Film publicitaire : la garantie de l’agence est due

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Film publicitaire : la garantie de l’agence est due

L’Essentiel : Dans le cadre d’une campagne publicitaire, l’agence BETC était responsable de garantir que les créations livrées étaient libres de droits. En sous-traitant à la société Iconoclaste, BETC devait s’assurer que tous les droits d’auteur nécessaires étaient acquis. Cependant, un litige est survenu lorsque la société Pacific Création a été alertée d’une possible contrefaçon liée à un modèle vestimentaire. Malgré cela, aucune preuve n’a été fournie pour établir que la société Abdi détenait des droits d’auteur sur le vêtement en question, ce qui a conduit à la conclusion qu’il n’y avait pas eu manquement de la part de BETC.

Le cédant d’un droit de propriété corporel ou incorporelle est tenu à une garantie d’éviction. Y compris lorsqu’elle  sous traite ses prestations, une agence de publicité doit, en sa qualité de cédant de ses droits d’exploitation sur la campagne publicitaire au profit de son client, garantir une jouissance paisible des droits cédés, et en particulier s’assurer que ladite campagne peut être exploitée sans risque, notamment d’action en contrefaçon de droits d’auteur. L’agence doit, pour se faire, s’assurer que les accessoires et vêtements portés par les mannequins dans toute campagne publicitaire commandée, ne sont grevés d’aucun droit de tiers, notamment d’un droit d’auteur, et que l’exploitation de ladite campagne publicitaire est sans risque de recours par un tiers.

Affaire BETC

Par contrat, la société Pacific Création, qui a pour activité la conception et l’exploitation des parfums sous la marque Lolita Lempicka, a confié à la société BETC, agence de publicité, la conception et la réalisation d’une campagne publicitaire. La société BETC a confié à la société Iconoclaste, société de production de films publicitaires et de vidéoclips musicaux, la réalisation et la production de l’ensemble des oeuvres audiovisuelles constituant la compagne. La société Pacific Création a été avertie par la société Adbi, exerçant sous le nom commercial ‘Mes Demoiselles’, de l’utilisation prétendument contrefaisante du modèle vestimentaire dénommé ‘Clémence’ porté par l’égérie de la campagne publicitaire ‘Premier Parfum’, information répercutée par la société Pacific Création auprès de la société BETC qui a indiqué faire le nécessaire. Par la suite, la société Pacific Création a mis un terme à la réalisation de la campagne publicitaire et résilié son contrat avec BETC.

Manquement à l’obligation de délivrance

Selon le contrat conclu, la société BETC avait pour mission de concevoir et de livrer une campagne publicitaire libre de droits et devait à cet effet négocier et acquérir les droits d’auteur nécessaires à la réalisation de ladite campagne. Dans le cadre de la collaboration, l’agence agissait en qualité d’entrepreneur conformément à l’article 1787 du code civil. A ce titre, l’agence devait répondre de la qualité des prestations sous-traitées vis à vis de l’annonceur et conservait la responsabilité finale de l’exécution de sa mission d’un point de vue technique et pécuniaire.

La société BETC avait notamment pour mission « la négociation et acquisition des droits des tiers intervenant dans l’exécution des campagnes publicitaires conçues par l’agence et nécessaires à celle-ci, notamment droit des auteurs’ et ‘s’engage à livrer les prestations originales et droits y afférents en temps et en heure : photographies et films destinés à la publicité de marque ».

Le contrat stipulait également que « L’agence apporte à l’annonceur sa pleine et entière garantie sur les créations cédées et qu’elles sont juridiquement disponibles et ne sont grevées de droits des tiers pour la France, des recherches pouvant être accomplies de par les outils disponibles (recherches d’antériorité de marque à l’identique sur le serveur ICIMARQUE de l’INPI, piges publicitaires ; On entend par droit des tiers le droit des auteurs extérieurs à l’agence (notamment photographe, illustrateur, compositeur), le droit voisin de artistes interprètes et des producteurs phonographiques, le droit de la personnalité comprenant le droit à l’image en particulier celui des mannequins, et autres attributs de la personnalité (voix, signature, …). Ces droits sont négociés par l’agence en accord avec l’annonceur suivant les nécessités des campagnes et facturés à celui-ci, conformément aux devis présentés à l’annonceur (…) ».

Preuve de la titularité des droits

Toutefois, en l’espèce, aucun élément produit aux débats ne justifiait que la société Abdi ait été détentrice de droits d’auteur sur le vêtement litigieux, ses droits n’ayant pas été reconnus par la société BETC, ni reconnus en justice, aucune action n’ayant été exercée à ce titre. Par conséquent, il n’était donc pas établi un manquement de la société BETC à son obligation de délivrance du fait de la livraison d’une campagne non libre de droits et au titre de laquelle la société BETC n’aurait pas négocié et ni acquis les droits de propriété intellectuelle de la société Abdi.

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Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que la garantie d’éviction dans le cadre d’un contrat de cession de droits ?

La garantie d’éviction est une obligation légale qui incombe au cédant d’un droit de propriété, qu’il soit corporel ou incorporel. Elle vise à protéger le cessionnaire contre toute revendication d’un tiers qui pourrait contester l’exploitation des droits cédés.

Dans le contexte d’une agence de publicité, cela signifie que l’agence doit garantir à son client une jouissance paisible des droits d’exploitation de la campagne publicitaire. Cela inclut la responsabilité de s’assurer que les éléments utilisés, comme les accessoires et vêtements, ne sont pas grevés de droits de tiers, notamment des droits d’auteur.

En cas de litige, le cédant doit être en mesure de défendre la validité des droits cédés, ce qui implique une diligence raisonnable dans la vérification des droits de propriété intellectuelle associés aux créations utilisées.

Quel était le rôle de la société BETC dans l’affaire BETC ?

Dans l’affaire BETC, la société BETC a été engagée par la société Pacific Création pour concevoir et réaliser une campagne publicitaire pour la marque de parfums Lolita Lempicka. BETC avait la responsabilité de livrer une campagne publicitaire qui soit libre de droits, ce qui incluait la négociation et l’acquisition des droits d’auteur nécessaires.

BETC a sous-traité la production des œuvres audiovisuelles à la société Iconoclaste, mais restait responsable de la qualité des prestations fournies. Selon le contrat, BETC devait garantir que les créations cédées étaient juridiquement disponibles et ne comportaient pas de droits de tiers.

Cette obligation de diligence et de garantie est déterminante pour éviter des litiges ultérieurs concernant la contrefaçon ou l’utilisation non autorisée de créations protégées.

Quelles étaient les obligations de BETC en matière de droits d’auteur ?

Les obligations de BETC en matière de droits d’auteur étaient clairement définies dans le contrat. L’agence devait négocier et acquérir tous les droits nécessaires à l’exécution de la campagne publicitaire, y compris les droits des auteurs et d’autres droits de propriété intellectuelle.

BETC s’engageait à livrer des prestations originales, telles que des photographies et des films, en temps et en heure. De plus, l’agence devait fournir une garantie pleine et entière sur les créations cédées, assurant qu’elles étaient disponibles juridiquement et exemptes de droits de tiers.

Cela impliquait également des recherches d’antériorité pour s’assurer qu’aucun droit d’auteur n’était enfreint, ce qui est essentiel pour éviter des recours juridiques ultérieurs.

Quelles preuves étaient nécessaires pour établir la titularité des droits dans cette affaire ?

Dans cette affaire, il était déterminant de prouver que la société Abdi détenait des droits d’auteur sur le vêtement en question. Cependant, aucun élément de preuve n’a été présenté pour démontrer que les droits d’Abdi avaient été reconnus, que ce soit par BETC ou par une décision de justice.

Sans preuve de la titularité des droits, il était impossible d’établir un manquement de BETC à son obligation de délivrance. En d’autres termes, si les droits d’Abdi n’étaient pas clairement établis, BETC ne pouvait pas être tenu responsable de la livraison d’une campagne non libre de droits.

Cela souligne l’importance de la documentation et des preuves dans les contrats de cession de droits, car l’absence de telles preuves peut exonérer une partie de toute responsabilité.


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