L’Essentiel : L’indemnité de résiliation d’un contrat de téléphonie ne relève pas des prestations de communication électronique, ce qui implique l’application d’une prescription quinquennale plutôt que d’une prescription abrégée d’un an. Dans l’affaire opposant la société Savigny matériaux à la Société commerciale de télécommunications, la cour d’appel a jugé que l’indemnité demandée, étant distincte des prestations fournies, était soumise à la prescription de cinq ans selon l’article L. 110-4 du code de commerce. Ainsi, la demande de paiement de cette indemnité n’était pas prescrite, confirmant la décision de la cour d’appel.
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L’indemnité de résiliation du contrat de téléphonie ne fait pas partie de la prestation du contrat de communication électronique, la prescription abrégée d’une année telle que prévue par le Code des postes et communications électroniques ne lui est pas applicable (application de la prescription de cinq ans) . Indemnité de résiliation du contrat de téléphonieSelon l’arrêt attaqué (Paris, 14 mai 2021), la société Savigny matériaux a conclu avec la Société commerciale de télécommunications (la SCT) un contrat de fourniture de téléphonie fixe et d’accès à internet pour une durée de soixante-trois mois. En juin 2015, la société Savigny matériaux a interrompu le paiement des factures et conclu un nouveau contrat avec un opérateur concurrent avec portabilité de son numéro téléphonique. Le 12 octobre 2016, la SCT l’a mise en demeure de lui payer la somme de 14 508,14 euros au titre des factures de téléphonies et de l’indemnité de résiliation du contrat puis, le 10 janvier 2017, a fait signifier à la société Savigny matériaux une ordonnance d’injonction de payer cette somme. Prescription anale innaplicableDevant le tribunal saisi de l’opposition à cette ordonnance, la société Savigny matériaux a soulevé la prescription de l’article L. 34-2, alinéa 2, du code des postes et des communications électroniques. L’article L. 34-2, alinéa 2, du CPCEAux termes de l’article L. 34-2, alinéa 2, du code des postes et des communications électroniques, la prescription est acquise, au profit de l’usager, pour les sommes dues en paiement des prestations de communications électroniques d’un opérateur appartenant aux catégories visées au précédent alinéa lorsque celui-ci ne les a pas réclamées dans un délai d’un an courant à compter de la date de leur exigibilité. Les dispositions relatives aux courtes prescriptions étant d’application stricte et ne pouvant être étendues à des cas qu’elles ne visent pas expressément, il en résulte que la prescription annale des demandes en paiement du prix des prestations de communications électroniques régit le règlement des frais de résiliation du contrat. Prescription quinquennale applicableAyant retenu que l’indemnité de résiliation dont le paiement était demandé était étrangère dans son objet à la fourniture des prestations de communications électroniques, la cour d’appel en a exactement déduit qu’elle se trouvait régie par la prescription quinquennale édictée à l’article L. 110-4, I du code de commerce, de sorte que la demande en paiement de cette indemnité n’était pas prescrite.
——— COUR DE CASSATION Audience publique du 29 mars 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 245 F-B Pourvoi n° X 21-23.104 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 MARS 2023 La société Savigny matériaux, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 21-23.104 contre l’arrêt rendu le 14 mai 2021 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l’opposant à la Société commerciale de télécommunications (SCT), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Savigny matériaux, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Société commerciale de télécommunications (SCT), après débats en l’audience publique du 7 février 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 14 mai 2021), la société Savigny matériaux a conclu avec la Société commerciale de télécommunications (la SCT) un contrat de fourniture de téléphonie fixe et d’accès à internet pour une durée de soixante-trois mois. En juin 2015, la société Savigny matériaux a interrompu le paiement des factures et conclu un nouveau contrat avec un opérateur concurrent avec portabilité de son numéro téléphonique. Le 12 octobre 2016, la SCT l’a mise en demeure de lui payer la somme de 14 508,14 euros au titre des factures de téléphonies et de l’indemnité de résiliation du contrat puis, le 10 janvier 2017, a fait signifier à la société Savigny matériaux une ordonnance d’injonction de payer cette somme. 2. Devant le tribunal saisi de l’opposition à cette ordonnance, la société Savigny matériaux a soulevé la prescription de l’article L. 34-2, alinéa 2, du code des postes et des communications électroniques. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société Savigny matériaux fait grief à l’arrêt de la condamner au paiement d’une somme de 7 000 euros à titre d’indemnité de résiliation du contrat, alors « que la prescription annale des demandes en paiement du prix des prestations de communications électroniques régit aussi le règlement des frais de résiliation du contrat ; qu’en retenant dès lors, pour considérer que la demande en paiement de l’indemnité de résiliation du contrat n’était pas prescrite, que, étrangère dans son objet à la fourniture de prestations de communications électroniques, elle était régie par la prescription de cinq ans édictée par l’article L. 110-4 du code de commerce applicables aux actes passés entre commerçants, la cour d’appel a violé l’article L. 34-2, alinéa 2, du code des postes et des communications électroniques. » Réponse de la Cour 4. Aux termes de l’article L. 34-2, alinéa 2, du code des postes et des communications électroniques, la prescription est acquise, au profit de l’usager, pour les sommes dues en paiement des prestations de communications électroniques d’un opérateur appartenant aux catégories visées au précédent alinéa lorsque celui-ci ne les a pas réclamées dans un délai d’un an courant à compter de la date de leur exigibilité. 