Comment et pourquoi identifier l’auteur d’un compte Instagram ? 

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Comment et pourquoi identifier l’auteur d’un compte Instagram ? 

L’Essentiel : Pour identifier l’auteur d’un compte Instagram, il est possible de demander une ordonnance sur requête au juge judiciaire. Cette procédure permet d’obtenir de la société Google Ireland Limited les données nécessaires à l’identification de l’auteur, en cas de contenu illicite ou pour un motif légitime. La procédure est non contradictoire, car l’intermédiaire technique n’est pas considéré comme partie adverse. Il est essentiel de justifier d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible lié à un litige potentiel, afin que la mesure d’instruction soit pertinente et utile pour établir la preuve des faits.

Passez par l’ordonnance sur requête

En présence d’un contenu illicite sur Instragram ou pour tout motif légitime, afin d’identifier l’auteur du compte incriminé, il convient de faire ordonner sur requête du juge judiciaire, à la société Google Ireland Limited, de communiquer toutes les données en sa possession permettant d’identifier l’auteur.

Une procédure non contradictoire

Un intermédiaire technique tel que Google auquel sont réclamées par ordonnance sur requête des données, aux fins d’identifier un créateur de contenus, n’est pas la partie adverse pour le requérant au sens de l’article 493 du code de procédure civile, la partie adverse étant le créateur de contenus (par définition non identifié au stade de cette procédure en requête).

Si les conditions d’application de la procédure sur requête fixées par l’article 493 du code de procédure civile sont réunies, la victime sera fondée à ne pas appeler la partie adverse et à ne pas recourir à une procédure contradictoire.

Des données personnelles pour préparer le procès

Pour rappel, aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’article 145 suppose l’existence d’un motif légitime c’est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

De plus, si la partie demanderesse dispose d’ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d’instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée.

Ni l’urgence ni l’absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d’application de ce texte.

Il résulte enfin de l’article 493 du code de procédure civile qu’une ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

A titre d’exemple, le motif légitime peut consister à faire supprimer ou sanctionner des propos susceptibles de recevoir une qualification pénale d’injure au sens de l’alinéa 2 de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRÊT DU 05 JANVIER 2023

AFFAIRE GRACIEUSE

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00545 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGND4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 mai 2022 – TJ de PARIS – RG n°22/1195

APPELANT

M. [G] [H]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicolas BÉNOIT de la SCP LUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0077

Assisté à l’audience par Me Pierre-Eugène BURGHARDT avocat au barreau de PARIS, toque : P77

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été évoquée le 24 novembre 2022, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Thomas RONDEAU, Conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Saveria MAUREL

MINISTERE PUBLIC : dossier transmis au ministère public le 4 octobre 2022, qui s’en rapporte.

ARRÊT :

— RENDU NON CONTRADICTOIREMENT

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [G] [H] a déposé, le 18 mai 2022, devant le président du tribunal judiciaire de Paris, une requête, au visa des articles 29 alinéa 2 et 33 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, de l’article 145 du code de procédure civile, de l’article L.34-1 du code des postes et des communications électroniques et de l’article 845 du code de procédure civile, aux fins de voir ordonner à la société Google Ireland Limited, société de droit irlandais immatriculée en Irlande, enregistrée sous le numéro d’immatriculation 368047, domiciliée [Adresse 3], de lui communiquer le nom, le prénom, la date de naissance, l’adresse postale du titulaire du compte mail [Courriel 4] ainsi que toutes les autres données en sa possession permettant de l’identifier, en commettant pour ce faire un huissier.

Par ordonnance du même jour, ce magistrat n’a pas fait droit à la requête, au motif que la mesure sollicitée n’exige pas de déroger à la contradiction.

M. [H] a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du tribunal le 30 mai 2022, enregistrée le 1er juin 2022.

Le magistrat de première instance, saisi sur le fondement de l’article 952 du code de procédure civile a, par décision du 3 juin 2022, refusé de se rétracter.

En application de l’alinéa 2 de ce texte, le dossier a été transmis à la cour par le greffe du tribunal judiciaire de Paris.

Aux termes de sa déclaration d’appel, à laquelle il est renvoyé s’agissant des moyens qui y sont développés, M. [H] demande à la cour d’ordonner à la société Google Ireland Limited de lui communiquer le nom, le prénom, la date de naissance, l’adresse postale du titulaire du compte mail [Courriel 4] ainsi que toutes les autres données en sa possession permettant de l’identifier.

L’affaire a été communiquée au ministère public le 20 octobre 2022.

SUR CE LA COUR

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’article 145 suppose l’existence d’un motif légitime c’est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

De plus, si la partie demanderesse dispose d’ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d’instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée.

Ni l’urgence ni l’absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d’application de ce texte.

