Indemnisation suite à un accident du travail et évaluation des préjudices subis

·

·

Indemnisation suite à un accident du travail et évaluation des préjudices subis

L’Essentiel : L’affaire concerne un accident du travail survenu le 16 novembre 2016, au cours duquel un salarié a subi une amputation de l’auriculaire gauche. L’accident a été reconnu comme imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice, qui avait substitué l’entreprise de travail temporaire. Suite à cet accident, le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les préjudices subis par le salarié. Le tribunal a rendu plusieurs jugements, majorant l’indemnité due au salarié et allouant une provision pour ses préjudices. L’expert a évalué les souffrances endurées et le préjudice esthétique permanent significatif.

Résumé des faits de l’affaire

L’affaire concerne un accident du travail survenu le 16 novembre 2016, au cours duquel un salarié a subi une amputation de l’auriculaire gauche. L’accident a été reconnu comme imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice, qui avait substitué l’entreprise de travail temporaire. Suite à cet accident, le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les préjudices subis par le salarié, qui a été hospitalisé et a suivi une rééducation.

Jugements rendus

Le tribunal a rendu plusieurs jugements, le premier en date du 10 janvier 2022, qui a notamment majoré l’indemnité en capital due au salarié et alloué une provision de 5 000 euros pour ses préjudices. Un second jugement, daté du 2 mai 2023, a ordonné un complément d’expertise pour évaluer le déficit fonctionnel permanent du salarié. Les rapports d’expertise ont révélé divers préjudices, y compris des souffrances physiques et morales, un préjudice esthétique, et une perte de chance de promotion professionnelle.

Demandes d’indemnisation

Le salarié a sollicité des indemnités pour divers préjudices, totalisant des sommes significatives, y compris pour les frais divers, l’assistance par tierce personne, et le déficit fonctionnel permanent. En revanche, l’entreprise utilisatrice a demandé une réduction des indemnités et a contesté certaines demandes, notamment celles relatives au préjudice esthétique temporaire et à la perte de chance de promotion professionnelle.

Évaluation des préjudices

L’expert a évalué les souffrances endurées par le salarié à un taux de 3,5/7 et a déterminé un préjudice esthétique permanent significatif. Le tribunal a également pris en compte le préjudice d’agrément, notant que le salarié ne pouvait plus pratiquer certaines activités qu’il appréciait avant l’accident. En ce qui concerne la perte de chance de promotion professionnelle, le tribunal a débouté le salarié, estimant qu’il n’avait pas justifié de perspectives d’avancement.

Décisions finales du tribunal

Le tribunal a fixé le montant total des indemnités dues au salarié à 45 854,23 euros, déduisant la provision déjà versée. Il a également ordonné à l’entreprise utilisatrice de rembourser les sommes avancées par la caisse d’assurance-maladie et a condamné l’entreprise garantissant l’entreprise utilisatrice à couvrir les frais liés à la faute inexcusable. L’exécution provisoire de la décision a été ordonnée, et les autres demandes des parties ont été rejetées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la responsabilité de l’employeur en cas de faute inexcusable dans un accident du travail ?

La responsabilité de l’employeur en cas de faute inexcusable est régie par l’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale. Cet article stipule que :

« La victime d’un accident du travail imputable à la faute inexcusable de l’employeur peut prétendre à l’indemnisation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. »

Dans le cas présent, le tribunal a reconnu que l’accident dont a été victime le salarié était imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice. Cela signifie que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité envers son salarié, ce qui a entraîné des conséquences graves pour ce dernier.

Cette reconnaissance de la faute inexcusable ouvre droit à une indemnisation élargie pour la victime, incluant des préjudices qui ne sont pas couverts par le régime général des accidents du travail.

Comment sont évalués les préjudices subis par la victime d’un accident du travail ?

L’évaluation des préjudices subis par la victime d’un accident du travail est effectuée par un expert médical, comme le stipule la jurisprudence et les pratiques judiciaires. Dans ce cas, le tribunal a ordonné une expertise médicale pour évaluer les différents types de préjudices.

