Hospitalisation sous contrainte : évaluation de l’urgence et des soins nécessaires

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Hospitalisation sous contrainte : évaluation de l’urgence et des soins nécessaires

L’Essentiel : Madame [V] [L], hospitalisée depuis le 03 janvier 2025 sous une mesure de soins psychiatriques, a été placée en urgence à la demande de son époux. Le 08 janvier, le directeur de l’institut a saisi le magistrat compétent, et le Procureur a soutenu le maintien de cette mesure. Absente à l’audience, Madame [V] a exprimé par écrit son refus de comparaître. Les certificats médicaux ont confirmé l’urgence de la situation, justifiant l’hospitalisation. Le juge a décidé de maintenir la mesure, considérant que la patiente ne pouvait consentir aux soins en raison de son état mental. L’ordonnance est susceptible d’appel.

Contexte de l’affaire

Madame [V] [L] épouse [Y], née le 02 janvier 1954, est hospitalisée depuis le 03 janvier 2025 au INSTITUT [10] sous une mesure de soins psychiatriques, décidée par le directeur de l’établissement à la demande de son époux, Monsieur [U] [Y]. Cette hospitalisation a été mise en place en urgence, conformément à l’article L. 3212-3 du code de la santé publique.

Procédure judiciaire

Le 08 janvier 2025, le directeur de l’institut a saisi le magistrat compétent pour statuer sur la mesure de soins psychiatriques. Madame le Procureur de la République a exprimé un avis favorable au maintien de cette mesure. Lors de l’audience, Madame [V] était absente, représentée par son avocat, Me Anna KOENEN. Les débats ont eu lieu en audience publique, et l’affaire a été mise en délibéré pour le 14 janvier 2025.

Examen de la situation de la patiente

Selon l’article L 3211-12-1, le juge des libertés et de la détention doit systématiquement examiner la situation des patients hospitalisés sans consentement. L’article L 3212-1 stipule que l’admission en soins psychiatriques peut être décidée lorsque les troubles mentaux empêchent le consentement et nécessitent des soins immédiats. Madame [V] a exprimé par écrit son souhait de ne pas se présenter à l’audience, invoquant sa souffrance.

Évaluation de l’urgence

L’article L 3212-3 permet une admission en soins psychiatriques en cas d’urgence, sur la base d’un certificat médical. Les certificats médicaux présentés indiquent un danger pour la patiente et pour autrui, en raison de troubles mentaux graves. L’urgence de la situation a été confirmée par plusieurs médecins, justifiant ainsi la mesure d’hospitalisation.

Décision du juge

Après avoir examiné les certificats médicaux et les avis des médecins, le juge a conclu que les restrictions à la liberté de Madame [V] étaient adaptées et nécessaires. La mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète a été maintenue, considérant que la patiente ne pouvait pas consentir aux soins en raison de son état mental.

Voies de recours

L’ordonnance du juge est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles dans un délai de dix jours. Seules certaines parties peuvent faire appel, y compris le ministère public. La décision du juge n’est pas suspensive d’exécution, sauf si le Premier Président en décide autrement.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de l’hospitalisation sous contrainte selon le Code de la santé publique ?

L’article L 3212-1 du Code de la santé publique stipule que l’admission d’une personne en soins psychiatriques sous le régime de l’hospitalisation complète peut être décidée par le directeur d’un établissement habilité lorsque les troubles mentaux de la personne rendent impossible son consentement.

Cette admission est justifiée lorsque l’état mental de la personne nécessite des soins immédiats, assortis d’une surveillance médicale constante, ou d’une surveillance régulière justifiant une prise en charge adaptée.

Il est donc essentiel que l’état de santé de la personne soit tel qu’il nécessite une intervention rapide et que son consentement ne puisse être obtenu en raison de la gravité de ses troubles.

En cas d’urgence, l’article L 3212-3 précise que le directeur peut prononcer l’admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers, sur la base d’un seul certificat médical, et que des certificats médicaux supplémentaires doivent être établis par deux psychiatres distincts.

Ainsi, l’hospitalisation sous contrainte repose sur des critères stricts, garantissant que la mesure est à la fois nécessaire et proportionnée à l’état de la personne concernée.

Comment le juge des libertés et de la détention intervient-il dans les mesures d’hospitalisation ?

L’article L 3211-12-1 du Code de la santé publique précise que le juge des libertés et de la détention doit systématiquement statuer sur la situation des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète, sans leur consentement.

Cette intervention judiciaire est cruciale pour garantir le respect des droits des patients et pour s’assurer que les mesures prises sont conformes à la législation en vigueur.

