L’Essentiel : De 2012 à 2015, M. [S] [G] a contracté des prêts en ligne en usurpant l’identité de son épouse, totalisant 211 600 euros. Reconnu coupable de faux en écriture publique, il a été condamné en mai 2017. En décembre 2019, la S.A. Floa a été informée de la situation par l’ex-épouse, entraînant une mise en demeure de M. [S] [G] pour 18 242,85 euros. Ce dernier a contesté la créance, arguant d’une procédure de surendettement. Le tribunal a déclaré irrecevable son exception de prescription et a débouté la S.A. Floa de sa demande en réparation, chaque partie supportant ses propres dépens.
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Contexte de l’affaireDe 2012 à 2015, M. [S] [G] a contracté plusieurs prêts en ligne en utilisant le nom de son épouse, en falsifiant sa signature. Parmi ces prêts, deux ont été contractés auprès de la Banque du groupe Casino, pour un montant total de 16 500 euros, remboursables en plusieurs mensualités. Reconnaissance de culpabilitéLe 11 mai 2017, M. [S] [G] a été reconnu coupable d’avoir trompé son ex-épouse en contractant 19 crédits en son nom, totalisant 211 600 euros. Il a également été reconnu coupable de faux en écriture publique, ayant signé des documents de crédit au nom de son ex-épouse sans son consentement. Actions de la S.A. FloaLe 4 décembre 2019, l’avocat de l’ex-épouse a informé la S.A. Floa de la qualité de victime de sa cliente, signalant l’impossibilité de recouvrer les sommes dues. Le 27 septembre 2022, la S.A. Floa a mis M. [S] [G] en demeure de régler 18 242,85 euros pour des échéances impayées. Réponse de M. [S] [G]En réponse, M. [S] [G] a assigné la S.A. Floa devant le tribunal judiciaire de Montpellier, demandant la condamnation de la société à lui verser 18 242,85 euros en réparation du dommage subi. Il a également soutenu que ses dettes avaient été éteintes par une procédure de surendettement en avril 2019. Arguments des partiesLa S.A. Floa a demandé au tribunal de condamner M. [S] [G] à lui verser 18 242,85 euros, ainsi que des intérêts et des frais. M. [S] [G] a contesté cette demande, affirmant que la créance de la S.A. Floa était éteinte en raison de la procédure de surendettement. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré irrecevable l’exception de prescription soulevée par M. [S] [G] et a débouté la S.A. Floa de sa demande en réparation. Chaque partie a été condamnée à payer ses propres dépens, et il n’y a pas eu lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire a été rappelée comme étant de droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de l’action de M. [S] [G] ?La recevabilité de l’action de M. [S] [G] est régie par l’article 122 du code de procédure civile, qui stipule que constitue une fin de non-recevoir tout moyen tendant à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond pour défaut de droit d’agir. Cet article précise que les causes d’irrecevabilité peuvent inclure le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, ou la chose jugée. Dans cette affaire, M. [S] [G] a soulevé la prescription de l’action de la S.A. Floa en se référant à l’article L218-2 du code de la consommation, qui prévoit que « l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent se prescrit par deux ans. » Cependant, le tribunal a noté que l’assignation a été délivrée après le 1er janvier 2020, date d’entrée en vigueur de l’article 789 du code de procédure civile, qui confère au juge de la mise en état la compétence exclusive pour statuer sur les exceptions de procédure, y compris la prescription. Ainsi, le juge du fond ne pouvait pas examiner ce moyen, le déclarant irrecevable. Comment la procédure de surendettement affecte-t-elle l’action en réparation du préjudice ?L’article L741-2 du code de la consommation stipule qu’en l’absence de contestation, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne l’effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, arrêtées à la date de la décision de la commission. Les dettes exclues de cette remise sont énumérées dans l’article L711-4, qui précise que, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale, et les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses. M. [S] [G] a bénéficié d’une mesure de rétablissement personnel, ce qui a conduit à l’effacement des dettes contractées auprès de la S.A. Floa. La S.A. Floa, quant à elle, soutient que sa demande de réparation est fondée sur un préjudice quasi délictuel. Toutefois, le tribunal a constaté que les créances de la S.A. Floa, déclarées à hauteur de 7 599,22 euros et 9 000 euros, faisaient partie des dettes effacées. De plus, la S.A. Floa n’a pas prouvé que la réparation qu’elle réclame lui aurait été allouée dans le cadre d’une condamnation pénale, ni qu’elle avait contesté la décision de la commission de surendettement dans