Force majeure et délais de procédure : un cas exceptionnel reconnu

·

·

Force majeure et délais de procédure : un cas exceptionnel reconnu

L’Essentiel : Le litige oppose M. [O] [N] à Mme [Z] [I] concernant un bail d’appartement. Le tribunal a ordonné à Mme [Z] [I] de libérer les lieux et de verser 8.550 euros à M. [O] [N] pour loyers impayés. En appel, Mme [Z] [I] a contesté le jugement, tandis que M. [O] [N] a vu ses conclusions déclarées irrecevables pour non-respect des délais. Toutefois, la présidente de chambre a reconnu un cas de force majeure justifiant ce retard. L’affaire a été renvoyée pour clôture à l’audience du 15 mai 2025, avec une fixation prévue pour le 13 juin 2025.

Contexte du litige

Le litige concerne un bail conclu le 5 août 2005 entre M. [O] [N] et Mme [Z] [I] pour un appartement à usage d’habitation. Le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Fort-de-France a rendu un jugement le 6 mai 2024, constatant que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 20 novembre 2022.

Décisions du tribunal

Le tribunal a ordonné à Mme [Z] [I] de libérer les lieux et de restituer les clés. En cas de non-respect, M. [O] [N] pourrait procéder à son expulsion avec l’aide de la force publique. De plus, Mme [Z] [I] a été condamnée à verser 8.550 euros à M. [O] [N] pour loyers et charges, ainsi qu’une indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la restitution des clés.

Appel de Mme [Z] [I]

Mme [Z] [I] a interjeté appel du jugement le 26 juin 2024. Un avis d’orientation a été adressé le 11 juillet 2024, et M. [O] [N] s’est constitué intimé le 30 juillet 2024. Le greffe a ensuite demandé des observations concernant le défaut de paiement du droit d’appel.

Conclusions des parties

Mme [Z] [I] a conclu au fond le 12 août 2024, tandis que M. [O] [N] a fait de même le 5 novembre 2024. Cependant, la présidente de chambre a soulevé l’irrecevabilité des conclusions de M. [O] [N] en raison du non-respect des délais.

Demande de M. [O] [N]

M. [O] [N] a demandé à la présidente de chambre de constater un cas de force majeure ayant empêché son avocat de remettre ses conclusions dans les délais. Il a sollicité l’écartement des sanctions prévues par le code de procédure civile.

Décision sur l’irrecevabilité

La présidente de chambre a examiné la situation et a constaté que l’avocate de M. [O] [N] avait effectivement rencontré des problèmes de santé justifiant son incapacité à respecter les délais. Par conséquent, la caducité de la déclaration d’appel a été écartée.

Conclusion et prochaines étapes

La présidente de chambre a décidé d’écarter les sanctions et a renvoyé l’affaire pour clôture à l’audience du 15 mai 2025, avec une fixation à l’audience du 13 juin 2025. Les dépens ont été réservés.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’application de la clause résolutoire dans un bail d’habitation ?

La clause résolutoire dans un bail d’habitation est régie par l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, qui stipule que :

« Le bailleur peut, par voie de commandement, faire constater la résiliation du bail en cas de non-paiement des loyers et charges aux échéances convenues. »

Pour que la clause résolutoire soit applicable, il est nécessaire que le bailleur ait respecté certaines conditions, notamment :

1. Notification préalable : Le bailleur doit notifier au locataire le défaut de paiement par un commandement de payer, conformément à l’article 24-1 de la même loi.

2. Délai de paiement : Le locataire doit avoir un délai de deux mois pour régulariser sa situation après la notification.

3. Constatation judiciaire : Si le locataire ne régularise pas sa situation, le bailleur peut demander au juge de constater la résiliation du bail.

Dans le cas présent, le juge a constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 20 novembre 2022, ce qui signifie que les étapes légales avaient été respectées.

Quels sont les effets d’une décision de justice ordonnant l’expulsion d’un locataire ?

L’expulsion d’un locataire est encadrée par l’article 38 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, qui précise que :

« L’expulsion ne peut être exécutée qu’après un jugement ayant constaté la résiliation du bail et ordonné l’expulsion. »

Les effets d’une telle décision incluent :

1. Libération des lieux : Le locataire doit libérer les lieux et restituer les clés au bailleur.

2. Délai d’exécution : Si le locataire ne s’exécute pas volontairement, le bailleur peut faire appel à un huissier pour procéder à l’expulsion, après un commandement de quitter les lieux.

