L’Essentiel : Europacorp a remporté une victoire judiciaire concernant la cession des droits sur les personnages de la trilogie « Arthur et les Minimoys ». Les juges d’appel ont validé les contrats de cession, permettant aux auteurs-illustrateurs d’être rémunérés forfaitairement selon l’ARCEPicle L. 131-4 du code de la propriété intellectuelle. Bien que les auteurs aient contesté la validité des contrats pour méconnaissance des règles de rémunération, l’action en nullité était prescrite pour le premier volet. Les juges ont également souligné que les auteurs étaient informés des enjeux lors de la signature des contrats, rendant leur engagement libre et éclairé.
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Affaire EuropacorpEuropacorp a remporté cette nouvelle manche judiciaire concernant la rémunération des auteurs dessinateurs de films d’animation. C’est à tort que les juges du premier degré ont invalidé la cession des droits sur les personnages principaux de la trilogie « Arthur et les minimoys ». Les juges d’appel ont reconnu la validité de la totalité des contrats de cession de droits en cause (conception graphique des personnages secondaires, accessoires et décors dessinés). Les auteurs-illustrateurs pouvaient donc être rémunérés de façon forfaitaire par application de l’article L. 131-4,4° du code de la propriété intellectuelle (CPI) y compris pour la cession du droit au marchandisage sur les personnages conçus. Prescription de l’action en nullitéLes auteurs-illustrateurs avaient contesté la validité des contrats conclus avec la société Europacorp pour méconnaissance des règles impératives du Code de la propriété intellectuelle et notamment celles relatives à la rémunération proportionnelle prévue à l’article L. 131-4. Or, l’action en nullité ouverte au profit de l’auteur se prescrit par cinq ans conformément aux dispositions de l’article 1304 du code civil en sa version applicable. L’action en nullité des contrats conclus pour la réalisation du 1er volet de la trilogie « Arthur et le Minimoys » était prescrite au jour de l’assignation. En revanche, l’action en nullité a été jugée recevable pour les second et troisième volets de la trilogie mais la cession des droits a été déclarée parfaite. Cession de droits validéeLes contrats en cause n’avaient pas pour objet la création de personnages principaux (déjà créés et cédés dans le cadre du premier opus) et la référence explicite à l’exception prévue L. 131-4 du CPI excluant une rémunération proportionnelle avait été signée en toute connaissance de cause et en parfaite adéquation avec la réalité du travail de création de chacun des auteurs. Pour rappel, l’article L. 131-4 du CPI dispose que la cession par l’auteur de ses droits sur son oeuvre peut être totale ou partielle et doit comporter à son profit la participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l’exploitation. Il est toutefois précisé que la rémunération de l’auteur peut être évaluée forfaitairement notamment si : « La nature ou les conditions de l’exploitation rendent impossible l’application de la règle de la rémunération proportionnelle, soit que la contribution de l’auteur ne constitue pas l’un des éléments essentiels de la création intellectuelle de l’œuvre, soit que l’utilisation de l’œuvre ne présente qu’un caractère accessoire par rapport à l’objet exploité ». L’objet des contrats stipulait clairement que l’auteur devait travailler « à partir des instructions et des éléments fournis par Luc Besson » et « en concertation permanente avec l’auteur réalisateur et le producteur » ; « l’auteur s’engage à accepter de procéder ou de voir procéder par les coauteurs aux modifications et remaniement de sa création… ». C’est donc à tort que le tribunal a pu se convaincre du caractère non accessoire de la création des auteurs. Cession négociée donc opposable
En réalité, les auteurs, assistés par le même avocat lors de la conclusion des contrats d’origine, étaient parfaitement informés des enjeux et du contenu du travail qu’ils auraient à fournir et des méthodes de travail qui avaient été celles du premier film. Pour autant, ils n’ont pas formulé la moindre prétention sur la paternité des personnages principaux, qui ont tous été créés sur l’opus 1, ni sur l’étendue et le rôle de leur contribution artistique en qualité de co-auteurs des personnages secondaires, accessoires et décors du film, ni de réclamation concernant la rémunération forfaitaire qu’ils ont perçue ou qu’ils entendaient percevoir pour les opus 2 et 3 en contrepartie de leur travail créatif. Leur engagement a donc été libre et éclairé et correspondait à la réalité des faits. En d’autres termes, les juges ont émis de sérieux doutes sur la bonne foi des auteurs, qui avaient demandé dans le cadre de la procédure de référés l’application des contrats dont ils ne contestaient alors pas la validité. Demande subsidiaire de rescision pour lésion
