L’Essentiel : M. [N] [F] a acquis une maison d’habitation pour 285 000 euros, mais a découvert, après mesurage, que la superficie était inférieure à celle indiquée dans l’acte de vente. En mars 2022, il a réclamé une indemnisation à la société SCI SRMB Emeraude. Après avoir assigné la société et le Cabinet [Z] en justice, le tribunal a rejeté ses demandes, considérant que les superficies étaient approximatives et que la loi Carrez ne s’appliquait pas. M. [N] [F] a été condamné aux dépens, devant verser 2 000 euros aux défendeurs.
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Vente de la maisonPar acte authentique du 19 avril 2021, la société SCI SRMB Emeraude a vendu à M. [N] [F] une maison d’habitation située à [Localité 8] pour un prix de 285 000 euros. L’acte identifiait le bien comme comprenant plusieurs appartements de différentes superficies. Mesurage et réclamationLe 31 octobre 2021, M. [N] [F] a fait mesurer la superficie de son bien, révélant des superficies inférieures à celles mentionnées dans l’acte de vente. Par lettre recommandée du 16 mars 2022, il a demandé une indemnisation à la venderesse pour la différence de superficie. Assignation en justiceLe 12 avril 2022, M. [N] [F] a assigné la société SCI SRMB Emeraude et le Cabinet [Z] devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant une condamnation solidaire à lui verser 78 770,51 euros. Il a également formulé des demandes subsidiaires concernant le manquement à l’obligation d’information et de conseil. Réponses des défendeursLa société SCI SRMB Emeraude a demandé le rejet des demandes de M. [N] [F], arguant que les superficies mentionnées étaient approximatives et qu’elle n’était pas un vendeur professionnel. Le Cabinet [Z] a également contesté la demande, affirmant qu’il n’avait pas de responsabilité dans la mesure des superficies. Arguments de M. [N] [F]M. [N] [F] a soutenu que la différence de superficie était significative et que la mention « environ » ne pouvait justifier une telle disparité. Il a également évoqué un dol et une faute lourde de la part de la venderesse et du Cabinet [Z]. Décision du tribunalLe tribunal a rejeté la demande de M. [N] [F] pour la réduction du prix de vente, considérant que les superficies étaient indiquées de manière approximative et que la loi Carrez n’était pas applicable. La demande de dommages et intérêts contre le Cabinet [Z] a également été rejetée. Conséquences financièresM. [N] [F] a été condamné aux dépens et à verser 2 000 euros à la société SCI SRMB Emeraude et au Cabinet [Z] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée des articles 1616 et 1619 du Code civil concernant la réduction du prix de vente pour moindre mesure ?Les articles 1616 et 1619 du Code civil stipulent que le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu’elle est portée au contrat. En cas de mesure, l’acquéreur peut demander une diminution du prix uniquement si la différence entre la mesure réelle et celle exprimée au contrat est supérieure à un vingtième. L’article 1616 précise : * »Le vendeur est tenu de délivrer la chose dans l’état où elle se trouve au moment de la vente. »* L’article 1619 ajoute : * »Lorsque la vente commence par la mesure, ou par la désignation de l’objet vendu suivie de la mesure, l’expression de cette mesure ne peut donner lieu, en faveur de l’acquéreur, à diminution du prix pour moindre mesure, qu’autant que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d’un vingtième en moins. »* Ainsi, pour que l’acquéreur puisse revendiquer une réduction de prix, il doit prouver que la superficie réelle est inférieure de plus d’un vingtième à celle mentionnée dans l’acte de vente. En l’espèce, M. [N] [F] n’a pas réussi à démontrer que la superficie réelle était inférieure de plus d’un vingtième à celle mentionnée dans l’acte, ce qui a conduit à un rejet de sa demande de réduction du prix. Quelles sont les implications de la loi Carrez dans le cadre de la vente immobilière ?La loi Carrez, issue de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, impose des règles spécifiques concernant la mesure des superficies dans le cadre des ventes d’immeubles en copropriété. Cependant, cette loi ne s’applique pas aux ventes de