3. Recours à la force publique : En cas de résistance, le bailleur peut demander le concours de la force publique pour réaliser l’expulsion.

Dans le jugement rendu, il a été ordonné à Mme [Z] [I] de libérer les lieux, et en cas de non-respect, M. [O] [N] pourrait procéder à son expulsion avec l’aide d’un serrurier et de la force publique.

Quelles sont les conséquences financières d’un défaut de paiement de loyer ?

Les conséquences financières d’un défaut de paiement de loyer sont régies par l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, qui stipule que :

« Le locataire est tenu de payer le loyer et les charges aux échéances convenues. »

En cas de non-paiement, le bailleur peut :

1. Demander le paiement des arriérés : Le bailleur peut réclamer les loyers impayés, comme cela a été fait dans le jugement où Mme [Z] [I] a été condamnée à payer 8.550 euros.

2. Indemnité d’occupation : En plus des arriérés, le bailleur peut demander une indemnité d’occupation pour la période durant laquelle le locataire reste dans les lieux après la résiliation du bail. Cette indemnité est fixée au montant du loyer et des charges.

3. Intérêts de retard : Le bailleur peut également demander des intérêts au taux légal sur les sommes dues à compter de la date de délivrance du commandement de payer.

Dans cette affaire, Mme [Z] [I] a été condamnée à payer des arriérés de loyer ainsi qu’une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 1er septembre 2022.

Quelles sont les implications de l’irrecevabilité des conclusions en appel ?

L’irrecevabilité des conclusions en appel est régie par l’article 905-2 du code de procédure civile, qui précise que :

« L’intimé dispose d’un délai d’un mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant pour remettre au greffe ses conclusions. »

Les implications de cette irrecevabilité incluent :

1. Perte de droit de réponse : Si l’intimé ne respecte pas le délai imparti, ses conclusions peuvent être déclarées irrecevables, ce qui signifie qu’il ne pourra pas faire valoir ses arguments devant la cour.

2. Sanctions : L’irrecevabilité peut entraîner des sanctions, comme le rejet des demandes de l’intimé, ce qui peut avoir des conséquences sur l’issue de l’affaire.

3. Possibilité de régularisation : Dans certains cas, comme celui de M. [O] [N], il est possible de demander l’écartement des sanctions en invoquant un cas de force majeure, ce qui a été retenu par la présidente de chambre dans cette affaire.

Ainsi, la présidente a écarté les sanctions prévues par l’article 905-2, permettant à M. [O] [N] de continuer à défendre ses intérêts dans le cadre de l’appel.

COUR D’APPEL

DE [Localité 5]

Chambre civile

MINUTE N° :

N° RG 24/00260 – N° Portalis DBWA-V-B7I-CO2G

Jugement du juge des contentieux de la protection de [Localité 5], en date du 06 Mai 2024, enregistré sous le n° 22/00997

ORDONNANCE

Madame [Z] [I]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Fred GERMAIN, avocat au barreau de Martinique

APPELANTE

Monsieur [O] [N]

[Adresse 6]

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentant : Me Céline CAMPI, avocat au barreau de Martinique

INTIME

Le seize Janvier deux mille vingt cinq

Nous, Christine PARIS, présidente de chambre, assisté de Mme Sandra DE SOUSA, greffière, 

Vu la procédure en instance d’appel inscrite au greffe sous le N° RG 24/00260 – N° Portalis DBWA-V-B7I-CO2G ;

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement contradictoire rendu en date du 6 mai 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Fort-de-France a notamment :

– Constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 5 août 2005 entre M. [O] [N] et Mme [Z] [I] portant sur un appartement à usage d’habitation situé [Adresse 2] sont réunies à la date du 20 novembre 2022 ;

– Ordonné en conséquence à Mme [Z] [I] de libérer les lieux et de restituer les clés dès la signification de la présente ordonnance ;

– Dit qu’à défaut pour Mme [Z] [I] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, M. [O] [N] pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

– Condamné Mme [Z] [I] à payer à M. [O] [N] la somme de 8.550 euros en principal (loyers, charges, d’août 2021 à août 2022 inclus), avec les intérêts au taux légal sur la somme de 7.410 euros à compter de la date de délivrance du commandement de payer, soit le 20 septembre 2022, et à compter de la présente ordonnance pour le surplus ;

– Condamné Mme [Z] [I] à payer à M. [O] [N] une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 1er septembre 2022 et jusqu’à la date de la libération définitive des lieux et la restitution des clés ;

– Fixé cette indemnité mensuelle d’occupation au montant du loyer et des charges, calculés tels que si le contrat s’était poursuivi ;

– Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné Mme [Z] [I] aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer;

– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Suivant déclaration au greffe en date du 26 juin 2024, Mme [Z] [I] a interjeté appel de chacun des chefs du jugement susvisé.

Un avis d’orientation et de fixation de l’affaire à bref délai lui a été adressé le 11 juillet 2024.

M. [O] [N] s’est constitué intimé le 30 juillet 2024.

Par courrier transmis par voie électronique le 30 juillet 2024, le greffe a sollicité les observations de l’avocat de l’intimé sur les raisons du défaut de paiement du droit prévu par l’article 1635 bis P du code général des impôts, l’a informé de la possibilité de régulariser la situation, lui a rappelé la sanction prévue par l’articles 963 du code de procédure civile, à savoir l’irrecevabilité de l’appel ou des défenses, et l’a averti qu’à défaut de régularisation, l’irrecevabilité serait constatée d’office.

Mme [Z] [I] a conclu au fond le 12 août 2024.

M. [O] [N] à quant à lui conclu au fond le 5 novembre 2024.

Par avis d’irrecevabilité des conclusions en date du 21 novembre 2024, la présidente de chambre a soulevé l’irrecevabilité des conclusions de l’intimé sur le fondement de l’article 905-2 du code de procédure civile et a invité les parties à faire valoir leurs observations avant le 2 décembre 2024.

Par conclusions d’incident notifiées par la voie électronique le 29 novembre 2024, M. [O] [N] demande à la présidente de chambre de :

– CONSTATER l’existence d’un cas de force majeure ayant empêché l’avocat de l’intimé de remettre ses conclusions au greffe de la cour dans les délais requis ;

En conséquence,

– ECARTER l’application des sanctions prévues à l’article 906-2 du code de procédure civile ;

– STATUER ce que de droit sur les dépens.

Mme [Z] [I] n’a fait aucune observation dans le délai imparti.

Les parties se sont acquittées du timbre.

L’incident a été retenu le 5 décembre 2024 et mis en délibéré le 16 janvier 2025.

MOTIFS:

En application de l’article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile, l’intimé dispose d’un délai d’un mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant pour remettre au greffe ses conclusions et former le cas échéant appel incident ou appel provoqué.

Selon l’article 911 du même code, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour.

En l’espèce, M. [O] [N], intimé, a constitué avocat le 30 juillet 2024.

Mme [Z] [I], appelante, a conclu le 12 août 2024.

L’intimé n’a conclu que le 5 novembre 2024, soit après le délai d’un mois suivant les conclusions de l’appelante du 12 août 2024.

L’avocate de M.[O] [N] invoque la force majeure. Elle fait valoir qu’elle n’a pas pu répondre dans les délais en raison de problèmes de santé.

Au regard des pièces produites,et notamment des pièces médicales l’avocate de M. [O] [N] justifie de graves problèmes de santé à compter du 13 juillet 2024 ayant persisté pendant le délai dont elle disposait pour faire appel.

Il n’est donc pas contesté et contestable que l’avocate de M.[O] [N] n’a pu exercer réellement son activité pour des raisons de santé et il y a donc lieu de considérer qu’elle n’a pu accomplir certaines diligences pour cause de force majeure.

La caducité de la déclaration d’appel soulevée sur le fondement de l’article 905-2 du code de procédure civile sera donc écartée.

PAR CES MOTIFS

La présidente de chambre,

– ECARTE les sanctions prévues à l’article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile ;

– RENVOIE l’affaire pour clôture à l’audience du 15 mai 2025 et fixation à l’audience du 13 juin 2025 à 9H00 en collégiale rapporteur ;

– RÉSERVE les dépens.

La greffière, La présidente de chambre,


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon