L’Essentiel : En 2001 et 2013, [A] [T] [M] [P] et son épouse [B] [Y] sont décédés, laissant trois enfants : MM. [U] et [S] [P] et Mme [X] [P] épouse [W]. Héritiers réservataires, ils détiennent des droits sur plusieurs parcelles agricoles en Haute-Marne. Mme [W] a assigné ses coindivisaires pour obtenir l’homologation d’un rapport d’expertise et le partage des successions. Après des litiges et des appels, la cour d’appel de Dijon a confirmé le jugement de 2020, ordonnant à M. [P] de fournir des documents sous astreinte. En 2023, une liquidation d’astreinte a été prononcée, entraînant de nouvelles assignations.
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Décès et héritage[A] [T] [M] [P] et son épouse [B] [Y] sont décédés respectivement en 2001 et 2013, laissant derrière eux trois enfants, MM. [U] et [S] [P] ainsi que Mme [X] [P] épouse [W]. Ces derniers sont héritiers réservataires et détiennent ensemble les droits sur plusieurs parcelles agricoles situées dans la commune de [Localité 14] en Haute-Marne. Parcelles agricoles en indivisionLes enfants sont indivisaires de plusieurs parcelles cadastrées, dont une moitié de la parcelle située à ‘[Adresse 12]’, une parcelle à ‘[Adresse 13]’, une autre à ‘[Adresse 15]’, et une dernière à ‘[Adresse 4]’. La moitié de la première parcelle a été attribuée à M. [S] [P] par donation en 2005. Assignation en justiceMme [W] a assigné ses coindivisaires devant le tribunal judiciaire de Chaumont pour obtenir l’homologation d’un rapport d’expertise et procéder à la liquidation et au partage des successions. Le tribunal a rendu un jugement en septembre 2020, désignant des notaires pour le partage et fixant des évaluations de biens. Appel et litigesMM. [P] ont interjeté appel du jugement, contestando notamment l’évaluation des biens. Par la suite, Mme [W] a assigné M. [U] [P] en expulsion, ce qui a conduit à un jugement en avril 2021, déboutant Mme [W] de ses demandes et condamnant celle-ci à payer des frais à son frère. Décision de la cour d’appelEn septembre 2022, la cour d’appel de Dijon a confirmé le jugement précédent, tout en ordonnant à M. [P] de communiquer des documents relatifs à l’exploitation des parcelles, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Liquidation de l’astreinteEn juin 2023, Mme [W] a assigné M. [U] [P] pour la liquidation de l’astreinte. En mars 2024, le juge a liquidé l’astreinte à 53 400 euros, condamnant M. [P] à verser cette somme à Mme [W] et à payer des frais supplémentaires. Appel et nouvelles assignationsM. [U] [P] a interjeté appel de cette décision en avril 2024. En mai 2024, Mme [W] a de nouveau assigné M. [P] en référé, demandant la radiation de l’affaire et le rejet de ses demandes reconventionnelles. Audience et décisions finalesLors de l’audience de décembre 2024, Mme [W] ne s’est pas présentée. Le tribunal a alors décidé de ne pas statuer sur ses demandes et a analysé uniquement la demande de M. [P] concernant l’arrêt de l’exécution provisoire. Le tribunal a débouté M. [P] de sa demande de suspension de l’exécution du jugement de mars 2024 et a condamné M. [P] aux dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de l’indivision sur l’exploitation des biens hérités ?L’indivision est régie par les articles 815 et suivants du Code civil. Selon l’article 815-1, « les indivisaires peuvent convenir de l’administration des biens indivis ». Cela signifie que chaque indivisaire a le droit d’exploiter les biens, mais doit le faire dans l’intérêt de tous les coindivisaires. En vertu de l’article 815-8, « quiconque perçoit des revenus ou expose des frais pour le compte de l’indivision doit en tenir un état qui est à la disposition des indivisaires ». Cela implique que M. [U] [P], en tant qu’exploitant des parcelles, doit fournir un compte rendu des revenus générés et des dépenses engagées. Si un indivisaire ne respecte pas cette obligation, comme cela a été le cas ici, l’autre indivisaire peut demander des comptes et, si nécessaire, saisir le juge pour obtenir des injonctions, comme cela a été fait par Mme [W]. Quels sont les recours possibles en cas de non-exécution d’une