Les préjudices sont classés en plusieurs catégories, notamment :

– **Déficit fonctionnel temporaire** : Il est évalué en fonction de l’incapacité à poursuivre les activités personnelles. L’expert a retenu des périodes d’incapacité totale et partielle, ce qui a permis de calculer une indemnité.

– **Souffrances endurées** : L’expert a évalué les souffrances physiques et morales sur une échelle de 1 à 7, permettant ainsi de quantifier le préjudice.

– **Préjudice esthétique** : Ce préjudice est évalué en tenant compte de l’impact de l’accident sur l’apparence physique de la victime.

– **Préjudice d’agrément** : Il s’agit de l’indemnisation pour la perte de loisirs et d’activités que la victime ne peut plus pratiquer.

– **Déficit fonctionnel permanent** : Ce préjudice est évalué en fonction du taux d’incapacité permanente, déterminé par l’expert.

Chaque type de préjudice est évalué séparément, et le tribunal se base sur les conclusions de l’expert pour fixer le montant des indemnités.

Quelles sont les conséquences financières pour l’employeur en cas de faute inexcusable ?

Les conséquences financières pour l’employeur en cas de faute inexcusable sont significatives. Selon l’article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, l’employeur est tenu de réparer l’ensemble des préjudices subis par la victime.

Cela inclut :

– **Les frais d’expertise** : L’employeur doit prendre en charge les frais liés à l’expertise médicale.

– **Les indemnités allouées** : L’employeur est responsable du paiement des indemnités pour les souffrances endurées, le préjudice esthétique, le préjudice d’agrément, et tout autre préjudice reconnu par le tribunal.

– **La majoration de capital** : En cas de faute inexcusable, la victime peut également prétendre à une majoration de capital.

Dans cette affaire, la société [3] a été condamnée à indemniser la victime, et la société [4] a été tenue de garantir la société [3] pour l’ensemble des sommes dues, y compris les frais d’expertise et les indemnités allouées.

Quelles sont les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile concernant les frais de justice ?

L’article 700 du Code de procédure civile stipule que :

« Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans le cadre de cette affaire, le tribunal a alloué à la victime une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700, ce qui couvre les frais de justice engagés par la victime pour faire valoir ses droits.

Cette disposition permet de compenser les frais non remboursés par le système judiciaire, et elle est souvent utilisée pour alléger le fardeau financier des parties qui ont dû engager des frais pour obtenir réparation de leurs préjudices.

MINUTE N° :
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON

POLE SOCIAL – CONTENTIEUX GENERAL

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT DU :

MAGISTRAT :

ASSESSEURS :

DÉBATS :

PRONONCE :

AFFAIRE :

NUMÉRO R.G :

3 février 2025

Florence AUGIER, présidente

Marie-José MARQUES, assesseur collège salarié

assistées lors des débats et du prononcé du jugement par Sophie RAOU, greffière

tenus en audience publique le 2 décembre 2024

jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 3 février 2025 par le même magistrat

Monsieur [U] [E] C/
Société [4] [Localité 5], Société [3]

N° RG 19/03261 – N° Portalis DB2H-W-B7D-UM5I

DEMANDEUR

Monsieur [U] [E]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Lynda LETTAT-OUATAH, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 189

DÉFENDERESSES

Société [4] [Localité 5],
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

Société [3],
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par la SELARL BENOIT – LALLIARD – ROUANET, avocats au barreau de LYON, vestiaire : 505

PARTIE INTERVENANTE

CPAM DU RHONE, dont le siège social est sis [Adresse 6]
représentée par Mme [Z] [T], munie d’un pouvoir

Notification le :
Une copie certifiée conforme à : [U] [E], Société [4] [Localité 5], Société [3], CPAM DU RHONE, la SELARL BENOIT – LALLIARD – ROUANET, vestiaire : 505, Me Lynda LETTAT-OUATAH, vestiaire : 189, la SCP NORMAND & ASSOCIES, vestiaire : P 141
Une copie revêtue de la formule exécutoire : Me Lynda LETTAT-OUATAH, vestiaire : 189
Une copie certifiée conforme au dossier