biens qui ne sont pas soumis au statut de la copropriété. L’article 46 de la loi Carrez stipule : * »La superficie privative d’un lot de copropriété est la somme des surfaces de plancher des locaux clos et couverts. »* Dans le cas présent, le tribunal a constaté que le bien vendu n’était pas soumis au statut des immeubles en copropriété, ce qui signifie que les dispositions de la loi Carrez ne s’appliquent pas. Par conséquent, le mesurage effectué par la société A.I.R, qui se basait sur les critères de la loi Carrez, n’avait pas de valeur probante pour établir une superficie erronée dans le cadre de la vente. Ainsi, la superficie mentionnée dans l’acte de vente, qui était approximative, ne pouvait pas être comparée avec les mesures effectuées selon la loi Carrez. Comment la responsabilité du Cabinet [Z] est-elle engagée en matière de devoir d’information et de conseil ?La responsabilité du Cabinet [Z] peut être engagée sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, qui impose une obligation de réparation en cas de faute ayant causé un préjudice. Pour établir cette responsabilité, il faut prouver une faute, un préjudice et un lien de causalité. L’article 1240 du Code civil dispose : * »Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »* Dans cette affaire, M. [N] [F] a soutenu que le Cabinet [Z] avait manqué à son devoir d’information et de conseil en ne vérifiant pas la superficie réelle du bien. Cependant, le tribunal a constaté que le Cabinet [Z] n’était pas tenu de réaliser des mesures de la superficie, car il se basait sur les informations fournies par la venderesse. De plus, le tribunal a noté que les surfaces mentionnées dans l’acte de vente étaient indicatives et que le prix avait été fixé de manière globale, sans que la superficie soit un élément déterminant. Ainsi, le Cabinet [Z] n’a pas été jugé responsable d’un manquement à son obligation d’information ou de conseil, et la demande de dommages et intérêts de M. [N] [F] a été rejetée. Quelles sont les conséquences des clauses d’exclusion de garantie dans le contrat de vente ?Les clauses d’exclusion de garantie dans un contrat de vente peuvent limiter la responsabilité du vendeur concernant la superficie ou la contenance du bien vendu. Ces clauses doivent être clairement stipulées dans l’acte de vente pour être opposables à l’acquéreur. Dans le cas présent, l’acte de vente contenait une clause stipulant : * »Le vendeur ne confère aucune garantie de contenance du terrain ni de superficie des constructions. »* Cette clause a été déterminante dans le jugement, car elle a permis à la société SCI SRMB Emeraude de se défendre contre la demande de M. [N] [F]. Le tribunal a considéré que, même si la superficie mentionnée était inférieure à la superficie réelle, la clause d’exclusion de garantie était applicable, car la société SCI SRMB Emeraude n’était pas considérée comme un vendeur professionnel au sens strict. Ainsi, la demande de M. [N] [F] a été rejetée, car il ne pouvait pas revendiquer une réduction de prix en raison de la clause d’exclusion de garantie présente dans l’acte de vente. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions exécutoires délivrées le :
Copies certifiées conformes délivrées le :
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2ème chambre civle
N° RG 22/10597 –
N° Portalis 352J-W-B7G-CWUPD
N° MINUTE :
Assignation du :
12 Avril 2022
JUGEMENT
rendu le 21 Novembre 2024
DEMANDEUR
Monsieur [N] [F]
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représenté par Maître Benoît GUILLON de la SELARL GHL Associés, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #P0220
DÉFENDERESSES
S.C.I. SRMB EMERAUDE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Maître Gwénaëlle BOUILLÉ de la SELEURL ARABESQUE AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B1068
S.A.R.L. CABINET [Z]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Maître Laurence GUEGAN-GELINET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0886
Décision du 21 Novembre 2024
2ème chambre civile
N° RG 22/10597 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWUPD
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Claire ISRAEL, Vice-Présidente, statuant en juge unique.