décision de justice ?L’article 524 du Code de procédure civile stipule que « lorsqu’une décision est susceptible d’appel, son exécution peut être suspendue ». Cela signifie que M. [P] a la possibilité de demander la suspension de l’exécution provisoire d’un jugement, comme il l’a fait dans cette affaire. Cependant, pour obtenir cette suspension, il doit démontrer l’existence de « moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour », conformément à l’article R 121-22 du Code des procédures civiles d’exécution. En l’espèce, la cour a jugé que les arguments de M. [P] ne constituaient pas des moyens sérieux, car il n’a pas pu prouver que l’astreinte était injustifiée ou que l’exécution était impossible. Comment se calcule le montant de l’astreinte en cas de non-respect d’une injonction ?L’article L.131-4 du Code des procédures civiles d’exécution précise que « le montant de l’astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécution ». Dans cette affaire, le juge a liquidé l’astreinte en tenant compte du comportement de M. [P] et des difficultés qu’il a rencontrées. Il a été constaté que M. [P] n’a pas fourni les documents requis, ce qui a conduit à la liquidation de l’astreinte à hauteur de 53 400 euros pour la période concernée. Il est important de noter que le taux de l’astreinte ne peut pas être modifié lors de sa liquidation, ce qui signifie que M. [P] ne peut pas contester le montant une fois qu’il a été fixé par le juge. Quelles sont les implications de l’absence de comparution d’une partie lors d’une audience ?L’article 16 du Code de procédure civile stipule que « le juge doit veiller au respect du contradictoire ». Cela signifie que chaque partie doit avoir la possibilité de présenter ses arguments. Dans le cas présent, l’absence de Mme [W] à l’audience a eu des conséquences sur sa capacité à soutenir ses prétentions. La cour a constaté qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur ses demandes, car elle n’avait pas comparu ni été représentée. Cela souligne l’importance de la comparution des parties dans le cadre d’une procédure judiciaire, car l’absence peut entraîner le rejet des demandes formulées. |
C O U R D ‘ A P P E L D E T O U L O U S E
DU 10 Janvier 2025
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
1/25
N° RG 24/00086 – N° Portalis DBVI-V-B7I-QHZK
Décision déférée du 21 Mars 2024
– Juge de l’exécution de MONTAUBAN – 23/00528
DEMANDERESSE
Madame [X] [P] épouse [W]
[Adresse 7]
[Localité 10]
Non comparante, non représentée
DEFENDEUR
Monsieur [U] [P]
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représenté par Me Aziz HEDABOU, avocat au barreau du TARN-ET-GARONNE
DÉBATS : A l’audience publique du 06 Décembre 2024 devant A. DUBOIS, assistée de C. IZARD
Nous, A. DUBOIS, présidente de chambre déléguée par ordonnance de la première présidente du 12 décembre 2024, en présence de notre greffière et après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications :
– avons mis l’affaire en délibéré au 10 Janvier 2025
– avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, l’ordonnance contradictoire suivante :
[A] [T] [M] [P] et son épouse [B] [Y] sont respectivement décédés les [Date décès 2] 2001 et [Date décès 1] 2013 laissant pour leur succéder leurs trois enfants, MM. [U] et [S] [P] et Mme [X] [P] épouse [W], héritiers réservataires ensemble pour le tout et chacun pour un tiers.
Ces derniers sont indivisaires de parcelles agricoles sise commune de [Localité 14] (Haute-Marne) cadastrées comme suit :
– moitié indivise de la parcelle de terre située lieudit ‘[Adresse 12]’ cadastrée ZH n°[Cadastre 8] pour 1 hectare 20 ares 10 centiares, étant précisé que l’autre moitié a été attribuée à M. [S] [P] suivant donation du 28 avril 2005,
– une parcelle de terre située lieudit ‘[Adresse 13]’ cadastrée section ZE numéro [Cadastre 6] pour 8 hectares 34 ares et 91 centiares,
– une parcelle de terre située lieudit ‘[Adresse 15]’ cadastrée section ZK numéro [Cadastre 3] pour 26 ares 80 centiares,
– une parcelle de terre située même lieudit cadastrée section ZK numéro [Cadastre 4] pour 11 hectares 62 ares 30 centiares.
