Filiation et vérité biologique : enjeux de reconnaissance et d’identité.

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Filiation et vérité biologique : enjeux de reconnaissance et d’identité.

L’Essentiel :

Naissance et Reconnaissance de l’Enfant

[R], [B] [H] [W] est née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] de Madame [K], [J], [D], [Z] [W]. Une reconnaissance prénatale a été effectuée le 16 mars 2022. Monsieur [O] [H] a reconnu [R] le 19 avril 2022.

Assignation en Justice

Le 05 octobre 2023, Madame [K] a assigné Monsieur [O] [H] et [B] [H] [W] pour contester la paternité de Monsieur [O] et demander la modification du nom de l’enfant.

Arguments de la Requérante

Madame [K] affirme que Monsieur [O] n’est pas le père biologique, précisant que [R] est issue de sa relation avec Monsieur [F].

Naissance et Reconnaissance de l’Enfant

[R], [B] [H] [W] est née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] de Madame [K], [J], [D], [Z] [W]. Cette dernière a effectué une reconnaissance prénatale de l’enfant le 16 mars 2022. Monsieur [O] [H], né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 11], a reconnu [R] le 19 avril 2022 devant l’officier d’état civil.

Assignation en Justice

Le 05 octobre 2023, Madame [K], [J], [D], [Z] [W] a assigné Monsieur [O] [H] et [B] [H] [W], l’enfant mineure, pour diverses demandes, notamment la désignation d’un administrateur ad hoc, une expertise par empreintes génétiques, et la contestation de la paternité de Monsieur [O] [H]. Elle a également demandé la suppression du nom de famille [H] de l’état civil de l’enfant et son remplacement par [W].

Arguments de la Requérante

Madame [K] soutient que le lien de filiation paternelle établi par Monsieur [O] [H] ne correspond pas à la réalité biologique. Elle explique qu’après une relation avec Monsieur [H] qui a pris fin en février 2021, elle a eu une relation avec Monsieur [F], le père biologique, dont est issue [R]. Elle souligne que Monsieur [F] a été incarcéré et que Monsieur [H] a reconnu l’enfant alors qu’il savait qu’il n’en était pas le père.

Position de Monsieur [O] [H]

En réponse, Monsieur [O] [H] a également demandé la désignation d’un administrateur ad hoc et une expertise génétique. Il a exprimé son accord avec les demandes de Madame [W], confirmant qu’il n’a plus de relation avec elle ni avec l’enfant, et qu’il souhaite rétablir la vérité biologique en annulant la filiation établie à son égard.

Intervention du Ministère Public

Le 18 mars 2024, le ministère public a émis un avis favorable à la réalisation de l’expertise génétique, soulignant l’importance de clarifier la situation de filiation.

Décision du Tribunal

Le tribunal a déclaré l’action recevable et a annulé la reconnaissance de [R], [B] [H] [W] par Monsieur [O] [H]. Il a statué que Monsieur [O] [H] n’est pas le père de l’enfant et que celle-ci portera désormais le nom de [W]. La décision a été ordonnée pour transcription sur les registres de l’état civil, laissant chaque partie responsable de ses propres dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’action en contestation de la filiation ?

L’action en contestation de la filiation est régie par l’article 333 du Code civil, qui stipule que « la filiation peut être contestée par toute personne qui a un intérêt légitime à agir ».

Dans le cas présent, Madame [K], [J], [D], [Z] [W] a un intérêt légitime à contester la filiation établie entre Monsieur [O] [H] et l’enfant [R], [B] [H] [W], car elle soutient que cette filiation ne correspond pas à la réalité biologique.

De plus, l’article 334 du même code précise que « l’action en contestation de la filiation est ouverte à toute personne qui a un intérêt légitime à agir ».

Ainsi, le tribunal a déclaré l’action recevable, considérant que Madame [K] avait un intérêt légitime à agir pour établir la vérité biologique concernant la filiation de l’enfant.

Quelles sont les conséquences de l’annulation de la reconnaissance de paternité ?

L’annulation de la reconnaissance de paternité a des conséquences directes sur l’état civil de l’enfant, conformément à l’article 316 du Code civil, qui dispose que « la reconnaissance de l’enfant peut être annulée pour cause de fraude ou d’erreur sur la personne ».

Dans cette affaire, le tribunal a annulé la reconnaissance de Monsieur [O] [H] en raison de l’absence de lien biologique avec l’enfant.

L’article 317 du Code civil précise également que « lorsque la reconnaissance est annulée, l’enfant retrouve son état antérieur ».

Ainsi, l’annulation de la reconnaissance entraîne la suppression du nom de famille [H] de l’état civil de l’enfant, qui portera désormais le nom de [W], comme l’a décidé le tribunal.

Quelles sont les implications de la décision sur le nom de famille de l’enfant ?

La décision du tribunal de modifier le nom de famille de l’enfant est fondée sur l’article 311-21 du Code civil, qui stipule que « lorsqu’un enfant a été reconnu par plusieurs personnes, il porte le nom de la personne qui l’a reconnu en premier lieu, sauf décision contraire du juge ».

Dans ce cas, le tribunal a jugé qu’il était dans l’intérêt de l’enfant de porter le nom de [W], en raison de l’absence de lien biologique avec Monsieur [O] [H].

L’article 311-23 du même code précise que « le nom de famille de l’enfant peut être modifié par décision de justice ».

Ainsi, le tribunal a ordonné la transcription de cette décision sur les registres de l’état civil, garantissant que l’enfant portera désormais le nom de [W].

Quel est le rôle de l’expertise génétique dans cette procédure ?

L’expertise génétique est un élément clé dans les affaires de contestation de filiation, comme le prévoit l’article 16-11 du Code civil, qui dispose que « toute personne a droit au respect de son identité, y compris son identité biologique ».

Dans cette affaire, le tribunal a ordonné une expertise par empreintes génétiques pour établir la vérité biologique concernant la filiation de l’enfant.

L’article 16-12 du même code précise que « l’expertise peut être ordonnée à la demande de toute personne ayant un intérêt légitime ».

Ainsi, l’expertise génétique vise à établir de manière objective le lien biologique entre l’enfant et son père, ce qui est essentiel pour trancher la question de la filiation dans cette affaire.

Quelles sont les implications de l’exécution provisoire de la décision ?

L’exécution provisoire de la décision est régie par l’article 514 du Code de procédure civile, qui stipule que « le juge peut ordonner l’exécution provisoire de sa décision, même en cas d’appel ».

Dans cette affaire, le tribunal a jugé qu’il n’y avait pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir, ce qui signifie que les effets de la décision seront immédiats, même si elle est susceptible d’appel.

L’article 515 du même code précise que « l’exécution provisoire est de droit dans les cas prévus par la loi ».

Ainsi, l’exécution provisoire permet de garantir que les décisions prises par le tribunal, notamment celles concernant la filiation et le nom de l’enfant, soient appliquées sans délai, dans l’intérêt de l’enfant.

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
06 JANVIER 2025

N° RG 23/05497 – N° Portalis DB22-W-B7H-RP42
Code NAC : 2AF

DEMANDERESSE :

Madame [K], [J], [D], [Z] [W] tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentante légale de l’enfant mineur [R], [B] [H] [W], née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] (78)
née le [Date naissance 3] 1997 à [Localité 10] (78)
demeurant Chez Madame [S] épouse [W]
[Adresse 9]
[Localité 7]
représentée par Me Morgane LE GALL, avocat au barreau de VERSAILLES

DEFENDEURS :

MADAME LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE
[Adresse 4]
[Localité 5]
dispensée du ministère d’avocat

Monsieur [O] [H]
né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 11] (78)
demeurant chez M. [T] [H], [Adresse 8]
[Localité 6]
représenté par Me Alexandra LECOQ, avocat au barreau de VERSAILLES

ACTE INITIAL du 05 Octobre 2023 reçu au greffe le 06 Octobre 2023.

DÉBATS : A l’audience tenue en chambre du conseil le 12 Novembre 2024, Madame LE BIDEAU, Vice Présidente, siégeant en qualité de juge rapporteur avec l’accord des parties en application de l’article 805 du Code de procédure civile, assistée de Madame BEAUVALLET, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 06 Janvier 2025.

MAGISTRATS AYANT DÉLIBÉRÉ :
Madame LE BIDEAU, Vice Présidente
Madame DURIGON, Vice-Présidente
Madame MARNAT, Juge

EXPOSE DU LITIGE

[R], [B] [H] [W] est née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] de Madame [K], [J], [D], [Z] [W] née le [Date naissance 3] 1997 à [Localité 10], laquelle a par ailleurs effectué une reconnaissance prénatale de l’enfant le 16 mars 2022.

Monsieur [O] [H], né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 11] (78) a reconnu [R] le 19 avril 2022 devant l’officier d’état civil.

Par acte de commissaire de justice en date du 05 octobre 2023, Madame [K], [J], [D], [Z] [W] a fait assigner Monsieur [O] [H] et [B] [H] [W], enfant mineure représentée par ses représentants légaux [K] [W] et [O] [H], aux fins de voir :
– Désigner un administrateur ad hoc qu’il plaira au tribunal afin de représenter l’enfant [R], [B] [H] [W], dans la présente instance,
– Ordonner une expertise par empreintes génétiques à l’égard de Monsieur [O] [H] et Madame [R] [H] [W],
– Donner acte à la requérante qu’elle communiquera les pièces à Monsieur le Procureur de la République à première demande,
– Juger que Monsieur [O] [H] n’est pas le père de l’enfant [R], [B] [H] [W],
– Supprimer le nom de famille [H] de l’état civil de l’enfant,
– Juger que le nom de famille de l’enfant sera désormais [W],
– Ordonner la transcription du jugement à venir sur les registres d’état civil et dire que mention en sera faite en marge de l’acte de naissance de l’enfant,
– Juger n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– Juger que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens de la présente instance et le cas échéant, à la charge du Trésor Public.