Assistée de Madame Fabienne CLODINE-FLORENT, Greffière lors de l’audience de plaidoiries et de Madame Audrey HALLOT, Greffière lors de la mise à disposition,
DÉBATS
A l’audience du 30 Septembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu le 21 Novembre 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au Greffe
Contradictoire et en premier ressort
_________________________
Par acte authentique du 19 avril 2021, la société SCI SRMB Emeraude a vendu à M. [N] [F] une maison d’habitation située [Adresse 3] à [Localité 8] (93) pour un prix de 285 000 euros.
Aux termes de l’acte, le bien vendu était identifié comme comprenant:
– Au rez-de-chaussée à droite, un appartement d’une superficie d’environ 45 m2,
– Au rez-de-chaussée à gauche, un appartement d’une superficie d’environ 65 m2,
– Au premier étage à droite, un studio d’une superficie d’environ 30 m2,
– Au premier étage à gauche, un appartement d’une superficie d’environ 45 m2.
Le 31 octobre 2021, M. [N] [F] a fait procéder à un mesurage de la superficie de son bien par la société A.I.R, géomètres, qui a retenu les superficies suivantes :
– Lot n°1 au rez-de-chaussée : 36,63 m2,
– Lot n°2 au rez-de-chaussée : 41,73 m2,
– Lot n°3 au premier étage porte de gauche : 34,10 m2,
– Lot n°4 au premier étage porte de droite : 24,26 m2.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 16 mars 2022, invoquant une différence de superficie entre la superficie figurant à l’acte de vente et la superficie réelle du bien, M. [N] [F] a demandé à la venderesse de l’indemniser du prix résultant de la surestimation de la superficie.
Par lettre recommandée avec avis de réception du même jour, il a également demandé une indemnisation au Cabinet [Z], agent immobilier, mandataire de la société SCI SRMB Emeraude et rédacteur du compromis de vente en date du 22 juillet 2020 préalable à l’acte authentique de vente et qui faisait apparaître la même superficie du bien que l’acte de vente du 19 avril 2021.
Par exploits d’huissier en date du 12 avril 2022, M. [N] [F] a fait assigner la société SCI SRMB Emeraude et le Cabinet [Z] devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins essentielles et principales de les voir condamner solidairement à lui payer la somme de 78 770,51 euros.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 1er septembre 2023, M. [N] [F] demande au tribunal de :
– Condamner solidairement la SCI SRMB EMERAUDE et le cabinet [Z] à payer à M. [F] une somme de 78.770,51 euros,
A titre subsidiaire,
– Juger que le cabinet [Z] a manqué à son devoir d’information et de conseil en sa qualité de professionnel à l’égard de M. [F],
– En conséquence, Condamner le cabinet [Z] à payer à M. [F] une somme de 78 770,51 euros,
– Juger que les sommes allouées à M. [F] porteront intérêt au taux légal à compter du 16 mars 2022 avec anatocisme à compter du 16 mars 2023,
– Condamner solidairement la SCI SRMB EMERAUDE et le cabinet [Z] à payer à M. [F] une somme de 5 000,00 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– Condamner solidairement la SCI SRMB EMERAUDE et le cabinet [Z] aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Benoît GUILLON du cabinet GHL ASSOCIES, avocat aux offres de droit dans les termes de l’article 699 du code de procédure civile,
– Rappeler l’exécution provisoire de droit dans les termes de l’article 514 du CPC.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 20 octobre 2023, la société SCI SRMB Emeraude demande au tribunal de:
A TITRE PRINCIPAL
– DEBOUTER M. [F] [N] de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions en ce qu’ils sont dirigés contre la société SCI SRMB EMERAUDE,
A TITRE SUBSIDIAIRE
– ECARTER l’exécution provisoire,
– CONDAMNER la société CABINET [Z] à relever et garantir la société SCI SRMB EMERAUDE de toutes condamnations qui pourrait intervenir à son encontre,
EN TOUTE HYPOTHESE
– CONDAMNER M. [F] [N] aux entiers dépens,
– CONDAMNER M. [F] [N] à payer à la société SCI SRMB EMERAUDE la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du CPC.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 24 mars 2023, le Cabinet [Z] demande au tribunal de :
– RECEVOIR le Cabinet [Z] en ses écritures et les juger bien fondées,
A titre principal,
– DEBOUTER M. [F] de l’intégralité de ses demandes,
A titre subsidiaire,
– RAMENER à de plus justes proportions le préjudice tiré de la perte de chance de M. [F],
– CONDAMNER M. [F] (sic) à relever et garantir le Cabinet [Z] des éventuelles condamnations prononcées à leur encontre,
En tout état de cause :
– CONDAMNER M. [F] à verser au Cabinet [Z] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– CONDAMNER M. [F] aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 6 novembre 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 30 septembre 2024.