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement en date du 10 janvier 2022, ce tribunal a :

– dit que l’accident du travail dont monsieur [U] [E] a été victime le 16 novembre 2016 est imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice substituée à l’entreprise de travail temporaire,

– dit que l’indemnité en capital attribué à monsieur [E] doit être majorée au taux maximum prévu par la loi,

– alloué à monsieur [E] une provision de 5 000 euros à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices,

– ordonné, avant-dire droit sur l’évaluation des préjudices, une expertise médicale de monsieur [E] confiée au Docteur [R] [F],

– condamné la société [3] garantie par la société [4] à payer à monsieur [E] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

Par jugement du 2 mai 2023, ce tribunal à :

– ordonné un complément d’expertise médicale, confié au docteur [R] [F], afin d’évaluer le déficit fonctionnel permanent.

Le docteur [R] [F] a déposé ses rapports d’expertise les 30 juin 2022 et 26 mars 2024.

Les conclusions de l’expert sont les suivantes :

– Déficit fonctionnel temporaire :

▸ déficit fonctionnel temporaire total pendant 3 jours correspondant à la durée des hospitalisations

▸ déficit fonctionnel temporaire partiel :

– 50 % pendant 14 jours (période où M. [E] avait le bras en écharpe)

– 25 % pendant 44 jours (période des pansements)

– 15 % pendant 248 jours (jusqu’à la consolidation le 21 septembre 2017)

– Assistance d’une tierce personne :

▸ 1h par jour pendant 2 mois.

– Perte de chance de promotion professionnelle :

Monsieur [E] explique que son traumatisme a entraîné le non-renouvellement de ses contrats d’intérim pour inaptitude ce qui l’a empêché d’évoluer vers un éventuel CDI.

– Souffrances endurées évaluées à 3,5/7.

– Préjudice esthétique évalué à 2/7.

– Préjudice d’agrément : monsieur [E] explique ne pas avoir repris la pratique de la musculation, du bricolage, des jeux vidéo et avoir une gêne à la pratique du vélo.

– Déficit fonctionnel permanent évalué à 7 %.

– Pas d’autres préjudices.

Monsieur [U] [E] sollicite la fixation des indemnités qui lui sont dues aux sommes suivantes :

– 1 262,07 euro au titre des frais divers,

– 2 077,43 euros au titre de l’assistance par tierce personne,

– 30 000 euros au titre de la perte de possibilités de promotion professionnelle,

– 1 791,80 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

– 20 000 euros au titre des souffrances endurées,

– 4 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

– 89 193,04 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

– 7 000 euros au titre du préjudice esthétique définitif,

– 10 000 euros au titre du préjudice d’agrément,

outre le paiement d’une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du CPC avec exécution provisoire de la décision à intervenir.

La société [3] demande au tribunal de réduire à de plus justes proportions l’indemnisation allouée au titre des frais divers, de l’assistance par tierce personne, du déficit fonctionnel temporaire total et partiel, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice esthétique permanent et de rejeter les demandes d’indemnisation formulées au titre du préjudice esthétique temporaire, du préjudice d’agrément et de la perte de chance de promotion professionnelle.

Elle demande également de déduire la somme de 5 000 euros précédemment alloués à titre de provision à valoir sur la liquidation du préjudice définitif.

Elle rappelle que l’indemnisation allouée est exclusivement liée à la faute inexcusable commise par la société [4] substituée à la société [3] dans la direction du salarié et sollicite la condamnation de la société [4] à la relever et garantir de l’intégralité des conséquences financières résultant de l’action engagée par monsieur [E].

Elle conclut au débouté de la nouvelle demande de condamnation au titre de l’article 700 formée par Monsieur [E].