Mme [W] a assigné ses deux coindivisaires devant le tribunal judiciaire de Chaumont aux fins d’homologation du rapport d’expertise de M. [C], expert judiciaire commis en référé, et qu’il soit procédé aux opérations de liquidation et partage des communautés et successions de leurs parents.
Par jugement du 24 septembre 2020, le tribunal a fait droit à ces demandes, désigné Maitre [Z], notaire à [Localité 11], et Maitre [D], Notaire à [Localité 16], à cette fin et fixé les évaluations de certains biens immobiliers.
MM. [P] ont interjeté appel du jugement et notamment du chef de l’évaluation retenue par le tribunal judiciaire.
Reprochant à M. [U] [P] d’exploiter les parcelles indivises, Mme [W] l’a assigné en expulsion devant le président du tribunal judiciaire de Chaumont, sur le fondement de l’article 815-9 du code civil, par acte du 22 décembre 2020.
Par jugement du 20 avril 2021, le président a :
– déclaré Mme [P] irrecevable en sa demande portant sur la moitiée indivise de la parcelle sis à [Localité 14], cadastrée ZH n°[Cadastre 8] lieudit ‘[Adresse 12]’,
– débouté Mme [P] de toutes ses demandes,
– débouté M. [U] [P] de sa demande de dommages et intérêts,
– copndamné Mme [P] à payer à son frère la somme de 2 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.
Sur appel de Mme [W], la cour d’appel de Dijon a notamment, par décision du 1er septembre 2022 :
– confirmé le jugement sauf en qu’il a rejeté la demande de communication de pièces,
– statuant à nouveau dans cette limite, fait injonction à M. [P] de communiquer à Mme [W] toutes les factures ou documents relatifs à la vente de paille et de grain récoltés sur les quatre parcelles indivises sise commune de [Localité 14] depuis novembre 2019, ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d’un délai de deux mois suivant signification de l’arrêt.
Par acte du 20 juin 2023, Mme [W] a fait assigner M. [U] [P] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Montauban en liquidation de l’astreinte.
Par jugement du 21 mars 2024, le juge de l’exécution a :
– liquidé l’astreinte pour la période du 28 mars 2023 au 15 février 2024 à la somme de 53 400 euros,
– condamné M. [P] à payer la somme de 53 400 euros à Mme [W] née [P],
– débouté M. [P] de sa demande en dommages et intérêts,
– condamné M. [P] à payer à Mme [W] née [P] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
M. [U] [P] a interjeté appel de cette décision le 8 avril 2024.
Par acte du 24 mai 2024, Mme [W] l’a fait assigner en référé devant la première présidente de la cour d’appel de Toulouse, sur le fondement de l’article 524 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions reçues au greffe le 2 décembre 2024, elle demande à la première présidente de :
– constater que M. [P] n’a pas exécuté le jugement du 21 mars 2024,
– en conséquence, ordonner la radiation du rôle de l’affaire référencée sous le n° RG 24/01720 de la cour d’appel de Toulouse,
– débouter M. [P] de sa demande reconventionnelle visant à obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du 21 mars 2024,
– statuer ce que de droit sur les dépens.
Suivant conclusions reçues au greffe le 4 juillet 2024, soutenues oralement à l’audience du 6 décembre 2024, auxquelles il conviendra de se référer pour l’exposé des moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, M. [P] demande à la première présidente de :
– débouter Mme [X] [P], épouse [W] de sa demande de radiation de l’instance d’appel enrôlée auprès de la 3ème Chambre de la cour d’appel de Toulouse,
– débouter Mme [X] [P], épouse [W] de sa demande au titre de l’article 700 et aux dépens,
– reconventionnellement, ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du 21 mars 2024 du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Montauban, dont il a relevé appel,
– laisser les dépens à la charge de Mme [X] [P], épouse [W].
A l’audience du 6 décembre 2024, Mme [X] [W] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter.
MOTIVATION :
La demanderesse n’ayant pas comparu et ne s’étant pas fait représenter à l’audience n’a pas soutenu ses prétentions sur lesquelles il n’y a donc pas lieu de statuer dans le cadre de la présente instance soumise aux règles de la procédure orale.
Dès lors, seule la demande d’arrêt de l’exécution provisoire formulée à titre reconventionnel et valablement soutenue par M. [P] à l’audience sera analysée.
