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En application du principe d’égalité de traitement, l’employeur doit assurer une même rémunération aux salariés qui effectuent un même travail ou un travail de valeur égale. * * * Cour d’appel de Paris, Pôle 6 – Chambre 7, 26 janvier 2023, 20/02931 Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 6 – Chambre 7 ARRET DU 26 JANVIER 2023 (n° , 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02931 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB2EZ Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Novembre 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de CRETEIL – RG n° 14/00090 APPELANTE URSSAF ILE DE FRANCE [Adresse 2] [Localité 4] Représentée par Me Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034 INTIME Monsieur [T] [M] [Adresse 5] [Adresse 1] [Localité 3] COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Septembre 2022, en audience publique et double rapporteur, les avocats ne s’étant pas opposés, devant Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre, et Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller Greffier, lors des débats : Mme Joanna FABBY ARRET : – rendu par défaut – par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. – signé par Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre et Philippine QUIL, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSE DU LITIGE Le 1er décembre 1993, M. [T] [M] a travaillé en qualité de technicien du service médical au sein de la CNAMTS avant d’intégrer en octobre 1996 la formation d’élève inspecteur du recouvrement au sein de l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiale d’Ile de France (ci-après l’URSSAF). La convention collective applicable est celle du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957. Ayant réussi l’examen final de formation des inspecteurs du recouvrement, M. [M] a été nommé en cette qualité, poste classé niveau 6, coefficient 270 à compter du 8 juillet 1997. Dans le cadre de la transposition du protocole d’accord du 30 novembre 2004, il a été classé au niveau 6, coefficient 305 et s’est vu octroyer 22 points d’expérience et 35 points de compétence. Il a ensuite obtenu à plusieurs reprises des pas de compétence (correspondant à 12 points de compétence) et a été promu au niveau 7 et classé au niveau 350 le 1er mai 2008. S’estimant victime d’une inégalité de traitement, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil le 10 janvier 2014 afin d’obtenir notamment le paiement de rappels de salaire et de primes. Il avait déjà saisi le conseil de prud’hommes le 20 juillet 2006 d’une action portant sur les articles 32 et 33 de la convention collective et avait été débouté de sa demande le 5 février 2009. Le 16 novembre 2015, il est devenu inspecteur du recouvrement LCTI, classé au niveau 7, coefficient 360. A compter du 15 décembre 2017, il a cessé d’exercer les fonctions d’inspecteur du recouvrement et a quitté l’URSSAF Ile de France. Par jugement en date du 14 novembre 2019, le conseil de prud’hommes a partiellement fait droit aux prétentions du salarié. Il a : – déclaré irrecevables les demandes formulées par le salarié au titre des articles 23, 32 et 33 de la convention collective, des frais de repas ou indemnités forfaitaires de déplacement et des dommages et intérêts y afférents, – déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes tendant à l’attribution de points de compétence pour la période antérieure au 10 janvier 2009, – débouté M. [M] de ses demandes relatives à l’attribution de points de compétence, – constaté l’existence d’une atteinte à l’égalité de traitement avec les inspecteurs du recouvrement LCTI, – enjoint à l’URSSAF Ile de France, avant dire droit sur les autres demandes, de produire les décisions par lesquelles elle a procédé à des attributions de points de compétence à certains inspecteurs LCTI lors de leur recrutement ; – ordonné la réouverture des débats et le renvoi de l’affaire à l’audience du 23 avril 2020 à 9 heures, – réservé les dépens. Le 26 mars 2020, l’URSSAF Ile de France a interjeté appel de ce jugement. Selon ses écritures notifiées le 26 juin 2020, l’URSSAF Ile de France demande à la cour de : – confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [M] de l’ensemble de ses demandes; – infirmer le jugement en ce qu’il a constaté l’existence d’une atteinte à l’égalité de traitement avec les inspecteurs du recouvrement LCTI ; Statuant à nouveau : – juger qu’il n’existe aucune inégalité de traitement avec les inspecteurs LCTI ; – débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes et notamment de ses demandes au titre d’une inégalité de traitement résultant de l’attribution de points de compétence à l’embauche aux inspecteurs du recouvrement LCTI ; En tout état de cause : – condamner M. [M] au paiement de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. M. [M], partie intimée, n’a pas constitué avocat, ni remis de conclusions au greffe dans le délai imparti de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant. L’URSSAF Ile de France l’a assigné devant la cour d’appel de Paris avec notification de ses conclusions et dénonciation de la déclaration d’appel par acte d’huissier du 22 juillet 2020 remis à l’étude. Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions notifiées par RPVA. Le 24 septembre 2020, le conseil de prud’hommes a ordonné un sursis à statuer dans l’attente du prononcé d’une décision définitive de la cour. L’instruction a été déclarée close le 22 juin 2022. MOTIFSEn application du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs. Sur l’égalité de traitement avec les anciens militaires devenus inspecteurs LCTI L’URSSAF conteste l’existence d’une inégalité de traitement entre le salarié et ces inspecteurs LCTI. Elle précise qu’à compter de 2011, elle a été chargée d’un projet pilote de mise en place d’un dispositif renforcé de contrôle en vue de lutter contre le travail illégal (LCTI) et a recherché des profils précis de personnes ayant notamment démontré au cours de leur précédente expérience professionnelle une capacité d’adaptation rapide et des aptitudes comportementales spécifiques, ce qui l’a amené à intégrer d’anciens militaires. Elle considère, d’une part que les missions confiées à ces deux catégories d’inspecteur sont différentes et, d’autre part, que l’exercice de leurs missions respectives mettent en oeuvre des compétences différentes, de sorte qu’ils ne sont pas placés dans une situation identique, ce qui a été retenu par plusieurs juridictions. Elle ajoute qu’en application de l’article 4 du protocole d’accord du 30 novembre 2004, elle a pu ainsi attribuer aux anciens militaires des points de compétence lors de leur embauche pour valoriser leur expérience antérieure et leurs compétences spécifiques. Elle ajoute qu’en toute hypothèse, l’analyse de l’évolution des carrières révèle que globalement les inspecteurs du recouvrement ont bénéficié d’une rémunération plus élevée que celle des inspecteurs LCTI et que la différence de situation n’a pas causé de préjudice à M. [M], ce qui doit conduire au rejet de ses demandes. Le conseil de prud’hommes a considéré que l’attribution par l’URSSAF de 90 points de compétence aux seuls inspecteurs du recouvrement LCTI ayant eu au préalable une expérience au sein de l’armée caractérise une inégalité de traitement avec les inspecteurs de recouvrement sans qu’aucun élément objectif ne puisse justifier cette rupture d’égalité, les deux mériers n’étant pas différents, les inspecteurs du recouvrement étant amené également à effectuer des missions de lutte contre le travail illégal et enfin qu’il n’est pas justifié que le photographe, le mécanicien et l’intendant comptable ainsi recrutés aient acquis au sein de l’armée des compétences spécifiques pertinentes pour l’exercice des fonctions d’inspecteur du recouvrement LCTI. * En application du principe d’égalité de traitement, l’employeur doit assurer une même rémunération aux salariés qui effectuent un même travail ou un travail de valeur égale. Selon l’article L.3221-4 du code du travail sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. Toutefois, l’employeur peut individualiser les salaires, dès lors qu’il est en mesure de justifier toute différence de traitement par des critères objectifs et matériellement vérifiables. Aux termes de l’article 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence. Il n’est pas contesté que plusieurs anciens militaires ont été recrutés en 2012 pour occuper des postes d’inspecteurs du recouvrement LCTI et ont, à cette occasion, bénéficié de 90 points de compétence, contrairement aux inspecteurs du recouvrement. Comme le fait remarquer l’employeur, en 2012 au moment de l’engagement d’anciens militaires aux fonctions d’inspecteur LCTI, le salarié n’exerçait pas les mêmes fonctions puisqu’il était alors inspecteur du recouvrement CCA (contrôle comptable d’assiette). En effet, le référenciel de l’emploi d’inspecteur du recouvrement LCTI précise que ceux-ci sont affectés à la préparation et à la mise en oeuvre d’actions de lutte contre le travail dissimulé sur le terrain en relation avec les partenaires habilités et mentionne au titre des compétences nécessaires notamment : savoir mettre en oeuvre les procédures civiles et pénales (technicité), savoir gérer et entretenir des relations avec les partenaires, savoir mener une audition (dimension relationnelle), savoir organiser les interventions en corrélation avec les autres corps de contrôle habilités (autonomie), enfin savoir faire preuve de discernement et de sang froid, savoir faire face aux situations résultant d’un contrôle inopiné et se rendre disponible en fonction des besoins rencontrés (savoir-faire relationnel). La note relative à ‘La LCTI’ rappelle également que l’URSSAF de Paris-Région Parisienne a été chargée d’un projet pilote de mise en place d’une ‘task force’ de lutte contre le travail illégal, nécessitant de faire évoluer la formation initiale et le profil habituel de recrutement des inspecteurs de recouvrement (actuellement des jeunes diplômés droit/comptabilité Bac + 3). Elle indique également que la LCTI est un métier de terrain qui nécessite d’intervenir dans des situations complexes et sensibles, sur des créneaux horaires parfois inhabituels (nuit, week end notamment) en partenariat avec d’autres services de l’Etat. En sus des compétences déjà indiquées dans le référentiel de l’emploi, la note mentionne également : la capacité de s’engager en mesurant les risques de son action et la capacité de gérer son stress et précise que cette lutte contre les fraudes met les inspecteurs face à des individus, des groupes ou des organisations nécessitant l’intervention conjointe d’équipes de lutte contre la fraude et la capacité à s’y intégrer. Il en découle que les missions des inspecteurs du recouvrement LCTI différent de celles des inspecteurs du recouvrement CCA et que la lutte contre le travail dissimulé constituant le coeur de leur activité, avec des sujétions spécifiques, ils ne sont pas dans