Les auteurs ont également demandé en vain la lésion de plus des 7/12ème subie sur l’ensemble des contrats de cessions d’auteurs signés (révision à la hausse du forfait). L’article L.131-5 du Code de propriété intellectuelle dispose qu’en cas de cession du droit d’exploitation, « lorsque l’auteur aura subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l’oeuvre, il pourra provoquer la révision des conditions de prix du contrat. Cette demande ne pourra être formée que dans le cas où l’œuvre aura été cédée moyennant une rémunération forfaitaire. La lésion sera appréciée en considération de l’ensemble de l’exploitation par le cessionnaire des oeuvres de l’auteur qui se prétend lésé. » La lésion se distingue de l’insuffisance de prévision des produits de l’oeuvre et doit être appréciée au moment de la conclusion du contrat. L’action en rescision pour lésion n’a pu être invoquée s’agissant des premiers contrats car prescrite. La preuve des lésions n’a pu être établie pour les contrats des autres opus de la trilogie. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle a été la décision des juges d’appel concernant la cession des droits sur les personnages de la trilogie « Arthur et les minimoys » ?La décision des juges d’appel a été de reconnaître la validité de la totalité des contrats de cession de droits en cause, y compris ceux relatifs à la conception graphique des personnages secondaires, accessoires et décors dessinés. Ils ont invalidé la décision des juges du premier degré qui avait déclaré la cession des droits sur les personnages principaux comme étant nulle. Les auteurs-illustrateurs ont donc pu être rémunérés de manière forfaitaire, conformément à l’article L. 131-4,4° du code de la propriété intellectuelle (CPI), ce qui inclut également le droit au marchandisage sur les personnages conçus. Quelles étaient les contestations des auteurs-illustrateurs concernant les contrats avec Europacorp ?Les auteurs-illustrateurs ont contesté la validité des contrats en raison de la méconnaissance des règles impératives du Code de la propriété intellectuelle, notamment celles relatives à la rémunération proportionnelle prévue à l’article L. 131-4. Ils ont soutenu que les contrats ne respectaient pas ces dispositions, ce qui a conduit à leur demande d’annulation. Cependant, l’action en nullité pour le premier volet de la trilogie était prescrite, car elle devait être engagée dans un délai de cinq ans. En revanche, l’action en nullité pour les second et troisième volets a été jugée recevable, mais la cession des droits a été déclarée parfaite, ce qui a renforcé la position d’Europacorp. Comment les juges ont-ils justifié la validité des contrats de cession de droits ?Les juges ont justifié la validité des contrats en précisant que ceux-ci n’avaient pas pour objet la création de personnages principaux, qui avaient déjà été créés et cédés dans le cadre du premier opus. De plus, la référence explicite à l’exception prévue par l’article L. 131-4 du CPI, qui exclut une rémunération proportionnelle, avait été signée en toute connaissance de cause par les auteurs. Les contrats stipulaient clairement que les auteurs devaient travailler à partir des instructions fournies par Luc Besson et en concertation avec lui, ce qui a été pris en compte pour établir la nature accessoire de leur création. Quelles étaient les implications de la demande subsidiaire de rescision pour lésion formulée par les auteurs ?Les auteurs ont demandé une révision à la hausse de leur rémunération forfaitaire en raison d’une lésion qu’ils estimaient avoir subie, dépassant les 7/12ème sur l’ensemble des contrats de cession. L’article L.131-5 du Code de propriété intellectuelle stipule que l’auteur peut demander une révision des conditions de prix du contrat en cas de préjudice significatif dû à une lésion. Cependant, cette demande n’a pas pu être retenue pour les premiers contrats, car elle était prescrite, et la preuve des lésions n’a pas pu être établie pour les contrats des autres volets de la trilogie. Quels éléments ont été pris en compte pour évaluer la bonne foi des auteurs dans cette affaire ?Les juges ont émis des doutes sur la bonne foi des auteurs, en soulignant qu’ils avaient été assistés par le même avocat lors de la conclusion des contrats et étaient donc bien informés des enjeux. Ils n’ont pas contesté la paternité des personnages principaux, ni l’étendue de leur contribution artistique en tant que co-auteurs des personnages secondaires, accessoires et décors. Leur engagement a été jugé libre et éclairé, correspondant à la réalité des faits, ce qui a renforcé la position d’Europacorp dans cette affaire. |
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