Par dérogation aux dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile excipé à tort par le défendeur, et indépendamment des conséquences manifestement excessives exigées par ce texte, l’article R 121-22 du code des procédures civiles d’exécution qui s’applique au présent litige, dispose qu’en cas d’appel, un sursis à l’exécution des décisions prises par le juge de l’exécution peut être accordé par le premier président s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour.
Il n’entre en revanche pas dans les pouvoirs du premier président d’infirmer ou de confirmer un jugement dont la cour est saisie de l’appel ou encore de déclarer nul ou caduc un procès-verbal de saisie-conservation.
En l’espèce, par arrêt de la cour d’appel de Dijon du 1er septembre 2022, M. [P] a reçu injonction de communiquer à Mme [W] ‘toutes les factures ou documents relatifs à la vente de paille et de grain récoltés sur les quatre parcelles indivises sise commune de [Localité 14] depuis novembre 2019, ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d’un délai de deux mois suivant signification de l’arrêt’.
Il critique la décision du juge de l’exécution qui liquide l’astreinte en soutenant, d’une part, qu’il est impossible d’extraire ou de limiter les factures aux parcelles visées par cet arrêt dès lors que la préparation des terres et la récolte ne peuvent être individualisées par parcelle et, d’autre part, que sa soeur ne lui a jamais répondu quand il lui a demandé si elle était satisfaite des pièces qu’il lui avait transmises.
Selon l’article L.131-4 du code des procédures civiles d’exécution, le montant de l’astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécution. Le taux de l’astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation. L’astreinte est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient en tout ou partie d’une cause étrangère.
Il convient ici de rappeler, comme déjà fait par le premier juge, que la cour d’appel a fondé l’injonction de communiquer sur l’exploitation des parcelles indivises par M. [P] dans l’intérêt, selon ce dernier, de l’indivision et sur l’article 815-8 du code civil aux termes duquel quiconque perçoit des revenus ou expose des frais pour le compte de l’indivision doit en tenir un état qui est à la disposition des indivisaires.
M. [P] ne peut donc se retrancher derrière l’envoi de nombreuses pièces fin novembre et début décembre 2022, dont une attestation de sa société qu’il a rédigée lui-même et qui n’a aucune valeur probante puisque nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, alors qu’elles ne permettent aucunement d’identifier les recettes et charges des parcelles concernées.
M. [P], à qui il incombait d’assurer une distinction entre ses propres parcelles et celles exploitées pour le compte de son frère et sa soeur, et de demander à son comptable de fournir des comptabilités séparées ou à tout le moins un état respectant les termes de l’article 815-9 précité, ne peut donc se retrancher derrière l’envoi de nombreuses pièces fin novembre et début décembre 2022.
En effet ces pièces, dont une attestation de sa société qu’il a rédigée lui-même et qui n’a aucune valeur probante puisque nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, ne permettent aucunement d’identifier les recettes et charges des parcelles concernées.
Le moyen tiré de l’impossibilité de cantonner la comptabilité aux seules parcelles indivises ne peut en conséquence être qualifié de sérieux.
Par ailleurs, le premier juge a bien pris en compte l’absence immédiate de réponse de Mme [W] aux questionnements relatifs au caractère probant et suffisant des documents transmis.
C’est la raison pour laquelle il n’a pas fait courir l’astreinte avant le 28 mars 2023, date à laquelle la créancière a sollicité le paiement de l’astreinte liquidée, manifestant ainsi sa contestation de l’effectivité de la communication des pièces utiles, étant de surcroît souligné qu’il ressort de leur étude, que les documents transmis ne répondent pas à l’injonction claire de la cour d’appel.
Le comportement de Mme [W] ne peut donc non plus constituer un moyen sérieux de réformation.
M. [P] sera en conséquence débouté de sa demande de suspension de l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement du 21 mars 2024.
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Statuant par décision contradictoire, après débats en audience publique,
Constatons que Mme [X] [W] n’a pas soutenu ses demandes à l’audience du 6 décembre 2024,
Déboutons M. [U] [P] de sa demande de suspension de l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement prononcé par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Montauban le 21 mars 2024,
Rejetons le surplus des demandes,
Condamnons M. [U] [P] aux dépens.
LA GREFFIERE LA MAGISTRATE DELEGUEE
C. IZARD A. DUBOIS
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