la même situation que M. [M], lequel lorsqu’il exerçait les fonctions d’inspecteur du recouvrement ne participait que ponctuellement à des opérations de ce type. Ainsi, il n’est pas établi que les salariés auxquels M. [M] se compare occupent des fonctions identiques ou similaires aux siennes. Par ailleurs, s’agissant des six militaires engagés par l’URSSAF en juillet 2012, leur expérience professionnelle antérieure au sein de l’armée pendant des années, même à des postes peu exposés comme ceux évoqués par le conseil, leur confère, par le cadre même inhérent à cette institution, des capacités spécifiques notamment de gestion de situations difficiles dans le cadre d’une équipe, lesquelles sont particulièrement nécessaires pour exercer les missions des inspecteurs dédiés LCTI et précédemment rappelées. Or, l’article 4 du protocole d’accord du 30 novembre 2004 applicable en 2012 prévoyait qu’au moment d’opérer un recrutement l’employeur avait la possibilité de tenir compte de l’expérience et des compétences acquises antérieurement par le candidat. Ce texte rendait d’autant plus fondée la décision de l’URSSAF Ile de France d’appliquer aux anciens militaires engagés comme inspecteurs du recouvrement LCTI un régime différent de celui des autres inspecteurs du recouvrement et se traduisant par l’attribution de points de compétence lors de leur recrutement. Il découle de ces observations qu’aucune inégalité de traitement ne peut être retenue et le jugement sera infirmé sur ce point et en ce qu’il a ordonné la production de pièces par l’URSSAF. Il n’est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles, l’intimé supportant en revanche les dépens d’appel. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, par arrêt par défaut et rendu en dernier ressort, dans les limites de l’appel, INFIRME le jugement en ce qu’il a : – constaté l’existence d’une atteinte à l’égalité de traitement avec les inspecteurs du recouvrement LCTI, – enjoint à l’URSSAF Ile de France, avant dire droit sur les autres demandes, de produire les décisions par lesquelles elle a procédé à des attributions de points de compétence à certains inspecteurs LCTI lors de leur recrutement ; – ordonné la réouverture des débats et le renvoi de l’affaire à l’audience du 23 avril 2020 à 9 heures, – réservé les dépens, Statuant à nouveau : REJETTE les demandes de M. [M] au titre de l’inégalité de traitement avec les inspecteurs du recouvrement LCTI, DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, CONDAMNE M. [M] au paiement des dépens d’appel. La greffière, La présidente, |
→ Questions / Réponses juridiques
Quelle est la date de la décision du tribunal administratif de Toulouse concernant M. C B ?La décision du tribunal administratif de Toulouse a été rendue le 25 janvier 2023. Cette décision fait suite à une requête déposée par M. C B le 5 juillet 2022, dans laquelle il contestait une décision antérieure du président du conseil départemental de la Haute-Garonne. Cette décision portait sur la suspension de son droit au revenu de solidarité active (RSA) à compter du 1er janvier 2022, ainsi que sur la fin de ses droits au RSA à partir du 30 avril 2022. Quelles étaient les raisons invoquées par M. C B pour contester la décision de suspension de son RSA ?M. C B a soutenu que sa situation était très difficile et qu’il avait communiqué toutes ses déclarations trimestrielles à la Caisse d’Allocations Familiales (CAF). Il a également affirmé que le blocage de ses droits provenait du département de la Haute-Garonne, et non de sa propre responsabilité. De plus, il a mentionné qu’il avait travaillé quelques heures par mois et qu’il exerçait une activité de photographe artiste, mais que cette activité n’avait généré aucun revenu. Ces éléments ont été présentés pour justifier sa demande de maintien de ses droits au RSA. Quelle a été la réponse du département de la Haute-Garonne à la requête de M. C B ?En réponse à la requête de M. C B, le département de la Haute-Garonne a déposé un mémoire en défense le 27 octobre 2022, concluant au non-lieu à statuer. Le département a fait valoir qu’il avait révisé la situation de M. B et lui avait accordé le RSA à compter du 1er janvier 2022 par une décision prise le 27 septembre 2022. Cela signifie que la demande de M. B était devenue sans objet, car il avait finalement obtenu le bénéfice du RSA. Quelles sont les implications de la décision du tribunal concernant la requête de M. C B ?La décision du tribunal a des implications significatives pour M. C B. En déclarant qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions de sa requête, le tribunal a effectivement mis fin à la contestation de la suspension de son RSA. Cela signifie que, bien que M. B ait initialement contesté la décision de suspension, le fait qu’il ait reçu le RSA à partir du 1er janvier 2022 a rendu sa demande caduque. Le tribunal a donc statué en faveur de l’absence de litige à ce sujet. Qui a été désigné pour statuer sur ce litige au tribunal administratif ?Pour statuer sur ce litige, la présidente du tribunal administratif de Toulouse a désigné M. D de Hureaux. Cette désignation est conforme à l’article R. 222-1 du code de justice administrative, qui stipule que des magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans peuvent être désignés pour traiter de tels litiges. Cette procédure vise à garantir que les affaires soient examinées par des magistrats expérimentés, assurant ainsi une justice équitable et éclairée. |
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