le délai imparti. Ainsi, la demande de réparation devient sans objet, et la S.A. Floa a été déboutée de sa demande. Quelles sont les conséquences sur les demandes accessoires ?Les demandes accessoires sont régies par l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge. Dans cette affaire, le tribunal a décidé que chaque partie conserverait ses propres dépens, ce qui signifie qu’aucune des parties ne sera condamnée à payer les frais de l’autre. En ce qui concerne l’article 700 du code de procédure civile, il prévoit que le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour les frais exposés et non compris dans les dépens. Cependant, le tribunal a jugé qu’il n’y avait pas lieu à une telle condamnation, tenant compte de l’équité et de la situation économique des parties. Ainsi, le tribunal a statué qu’il n’y avait pas lieu à application des dispositions de l’article 700, et a rappelé que l’exécution provisoire est de droit. |
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N° RG 22/05020 – N° Portalis DBYB-W-B7G-N5A7
Pôle Civil section 2
Date : 21 Novembre 2024
LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONTPELLIER
Pôle Civil section 2
a rendu le jugement dont la teneur suit :
DEMANDERESSE
S.A. FLOA, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 4] – [Localité 1]
représentée par Maître Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocats postulants au barreau de MONTPELLIER et Maitte Aurélie DEGLANE de la SELARL BRT, avocats plaidants au barreau de LA ROCHELLE – ROCHEFORT
DEFENDEUR
Monsieur [S] [G], demeurant [Adresse 2] et actuellement [Adresse 5] – [Localité 3]
représenté par Me Anne SEVENIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : Florence LE-GAL
Juge unique
assisté de Françoise CHAZAL greffier faisant fonction, lors des débats et du prononcé.
DEBATS : en audience publique du 19 Septembre 2024
MIS EN DELIBERE au 21 Novembre 2024
JUGEMENT : signé par le président et le greffier et mis à disposition le 21 Novembre 2024
De 2012 à courant 2015, M. [S] [G] a contracté plusieurs prêts en ligne en utilisant le nom de son épouse et falsifiant sa signature, dont deux prêts auprès de la société Banque du groupe Casino -ayant changé sa dénomination pour M. [S] [G]- suivant contrats du
-14 septembre 2014 pour un prêt personnel de 7500 euros remboursable en 60 mensualités de 158, 24 euros,
– 14 février 2015 pour un prêt personnel 9000 euros remboursable en 48 mensualités de 227, 34 euros.
Par ordonnance du 11 mai 2017 en homologation de la peine proposée par le procureur de la République de Montpellier, M. [S] [G] a été reconnu coupable d’avoir trompé son ex-épouse en faisant usage d’un faux nom afin de contracter 19 crédits en son nom pour un montant total de 211 600 euros, et d’avoir commis l’infraction de faux en écriture publique ou authentique, en ayant signé divers documents de crédit au nom de son ex-épouse sans l’en avoir prévenue et en ayant fait parvenir divers documents personnels pour obtenir ces crédits.
Par courrier du 4 décembre 2019, l’avocat de son ex-épouse a notamment informé la S.A. Floa de la qualité de victime de sa cliente et de l’impossibilité de recouvrement des sommes dues au titre des prêts litigieux.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 27 septembre 2022 a mis la S.A. Floa en demeure de régler la somme de 18 242,85 euros correspondant à l’absence de règlement des échéances des deux contrats précités.
Sans réponse de M. [S] [G], par acte de commissaire de justice du 18 octobre 2022, M. [S] [G] l’a assigné devant le tribunal judiciaire de Montpellier aux fins de sa condamnation en réparation du dommage subi à hauteur de 18 242,85 euros.
Par dernières conclusions notifiées le 29 septembre 2023 par R.P.V.A, au visa des dispositions de l’article 1240 du code civil, la S.A. Floa demande au tribunal de condamner M. [S] [G] à lui payer la somme de 18 242,85 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2022, ainsi que la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par conclusions notifiées le 12 septembre 2023, M. [S] [G] demande au tribunal :
– à titre principal de constater que ses dettes ont été éteintes par la commission de surendettement le 2 avril 2019 et de rejeter en conséquence les demande de la requérante,
– à titre subsidiaire de dire que l’action de la S.A. Floa et de déclarer en conséquences l’action adverse irrecevable,
– à titre infiniment subsidiaire, de dire que la prétention de la requérante constitue une fraude à la loi et de la condamner à lui payer 3000 euros au titre de l’article 700 ainsi que les entiers dépens.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux dernières conclusions régulièrement notifiées par bulletin au R.P.V.A. par la S.A. Floa et celles régulièrement notifiées par bulletin au R.P.V.A. par M. [S] [G].
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2024 avec une audience de plaidoirie prévue le 19 septembre 2024. La décision a été mise en délibéré au 21 novembre 2024.
A titre liminaire, il est rappelé aux parties que le tribunal n’est pas tenu de les suivre dans l’ordre de de leur argumentation.
Il appartient au tribunal d’examiner en premier lieu la fin de non recevoir soulevée dont l’accueil aurait été de nature à influer sur la recevabilité de l’action sans s’arrêter à l’ordre dans laquelle elle a été présentée, “à titre subsidiaire”.
SUR LA FORME, la recevabilité de l’action de M. [S] [G]
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L’article 789 du code de procédure civile prévoit que “le juge de la mise en état est, à compter de sa désignation et, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance ; […]”
En l’espèce, M. [S] [G] soutient que l’action de la S.A. Floa est prescrite au visa de L218-2 du code de la consommation aux termes duquel “l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent se prescrit par deux ans.
Il ressort toutefois des éléments du dossier que l’assignation a été délivrée postérieurement au 1er janvier 2020, date d’entrée en vigueur des dispositions de l’article 789 du code de procédure civile précitées : par conséquent, seul le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur l’exception tirée de la prescription. Le juge du fond ne pouvant en être saisi, ce moyen en droit est déclaré irrecevable.
SUR LE FOND, l’incidence de la procédure de surendettement sur l’action en réparation du préjudice
L’article L741-2 du code de la consommation prévoit -version en vigueur au 2 avril 2019, date à laquelle M. [S] [G] a bénéficié de la commission de surendettement des particuliers de l’Hérault d’une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire- qu’ “En l’absence de contestation dans les conditions prévues à l’article L. 741-4, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne l’effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, arrêtées à la date de la décision de la commission, à l’exception des dettes mentionnées aux articles L. 711-4 et L. 711-5 et des dettes dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques. […]”
Et aux termes de l’article L741-3 du même code : “Les créances dont les titulaires n’ont pas été avisés de la décision imposée par la commission et n’ont pas contesté cette décision dans le délai fixé par décret mentionné à l’article L. 741-4 sont éteintes.” et de l’article L711-4 de même code: “Sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement :
1° Les dettes alimentaires ;
2° Les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale ;
3° Les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale énumérés à l’article L. 114-12 du code de la sécurité sociale ;
L’origine frauduleuse de la dette est établie soit par une décision de justice, soit par une sanction prononcée par un organisme de sécurité sociale dans les conditions prévues aux articles L. 114-17 et L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale.”
En l’espèce, M. [S] [G] plaide qu’il a bénéficié d’une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire par la commission de surendettement des particuliers de l’Hérault, que l’inscription puis l’effacement des dettes contractées auprès de la S.A. Floa interdit à cette dernière de lui en réclamer le paiement.
La S.A. Floa affirme qu’il n’en est rien, en ce qu’elle réclame la condamnation de l’intéressé sur un fondement quasi délictuel.
Mais font bien partie des dettes effacées, la créance de la S.A. Floa déclarée à hauteur de 7 599, 22 euros et 9000 euros au titre des deux prêts sus-visés.
Par ailleurs la requérante ne justifie nullement que la réparation pécuniaire qu’elle réclame lui aurait été allouée dans le cadre de d’une condamnation pénale pas plus qu’elle ne justifie avoir constesté la décision de la commission de surendettement des particuliers de l’Hérault dans le délai imparti par décret.
Ces dettes ayant été effacées, la demande en réparation du préjudice subi qui lui est lié devient sans objet et la S.A. Floa doit être déboutée de sa demande.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
Au vu des éléments de la présente affaire, il y a lieu d’ordonner que chaque partie conserve ses propres dépens engagés dans cette instance.
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2° Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent. La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l’État majorée de 50 %.
En l’espèce, l’équité commande de dire n’y avoir lieu à condamnation au visa de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Le tribunal statuant publiquement, contradictoirement en premier ressort, par mise à disposition du jugement au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
DECLARE irrecevable l’exception de prescription de l’action,
DÉBOUTE la S.A. Floa de sa demande en réparation de son préjudice par le paiement de la somme de 18 242,85 euros,
CONDAMNE chaque partie au paiement de ses propres dépens engagés dans l’instance,
DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Ainsi jugé et mis à disposition au greffe civil le 21 novembre 2024.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
Françoise CHAZAL Florence LE-GAL
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