Sur la demande de diminution du prix
Sur le fondement des articles 1616 et 1619 du code civil, M. [N] [F] demande la condamnation solidaire de la société SCI SRMB Emeraude et du Cabinet [Z] à lui verser la somme de 78 770,51 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2022, au titre de la diminution proportionnelle du prix de vente, en raison du déficit de superficie de l’immeuble vendu.
Il fait valoir que :
– La superficie du bien qu’il a acquis est inférieure de 48,28 m2, soit 35% à la superficie mentionnée à l’acte de vente, et donc largement supérieure à un vingtième,
– Il est indifférent que l’acte mentionne des superficies après la mention » environ » qui peut signifier » approchant » compte tenu ici de l’importance de la différence de mesurage qui excède largement » un intervalle raisonnable de surface « , d’autant que dans les documents commerciaux du Cabinet [Z] les surfaces étaient exprimées sans réserve,
– L’absence d’application de la loi Carrez n’explique pas le mensonge sur la surface du bien,
– La clause excluant cette garantie ne lui est pas opposable dès lors que la société SCI SRMB Emeraude est un professionnel de l’immobilier, son objet social portant sur l’acquisition, l’administration et l’exploitation par bail, location de biens immobiliers et que les gérants de la société sont également impliqués dans de nombreuses autres SCI dont l’objet social est identique, alors qu’il est lui-même un non-professionnel,
– Le contrat de vente est par ailleurs affecté d’un dol ou relève à tout le moins d’une faute lourde, commise par la venderesse et le Cabinet [Z],
– Les différents lots sont donnés à bail et deux des contrats ont été conclus par la société SCI SRMB Emeraude, les deux autres par le Cabinet [Z],
– Trois des baux ne mentionnent pas la superficie du bien, ce qui constitue une violation de l’article 3 de la loi du 6 juillet 1989, alors que la bailleresse était tenue de connaitre et préciser la superficie exacte des biens donnés à bail,
– Si les superficies avaient été précisées dans les contrats de bail, cela aurait permis d’éviter l’erreur sur la superficie dans le contrat de vente,
– S’agissant du quatrième bail qui porte sur le lot n°4, à savoir le studio au premier étage à droite, le bail mentionne une superficie de 24 m2, alors que l’acte de vente mentionne 30 m2, ce qui prouve que le Cabinet [Z] et la venderesse connaissaient au moins la superficie réelle de ce lot n°4 et ont volontairement surévalué la surface des différents lots du bien pour sous-évaluer artificiellement le prix au mètre carré,
– Le Cabinet [Z] engage donc également sa responsabilité,
– La somme demandée correspond à la diminution proportionnelle du prix, soit la somme de 74 377,30 euros augmentée des frais de mutation correspondant au différentiel et de la part imputée de la contribution proportionnelle au bien.
La société SCI SRMB Emeraude fait valoir en défense que :
– L’acte de vente mentionne des superficies approximatives, au regard de la mention » environ » de sorte que la superficie ne peut être considérée comme garantie et une différence de superficie ne peut s’analyser en un manquement à l’obligation de délivrance,
– La loi Carrez n’est pas applicable à la vente de sorte que le calcul de la superficie se fait en référence à l’article D. 331-10 du CCH (surface utile) et que le mesurage invoqué par l’acquéreur n’est pas pertinent,
– Elle n’est pas un vendeur professionnel, dès lors qu’elle est une SCI familiale et n’a vocation qu’à acheter des biens, sans opération autre que leur mise en location, de sorte que la clause d’exclusion de la garantie de la contenance du terrain et de la superficie des constructions est donc applicable,
– La mention de la superficie dans les baux n’est obligatoire que depuis le 28 mars 2009, ce qu’elle ignorait, n’étant pas une professionnelle,
– L’absence de mention de la superficie des logements dans les baux d’habitation n’établit pas sa connaissance de la superficie exacte desdits logements.