Au soutien de ses prétentions, Madame [K], [J], [D], [Z] [W] fait valoir que le lien de filiation paternelle, non conforté par une possession d’état conforme au titre, ne correspond pas à la vérité biologique, qu’il est dans l’intérêt de l’enfant d’avoir un lien de filiation correspondant à cette réalité biologique et de permettre au véritable père d’établir son propre lien de filiation.

Elle expose qu’après une relation avec Monsieur [H] ayant pris fin en février 2021, elle a entamé une nouvelle relation avec Monsieur [F] en juin 2021 dont est issue [R], née le [Date naissance 2] 2022. Elle souligne que Monsieur [F] a été incarcéré en décembre 2021 laissant Madame [W] sans nouvelles et qu’au début du mois d’avril 2022, Monsieur [H] est revenu vers elle, lui demandant une seconde chance. Elle ajoute qu’elle se trouvait alors dans un état de particulière vulnérabilité, qu’elle a fait confiance à Monsieur [H] qui a reconnu et déclaré l’enfant sous le nom de [R], [B] [H] [W] alors qu’il savait qu’il n’en était pas le père. Elle précise avoir découvert par la suite cette reconnaissance, avec l’ajout d’un second prénom [B] qui n’avait aucun sens pour elle et que des démarches ont été entreprises pour rectifier cette erreur en faisant une demande d’aide juridictionnelle pour la présente procédure. Elle souligne qu’ils ont fini par mettre fin à leur relation et qu’ils n’ont gardé de contact que s’agissant des démarches entreprises, aucune relation avec l’enfant n’ayant été maintenue. Enfin, elle ajoute que le père biologique, Monsieur [F], et sa famille sont présents pour l’enfant et que celui-ci souhaite reconnaître sa fille.

En défense, par conclusions communiquées par RPVA le 29 octobre 2024, Monsieur [O] [H] demande au tribunal de :
– Désigner un administrateur ad hoc qu’il plaira au tribunal afin de représenter l’enfant [R], [B] [H] [W], dans la présente instance,
– Ordonner une expertise par empreintes génétiques à l’égard de Monsieur [O] [H] et Madame [R] [H] [W],
– Juger que Monsieur [O] [H] n’est pas le père de l’enfant [R], [B] [H] [W],
– Supprimer le nom de famille [H] de l’état civil de l’enfant,
– Juger que le nom de famille de l’enfant sera désormais [W],
– Ordonner la transcription du jugement à venir sur les registres d’état civil et dire que mention en sera faite en marge de l’acte de naissance de l’enfant,
– Juger n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
– Juger que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens de la présente instance et le cas échéant, à la charge du Trésor Public.

Monsieur [H] manifeste son accord avec les prétentions de Madame [W]. Il confirme être définitivement séparé de cette dernière, aucune relation n’étant maintenue ni avec elle ni avec l’enfant, et son entourage ne considérant pas l’enfant comme sa fille. Il déclare ne pas avoir pris conscience de la mesure de ses déclarations lors de la naissance de l’enfant et souhaiter que soit rétablie la vérité biologique en anéantissant la filiation établie à son égard et en modifiant le nom de famille de l’enfant.

Le 18 mars 2024, le ministère public a émis un avis favorable à l’expertise génétique.

L’ordonnance de clôture en date du 02 mai 2024 a fixé les plaidoiries au 12 novembre 2024.

[DÉBATS NON PUBLICS – Motivation de la décision occultée]
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, après débats en chambre du conseil, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

Déclare l’action recevable ;

Annule la reconnaissance de [R], [B] [H] [W], née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] (78) par Monsieur [O] [H], né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 11] (78) ;

Dit que Monsieur [O] [H], né le [Date naissance 1] 1997 à [Localité 11] (78), n’est pas le père de l’enfant [R], [B] [H] [W], née le [Date naissance 2] 2022 à [Localité 10] (78) ;

Dit que l’enfant portera désormais le seul nom de [W] ;

Ordonne la transcription de la présente décision sur les registres de l’état civil et en marge de l’acte de naissance de l’enfant n° 001286/2022 établi par l’officier d’état civil de la mairie de [Localité 10] (78) ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 JANVIER 2025 par Madame LE BIDEAU, Vice-Présidente, assistée de Madame BEAUVALLET, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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