La société [4] conclut à la fixation de l’indemnisation des préjudices de M. [E] aux sommes suivantes :

– 688 euros au titre des besoins tierce personne

– 1 445 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total et partiel

– 1 200 euros au titre des frais divers

– 6 000 euros au titre des souffrances endurées

– 3 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent

– 15 785 euros au titre du DFP.

Elle sollicite le débouté de M. [E] de ses demandes au titre du préjudice esthétique temporaire, du préjudice d’agrément et de la perte de chance de promotion professionnelle ainsi que de sa demande au titre de l’article 700 du CPC.

La CPAM RHONE ALPES ne formule pas d’observations en ce qui concerne les sommes allouées au titre des préjudices retenus et demande au tribunal de dire et juger qu’elle procédera au recouvrement de l’intégralité des sommes dont elle serait amenée à faire l’avance directement auprès de l’employeur soit les sommes versées au titre de la rente et les sommes versées au titre des préjudices reconnus y compris les frais relatifs à la mise en œuvre de l’expertise.

En l’absence d’un assesseur, la présidente a statué seule avec l’accord des parties et après avoir recueilli l’avis de l’assesseur présent, en application des articles L.218-1 et L.211-16 du code l’organisation judiciaire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l’article L. 452 -3 du code de la sécurité sociale, la victime d’un accident du travail imputable à la faute inexcusable l’employeur peut prétendre à l’indemnisation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

Par décision n°2010-08 QPC du 18 juin 2010, le conseil constitutionnel a reconnu au salarié victime d’un accident du travail imputable à la faute inexcusable de l’employeur le droit de réclamer devant les juridictions de sécurité sociale la réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Monsieur [E] est né le 22 décembre 1996, il était âgé de 20 ans à la date de l’accident du travail survenu le 16 novembre 2016 au cours duquel son auriculaire gauche a été sectionné lors du déblocage d’un support métallique inadapté.

Il a été opéré le lendemain pour une amputation trans P1 D5 gauche et a regagné son domicile le 18 novembre 2016.

Il a eu des pansements pendant une durée de 2 mois puis a débuté des séquences de rééducation le 17 janvier 2017 jusqu’au 18 avril 2017 correspondant à 12 séances.

Il a également été vu en consultation par une psychologue clinicienne à 5 reprises.

Le médecin-conseil a déclaré l’état de Monsieur [E] consolidé le 22 septembre 2017 avec un taux d’IPP de 7 %.

Le médecin expert constate une force de serrage diminuée de 2/3 à gauche et note les plaintes de Monsieur [E] concernant des douleurs au moindre choc, barométriques, de type membre fantôme, aux gestes répétitifs, un manque de force, une intolérance au froid, une gêne esthétique, une appréhension face aux objets contondants et une gêne psychologique.

– Sur les frais divers :

Monsieur [E] justifie avoir bénéficié de l’assistance d’un médecin-conseil à 2 reprises lors des opérations d’expertise des 30 juin 2022 et 26 mars 2024.

Il produit au débat deux factures de 600 euros soit une somme totale de 1200 euros qu’il n’y a pas lieu de revaloriser alors que l’expert lui-même fixe le tarif de sa prestation à la même somme en 2022 et 2024.

Il sera en conséquence allouée à Monsieur [E] à ce titre la somme de 1200 euros.

– Sur l’assistance par tierce personne :

L’expert retient la nécessité de l’assistance d’une tierce personne non spécialisée 1h par jour pendant 2 mois.

L’expert n’a pas contredit que monsieur [E] n’a pas pu reprendre la conduite avant le mois de mai 2017 de sorte qu’il a dû être accompagné dans ses déplacements par un tiers.

L’indemnité allouée au titre de l’assistance tierce personne ne peut être réduite en cas d’assistance par un proche de la victime afin de favoriser l’entraide familiale.

Il sera alloué à M. [E] en réparation du préjudice subi à ce titre la somme de :

▸ 43 jours x 1 h x 22 euros = 946 euros

▸ 3 heures x 120jours/7 x 22 euros = 1131,43 euros

▸ total : 2 077,43 euros.

– Sur le déficit fonctionnel temporaire :

Il est justifié d’une incapacité totale de poursuite des activités personnelles pendant 3 jours correspondants à l’hospitalisation du 16 au 18 novembre 2016.

L’expert a retenu 3 périodes d’incapacité partielle de poursuite des activités personnelles : soit 14 jours au taux de 50 % correspondant à la période où Monsieur [E] avait le bras en écharpe, 44 jours au taux de 25 % correspondant à la période des pansements et 248 jours au taux de 15 % jusqu’au 22 septembre 2017 correspondant à la fin de l’arrêt de travail.

Il sera en alloué à M. [E], au titre du déficit fonctionnel temporaire en retenant une indemnité journalière moyenne de 31 euros compte tenu de la gravité des blessures, de la longueur de l’arrêt et du suivi psychologique et psychiatrique, la somme suivante :

▸ 31 euros x 3 jours = 93 euros

▸ 31 euros x 14 jours x 50 % = 217 euros

▸ 31 euros x 44 jours x 25 % = 341 euros

▸ 31 euros x 248 jours x 15 % = 1 153,20 euros

Total : 1804,20 euros

Il lui sera alloué 1 791,80 euros au vu des demandes formulées.

– Sur les souffrances endurées :

L’expert judiciaire a retenu un taux de 3,5/7 correspondant à des souffrances modérées à moyennes.

Les souffrances physiques et morales endurées résultent du traumatisme initial, d’une intervention chirurgicale avec une hospitalisation de 3 jours suivie d’une rééducation fonctionnelle et de consultations psychologiques.

Le tribunal dispose des éléments pour évaluer les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, dignité et intimité présentée, et des traitements subis à la somme de 10 000 euros.

– Sur le préjudice esthétique temporaire et permanent :

L’expert retient un préjudice esthétique correspondant à l’amputation de l’auriculaire de la main gauche qu’il fixe à 2/7 .

Le préjudice esthétique temporaire résultant de cette amputation et du port de pansements pendant deux mois est caractérisé.

Il lui sera alloué la somme de 2 000 euros à ce titre.

Monsieur [E] a un préjudice esthétique permanent résultant de l’amputation de son auriculaire gauche particulièrement visible et qui lui cause un préjudice particulier compte tenu de son jeune âge.

Il lui sera alloué la somme de 6 000 euros en réparation du préjudice esthétique définitif.

– Sur le préjudice d’agrément :

Monsieur [E] justifie par les témoignages de ses proches qu’il pratiquait notamment la musculation et le bricolage avant l’accident.

Au vu des séquelles de l’accident il ne peut être contesté que monsieur [U] [E] ne peut plus pratiquer ces activités sportives et de loisirs spécifiques dès lors qu’il a perdu les deux tiers de la force de serrage de sa main gauche.

L’indemnisation du préjudice d’agrément n’est pas limitée à l’impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisir exercée antérieurement à l’accident mais indemnise également les limitations ou les difficultés à poursuivre ses activités.

Le préjudice d’agrément postérieur à la consolidation sera réparé au vu du très jeune âge de monsieur [E] par l’allocation d’une somme de 7 000 euros.

– Sur la perte de chance de promotion professionnelle :

Monsieur [E] expose qu’embauché en qualité d’intérimaire depuis le 16 décembre 2015, il donnait toute satisfaction à l’employeur et que sans l’accident il aurait pu se voir proposer un CDI au sein de la société.

Il y a lieu de rappeler que la rente majorée versée à l’assuré indemnise d’une part les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité.

Il en résulte que les préjudices résultant d’un changement d’emploi et/ou d’un éventuel déclassement professionnel sont déjà réparées par la rente versée.

Il ne s’agit pas ici de réparer la perte de l’emploi mais uniquement l’impossibilité pour la victime d’obtenir une situation professionnelle plus favorable qu’il était sur le point d’obtenir.

En l’espèce monsieur [E] ne justifie pas de perspectives d’avancement proches et certaines dans l’entreprise qui l’employait.

Il y a lieu en conséquence de débouter monsieur [E] de sa demande à ce titre.

– Sur le déficit fonctionnel permanent :

Pour évaluer le taux du DFP l’expert retient que monsieur [E], qui a été consolidé à l’âge de 21 ans, présente dans le cadre de son amputation de l’auriculaire gauche, une importante baisse de la force de serrage et des séquelles psychologiques.

Il évalue ce taux à 7 % prenant en compte la perte totale de la fonction d’un doigt sur le côté non dominant ainsi que des manifestations anxieuses discrètes spécifiques avec réminiscences pénibles et tension psychique.

L’évaluation réalisée par l’expert tient compte expressément des douleurs et des troubles dans les conditions d’existence en plus de l’atteinte physiologique.

Il n’est pas justifié que l’expert ait omis de prendre en compte chaque composante du déficit fonctionnel permanent dans son évaluation.

La valeur du point est déterminée en fonction de l’importance du taux du déficit, de l’âge de la victime et de la durée pendant laquelle le trouble sera subi.

Il n’est pas établi que cette méthode d’indemnisation ne permette pas la réparation intégrale du préjudice alors que le taux fixé tient compte de l’ensemble des composantes du DFP.

Il y a lieu en conséquence d’indemniser le déficit fonctionnel permanent par multiplication du taux du déficit fonctionnel permanent par la valeur du point soit 2 255 euros.

Il sera en conséquence alloué à monsieur [E] la somme de 15 785 euros au titre du déficit fonctionnel permanent.

– Sur les autres demandes :

Il y a lieu de dire et juger que la caisse d’assurance-maladie RHONE ALPES doit faire l’avance de l’intégralité des sommes revenant à la victime en réparation des préjudices et dispose du droit d’en recouvrer le montant sur la société [3] garantie par la société [4].

Il y a lieu de rappeler que la société [4] est tenue de garantir la société [3] de toutes les conséquences résultant de la reconnaissance de la faute inexcusable : majoration de capital, frais d’expertise, sommes allouées en réparation des préjudices et de l’article 700 du CPC outre les dépens.

L’équité commande qu’il soit alloué à M. [E] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du CPC.

L’exécution provisoire, compatible avec la nature de l’affaire, sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

La présidente du pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant seule après avoir pris l’avis de l’assesseur présent, par jugement mis à disposition, contradictoire et en premier ressort,

Vu les jugements du pôle social du tribunal judiciaire Lyon en date des 10 janvier 2022 et 2 mai 2023,

Fixe le montant des indemnités revenant à monsieur [U] [E] aux sommes suivantes:

– 1 200 euros au titre des frais d’assistance à expertise

– 2 077,43 euros au titre de l’assistance tierce personne

– 1 791,80 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire

– 10 000 euros au titre des souffrances endurées

– 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire

– 6 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent

– 7 000 euros au titre du préjudice d’agrément

– 15 785 euros au titre du déficit fonctionnel permanent

soit une indemnisation totale s’élevant à 45 854,23 euros dont il y a lieu de déduire la provision de 5 000 euros.

Condamne la société [3] garantie par la société [4] à payer à monsieur [E] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du CPC.

Dit que la CPAM RHONE ALPES doit faire l’avance de l’intégralité des sommes revenant à la victime en réparation de ses préjudices et dispose du droit d’en recouvrer le montant sur la société [3].

Condamne la société [3] à rembourser à la caisse les sommes avancées par celle-ci au titre des préjudices définitivement alloués, de la majoration du capital et des frais d’expertise.

Condamne la société [4] à garantir la société [3] des sommes mises à sa charge au titre de la majoration du capital, des indemnisations allouées en réparation des préjudices subis, des frais d’expertise, des indemnités allouées au titre de l’article 700 du CPC et des dépens.

Ordonne l’exécution provisoire la présente décision.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la société [3] garantie par la société [4] aux dépens.
Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 3 février 2025 et signé par la présidente et la greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon