Honoraires d’avocat : évaluation et restitution partielle

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Honoraires d’avocat : évaluation et restitution partielle

L’Essentiel : Le 14 septembre 2021, le bâtonnier de Marseille a fixé les honoraires de madame [X] [H] à 3000 euros, tout en ordonnant la restitution de 1800 euros. Contestant cette décision, madame [H] a saisi la cour d’appel, arguant d’une convention d’honoraires de 4000 euros HT et d’un paiement déjà effectué de 300 euros. Maître [I] a défendu la décision du bâtonnier, affirmant que madame [H] devait encore 300 euros. Finalement, le recours a été jugé recevable et la décision infirmée, les honoraires étant fixés à 2400 euros TTC, déjà réglés par madame [H].

Décision du Bâtonnier

Le 14 septembre 2021, le bâtonnier de l’ordre des avocats de Marseille a fixé les honoraires dus par madame [X] [H] à maître [Y] [I] à 3000 euros, tout en faisant droit à la demande de restitution d’honoraires de madame [X] [H] à hauteur de 1800 euros TTC.

Contestation de la Décision

Madame [X] [H] a contesté cette décision par lettre recommandée le 6 octobre 2021, saisissant le premier président de la cour d’appel. Elle a demandé l’infirmation de la décision du bâtonnier et a formulé des demandes principales et subsidiaires concernant le montant des honoraires.

Arguments de Madame [X] [H]

Elle a soutenu avoir chargé maître [I] d’une procédure devant le juge aux affaires familiales, qu’une convention d’honoraires avait été signée pour 4000 euros HT, et qu’elle avait déjà réglé 300 euros pour une audience. Elle a également précisé qu’aucune procédure pour abandon de famille n’avait été engagée et que les diligences de maître [I] se limitaient à la rédaction de deux projets de citation.

Position de Maître [I]

Maître [I] a demandé la confirmation de la décision du bâtonnier, affirmant que madame [H] avait déjà versé 2700 euros et devait encore 300 euros. Il a détaillé ses diligences dans les procédures, justifiant le montant des honoraires fixés par le bâtonnier.

Recevabilité du Recours

Le recours de madame [H] a été jugé recevable, car il a été posté dans le délai d’un mois suivant la décision du bâtonnier, même si la date de notification n’était pas connue.

Analyse des Honoraires

La convention d’honoraires signée stipulait un montant forfaitaire pour plusieurs procédures. Madame [H] avait déjà remis des chèques pour un total de 2400 euros, et la demande de restitution ne pouvait être justifiée que par une action en responsabilité.

Conclusion sur les Honoraires

Il a été établi que les honoraires dus à maître [I] pour la procédure devant le juge aux affaires familiales s’élevaient à 2400 euros TTC, montant déjà payé par madame [H]. Les honoraires pour les procédures devant le tribunal correctionnel n’étaient pas justifiés, car maître [I] n’avait pas apporté son assistance.

Décision Finale

Le recours de madame [X] [H] a été jugé recevable, la décision du bâtonnier a été infirmée, et les honoraires dus à maître [Y] [I] ont été fixés à 2400 euros TTC. Les dépens ont été partagés entre les parties, et la demande de madame [X] [H] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité du recours

La recevabilité du recours est régie par les dispositions de l’article 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, qui stipule que les réclamations doivent être soumises au bâtonnier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé.

Le bâtonnier doit prendre sa décision dans un délai de quatre mois, et celle-ci doit être notifiée dans les quinze jours suivant sa date, à l’avocat et à la partie concernée. La notification doit mentionner, sous peine de nullité, le délai et les modalités du recours.

L’article 176 de ce même décret précise que la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui doit être saisi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans un délai d’un mois.

Dans cette affaire, la décision contestée a été rendue le 14 septembre 2021. Madame [H] a posté sa lettre de recours le 6 octobre 2021, ce qui est recevable car cela se situe dans le délai d’un mois.

Sur la demande principale

La demande principale de madame [H] est fondée sur l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, qui stipule que les honoraires d’un avocat doivent être fixés d’un commun accord avec le client, sauf dans certaines matières limitativement énumérées.

L’alinéa 3 de cet article précise que, sauf en cas d’urgence ou de force majeure, l’avocat doit conclure une convention d’honoraires par écrit avec son client, précisant le montant ou le mode de détermination des honoraires.

Les honoraires doivent tenir compte de la situation financière du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences effectuées. Il est également précisé que toute fixation d’honoraires ne peut être uniquement basée sur le résultat judiciaire.

En l’espèce, les parties ont signé une convention d’honoraires au forfait le 14 septembre 2020, pour un montant de 4000 euros HT, couvrant plusieurs procédures. Madame [H] a déjà versé 2400 euros, et a demandé la restitution d’un second chèque de 2400 euros.

Il est important de noter que, selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ainsi, la convention d’honoraires doit être respectée par les deux parties.

Sur la justification des diligences

L’article 9 du code de procédure civile impose à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention. L’article 1353 du code civil stipule que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver, et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Dans cette affaire, il a été établi que maître [I] a effectivement assisté et représenté madame [H] dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales, ce qui justifie le paiement de 2400 euros.

Cependant, il n’a pas été prouvé que les citations pour non-représentation d’enfant et abandon de famille aient été diligentées par maître [I], ni qu’il ait apporté son assistance lors de ces procédures.

Ainsi, aucun honoraire n’est dû pour ces procédures, et la demande de restitution de la somme de 2400 euros ne peut être fondée que sur une action en responsabilité.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Concernant les dépens, chaque partie succombant partiellement dans ses prétentions, il a été décidé de partager les dépens par moitié.

L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais d’avocat, mais dans ce cas, l’équité n’impose pas l’application de cette disposition, car les deux parties ont partiellement gagné et perdu.

Ainsi, madame [H] a été déboutée de sa demande fondée sur l’article 700, et les dépens ont été partagés équitablement entre les parties.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP

ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D’HONORAIRES D’AVOCATS

DU 17 JANVIER 2025

N°2025/ 010

Rôle N° RG 21/14520 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIHES

[X] [H]

C/

[Y] [I]

Copie exécutoire délivrée

le : 17 janvier 2025

à :

Maître [U] [N]

Maître Karine BERTHIER-LAIGNEL

Décision déférée au Premier Président de la Cour d’Appel:

Décision rendue le 14 Septembre 2021 par le Bâtonnier de l’ordre des avocats de MARSEILLE.

DEMANDERESSE

Madame [X] [H],

demeurant [Adresse 2]

Comparante et représentée par Maître JULLIEN Amandine, avocat au barreau de Montpellier, avocat ayant plaidé

DEFENDEUR

Maître [Y] [I],

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Maître Karine BERTHIER-LAIGNEL, avocat au barreau de Marseille

*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L’affaire a été débattue le 13 Novembre 2024 en audience publique devant

Mme Nathalie FEVRE, Présidente de chambre

déléguée par ordonnance du Premier Président .

Greffier lors des débats : Mme Anne-Marie BLANCO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Décembre 2024 prorogé au 17 janvier 2025.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 janvier 2025.

Signée par Mme Nathalie FEVRE, Présidente de chambre et Mme Anne-Marie BLANCO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par décision du 14 septembre 2021, le bâtonnier de l’ordre des avocats de Marseille a fixé à 3000 euros les honoraires dus par madame [X] [H] à maître [Y] [I] , fait droit à la demande de restitution d’honoraires de madame [X] [H] à hauteur de la somme de 1800 euros TTC.

Par lettre recommandée postée le 6 octobre 2021, madame [X] [H] a saisi le premier président de la cour d’appel d’une contestation de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oalement à l’audience, elle demande d’infirmer la décision du bâtonnier de l’ordre des avocats et de débouter maître [I] de l’ensemble de ses demandes,

A titre principal:

-de condamner maître [I] à lui restituer la somme de 2400 euros

A titre subsidiaire

-de fixer à la somme de 630 euros TTC les honoraires dus par elle à maître [I]

En tout état de cause

-de condamner maître [I] aux dépens et à lui payer la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir:

*qu’elle a chargé maître [I] après délivrance de l’assignation, d’une procédure à jour fixe devant le juge aux affaires familiales ,

*qu’une convention d’honoraires a été signée le 14 septembre 2020 poru la somme de 4000 euros HT pour 3 procédures distinctes,

*que maître [I] a été substitué à l’audience du 12 novembre 2020 et qu’elle a réglé la somme de 300 euros à ce titre,

*qu’elle a comparu seule devant le tribunal correctionnel dans le cadre de la procédure pour non représentation d’enfant initiée sur convocation par officier de police judiciaire et non sur citation directe

*qu’aucune procédue n’a été engagée pour abandon de famille,

*qu’à titre subsidiaire , les diligences se limitent à la rédaction de deux projetsde citation identiques de 4 pages en matière pénale

*que maître [I] ne justifie d’aucune diligence dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales

Aux termes des siennes auxquelles il se réfère à l’audience, maître [I] demande de confirmer la décision du bâtonnier , de fixer à la somme de 3000 euros les honoraires dus par madame [H], de constater que cette dernière a déjà remis la somme de 2700 euos à titre d’honoraires et de dire qu’elle devra lui verser la somme de 300 euros au titre du solde dû.

Il précise ses diligences

-dans la procédure devant le juge aux affaires familiales:enrôlement de l’assignation, constitution aux lieu et place de son prédécesseur, représentation devant le juge aux affaires familiales

-devant la tribunal correctionnel :rédaction d’une citation directe pour non représentation d’enfant et abandon de famille et enrôlement , saisine du parquet de Marseille pour le retour de l’enfant [L]

Il indique également que suite au changement de conseil par madame [H] , les honoraires ont été fixés à juste titre à la somme de 3000 euros par le bâtonnier compte tenu de ses diligences et de la complexité de l’affaire ainsi que de la renommée de son cabinet.

MOTIFS

Sur la recevabilité du recours

Selon les dispositions de l’article 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé… Le bâtonnier prend sa décision dans les quatre mois et cette décision est notifiée, dans les quinze jours de sa date, à l’avocat et à la partie, par le secrétaire de l’ordre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la lettre de notification mentionnant, à peine de nullité, le délai et les modalités du recours. Aux termes de l’article 176 de ce décret la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou la partie, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans le délai d’un mois.

En l’espèce la décision querellée a été rendue le 14 septembre 2021.

Madame [H] ayant posté la lettre recommandée de recours le 6 octobre , bien que la date de notification de la décision soit inconnue, celui-ci est recevable puisqu’antérieur à l’expiration du délai d’un mois depuis la décision elle-même.

Sur la demande principale

L’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 dispose que les honoraires de postulation, de consultation, d`assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont, à l’exception de certaines matières limitativement énumérées, fixés en accord avec le client. L’alinéa 3 du même texte énonce en outre que, sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 19 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés. Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci étant précisé que toute fixation d’honoraires qui ne le serait qu’en fonction du résultat judiciaire est interdite. Est licite en revanche la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d’un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.

Par ailleurs, aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En application de l’article 9 du code de procédure civile il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention et, selon l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En l’espèce, les parties sont liées par une convention d’honoraires au forfait signée le 14 septembre 2020 pour un montant de 4000 euros HT confiant à maître [I], la défense et de la représentation de ses intérêts dans le cadre du litige suivant:

-dossier d’assistance et représentation de madame [X] [H] dans une procédure de non représentation d’enfant, une procédure pour abandon de famille et une procédure par devant le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Marseille.

Madame [H] a remis deux chèques de 2400 euros dont le premier a été encaissé avant l’audeince devant le juge aux affaires familiales et madame [H] a demandé la restitution du second par lettre recommandée du 19/11/2020.

En matière de contestation d’honoraires il ne revient pas au premier président de statuer sur d’éventuels manquements de l’avocat à ses obligations y compris déontologiques, ceux-ci ne pouvant en tout état de cause justifier la minoration des honoraires dus dès lors qu’ils correspondent aux tâches réalisées, seul le succès d’une action en responsabilité pouvant conduire à celle-ci ou à leur restitution.

Il doit en revanche être vérifié l’effectivité et l’utilité des diligences invoquées.

Ainsi établir des projets d’actes dont il n’est pas justifié qu’ils aient été portés à la connaissance du client et suivi d’une délivrance ou transmission effective ne justifie pas un honoraire.

Concernant la procédure devant le juge aux affaires familiales, il résulte de la décision du 29 décembre 2020 donnant satisfaction aux demandes de madame [H] dans le cadre de cette procédure, que maître [I] l’a assistée et représentée sur la base et dans les termes d’une assignation qu’il n’avait certes pas rédigée mais qui avait donné lieu à des échanges de pièces avec son contradicteur.

Il est donc justifié de l’exécution de la mission de maître [I] à ce titre, rémunérée par le chèque de 2400 euros remis et la demande de restitution ne peut s’inscrire que dans le cadre d’une action en responsabilité.

Il n’est pas justifié en revanche de la délivrance des citations, dont maître [I] produit des projets, pour non représentation d’enfant et abandon de famille devant le tribunal correctionnel, ni de leur enrôlement en l’absence de récépissé d’envoi ou d’accusé de réception des courriers au greffe de la juridiction.

Ceci est tellement vrai que le jugement du tribunal correctionnel du 19 février 2021 sur la prévention de non représentation d’enfant a été rendu sur convocation de monsieur [T] par officier de police judiciaire et avis à victime par ce même mode , ce dont madame [H] avait avisé son conseil par courriel du 3 décembre 2020.

Maître [I] n’était pas présent à cette audience.

Aucun honoraire n’est donc dû au titre de procédures devant le tribunal correctionnel qui n’ont pas été diligentées par ses soins et dans lesquelles maître [I] n’a pas apporté son assistance.

Le solde des honoraires prévu par la convention n’est donc pas dû et les honoraires seront fixés à la seule somme de 2400 euros TTC payée par madame [H] au titre de la procédure devant le juge aux affaires familiales.

Chaque partie succombant partiellement en ses prétentions , les dépens seront partagés par moitié et l’équité n’impose pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par décision contradictoire mise à disposition au greffe,

DISONS le recours de madame [X] [H] recevable,

INFIRMONS la décision du bâtonnier,

FXONS à la somme de 2400 euros TTC le montant des honoraires dus à maître [Y] [I] par madame [X] [H] et CONSTATONS que cette somme a été payée,

FAISONS masse des dépens et CONDAMNONS chacune des parties à les supporter par moitié,

DEBOUTONS madame [X] [H] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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