Le juge doit examiner les éléments présentés, notamment les certificats médicaux, et évaluer si les conditions d’hospitalisation sous contrainte sont remplies.

Il est également important de noter que le juge doit tenir compte de la volonté de la patiente, même si celle-ci ne se présente pas à l’audience, comme cela a été le cas dans cette affaire où Madame [V] [L] a exprimé par écrit son souhait de ne pas comparaître.

Ainsi, le rôle du juge est de garantir un équilibre entre la protection de la santé mentale de la personne et le respect de ses droits fondamentaux.

Quelles sont les voies de recours contre une ordonnance de maintien en hospitalisation complète ?

L’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles, comme le prévoit l’article R.3211-13 du Code de la santé publique.

Les parties à la procédure, telles que le requérant, la personne sous soins psychiatriques, le préfet ou le directeur d’établissement, peuvent interjeter appel dans un délai de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance.

Le ministère public a également la possibilité d’interjeter appel dans le même délai.

La déclaration d’appel doit être motivée et transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’Appel, qui en informe le greffier du tribunal judiciaire.

Il est important de noter que, sauf décision contraire du Premier Président, le recours n’est pas suspensif d’exécution, ce qui signifie que la mesure d’hospitalisation peut continuer à s’appliquer pendant la durée de l’appel.

Le Premier Président statue dans un délai de douze jours, qui peut être prolongé à vingt-cinq jours si une expertise est ordonnée.

Ces dispositions garantissent que les droits des parties sont respectés tout en permettant une réponse rapide aux situations d’urgence en matière de santé mentale.

TRIBUNAL JUDICIAIRE de VERSAILLES

ORDONNANCE DE MAINTIEN D’UNE HOSPITALISATION COMPLÈTE
(Art L. 3211-12-1 code de la santé publique)

Dossier N° RG 25/00084 – N° Portalis DB22-W-B7J-SWEG
N° de Minute : 25/84

M. le directeur du INSTITUT [10]

c/
Madame [V] [L] épouse [Y]

NOTIFICATION par courriel contre récépissé au défendeur par remise de copie contre signature

LE : 14 Janvier 2025

– NOTIFICATION par courriel contre récépissé à :
– l’avocat
– monsieur le directeur de l’établissement hospitalier

LE : 14 Janvier 2025

– NOTIFICATION par lettre simple au tiers

LE : 14 Janvier 2025

– NOTIFICATION par remise de copie à Madame le Procureur de la République

LE : 14 Janvier 2025

______________________________

Le greffier

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ORDONNANCE
Hospitalisation sous contrainte

l’an deux mil vingt cinq et le quatorze Janvier

Devant Nous, Madame Agnès BELGHAZI, Vice-Présidente, au tribunal judiciaire de Versailles statuant en application du code de la santé publique assisté(e) de Madame Christine VILETTE, greffier, à l’audience du 14 Janvier 2025

DEMANDEUR

Monsieur le directeur du INSTITUT [10]
régulièrement convoqué, absent non représenté

DÉFENDEUR

Madame [V] [L] épouse [Y]
[Adresse 4]
[Localité 7]
actuellement hospitalisée au INSTITUT [10]
régulièrement convoquée, absente et représentée par Me Anna KOENEN, avocat au barreau de VERSAILLES,

tiers

Monsieur [U] [Y]
[Adresse 8]
[Localité 7]

régulièrement avisé, absent

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

– Madame le Procureur de la République
près le Tribunal Judiciaire de Versailles

régulièrement avisée, absente non représentée

Madame [V] [L] épouse [Y], née le 02 Janvier 1954 à [Localité 9] (URSS), demeurant [Adresse 5], fait l’objet, depuis le 03 janvier 2025 au INSTITUT [10], d’une mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation sous contrainte sur décision du directeur d’établissement, en application des dispositions de l’article L. 3212-3 du code de la santé publique, en urgence et à la demande d’un tiers Monsieur [U] [Y], son époux.

Le 08 Janvier 2025, Monsieur le directeur du INSTITUT [10] a saisi le magistrat statuant en application du code de la santé publique afin qu’il soit statué, conformément aux dispositions des articles L 3211-12-1 à L 3212-12 et des articles L 3213-1 à L 3213-11 du code de la santé publique, sur cette mesure.

Madame le Procureur de la République, avisée, a fait connaître son avis favorable au maintien de la mesure.

A l’audience, Madame [V] [L] épouse [Y] était absente et représentée par – Me Me Anna KOENEN, avocat au barreau de VERSAILLES.

Les débats ont été tenus en audience publique.

La cause entendue à l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 14 Janvier 2025, par mise à disposition de l’ordonnance au greffe du juge des libertés et de la détention.

DISCUSSION

Il résulte des dispositions de l’article L 3211-12-1 du code de la santé publique qu’il appartient au juge des libertés et de la détention de statuer systématiquement sur la situation des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète, sans leur consentement.

L’article L 3212-1 de ce même code prévoit l’admission d’une personne en soins psychiatrique sous le régime de l’hospitalisation complète, sur décision du directeur d’un établissement habilité, lorsque ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, ou d’une surveillance régulière justifiant une prise en charge adaptée.

Sur le défaut de comparution de la patiente :

Par courrier transmis au greffe, le 14 janvier 2025, et adressé au conseil de la patiente, par respect du contradictoire, il ressort que Madame [V] [L] épouse [Y] a exprimé par écrit son souhait de ne pas se présenter à l’audience de ce jour aux motifs qu’elle est « vraiment très souffrante » et qu’elle en est « navrée ».

Dans ce contexte et tenant compte de la libre volonté de la patiente de comparaître à l’audience devant le juge des libertés et de la détention, il convient de rejeter le moyen soutenu.

Sur l’absence de caractérisation de l’urgence

L’article L 3212-3 du code de la santé publique prévoit que :
« En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.
Préalablement à l’admission, le directeur de l’établissement d’accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1° du II de l’article L. 3212-1 et s’assure de l’identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l’appui de sa demande un extrait de jugement de mise sous tutelle ou curatelle. »

Il apparaît en l’état à la lecture des certificats médicaux particulièrement motivés, tant initial que suivants, que les médecins relèvent un danger tant pour la patiente elle-même que pour autrui consécutivement à une décompensation d’allure maniaque, une perturbation des associations idéiques, un discours délirant et diffluent véhiculant des propos délirants, outre des représentations délirantes vécues comme persécutives, et l’absence de critique à l’inadéquation comportementale ainsi que le déni de son état morbide.

L’urgence peut donc se concevoir dans ce dossier et le moyen soutenu sera donc écarté.

Sur le fond

Vu le certificat médical initial, dressé le 03 janvier 2025, par le Docteur [I] ;

Vu le certificat médical dit des 24 heures, dressé le 04 janvier 2025, par le Docteur [X] ;

Vu le certificat médical dit des 72 heures, dressé le 06 janvier 2025, par le Docteur [J] ;

Dans un avis motivé établi le 08 janvier 2025, le Docteur [M] conclut à la nécessité du maintien des soins sous la forme d’une hospitalisation complète. Il y est notamment relevé que la patiente est de « contact hypersyntone », que « l’humeur est exaltée et le déni des troubles est total ».

Il convient, au regard de ces éléments, les restrictions à l’exercice des libertés individuelles de Madame [V] [L] épouse [Y], née le 02 Janvier 1954 à [Localité 9] (URSS), demeurant [Adresse 5] étant adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis, l’intéressée se trouvant dans l’impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits, son état nécessitant des soins assortis d’une surveillance constante, de dire que la mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète sera, en l’état, maintenue.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Rejetons les moyens d’irrégularité invoqués.

Ordonnons le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète de Madame [V] [L] épouse [Y].

Rappelons que l’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’Appel de Versailles dans un délai de dix jours à compter de sa notification. Seules les parties à la procédure définies à l’article R.3211-13 du CSP peuvent faire appel (requérant, personne sous soins psychiatriques, préfet ou directeur d’établissement le cas échéant). Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai. La déclaration d’appel motivée est transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’Appel de Versailles qui en avise sur-le-champ le greffier du tribunal judiciaire et fait connaître la date et l’heure de l’audience aux parties, à leurs avocats, au tiers qui a demandé l’admission en soins et au directeur d’établissement. A moins qu’il n’ait été donné un effet suspensif à l’appel, le premier président statue dans les douze jours de sa saisine. Ce délai est porté à vingt-cinq jours si une expertise est ordonnée. Adresse : Monsieur le Premier Président – Cour d’Appel de Versailles – [Adresse 6] (télécopie : [XXXXXXXX02] – téléphone : [XXXXXXXX01] et [XXXXXXXX03] ). Rappelons que sur le fondement des dispositions des articles L 3211-12-4, R. 3211-16 et R 3211-20 du code de la santé publique le recours n’est pas suspensif d’exécution, sauf décision du Premier Président de la Cour d’appel de Versailles déclarant le recours suspensif à la demande du Procureur de la République. Laissons les éventuels dépens à la charge du Trésor Public.
Prononcée par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2025 par Madame Agnès BELGHAZI, Vice-Présidente, assisté(e) de Madame Christine VILETTE, greffier, qui ont signé la minute de la présente décision.
Le greffier Le président


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