5. Les dispositions relatives aux courtes prescriptions étant d’application stricte et ne pouvant être étendues à des cas qu’elles ne visent pas expressément, il en résulte que la prescription annale des demandes en paiement du prix des prestations de communications électroniques régit le règlement des frais de résiliation du contrat. 6. Ayant retenu que l’indemnité de résiliation dont le paiement était demandé était étrangère dans son objet à la fourniture des prestations de communications électroniques, la cour d’appel en a exactement déduit qu’elle se trouvait régie par la prescription quinquennale édictée à l’article L. 110-4, I du code de commerce, de sorte que la demande en paiement de cette indemnité n’était pas prescrite. 7. Le moyen n’est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Savigny matériaux aux dépens ; En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société commerciale de télécommunications (SCT) la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille vingt-trois. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de l’indemnité de résiliation du contrat de téléphonie ?L’indemnité de résiliation du contrat de téléphonie est considérée comme distincte des prestations de communication électronique. Dans le cas de la société Savigny matériaux, cette indemnité a été demandée suite à l’interruption du paiement des factures et à la conclusion d’un nouveau contrat avec un autre opérateur. Cette indemnité est donc régie par des règles différentes de celles qui s’appliquent aux prestations de communication électronique. En effet, la cour d’appel a jugé que l’indemnité de résiliation n’était pas liée à la fourniture de services de télécommunication, ce qui a des implications sur la durée de prescription applicable. En conséquence, la demande de paiement de cette indemnité ne peut pas être soumise à la prescription abrégée d’un an prévue par le Code des postes et communications électroniques, mais plutôt à la prescription quinquennale du Code de commerce. Quelles sont les implications de la prescription quinquennale pour l’indemnité de résiliation ?La prescription quinquennale, selon l’article L. 110-4, I du Code de commerce, s’applique aux actes passés entre commerçants, ce qui inclut les contrats de téléphonie. Dans le cas de la société Savigny matériaux, la cour d’appel a déterminé que l’indemnité de résiliation était régie par cette prescription quinquennale. Cela signifie que la société Savigny matériaux avait un délai de cinq ans pour contester ou ne pas payer l’indemnité de résiliation. Étant donné que la demande de paiement de cette indemnité n’était pas prescrite, la cour a rejeté l’argument de la société Savigny matériaux qui invoquait la prescription d’un an. Ainsi, la cour a confirmé que la demande de la Société commerciale de télécommunications (SCT) pour le paiement de l’indemnité de résiliation était valide et que la société Savigny matériaux devait s’acquitter de cette somme. Comment la cour a-t-elle interprété l’article L. 34-2, alinéa 2, du Code des postes et des communications électroniques ?L’article L. 34-2, alinéa 2, du Code des postes et des communications électroniques stipule que la prescription est acquise en faveur de l’usager pour les sommes dues en paiement des prestations de communications électroniques, si celles-ci ne sont pas réclamées dans un délai d’un an. Cependant, la cour a interprété cet article en précisant que les dispositions relatives aux courtes prescriptions ne peuvent pas être étendues à des cas qu’elles ne visent pas expressément. Dans ce contexte, l’indemnité de résiliation a été jugée comme étant étrangère à la fourniture des prestations de communications électroniques. Cette interprétation a conduit la cour à conclure que la prescription quinquennale s’appliquait à l’indemnité de résiliation, et non la prescription d’un an. Cela a été un point déterminant dans le jugement, car cela a permis à la SCT de récupérer la somme due. Quels étaient les faits de l’affaire entre la société Savigny matériaux et la SCT ?Les faits de l’affaire remontent à un contrat de fourniture de téléphonie fixe et d’accès à internet conclu entre la société Savigny matériaux et la Société commerciale de télécommunications (SCT) pour une durée de soixante-trois mois. En juin 2015, la société Savigny matériaux a cessé de payer ses factures et a choisi de changer d’opérateur, en conservant son numéro de téléphone. Suite à cette interruption de paiement, la SCT a mis en demeure la société Savigny matériaux le 12 octobre 2016, lui réclamant un montant total de 14 508,14 euros, incluant les factures impayées et l’indemnité de résiliation. En janvier 2017, la SCT a obtenu une ordonnance d’injonction de payer cette somme. La société Savigny matériaux a alors contesté cette ordonnance en invoquant la prescription d’un an prévue par le Code des postes et des communications électroniques, ce qui a conduit à l’examen de l’affaire par la cour d’appel et, finalement, à la Cour de cassation. |
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