L’Essentiel : Le 27 novembre 2019, Madame [A] [J] a été hospitalisée sous contrainte à la demande de son compagnon. Le certificat d’admission, signé par le Docteur [L], a été notifié le jour même. Après un examen le 30 novembre, une hospitalisation d’un mois a été décidée. Cependant, Madame [J] a fugué le 3 décembre, avant d’être réadmise le 4. En septembre 2022, elle a assigné le CHU, réclamant des dommages pour irrégularités dans son hospitalisation. Le tribunal a reconnu ces irrégularités, condamnant le CHU à verser 1 750€ pour préjudice moral et 1 200€ pour préjudice matériel.
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Contexte de l’hospitalisationLe 27 novembre 2019, Madame [A] [J] a été hospitalisée sous contrainte au Centre hospitalier universitaire de [Localité 8] à la demande de son compagnon, Monsieur [K] [N]. Le certificat d’admission a été signé par le Docteur [L] et la décision a été notifiée à Madame [J] le même jour. Le lendemain, elle a été examinée par le Docteur [Z], qui a recommandé le maintien de l’hospitalisation. Évolution de la situation médicaleLe 30 novembre 2019, un nouvel examen par le Docteur [X] a conduit à une décision d’hospitalisation pour un mois, notifiée le jour même. Cependant, le 3 décembre 2019, Madame [J] a fugué du CHU. Elle a été réadmise le 4 décembre dans une unité d’hospitalisation de courte durée, puis transférée à la clinique [Localité 6]. Le juge des libertés a ordonné le maintien de l’hospitalisation le 6 décembre, mais le directeur de la clinique a levé cette mesure le 7 décembre. Actions judiciaires de Madame [J]Estimant que l’hospitalisation avait été entachée d’irrégularités, Madame [J] a assigné l’Agent judiciaire de l’État et le CHU en septembre 2022. Dans ses conclusions, elle a demandé des dommages et intérêts pour divers préjudices, totalisant 20 000€ pour la privation de liberté, 30 000€ pour l’atteinte à sa vie privée, et d’autres montants pour des préjudices spécifiques. Arguments de Madame [J]Madame [J] a soutenu que la décision d’admission était irrégulière, n’étant pas justifiée par un second certificat médical, et que le certificat initial ne précisait pas le risque grave pour son intégrité. Elle a également contesté la régularité des notifications de la décision d’admission et a affirmé avoir été transportée de force aux urgences, ce qui constituait une violence. Réponse du CHULe CHU a contesté les arguments de Madame [J], affirmant que l’admission était régulière et justifiée par le certificat médical. Il a soutenu que la décision d’admission à la demande d’un tiers était conforme aux exigences légales et que les notifications avaient été effectuées correctement. Le CHU a également demandé à être débouté des demandes de Madame [J] et a sollicité la modération des sommes demandées. Position de l’Agent judiciaire de l’ÉtatL’Agent judiciaire de l’État a également demandé le déboutement de Madame [J], arguant que l’hospitalisation à la demande d’un tiers ne nécessitait pas l’intervention de l’autorité publique. Il a précisé que la responsabilité de l’État ne pouvait pas être engagée dans cette procédure. Décision du tribunalLe tribunal a reconnu l’irrégularité de l’admission et du maintien en hospitalisation sous contrainte, entraînant un préjudice pour Madame [J]. Il a condamné le CHU à verser 1 750€ pour préjudice moral et 1 200€ pour préjudice matériel. Le tribunal a également fait masse des dépens et a condamné chaque partie à la moitié des dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la régularité de la décision d’admissionLa régularité de la décision d’admission de Madame [J] est encadrée par l’article L3212-3 du code de la santé publique, qui stipule que, dans des cas exceptionnels, le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission d’un patient sur la base d’un seul certificat médical, en cas de péril imminent pour la santé du malade. Cet article précise que l’admission peut être effectuée « au vu d’un seul certificat médical émanant éventuellement d’un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil ». Dans le cas présent, le certificat médical établi par le docteur [L] le 27 novembre 2019 mentionne des troubles graves, tels que « décompensation maniaque aiguë » et « risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ». Ces éléments justifient l’admission de Madame [J] sans qu’un second certificat soit requis. Ainsi, la décision d’admission est considérée comme régulière, car elle répond aux exigences légales. Sur la proportionnalité du placement en soins sans consentementL’article L3212-1 du code de la santé publique stipule qu’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement que si ses troubles rendent impossible ce consentement et nécessitent des soins immédiats. Le certificat médical initial mentionne que l’état de Madame [J] justifie une hospitalisation complète sous surveillance constante. Il est donc établi que la mesure était proportionnée à la situation de la patiente, qui présentait des troubles nécessitant une intervention rapide. Aucune irrégularité n’est constatée à ce titre, et la décision de placement en soins sans consentement est validée. Sur la régularité de la notification de la décision d’admissionL’article L3211-3 du code de la santé publique impose que toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement soit informée de la décision d’admission et des raisons qui la motivent. Dans ce cas, Madame [J] a signé la notification de la décision d’admission le 27 novembre 2019. Cependant, il