Le Cabinet [Z] oppose essentiellement que l’action en diminution du prix ne peut être dirigée que contre le vendeur, de sorte que la demande de M. [N] [F] doit être rejetée.
Sur ce,
En application des articles 1616 et 1619 du code civil, le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu’elle est portée au contrat et lorsque la vente commence par la mesure, ou par la désignation de l’objet vendu suivie de la mesure, l’expression de cette mesure ne peut donner lieu, en faveur de l’acquéreur, à diminution du prix pour moindre mesure, qu’autant que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d’un vingtième en moins, eu égard à la valeur de la totalité des objets vendus, s’il n’y a stipulation contraire.
Il appartient à l’acquéreur qui soutient que la surface réelle du bien acquis est inférieure de plus d’un vingtième par rapport à la surface mentionnée à l’acte de vente, d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, il ressort de l’acte de vente du 19 avril 2021 que la contenance de l’immeuble vendu a fait l’objet de la mention suivante :
– » Au rez-de-chaussée à droite, un appartement (…) d’une superficie d’environ 45 m2,
– Au rez-de-chaussée à gauche, un appartement (…) d’une superficie d’environ 65 m2,
– Au premier étage à droite, un studio (…) d’une superficie d’environ 30 m2,
– Au premier étage à gauche, un appartement (…) d’une superficie d’environ 45 m2 « .
L’acte de vente ne mentionne donc aucune surface garantie et exacte, chacune des superficies correspondant à chacun des logements étant précédée de la mention » environ » et donc exprimée de façon approximative et non vérifiée.
Les parties ont d’ailleurs stipulé à l’acte une clause aux termes de laquelle » le vendeur ne confère aucune garantie de contenance du terrain ni de superficie des constructions « .
En outre, pour soutenir que l’acte de vente a mentionné une superficie inférieure de plus d’un vingtième par rapport à la superficie réelle du bien vendu, le demandeur se prévaut de la mesure effectuée le 31 octobre 2021 par la société A.I.R, laquelle a procédé à la mesure des superficies privatives du bien, au sens de la loi Carrez et de son décret d’application n°97-532 du 23 mai 1997 portant définition de la superficie privative d’un lot de copropriété.
Or, le bien objet de la vente n’étant pas soumis au statut des immeubles en copropriété, les dispositions de l’article 46 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 issues de la loi dite Carrez et du décret d’application précité ne sont pas applicables à l’acte de vente objet du présent litige.
Ce certificat de mesurage est donc dénué de valeur probante dès lors qu’il exprime la superficie privative des différents logements, selon les critères du décret du 23 mai 1997 qui n’est pas applicable au bien litigieux et partant, qui ne sont pas les critères appliqués pour la mesure de la superficie telle qu’elle est mentionnée à l’acte de vente.
Dès lors il en résulte d’une part que la superficie mentionnée à l’acte est approximative et d’autre part, que ces superficies simplement indicatives ne peuvent être comparées avec les superficies mesurées par la société A.I.R. en application de la loi Carrez.
Il n’est donc pas démontré par M. [N] [F] que la superficie réelle de son bien est inférieure de plus d’un vingtième à la superficie mentionnée à l’acte.
En conséquence et sans qu’il ne soit besoin d’examiner si la clause d’exonération de garantie de la superficie doit trouver ou non application, sa demande de réduction du prix à la moindre mesure dirigée contre la venderesse doit être rejetée.
Selon les mêmes motifs, il sera également débouté de sa demande dirigée contre le Cabinet [Z], étant au surplus et en tout état de cause observé que la demande de restitution d’une partie du prix de vente pour déficit de superficie ne peut être dirigée qu’à l’encontre du vendeur.
