L’Essentiel : Le 20 novembre 2023, le Groupe Barrière a déposé une plainte contre Meta pour l’utilisation non autorisée de sa marque dans 2400 publicités sur Facebook et Instagram, promouvant des jeux en ligne illégaux. Malgré les efforts de Meta pour signaler ces contenus, Barrière a exigé le retrait immédiat des annonces et la prévention de futures publicités similaires. Le 11 janvier 2024, une ordonnance a été rendue, ordonnant à Meta de filtrer les publicités contrefaisantes et de conserver les données des annonceurs. Cette affaire souligne l’importance de la protection des droits de propriété intellectuelle dans l’environnement numérique. |
Face à une contrefaçon massive en ligne sur les réseaux sociaux (par affichage publicitaire notamment), pensez à l’ordonnance sur requête. L’ordonnance imposant à Meta des mesures de retrait et filtrage de publicités contrefaisantes a été confirmée par la juridiction. Groupe Barrière c/ MetaLe 20 novembre 2023, la société Barrière a déposé une plainte pénale pour dénoncer l’utilisation sans son autorisation de la marque Barrière pour promouvoir une activité de jeux en ligne qu’elle estime illégale sur Facebook et Instagram. La société Meta expose avoir été informée par l’Autorité Nationale des Jeux en décembre 2023 de l’existence de ces publicités et avoir proposé à la société Barrière un outil de protection des droits de la marque pour lui permettre de supprimer les contenus contrefaisants publiés. Les 5 et 7 janvier 2024, la société Barrière a fait constater par commissaire de justice la diffusion sur Facebook, Instagram et Messenger de au moins 2400 publicités, publiées par plusieurs centaines de profils d’annonceurs différents reproduisant ses marques sans son accord pour faire la promotion d’une application de jeux de casino en ligne, certaines annonces reproduisant la devanture de ses casinos. La société Barrière expose avoir procédé à la signalisation de plus d’une centaine de comptes sur la plateforme de Meta ou par l’intermédiaire de son conseil. Elle a mis en demeure la société Meta le 8 janvier 2024 de retirer les publicités estimées illicites diffusées sur Instagram et Facebook, soulignant que les applications de casino en ligne sont prohibées en France et lui enjoignant de lui communiquer les informations nécessaires à l’identification des éditeurs des annonces et pages litigieuses et de refuser à l’avenir les publicités sur Facebook, Instagram, Messenger et Audience Network relatives aux jeux de casino ou jeux d’argent ou de hasard, reproduisant les marques Barrière ou les imitant, lorsque l’annonceur n’a pas de compte certifié. Par courriel officiel du 25 janvier 2024, la société Meta, par l’intermédiaire de son conseil, a informé la société Barrière que les publicités litigieuses étaient inaccessibles, précisé que les informations sur les annonceurs pourront être communiquées sur décision de justice et indiqué ne pouvoir accéder à la demande de la société Barrière de prévenir la diffusion d’autres publicités dès lors qu’en sa qualité d’hébergeur, elle n’a pas d’obligation de surveillance générale. La voie royale de l’OrdonnanceL’article L.716-4-6 du code de la propriété intellectuelle prévoit dans son premier alinéa que “La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur.” Les conditions posées par l’article L. 716-6 du code de la propriété intellectuelle, devenu L.716-4-6, se distinguent de celles de la procédure sur requête du droit commun en ce que l’urgence peut à elle seule justifier l’absence de contradiction (Com., 6 mai 2014, pourvoi n° 13-11.976). Si l’urgence justifiant de déroger au principe du contradictoire peut résulter de tout retard de nature à causer un préjudice irréparable au requérant, le texte de l’article L.716-4-6 n’est pas limitatif et tout autre motif d’urgence peut être de nature à justifier le recours à la procédure sur requête. L’ordonnance rendue au visa de la requête emporte adoption de ses motifs (Civ. 2e, 6 mai 1999, pourvoir n° 96-10.631). Il est en conséquence indifférent que l’ordonnance, qui renvoie à la requête, ne mentionne pas les circonstances justifiant qu’il soit dérogé au principe du contradictoire, dès lors que la requête en a justifié ( 2e Civ., 4 mars 2021, pourvoi n° 19-25.092). Le juge, saisi d’une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête, ne peut se fonder sur des circonstances postérieures à la requête ou à l’ordonnance pour justifier la dérogation au principe de la contradiction (2e Civ., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-22.349). L’article 493 du code de procédure civile dispose que « L’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ». L’action en rétractationL’article 497 dudit code prévoit que « Le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire ». L’article L.716-4-6, alinéa 5 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. A défaut, sur demande du défendeur et sans que celui-ci ait à motiver sa demande, les mesures ordonnées sont annulées, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés ». L’article R.716-15 du même code prévoit que « Le délai prévu au dernier alinéa de l’article L. 716-4-6 et imparti au demandeur pour se pourvoir au fond par la voie civile ou pénale, ou déposer une plainte auprès du procureur de la République, est de vingt jours ouvrables ou de trente et un jours civils si ce délai est plus long, à compter de la date de l’ordonnance ». |
