les pièces nécessaires à la constatation authentique de cette réalisation obtenues et annexées. Une date de signature de la vente a été fixée au 19 septembre 2019 à 17h30 en l’Etude. Le prix et les frais ont été versés par I’ACQUEREUR, requérant pour ce jour. Le projet d’acte de vente a été transmis aux parties, et se trouve annexé aux présentes. »
Les mentions du procès-verbal de carence sont corroborées d’une part par le relevé de compte de la SARL JACQUIN et Associés Notaires en date du 16 janvier 2020 et d’autre part par le relevé de compte BOURSORAMA Banque de M. [R] [Y] en date du 1er octobre 2019 et le courrier de BOURSORAMA Banque du 19 septembre 2019, desquels il ressort que M. [R] [Y] a bien versé à l’étude notariale, les 17 et 18 septembre 2019, les sommes correspondant au prix de vente (provenant tant du prêt que de son apport personnel), aux frais d’acte de vente et de prêt, soit la somme totale de 560 700 euros.
Il est donc démontré que M. [R] [Y] a valablement levé l’option avant le 20 septembre 2019, date d’expiration de la promesse.
Il est constant que l’acte authentique de vente n’a pas été signé par les parties dans les quinze jours de l’expiration de la promesse, en dépit d’une mise en demeure adressée le 4 octobre 2019 à cette fin, par M. [R] [Y] à la promettante.
Enfin, il résulte du procès-verbal de carence que malgré la sommation qui lui avait été délivrée le 22 octobre 2019 d’avoir à se présenter en l’étude du notaire pour signer l’acte authentique de vente le 6 novembre 2019 conformément aux prévisions contractuelles, la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE ne s’est pas présentée.
Le fait que M. [S] [I] ait pu être éventuellement représenté à cette date par M. [Z] [J] est indifférent dès lors que ce dernier n’aurait en tout état de cause pas pu signer l’acte de vente, seul le gérant de la société promettante ayant le pouvoir de la représenter pour cet acte.
Il est donc établi que la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE, promettante, a manqué à son obligation contractuelle de signer l’acte de vente alors que le bénéficiaire avait valablement levé l’option et l’avait sommée de se présenter à cette fin.
En conséquence, M. [R] [Y] est fondé, en application des stipulations contractuelles, à réclamer l’indemnisation de son préjudice, même s’il ne demande pas la réalisation forcée de la vente, ce qu’il n’a nullement l’obligation de faire dès lors que la non-réalisation de la vente est imputable à la promettante.
Il lui appartient toutefois de démontrer que les préjudices qu’il allègue sont en lien de causalité avec le manquement de la société promettante.
– Sur le préjudice résultant du déblocage du plan d’épargne salariale
S’agissant tout d’abord de sa demande d’indemnisation au titre des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti en débloquant ses plans d’épargne salariale pour financer l’acquisition qui n’a pas abouti, M. [R] [Y] justifie en effet du rachat le 26 juin 2019 de deux plans d’épargne salariale (PEE et PERCO) pour un montant total de 111 883,18 euros ayant généré des prélèvements sociaux de 2 291,76 euros.
S’il est démontré que cette opération de rachat était justifiée par l’acquisition envisagée du bien de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE et s’il a été démontré que cette acquisition n’a pas abouti par la faute de cette dernière, M. [R] [Y] reconnaît néanmoins qu’il a acquis dans l’année qui a suivi un autre bien immobilier de sorte qu’il a utilisé la somme débloquée pour cette acquisition. Il était donc en tout état de cause débiteur à l’égard de l’Etat au titre des cotisations sociales dès lors qu’il devait débloquer les sommes épargnées pour financer son acquisition immobilière et cette dette n’a pas pour cause le manquement de la promettante à ses obligations.
Sa demande d’indemnisation à ce titre sera donc rejetée.
Sur les échéances du prêt et l’assurance du prêt
M. [R] [Y] justifie au moyen de ses relevés bancaires avoir remboursé deux échéances du prêt obtenu auprès de la société BOURSORAMA Banque, soit les sommes de 196,77 euros le 21 octobre 2019 et 203,33 euros le 19 novembre 2019.
Il produit également un appel de cotisations d’assurance dudit prêt de la société APRIL ASSURANCES d’un montant de 169,54 euros au titre de l’année 2019 et justifie par ses relevés bancaires, du paiement des cotisations pour les mois de septembre, octobre et novembre 2019, soit une somme totale de 130,88 euros.
Enfin, il justifie avoir remboursé intégralement le prêt accordé par la société BOURSORAMA Banque le 19 novembre 2019, ce qui démontre qu’il n’a pas acquis un autre bien immobilier avec cet emprunt, contrairement à ce qu’avancent les défendeurs.
Il en résulte que ce n’est qu’en raison de la défaillance de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE que M. [R] [Y] a dû payer les intérêts sur deux échéances de son prêt et les cotisations d’assurances, jusqu’à sa renonciation à la vente, après établissement du procès-verbal de carence.
La SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE sera donc condamnée à lui verser à titre de dommages et intérêts la somme de 130,88 euros au titre des cotisations d’assurance, avec intérêts au taux légal.
En revanche, dès lors que le demandeur ne justifie pas du montant des intérêts compris dans les échéances de remboursement du prêt à défaut de produire le tableau d’amortissement dudit prêt, sa demande à ce titre sera rejetée à défaut pour le tribunal de pouvoir évaluer le préjudice subi, seuls les intérêts pouvant être indemnisés, le remboursement d’un capital qui ne lui appartenait pas ne constituant pas un préjudice indemnisable.
– Sur les sommes versées aux notaire et huissier de justice
M. [R] [Y] justifie d’une part du paiement le 6 novembre 2019 de la somme de 125 euros au titre de l’établissement du procès-verbal de carence au moyen du relevé de l’étude notariale et de son relevé de compte bancaire et d’autre part du paiement de la somme de 98,04 euros au titre de la sommation à comparaître, par la production de la facture du 23 octobre 2019 de Maître [D] [L], huissier de justice.
En revanche, il ne justifie pas du paiement d’une somme de 500 euros de frais d’acte qui serait en lien avec la carence de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE de sorte que celle-ci ne sera condamnée qu’au paiement de la somme de 223,04 euros, avec intérêts au taux légal, au titre des sommes versées par M. [R] [Y] au notaire et à l’huissier de justice par suite du manquement de la promettante à son obligation de signer l’acte authentique de vente.
Sur les loyers acquittés après la non-réalisation de la vente,
M. [R] [Y] invoque le paiement de loyers d’octobre 2019 à septembre 2020, indiquant qu’il n’a pu acquérir un autre bien immobilier qu’en octobre 2020, sans produire au demeurant l’acte de vente annoncé dans son bordereau de pièces.
Il est constant que M. [R] [Y] a entendu acquérir le bien aux fins de l’habiter et il a été jugé ci-dessus qu’il en a été empêché par le manquement de la promettante, laquelle a refusé de signer l’acte authentique de vente.
Il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir poursuivi l’exécution forcée de la vente dès lors que la promesse lui permettait d’opter pour la résolution de la vente et l’indemnisation de ses préjudices, étant observé qu’une action en exécution forcée de la vente aurait en tout état de cause été d’une certaine durée, durant laquelle il aurait été contraint de se loger.
La SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE ne démontre pas que les travaux envisagés par l’acquéreur auraient retardé son installation.
C’est donc bien en raison de la défaillance de la promettante à compter de l’expiration du délai de 15 jours à compter de l’expiration de la promesse, soit à compter du 4 octobre 2019, que M. [R] [Y] a été contraint d’exposer des loyers pour se loger, alors qu’il aurait pu à cette date être propriétaire du bien objet de la promesse et l’habiter.
Toutefois, dans cette hypothèse, M. [R] [Y] aurait dû rembourser les échéances de son prêt puisqu’il est constant qu’il finançait l’acquisition du bien au moins pour partie au moyen d’un emprunt.
Or, à défaut de produire le tableau d’amortissement du prêt et partant, de justifier que le montant de l’échéance qu’il aurait dû rembourser mensuellement était inférieure au montant du loyer qu’il a dû exposer pour se loger, M. [R] [Y] ne démontre pas que la faute de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE lui a causé un préjudice financier.
Sa demande au titre des loyers qu’il a dû exposer sera donc rejetée.
Sur le préjudice moral
Enfin, il n’est guère contestable que les démarches dont M. [R] [Y] justifie pour l’obtention d’un prêt, ainsi que les démarches amiables en vue de faire aboutir la vente alors que M. [S] [I] se maintenait dans les lieux puis la présente procédure ont occasionné au demandeur, en raison de l’énergie et du temps qu’il a dû y consacrer et les tracas inévitables que cela a généré pour lui, un préjudice moral qu’il est juste d’indemniser par l’allocation de la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal.
Conformément à l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts sera ordonnée.
Sur les demandes accessoires
La SCI DU 33 CAMPAGNE PREMIERE, partie succombant à l’instance, sera condamnée aux dépens.
Elle sera également condamnée au paiement de la somme de 4 000 euros à M. [R] [Y] au titre des frais irrépétibles, conformément à l’article 700 du code de procédure civile.
Les autres demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
Il sera enfin rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Condamne la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE à payer à M. [R] [Y] les sommes suivantes à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement :
– 130,88 euros au titre des cotisations d’assurance du prêt bancaire,
– 223,04 euros au titre des frais de notaire et d’huissier,
– 1 000 euros au titre du préjudice moral,
Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière,
Rejette le surplus des demandes de dommages et intérêts de M. [R] [Y],
Condamne la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE aux dépens,
Condamne la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE à payer à M. [R] [Y], la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette la demande de M. [R] [Y] dirigée contre M. [S] [I] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes de la SCI DU 33 RUE CAMPAGNE PREMIERE et M. [S] [I] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 09 Janvier 2025
La Greffière La Présidente
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