Sur la demande subsidiaire de dommages et intérêts
A titre subsidiaire, M. [N] [F] demande la condamnation du Cabinet [Z], sur le fondement de l’article 1240 du code civil, à l’indemniser de son préjudice, à hauteur de 78 770,51 euros, et lui reproche un manquement à son devoir d’information et de conseil, en sa qualité de professionnel, dès lors qu’il lui appartenait de vérifier, le cas échéant avec l’assistance d’un tiers, que l’immeuble vendu par ses soins était conforme à la description faite par le vendeur.
Le Cabinet [Z] oppose en défense qu’il n’a commis aucune faute, ni manquement à son obligation de conseil. Il fait essentiellement valoir que :
– Il n’est pas un professionnel de la construction et partant, il se fonde sur les documents qui lui sont remis et n’a pas à procéder au mesurage de la superficie,
– En tout état de cause, le prix a été fixé en considération du bien dans son ensemble, de manière globale, et non » tant à la mesure « , ce qui démontre que la superficie n’était pas déterminante dans l’intention des contractants et que le prix n’est pas fixé en considération de la superficie, les acquéreurs n’ayant d’ailleurs fait réaliser un mesurage que six mois après la vente,
– La vente n’était pas soumise aux dispositions de la loi Carrez, ne s’agissant pas d’un bien en copropriété, ce qui explique que les surfaces mentionnées à l’acte soient indicatives,
– Les surfaces mentionnées à l’acte de vente sont les surfaces » utiles » qui ne correspondent pas au mesurage » Carrez « , alors que les surfaces mentionnées au contrat de bail doivent respecter la loi Carrez.
Il ajoute que le préjudice pouvant le cas échéant résulter de sa faute ne peut être qu’une perte de chance pour l’acquéreur de négocier le prix à la baisse, qui ne peut être évalué à hauteur de la totalité du montant réclamé au titre de la diminution du prix.
Sur ce,
En application des dispositions de l’article 1240 du code civil, pour que la responsabilité délictuelle d’une personne soit établie, doivent être caractérisés une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
En l’espèce, il résulte des motifs qui précèdent que M. [N] [F] ne démontre pas que la surface réelle du bien est inférieure à la surface exprimée, au demeurant de façon indicative, dans l’acte de vente, dès lors qu’il ne verse aux débats, au soutien de ses demandes, qu’un certificat de mesurage réalisé selon les critères de la loi Carrez, applicable aux seuls immeubles en copropriété.
Il n’établit dès lors pas que l’acte de vente mentionne une superficie erronée du bien.
En tout état de cause, le Cabinet [Z] a établi le compromis de vente à partir des informations communiquées par la venderesse et n’était pas lui-même tenu de réaliser des mesures de la superficie, étant au surplus souligné qu’il n’était pas tenu de mentionner une superficie vérifiée du bien dans le compromis de vente, pas davantage que ce n’était obligatoire dans l’acte de vente.
Dès lors, le Cabinet [Z] n’a manqué à aucune obligation d’information ou de conseil à l’égard de l’acquéreur.
En conséquence, la demande de dommages et intérêts de M. [N] [F] dirigée contre le Cabinet [Z] sera rejetée.
Les demandes dirigées contre la société SCI SRMB Emeraude et le Cabinet [Z] ayant été rejetées, il n’y pas lieu d’examiner leurs demandes de garantie.
Sur les demandes accessoires
M. [N] [F], partie succombant à l’instance, sera condamné aux dépens.
Il sera également condamné à payer à la société SCI SRMB Emeraude et au Cabinet [Z], la somme de 2 000 euros chacun, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Rejette la demande de M. [N] [F] tendant à la condamnation solidaire de la société SCI SRMB Emeraude et du Cabinet [Z] à lui payer la somme de 78 770,51 euros au titre de la réduction proportionnelle du prix de vente,
Rejette la demande de dommages et intérêts de M. [N] [F] dirigée contre le Cabinet [Z],
Condamne M. [N] [F] aux dépens,
Condamne M. [N] [F] à payer à la société SCI SRMB Emeraude, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [N] [F] à payer au Cabinet [Z], la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 21 Novembre 2024
La Greffière La Présidente
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