Il résulte enfin de l’article 493 du code de procédure civile qu’une ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

En l’espèce, il y a lieu de relever :

— que le requérant fait état de ce que, sur le réseau social Instagram, a été publié le 12 mai 2021 un message parodiant l’émission ‘Bande de food’ du requérant, avec l’usage des termes ‘bande de cons’ ;

— qu’au stade de la mesure d’instruction, il suffit de constater que les propos litigieux sont susceptibles de recevoir une qualification pénale d’injure au sens de l’alinéa 2 de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, le terme ‘cons’ étant sans difficulté une invective présentant un caractère grossier, M. [H] justifiant par ailleurs de ce qu’il a déposé une plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d’instruction, du chef d’injure publique envers particulier ;

— qu’il est justifié d’ailleurs de ce que l’internaute en cause n’a pu être identifié ;

— qu’à la suite d’une première requête, il apparaît que la société Facebook Ireland Limited, gestionnaire des données d’Instagram, a communiqué à M. [H] l’adresse courriel [Courriel 4] sous laquelle le compte mis en cause a été enregistré ;

— que la communication des données relatives à cette adresse est ainsi de nature à améliorer la situation probatoire de M. [H] aux fins d’identifier l’internaute ;

— que, certes, la procédure sur requête est une procédure non contradictoire ;

— que, cependant, un intermédiaire technique auquel sont réclamées par ordonnance sur requête des données, aux fins d’identifier un créateur de contenus, n’est pas la partie adverse pour le requérant au sens de l’article 493 du code de procédure civile, la partie adverse étant le créateur de contenus, par définition non identifié à ce stade ;

— que les conditions d’application de la procédure sur requête fixées par l’article 493 du code de procédure civile sont donc réunies, M. [H] étant fondé à ne pas appeler la partie adverse et à ne pas recourir à une procédure contradictoire.

Aussi, il y a lieu d’infirmer l’ordonnance entreprise et de faire droit à la demande dans les termes indiqués au dispositif.

Cette procédure étant conduite dans l’intérêt de M. [G] [H], ce dernier supportera les dépens exposés.

PAR CES MOTIFS

Statuant hors la présence du public, non contradictoirement,

Infirme l’ordonnance rendue sur requête le 18 mai 2022 ;

Statuant à nouveau,

Ordonne à la société Google Ireland Limited, société de droit irlandais enregistrée sous le numéro d’immatriculation 368047, domiciliée [Adresse 3], de communiquer à M. [G] [H] le nom, le prénom, la date de naissance, l’adresse postale du titulaire du compte mail [Courriel 4] ainsi que toutes les autres données en sa possession permettant de l’identifier ;

Laisse les dépens exposés dans le cadre de cette procédure à la charge de M. [G] [H].

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce qu’une ordonnance sur requête ?

Une ordonnance sur requête est une décision judiciaire rendue sans la présence de la partie adverse, permettant à un requérant d’obtenir des mesures provisoires.

Cette procédure est souvent utilisée pour obtenir des informations ou des preuves avant un procès, notamment dans des cas où l’identité de l’auteur d’un contenu illicite doit être établie.

Dans le contexte de la loi française, l’article 493 du code de procédure civile précise que cette ordonnance peut être émise lorsque le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse, ce qui est fréquent dans les affaires impliquant des contenus en ligne.

Quels sont les motifs légitimes pour demander une ordonnance sur requête ?

Les motifs légitimes pour demander une ordonnance sur requête incluent la nécessité de préserver des preuves avant un procès potentiel.

Selon l’article 145 du code de procédure civile, il doit exister un fait crédible et plausible qui présente un lien utile avec un litige potentiel.

Ce fait ne doit pas être une simple hypothèse, mais doit être suffisamment déterminé pour justifier la mesure d’instruction sollicitée.

Il est également essentiel que la mesure ne porte pas atteinte aux droits d’autrui et qu’elle soit pertinente et utile pour le litige.

Comment se déroule la procédure non contradictoire ?

La procédure non contradictoire signifie que le requérant peut obtenir une décision sans que la partie adverse soit présente ou informée.

Dans le cas d’une ordonnance sur requête, l’intermédiaire technique, comme Google, n’est pas considéré comme la partie adverse.

Cela permet au requérant de demander des informations sans avoir à engager une procédure contradictoire, ce qui peut accélérer le processus d’identification de l’auteur d’un contenu illicite.

Quelles sont les conditions d’application de l’article 145 du code de procédure civile ?

L’article 145 du code de procédure civile impose plusieurs conditions pour qu’une mesure d’instruction soit ordonnée.

Il faut d’abord établir l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible lié à un litige potentiel.

Le requérant doit également démontrer que le litige n’est pas manifestement voué à l’échec et que la mesure demandée améliorera la situation probatoire.

Si le requérant dispose déjà de preuves suffisantes, la demande peut être rejetée.

Quels types de données peuvent être demandés par ordonnance sur requête ?

Les données pouvant être demandées par ordonnance sur requête incluent des informations personnelles telles que le nom, le prénom, la date de naissance et l’adresse postale d’un individu.

Dans le cas présent, M. [H] a demandé à Google Ireland Limited de communiquer ces informations concernant le titulaire d’un compte mail spécifique.

Ces données sont essentielles pour identifier l’auteur d’un contenu illicite, permettant ainsi à la victime de préparer son procès.

Quel est l’impact de la décision de la Cour d’Appel de Paris ?

La décision de la Cour d’Appel de Paris a infirmé l’ordonnance initiale qui refusait de communiquer les données demandées.

En ordonnant à Google de fournir les informations, la Cour a reconnu la légitimité de la demande de M. [H] et l’importance de l’identification de l’auteur du contenu litigieux.

Cette décision souligne également l’application des articles 145 et 493 du code de procédure civile dans le cadre de la protection des droits des victimes de contenus illicites en ligne.


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