Q/R juridiques soulevées : Quel est le contexte de la plainte de la société Barrière contre Meta ?La société Barrière a déposé une plainte pénale le 20 novembre 2023, dénonçant l’utilisation non autorisée de sa marque pour promouvoir des jeux en ligne jugés illégaux sur les plateformes Facebook et Instagram. Cette plainte fait suite à des publicités diffusées sans accord, ce qui a conduit Barrière à signaler plus de 2400 publicités contrefaisantes. Ces publicités, publiées par de nombreux annonceurs, reproduisaient la marque Barrière et faisaient la promotion d’applications de jeux de casino en ligne, certaines imitant même la devanture de ses casinos.Quelles actions a entreprises la société Barrière pour faire cesser la contrefaçon ?La société Barrière a pris plusieurs mesures pour lutter contre la contrefaçon de sa marque. Elle a d’abord signalé plus d’une centaine de comptes sur les plateformes de Meta. Le 8 janvier 2024, elle a mis en demeure Meta de retirer les publicités jugées illicites et a demandé des informations sur les annonceurs. En réponse à l’urgence de la situation, Barrière a également présenté une requête le 11 janvier 2024, qui a abouti à une ordonnance ordonnant à Meta de filtrer les publicités contrefaisantes et de conserver les données relatives à ces publicités.Quelles sont les implications de l’ordonnance sur requête dans ce contexte ?L’ordonnance sur requête, prévue par l’article L.716-4-6 du code de la propriété intellectuelle, permet à une juridiction civile d’ordonner des mesures urgentes sans contradiction préalable lorsque cela est nécessaire pour éviter un préjudice irréparable. Dans le cas de Barrière, cette ordonnance a permis d’imposer à Meta des mesures immédiates pour filtrer les publicités contrefaisantes. L’urgence a été reconnue, justifiant ainsi la dérogation au principe du contradictoire, ce qui est essentiel pour protéger les droits de propriété intellectuelle dans des situations où un retard pourrait causer un préjudice significatif.Comment Meta a-t-elle réagi à la demande de Barrière ?Meta a informé Barrière par courriel le 25 janvier 2024 que les publicités litigieuses étaient désormais inaccessibles. Cependant, elle a précisé que les informations sur les annonceurs ne pouvaient être communiquées que sur décision de justice. Meta a également souligné qu’en tant qu’hébergeur, elle n’avait pas d’obligation de surveillance générale, ce qui limite sa responsabilité dans la diffusion de contenus illicites. Cette position soulève des questions sur la responsabilité des plateformes en ligne face à la contrefaçon et à la protection des marques.Quelles sont les conditions pour une ordonnance sur requête selon le code de la propriété intellectuelle ?L’article L.716-4-6 du code de la propriété intellectuelle stipule que la juridiction civile peut ordonner des mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement. L’urgence peut justifier cette absence de contradiction, et tout retard pouvant causer un préjudice irréparable au requérant est suffisant pour recourir à cette procédure. De plus, l’ordonnance rendue emporte adoption de ses motifs, ce qui signifie que les raisons justifiant l’urgence n’ont pas besoin d’être répétées dans l’ordonnance elle-même.Quelles sont les possibilités de rétractation d’une ordonnance sur requête ?Selon l’article 497 du code de procédure civile, le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si l’affaire est déjà portée devant le juge du fond. L’article L.716-4-6 précise également que si des mesures sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit agir dans un délai réglementaire, sous peine d’annulation des mesures ordonnées. Ce cadre juridique permet de garantir que les mesures urgentes restent pertinentes et adaptées à l’évolution de la situation.Quel est le délai imparti au demandeur pour agir après une ordonnance sur requête ?L’article R.716-15 du code de la propriété intellectuelle fixe le délai imparti au demandeur pour se pourvoir au fond à vingt jours ouvrables ou à trente et un jours civils, selon ce qui est le plus long, à compter de la date de l’ordonnance. Ce délai est déterminant pour assurer que les mesures prises restent en vigueur et que le demandeur puisse faire valoir ses droits dans un cadre légal approprié. Si le demandeur ne respecte pas ce délai, les mesures ordonnées peuvent être annulées, ce qui souligne l’importance de la réactivité dans les affaires de contrefaçon. |
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