est noté que le certificat médical n’a pas été joint à cette notification, ce qui pourrait constituer une irrégularité. La notification du 30 novembre 2019, qui a suivi le même formalisme, n’a pas non plus inclus le certificat médical. Ainsi, une irrégularité affecte la mesure d’hospitalisation sous contrainte à compter du 30 novembre 2019, car la patiente n’a pas été pleinement informée de la base médicale de son admission. Sur l’absence d’information préalable et de participation à la décision de maintienL’article L3211-3 alinéa 2 du code de la santé publique stipule que la personne faisant l’objet de soins psychiatriques doit être informée du projet de décision de maintien et mise à même de faire valoir ses observations. Il est établi que Madame [J] a été informée du projet de maintien en soins et a pu faire valoir ses observations. Ainsi, le grief relatif à l’absence d’information préalable est écarté, car la patiente a été mise en mesure de s’exprimer sur son maintien en soins. Sur le transport par ambulanceL’article L3212-3 du code de la santé publique précise que l’admission en soins psychiatriques peut être effectuée à la demande d’un tiers en cas d’urgence. Le transport de Madame [J] par ambulance, bien que contesté, ne remet pas en cause la régularité de l’admission. L’irrégularité éventuelle du transport n’affecte pas la légitimité de la mesure d’hospitalisation sous contrainte, et aucune demande d’indemnisation liée à ce transport n’a été formulée. Sur la qualité à agir du tiersL’article L3212-3 du code de la santé publique ne définit pas la notion de « tiers ». L’article R3212-1 précise que la demande d’admission doit indiquer les relations existant entre le demandeur et le patient. Il n’est pas requis que le tiers ait un lien de parenté proche avec la personne concernée. Ainsi, la demande d’admission formulée par Monsieur [N] est considérée comme valide, et aucune irrégularité n’est caractérisée à ce titre. Sur l’absence de saisine de la commission départementale des soins psychiatriquesL’article L3212-5 du code de la santé publique impose que toute décision d’admission soit transmise sans délai à la commission départementale des soins psychiatriques. Il est constant que cette commission n’a pas été informée de l’admission de Madame [J]. Cette absence de transmission constitue une irrégularité qui ouvre droit à indemnisation, car l’information de la commission doit intervenir sans délai. Sur les droits de la défenseL’article L3211-3 du code de la santé publique garantit à toute personne en hospitalisation sous contrainte le droit de prendre conseil d’un avocat. Il est attesté que Madame [J] n’a pas pu s’entretenir avec son avocat durant son hospitalisation, ce qui pourrait constituer une violation de ses droits. Cependant, le centre hospitalier a justifié cette restriction par des considérations de santé. L’irrégularité n’est donc pas établie, car le droit d’accès à un avocat peut être limité pour des raisons de santé. Sur l’absence de contrôle de la mesure par le préfet et la responsabilité de l’EtatL’article L3212-5 du code de la santé publique stipule que l’hospitalisation à la demande d’un tiers ne nécessite pas l’intervention de l’autorité publique. Le directeur de l’établissement est seul responsable de la décision d’admission. Ainsi, la responsabilité de l’Etat ne peut être engagée dans ce cadre, et les demandes de Madame [J] à cet égard sont rejetées. Sur les préjudicesL’irrégularité de l’admission et du maintien en hospitalisation sous contrainte entraîne un préjudice, notamment en raison de la privation de liberté. Le tribunal a reconnu un préjudice moral de 1 750€ et un préjudice matériel de 1 200€, en tenant compte de la durée de l’hospitalisation et des circonstances particulières de la patiente. Les autres demandes de dommages et intérêts n’ont pas été justifiées et ont été rejetées. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
■
1/1/1 resp profess du drt
N° RG 22/11064 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXZC2
N° MINUTE :
Assignation du :
05 Septembre 2022
JUGEMENT
rendu le 22 Janvier 2025
DEMANDERESSE
Madame [A] [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Corinne VAILLANT, avocat postulant au barreau de PARIS, vestiaire #R0199 et par Me Nathalie DE SEGUIN, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE, [Adresse 4]
DÉFENDEURS
CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE [Localité 8]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Gabrielle MILON, avocat postulant au barreau de PARIS, vestiaire #D0707, et par Me Aimée CARA, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE, [Adresse 3]
AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Représenté par Me Sophie SCHWILDEN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire #PB139
Décision du 22 Janvier 2025
1/1/1 resp profess du drt
N° RG 22/11064 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXZC2
MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur Etienne LAGUARIGUE de SURVILLIERS,
Premier Vice-Procureur
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Cécile VITON, Première vice-présidente adjointe
Présidente de formation,
Monsieur Benoit CHAMOUARD, Premier vice-président adjoint
Madame Valérie MESSAS, Vice-présidente
Assesseurs,
assistés de Monsieur Gilles ARCAS, Greffier lors des débats et de Madame Marion CHARRIER, Greffier lors du prononcé
DÉBATS
A l’audience du 30 Octobre 2024
tenue en audience publique
Monsieur Benoit CHAMOUARD a fait un rapport de l’affaire.
JUGEMENT
Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
en premier ressort
Le 27 novembre 2019, Madame [A] [J] a été hospitalisée sous contrainte au sein d’un service du Centre hospitalier universitaire ( » CHU « ) de [Localité 8] sur demande d’un tiers, en l’espèce Monsieur [K] [N], son compagnon.
Le certificat d’admission a été signé par le Docteur [L] le 27 novembre 2019 à 22h41. La décision d’admission a été prise par le directeur du CHU le même jour. Cette décision a été notifiée à Madame [J].
Le 28 novembre 2019, Madame [J] a été examinée par le docteur [Z], qui concluait au maintien de la mesure d’hospitalisation sous contrainte.
Madame [J] a à nouveau été examinée le 30 novembre 2019, par le Docteur [X], qui recommandait la poursuite de l’hospitalisation complète sous contrainte. Le directeur du CHU décidait de cette hospitalisation pour une durée d’un mois par décision du 30 novembre 2019 notifiée le jour-même.
Le 3 décembre 2019 à 15 heures, Madame [J] fuguait du CHU. Le 4 décembre 2019 à 1 heure 59, Madame [J] était admise en unité d’hospitalisation de courte durée fermée, puis transférée à 10 heures 43 vers la clinique [Localité 6].
Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse ordonnait le maintien sous hospitalisation sous contrainte de Madame [J] le 6 décembre 2019. Le 7 décembre 2019, le directeur de la clinique [Localité 6] décidait de la mainlevée de cette mesure.
Estimant que la mesure d’hospitalisation sous contrainte avait été entachée d’irrégularités, Madame [J] a fait assigner l’Agent judiciaire de l’Etat et le CHU devant ce tribunal par acte des 5 et 9 septembre 2022.
Par dernières conclusions du 10 novembre 2023, Madame [J] demande au tribunal de condamner le CHU au paiement de :
– 20 000€ de dommages et intérêts en réparation de la privation de sa liberté d’aller et venir ;
– 30 000€ de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte à sa vie privée et familiale ;
– 5 000€ de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’administration de traitements sous la contrainte ;
– 2 000€ de dommages et intérêts en réparation en réparation de l’atteinte à son image ;
– 3 000€ de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte à ses droits de la défense ;
– 2 000€ de dommages et intérêts en réparation du stress post traumatique lié à l’hospitalisation ;
– 19 833€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier.
Elle sollicite également la condamnation de l’Agent judiciaire de l’Etat au paiement, in solidum avec le CHU, de 1 000€ de dommages et intérêts pour l’atteinte à sa privation de liberté d’aller et venir et 1€ symbolique pour la perte de chance de demander la mainlevée de l’hospitalisation sous contrainte.
Elle sollicite enfin la condamnation in solidum du CHU et de l’Agent judiciaire de l’Etat au paiement de 5 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que leur condamnation aux dépens.
Madame [J] soutient que la décision d’admission du 27 novembre 2019 du directeur du CHU est irrégulière, à défaut de justification par le seul certificat médical initial de l’urgence pour risque grave ou imminent d’atteinte à son intégrité. En l’absence d’une telle motivation, un second certificat médical aurait dû être pris, conformément à l’article L3212-3 du code de la santé publique. Elle souligne que l’auteur du certificat, le docteur [L], n’a pas personnellement constaté les troubles allégués. Aucune précision ne figure par ailleurs sur le risque grave à l’intégrité du malade mentionné dans le certificat médical, qui aurait dû caractériser un tel risque. Elle conteste en effet que son enfant ait été hospitalisé, avoir elle-même été hospitalisée sous contrainte en 2016 et le diagnostic de décompensation maniaque aiguë. Elle indique que les mails professionnels produits par le CHU portent atteinte à sa vie personnelle et professionnelle. Elle précise que le docteur [O] n’a pas sollicité son hospitalisation et a souhaité rectifier les propos qui lui ont été attribués dans le dossier médical. Madame [J] soutient ainsi qu’il a manqué l’objectivité d’un second certificat médical en vue de l’admission. Elle estime que cette irrégularité est à l’origine de la seconde hospitalisation dont elle a fait l’objet en décembre 2019.
A titre subsidiaire concernant cette décision, Madame [J] fait valoir que la mesure de surveillance constante 24 heures sur 24 n’était ni adaptée, ni proportionnée à sa situation. Elle relève que sa situation de mère venant d’accoucher la plaçait dans une situation de vulnérabilité particulière, qui n’a pas été prise en considération.
Madame [J] soutient par ailleurs que les notifications de la décision d’admission n’ont pas été régulières. Elle expose que le certificat médical n’a pas été joint aux notifications des 28 et 30 novembre 2019, ce qui ne lui a permis d’être pleinement informée. Elle souligne ne jamais avoir refusé de signer l’acte de notification, qui porte bien sa signature. Elle relève toutefois qu’aucune signature d’infirmier ne figure sur la notification de l’admission et que cette décision ne lui a pas été présentée.
La demanderesse souligne que son avis n’a pas été sollicité avant la décision du 30 novembre 2019, contrairement aux dispositions de l’article L3211-3 du code de la santé publique.
Elle soutient également avoir été amenée seule et de force par ambulance aux urgences, sans certificat médical, ce qui constitue une violence, une séquestration et une violation de son droit de ne pas se présenter aux urgences psychiatriques. En effet, seul un médecin peut prescrire dans l’urgence qu’une ambulance emmène contre son gré un patient, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.
Madame [J] fait également valoir que Monsieur [N] ne disposait pas de la qualité pour agir en qualité de tiers, en raison du conflit conjugal les opposant.
Madame [J] relève l’existence d’une irrégularité, tirée du défaut d’information de la commission départementale des soins psychiatriques de la Haute Garonne. Elle rappelle qu’en application de l’article L3212-5 du code de la santé publique, toute décision d’admission à la demande d’un tiers doit être transmise à cet organisme. L’absence de transmission constitue une irrégularité susceptible d’occasionner un grief. Elle précise avoir perdu une chance que la commission examine son dossier et ordonne la mainlevée de la mesure, comme elle en avait la possibilité.
La demanderesse reproche par ailleurs l’absence de contrôle de la mesure par le préfet, engageant la responsabilité de l’Etat. Elle expose que le préfet ne justifie pas avoir visité l’établissement une fois par an, ce qui lui cause nécessairement grief.
Elle expose qu’il a été porté atteinte à ses droits de la défense, à défaut d’avoir pu s’entretenir avec son conseil au cours de l’hospitalisation.
Madame [J] sollicite l’indemnisation de préjudices résultant de sa privation de liberté, de l’administration de traitements sous la contrainte. Elle précise également avoir subi une atteinte à sa vie privée et familiale en étant privée de voir ses enfants pendant l’hospitalisation, puis en raison du placement de son fils cadet et du fait que le père de son fils aîné a obtenu que la résidence de ce dernier soit fixée à son domicile.
L’atteinte à son droit à l’image et à son honneur résulte du fait d’avoir été emmenée aux urgences à la vue de ses voisins.
Elle expose enfin justifier d’un stress post traumatique spécifique lié à l’hospitalisation aux urgences, à son placement en isolement et à la séparation brutale d’avec son bébé.
Au titre du préjudice financier, elle expose avoir dû engager des frais de représentation devant le juge des libertés et de la détention, puis les juges des enfants.
Elle sollicite enfin l’euro symbolique au titre de la perte de chance de voir la commission départementale et le préfet s’informer de son hospitalisation.
Par dernières conclusions du 1er décembre 2023, le CHU demande à titre principal au tribunal de débouter Madame [J] de ses demandes et de la condamner aux dépens et au paiement de 2 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, le CHU demande au tribunal de modérer les demandes formulées au titre du préjudice moral tiré de la privation de liberté et de débouter la demanderesse de ses prétentions.
A titre très subsidiaire, il demande la modération des demandes au titre des frais irrépétibles et que les dépens soient laissés à la charge de Madame [J].
Concernant tout d’abord la régularité de l’admission de Madame [J], le CHU rappelle que le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission à la demande d’un tiers, au vu d’un seul certificat, en cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, en application de l’article L3212-3 du code de la santé publique. Il souligne qu’en l’espèce, le certificat médical du docteur [L] justifie le risque grave d’atteinte à l’intégrité de Madame [J] et qu’un second certificat n’était pas nécessaire. Il retrace le parcours psychiatrique antérieure de la demanderesse et sa banalisation de son état de santé. Il précise ne pas être responsable de l’hospitalisation du 12 au 19 décembre 2019.
Le CHU estime inopérant le moyen tiré de l’absence de communication de l’avis du docteur [L]. Il souligne que l’article L3211-3 du code de la santé publique ne prévoit qu’une information concernant la décision d’admission et les décisions ultérieures. Il précise que le deuxième alinéa de cet article, concernant l’information sur les projets de décision et le recueil préalable de l’avis de la personne concerné, n’est pas applicable aux hospitalisations de l’article L3212-3 du code de la santé publique. Il ajoute qu’il ressort du certificat médical du 28 novembre 2019 que le certificat initial a été présenté à la demanderesse et qu’elle a été informée de sa prise en charge. Il soutient que Madame [J] ne justifie pas d’un grief.
Le CHU conteste que les observations de Madame [J] n’aient pas été sollicitées avant la décision d’admission, contrairement aux exigences de l’article L3211-3 du code de la santé publique. Il souligne que cette disposition ne s’applique qu’aux maintiens et non à l’admission. Il précise que ses observations ont été recherchées avant la décision de maintien du 30 novembre 2019.
Le CHU souligne le caractère inopérant des modalités du transport de Madame [J] vers le CHU. Il expose qu’au moment des faits, l’article L3212-3 du code de la santé publique permettait l’admission sur demande d’un tiers, après avis d’un médecin de l’établissement. Il ajoute que le SAMU est composé de médecins régulateurs et que la décision de transport est une décision médicale, prise après évaluation d’un médecin régulateur.
Le CHU expose ensuite que la demande de tiers, formée par Monsieur [J], souscrit aux exigences de l’article R3212-1 du code de la santé publique. Il fait valoir que Monsieur [N] avait la qualité de tiers et que le conflit conjugal allégué ne relevait pas de son appréciation.
Il soutient que la demanderesse ne justifie pas d’un grief réel qui résulterait d’une notification irrégulière. Il précise avoir notifié au préfet les éléments requis et que Madame [J] a été assistée par un avocat devant le juge des libertés et de la détention. Il ajoute que la commission départementale des soins psychiatriques n’exerce en réalité jamais ses prérogatives et que l’arrêt de la Cour de cassation sur ce point laisse apparaître une réflexion totalement abstraite et déconnectée de la réalité. Il estime en effet que le grief est virtuel, s’agissant d’une formalité procédurale artificielle.
Le CHU conteste la crédibilité des rapports d’expertise du docteur [U] et du docteur [T].
Il précise qu’il n’est pas établi que Maître [P] était le conseil de la demanderesse, l’avocat indiqué dans la décision du juge des libertés et de la détention étant différent, et qu’à défaut d’avoir été soulevé devant le juge des libertés et de la détention l’absence d’accès à un conseil ne peut pas être confirmé.
A titre subsidiaire, le CHU sollicite la modération des sommes sollicitées. Il fait valoir que Madame [J] est sortie du service sans autorisation le 3 décembre 2019. Il compare le montant de l’indemnisation avec celui de la détention provisoire.
Il souligne que le traitement était nécessaire et qu’il n’est pas démontré qu’il a été excessif.
Concernant l’atteinte à la vie privée et familiale, il relève que les décisions du juge des enfants et du juge aux affaires familiales n’ont pas de lien avec l’hospitalisation litigieuse et ne relèvent pas de sa responsabilité. Le préjudice financier allégué n’est donc pas lié à son intervention.
Il fait valoir que le fait qu’une ambulance soit venue la chercher à son domicile n’est pas de nature à attirer l’attention et porter atteinte à son image.
Il ajoute que le stress post-traumatique ne doit pas être confondu avec la dépression ou d’autres maladies psychiatriques et n’est pas établi.
Le préjudice tiré de l’atteinte aux droits de la défense n’est pas établi selon lui.
Par dernières conclusions du 18 octobre 2023, l’Agent judiciaire de l’Etat demande au tribunal de débouter Madame [J] de ses demandes, de la condamner aux dépens et au paiement de 882€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’Agent judiciaire de l’Etat expose que l’hospitalisation à la demande d’un tiers ne nécessite pas l’intervention de l’autorité publique, le représentant de l’Etat en étant uniquement informé par le directeur de l’établissement. L’Agent judiciaire de l’Etat ne peut donc être condamné dans ces procédures.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, comme le permet l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 4 décembre 2023.
1. Sur la régularité de la décision d’admission
L’article L3212-3 du code de la santé publique dispose qu’à titre exceptionnel et en cas de péril imminent pour la santé du malade dûment constaté par le médecin, le directeur de l’établissement peut prononcer l’admission au vu d’un seul certificat médical émanant éventuellement d’un médecin exerçant dans l’établissement d’accueil.
Le certificat médical d’admission a été établi le 27 novembre 2019 par le docteur [L]. Il expose que Madame [J] :
» présente un état de décompensation maniaque aigu France avec tachypsychie, logorrhée, instabilité
Troubles du comportement depuis quelques jours, inadapté avec son bébé de 3 mois (gestes brusques), achats inconsidérés ces derniers jours (canapé à 200 euros, nombreux vêtements onéreux)
Consommation massive de cannabis alors qu’elle allaite
Perte de 23kg en 3 mois
Déni majeur des troubles
Ces troubles rendent impossible son consentement à des soins pourtant indispensables de façon immédiate, sous surveillance constante en milieu hospitalier, d’autant qu’existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade.
En conséquence, ceci justifie son admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers sous la forme d’une hospitalisation complète dans le cadre d’une procédure d’urgence « .
En évoquant ainsi des soins » indispensables de façon immédiate » et un » risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade « , après avoir fait état notamment d’un état de décompensation maniaque aigu et de troubles du comportement, le certificat médical répond pleinement aux exigences de l’article L3212-3 du code de la santé publique.
Il importe peu que l’ensemble des symptômes mentionnés à l’appui du diagnostic n’ait pas été constaté par le médecin. Le certificat mentionne en effet des symptômes de nature à avoir été identifiés lors de l’examen ( » tachypsychie, logorrhée, instabilité « ), complétés par d’autres correspondant aux jours précédents et qui lui ont été rapportés.
L’admission de Madame [J] ne nécessitait donc pas qu’un second certificat médical soit établi et l’admission est régulière à ce titre.
2. Sur la proportionnalité du placement en soins sans consentement
L’article L3212-1 du code de la santé publique prévoyait, dans sa version applicable au litige, qu’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’établissement que si ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et si son état mental impose des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète ou une surveillance régulière justifiant un programme de soin.
Lorsqu’il est saisi, le tribunal doit examiner le bien-fondé de la mesure au regard des éléments médicaux, communiqués par les parties ou établis à sa demande, sans pouvoir porter une appréciation d’ordre médical (Civ.1, 8 février 2023, n°22-10.852).
Si Madame [J] soutient qu’elle était en droit d’attendre une certaine prudence de la part du Centre hospitalier, au regard de sa situation de mère venant d’accoucher, le certificat médical initial mentionne le fait qu’elle allaite, ce qui atteste que sa situation a été prise en considération.
Ce certificat, dont les mentions sont reproduites ci-dessus, décrit par ailleurs avec précision les troubles constatés et les raisons médicales justifiant l’admission.
Aucune irrégularité n’est établie à ce titre.
3. Sur la régularité de la notification de la décision d’admission
L’article L3211-3 du code de la santé publique prévoit que toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement est informée le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état de la décision d’admission, ainsi que des raisons qui la motive.
En l’espèce, Madame [J] a signé la notification de la décision d’admission le 27 novembre 2019. Cette décision vise le certificat médical initial, sans indiquer qu’il figure en document joint. La notification ne mentionne pas que ce certificat a été présenté à la demanderesse.
La fiche de transmission établie à 11 heures 04 le 28 novembre 2019, soit quelques heures seulement après la rédaction du certificat médical le 27 novembre 2019 à 22 heures 42, indique : » certificat initial fait le 27/11/2019 […] Notif de l’initial a récupérée et présentée à la patiente ».
Compte tenu du fait que l’admission a été effectivement notifiée à la demanderesse, la dernière phrase ne peut s’interpréter, malgré l’omission du mot » été « , que comme retraçant la notification du certificat initial à Madame [J].
Aucune irrégularité n’est donc établie concernant la notification de la décision d’admission.
La notification du 30 novembre 2019 suit le même formalisme que la décision d’admission et a été signée par Madame [J]. Aucune pièce produite n’atteste toutefois que le certificat médical a été transmis à la demanderesse.
Le centre hospitalier ne soutient pas par ailleurs que l’état de santé de la demanderesse justifiait un report de la notification de ce certificat.
Dès lors, une irrégularité affecte la mesure d’hospitalisation sous contrainte à compter du 30 novembre 2019.
4. Sur l’absence d’information préalable et de participation à la décision de maintien
L’article L3211-3 alinéa 2 du code de la santé publique prévoit qu’avant chaque décision prononçant le maintien des soins ou définissant la forme de la prise en charge, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En l’espèce, il ressort de la note d’information donnée au patient du 28 novembre 2019 et signée par Madame [J] les éléments suivants :
» Madame [A] [J] a confirmé avoir reçu l’information délivrée par le psychiatre :
– du projet de décision la concernant (de maintien en soins ainsi que la forme de prise en charge) et a été appelée à faire valoir des observations »
La demanderesse a ainsi été mise en mesure de faire valoir sa position sur son maintien en soins sans consentement. Le grief sera écarté.
5. Sur le transport par ambulance
Madame [J] expose que seul un médecin peut prescrire dans l’urgence qu’une ambulance emmène un patient contre son gré, comme cela a été le cas pour elle.
L’article L3212-3 rappelé ci-dessus expose qu’en cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave à l’intégrité du malade, le directeur d’établissement peut prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soin psychiatrique d’une personne malade au vu d’un seul certificat.
L’utilisation du terme » admission » dans la lettre de cette disposition implique que la mesure d’hospitalisation sous contrainte débute par l’admission et non la conduite du patient dans l’établissement. Une irrégularité éventuelle de ce transport n’affecte donc pas la régularité de la mesure d’hospitalisation sous contrainte.
Par ailleurs, Madame [J] ne formule pas de demande d’indemnisation liée à ce manquement allégué.
Le grief sera donc écarté.
6. Sur la qualité à agir du tiers
L’article L3212-3 du code de la santé publique ne définit pas la notion de » tiers « .
L’article R3212-1 du même code indique que la demande d’admission indique :
» 2° les nom, prénoms, date de naissance et domicile de la personne qui demande les soins et de celle pour laquelle ils sont demandés ;
3° le cas échéant, leur degré de parenté ou la nature des relations existant entre elles avant la demande de soin « .
La loi ne conditionnant pas la qualité de tiers à un degré de proximité quelconque avec la personne concernée, il ne peut être reproché au centre hospitalier d’avoir admis la demanderesse à la demande de son conjoint, quelles qu’aient pu être leurs relations au moment de la demande.
Aucune irrégularité n’est caractérisée à ce titre.
7. Sur l’absence de saisine de la commission départementale des soins psychiatriques
L’article L3212-5 du code de la santé publique dispose que le directeur de l’établissement d’accueil transmet sans délai au représentant de l’Etat dans le département ou, à [Localité 7], au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L3222-5 toute décision d’admission d’une personne en soins psychiatriques en application du présent chapitre. Il transmet également sans délai à cette commission une copie du certificat médical d’admission, du bulletin d’entrée et de chacun des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L3211-2-2.
L’article L3212-9 prévoit par ailleurs que le directeur de l’établissement prononce la levée de la mesure de soins psychiatriques lorsque celle-ci est demandée par la commission départementale des soins psychiatriques.
L’article L3216-1 du code de la santé publique dispose quant à lui que la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.
Le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L3211-12 et L3211-12-1. Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet.
Il résulte de ces dispositions que l’hospitalisation sous contrainte entraîne l’information sans délai par le directeur de l’établissement de la commission départementale des soins psychiatriques et que la justification d’un grief n’est pas exigée dans le cadre de l’action en indemnisation, le grief conditionnant uniquement la mainlevée éventuelle de la mesure.
Il est constant en l’espèce que la commission départementale des soins psychiatriques n’a pas été informée de l’admission en soins psychiatrique sans consentement de Madame [J].
La procédure est donc entachée d’une irrégularité qui ouvre le droit à indemnisation dès l’admission de Madame [J], puisque l’information de la commission doit intervenir sans délais.
8. Sur les droits de la défense
En vertu de l’article L3211-3 du code de la santé publique, toute personne placée en hospitalisation sous contrainte dispose du droit de prendre conseil d’un avocat de son choix.
En l’espèce, Madame [J] produit une attestation de Maître [Y] [P], qui indique avoir été informée le 29 novembre 2019 par le conjoint de la demanderesse de son hospitalisation sous contrainte. Elle indique avoir pris attache téléphonique avec le centre hospitalier le même jour et que » le médecin en charge a refusé de [la] mettre en relation avec [sa] cliente « . Maître [P] ajoute s’être présentée le samedi 30 novembre entre 11 heures et 13 heures. Elle indique : » l’accès m’a été refusé au motif que la mise en relation de la patiente avec son avocat pourrait aggraver son état de santé « .
Il convient de rappeler que le droit d’accès à un avocat, reconnu par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, n’est pas un droit absolu et peut être mis en balance avec d’autres intérêts, dont la santé de la demanderesse, qui ne conteste pas en l’espèce les motifs avancés par le centre hospitalier sur cette période.
L’irrégularité n’est donc pas établie.
9. Sur l’absence de contrôle de la mesure par le préfet et la responsabilité de l’Etat
Comme le souligne à bon droit l’Agent judiciaire de l’Etat, l’hospitalisation à la demande d’un tiers ne nécessite pas l’intervention de l’autorité publique, la décision relevant du directeur de l’établissement. Madame [J] ayant été admise dans ce cadre, la responsabilité de l’Etat ne peut donc être engagée à ce titre.
L’article L3212-5 du code de la santé publique dispose par ailleurs que le directeur de l’établissement d’accueil transmet sans délai au représentant de l’Etat dans le département toute décision d’admission d’une personne en soins psychiatriques.
Il ne peut toutefois se déduire de cette disposition, ni d’aucune autre disposition, que le préfet est tenu d’une obligation de contrôle de la mesure d’hospitalisation sous contrainte.
L’article L3222-4 du même code dispose quant à lui que les établissements sont visités au moins une fois par an par le représentant de l’Etat dans le département ou son représentant, par le président du tribunal judiciaire ou son délégué, par le procureur de la République dans le ressort duquel est situé l’établissement ou le maire de la commune ou son représentant.
L’absence éventuel de respect de cette disposition ne constitue pas toutefois une irrégularité affectant une mesure particulière d’hospitalisation sous contrainte, comme celle subie par la demanderesse.
Madame [J] sera donc déboutée des demandes formées à l’encontre de l’Agent judiciaire de l’Etat.
10. Sur les préjudices
L’irrégularité de l’admission et du maintien en hospitalisation sous contrainte occasionne un préjudice, tirée en particulier de la privation de liberté, quand bien même la réalité de l’état de santé du malade justifiait les soins.
Concernant la privation de liberté, il convient de prendre en considération sa durée relativement brève et le fait que Madame [J] a fait l’objet d’un bref placement en isolement. Au regard de ces éléments, elle justifie d’un préjudice moral qui sera intégralement réparé par la condamnation du CHU au paiement de 1 200€ de dommages et intérêts.
Ce chef de préjudice recoupe intégralement celui allégué au titre du stress post-traumatique. Le fait que Madame [J] aurait perdu une chance de voir la commission départementale des soins psychiatriques s’informer de sa situation est également inclus dans le préjudice résultant de la privation de liberté, l’intervention de cette commission ayant pour effet potentiel d’entraîner la mainlevée de l’hospitalisation.
L’indemnisation du préjudice résultant de l’administration de traitements sous la contrainte n’est pas non plus conditionnée à l’opportunité de ces traitements pour la patiente et fait naître un préjudice distinct, qui sera indemnisé à hauteur de 150€.
L’admission sous contrainte au sein du CHU a par ailleurs porté atteinte à la vie privée et familiale de Madame [J]. Il convient de prendre particulièrement en considération le fait qu’elle a été séparée de son enfant de 3 mois, qu’elle allaitait à cette période. En revanche, les pièces produites sont insuffisantes pour établir un lien de causalité entre l’hospitalisation irrégulière et les décisions ultérieures du juge des enfants et du juge aux affaires familiales.
Madame [J] justifie ainsi d’un préjudice qui sera indemnisé à hauteur de 400€.
En revanche, Madame [J] ne justifie pas d’un préjudice résultant d’une atteinte à son image et à son honneur, le seul fait d’avoir été emmenée aux urgences en ambulance n’est pas en soi infâmant.
Au titre du préjudice matériel, Madame [J] justifie avoir payé des honoraires d’avocat à hauteur de 1 200€ pour la procédure devant le juge des libertés et de la détention. Les autres factures produites concernent les procédures devant le juge des enfants et le juge aux affaires familiales, sans lien de causalité avec l’irrégularité retenue. Les factures concernant la présente instance seront prises en considération au titre des frais irrépétibles.
Ainsi, Madame [J] justifie d’un préjudice moral à hauteur de 1 750€ , ainsi que d’un préjudice matériel à hauteur de 1 200€. Le centre hospitalier sera condamné au paiement de ces sommes.
11. Sur les autres demandes
L’équité commande en l’espèce de faire masse des dépens et de condamner Madame [J] et le centre hospitalier chacun à la moitié des dépens.
L’équité commande également de condamner le centre hospitalier au paiement de 3 000€ à Madame [J] et de condamner Madame [J] au paiement de 882€ à l’Agent judiciaire de l’Etat sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’exécution provisoire de ce jugement est de droit, en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Le tribunal statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et susceptible d’appel,
CONDAMNE le centre hospitalier universitaire de [Localité 8] à payer à Madame [A] [J] :
– 1 750€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
– 1 200€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel,
FAIT masse des dépens,
CONDAMNE le centre hospitalier universitaire de [Localité 8] à la moitié des dépens,
CONDAMNE Madame [A] [J] à la moitié des dépens,
CONDAMNE le centre hospitalier universitaire de [Localité 8] à payer 3 000€ à Madame [A] [J] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Madame [A] [J] à payer 882€ à l’Agent judiciaire de l’Etat sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE les parties de leurs autres ou plus amples demandes,
RAPPELLE que l’exécution provisoire de ce jugement est de droit.
Fait et jugé à Paris le 22 Janvier 2025
Le Greffier Le Président
Marion CHARRIER Cécile VITON
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