L’Essentiel : La cour d’appel de Rennes a confirmé l’irrecevabilité des preuves issues de l’ordinateur de M. [H], ancien dirigeant d’ALPHATECH, en raison de l’absence de contradiction lors de l’examen du matériel. Les éléments de preuve, liés à des accusations de concurrence déloyale, ne peuvent être retenus, car il n’est pas établi que l’ordinateur n’ait pas été utilisé par d’autres personnes. Les obligations contractuelles de M. [H] ne suffisent pas à prouver des actes déloyaux, et la société ALPHATECH n’a pas démontré de dommages imminents ou de troubles manifestement illicites, rendant ainsi la demande de mesures conservatoires infondée.
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Il ne peut être tenu retenu à titre d’éléments de preuve (concurrence déloyale), des pièces émanant de l’ordinateur d’un ancien dirigeant dès lors que l’examen du matériel ayant été réalisé à son départ de l’entreprise sans contradiction et sans qu’il soit donc certain que cet ordinateur n’a pas été utilisé par une autre personne à son insu.
3ème Chambre Commerciale ARRÊT N°. N° RG 22/00238 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SMHR S.A.S. ALPHATECH C/ Mme [X] [B] épouse [H] M. [G] [H] S.A.S. INOVEA S.A.S.U. NATURIVIA Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours Copie exécutoire délivrée le : à : Me Stéphanie PRENEUX Me Matthieu MERCIER RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE RENNES ARRÊT DU 09 MAI 2023 COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ: Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre, Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre,rapporteur Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère, GREFFIER : Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Morgane LIZEE, lors du prononcé, DÉBATS : A l’audience publique du 28 Février 2023 ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 09 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats **** APPELANTE : S.A.S. ALPHATECH, immatriculée au RCS de SAINT-BRIEUC sous le n°432 833 622, agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège [Adresse 10] [Localité 2] Représentée par Me Stéphanie PRENEUX de la SELARL BAZILLE, TESSIER, PRENEUX, Postulant, avocat au barreau de RENNES Représentée par Me Martin TOMASI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS INTIMÉS : Madame [X] [B] épouse [H] née le 05 Septembre 1966 à [Localité 7] [Adresse 3] [Localité 2] Représentée par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D’AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES Monsieur [G] [H] né le 20 Décembre 1963 à [Localité 4] [Adresse 3] [Localité 2] Représenté par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D’AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES SAS INOVEA, immatriculée au RCS de SAINT-BRIEUC sous le n°892 719 469, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège [Adresse 3] [Localité 2] Représentée par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D’AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES SAS NATURIVIA, immatriculée au RCS de SAINT-BRIEUC sous le n°894 473 180, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège [Adresse 8] [Localité 1] Représentée par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D’AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES **** FAITS La société ALPHATECH fabrique des produits asséchants de litières animales et des compléments alimentaires pour l’élevage. En 2004, le groupe WINFARM a acquis 100 % des actions d’ALPHATECH. M.[G] [H] a été recruté en tant que directeur général salarié et dans le cadre des accords passés à cette occasion, WINFARM lui a cédé 20 % des titres ALPHATECH. M. [H] a exercé ses fonctions de directeur salarié jusqu’au 5 février 2021. Mme [X] [B], son épouse était assistante de direction dans la société. Début 2020, des dissensions sont apparues entre WINFARM et M. [H] au sujet d’un projet d’admission de WINFARM sur le marché boursier Euronext. En raison de ces tensions, les associés d’ALPHATECH ont négocié le départ de M. [H] de l’entreprise. Selon protocole transactionnel du 25 septembre 2020, M. [H] s’est engagé à céder à WINFARM ses actions de la société ALPHATECH pour le prix de 1.940.280 euros et ses parts de la SCI de BEAUSOLEIL, propriétaire de locaux loués à ALPHATECH, pour un prix de 10.000 euros. Il a également été convenu au protocole qu’il serait mis fin au contrat de travail de M. [H] au plus tard le 31 mars 2021. Mme [X] [B] a quitté l’entreprise en octobre 2020. La société ALPHATECH a notifié son licenciement à M [H] le 5 février 2021. Le 15 février 2021 elle lui a versé une indemnité de 50 000 euros. Le protocole et les actes de cession ne comportaient pas de clause de non-concurrence à la charge de M. [H]. Cependant aux termes de l’article 3.2 du protocole transactionnel et des actes de cession, que M. [H] était tenu, avec sa holding personnelle, la société KASTELL- VRAN à la garantie légale d’éviction du vendeur prévues aux articles 1625 et 1626 du code civil et de s’abstenir à tout acte de concurrence déloyale, de parasitisme et de dénigrement. A son départ le 5 février 2021, M. [H] a restitué à ALPHATECH un ordinateur qu’il utilisait dans le cadre de ses fonctions. En procédant à l’examen de cet ordinateur, ALPHATECH indique avoir constaté la présence dans la boîte d’envoi de la messagerie électronique de M. [H] ([Courriel 6]), de courriels contenant des informations et des fichiers envoyés à partir du mois de juin 2020 vers l’adresse électronique [Courriel 5] de la société NATURIFARM immatriculée le 23 février 2021 ayant pour associée unique la holding personnelle de M. [H], la société KASTELL-VRAN. Fin mars 2021, NATURIFARM a changé de dénomination sociale pour devenir NATURIVIA. Soupçonnant M. [H], son épouse et leurs sociétés de se livrer à des actes de concurrence déloyale afin de capter la clientèle d’ALPHATECH, cette dernière a saisi le président du tribunal de commerce de Saint-Brieuc d’une requête tendant, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, à voir désigner un huissier afin que celui-ci constate la présence, sur les équipements informatiques de M. [H], de son épouse et de NATURIVIA, de tout document et/ou information provenant d’ALPHATECH ou appartenant à cette dernière, et identifie tous actes de dénigrement, parasitisme ou tentative de débauchage de personnel. Selon ordonnance du 24 mars 2021, il a été fait droit à cette demande. L’huissier a exécuté sa mission le 7 avril 2021 et les fichiers appréhendés ont été placés sous séquestre entre les mains de l’huissier. Le 28 juin 2021, à la suite de la saisine en rétraction de M. [H], son épouse et de la société NATURIVIA, le président du tribunal de Saint-Brieuc a confirmé l’ordonnance et a ordonné à l’huissier de remettre les fichiers à ALPHATECH. M. [H] son épouse et de la société NATURIVIA ont fait appel de l’ordonnance. Par arrêt du 25 janvier 2022, la cour d’appel de Rennes a ordonné la rétraction de l’ordonnance sur requête et fait interdiction à la société ALPHATECH d’utiliser à quelque fin que ce soit, les procès-verbaux de constat établis par l’huissier en exécution de l’ordonnance du 24 mars 2021, ainsi que les données, documents et fichiers obtenus lors des opérations de constat du 7 avril 2021. Cet arrêt est frappé d’un pourvoi. M. [H] et sa société NATURIVIA faisant valoir que la société ALPHATECH utilisait les pièces issues de la mesure d’instruction pour les dénigrer ont obtenu, le 29 juillet 2021, du président du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc une ordonnance l’autorisant à réaliser une mesure d’instruction au sein de la société ALPHATECH et de sa maison-mère WINFARM. Cette mesure d’instruction a été exécutée le 8 septembre 2021, et les pièces ont été placées sous séquestre dans l’attente de l’issue de la procédure de référés rétractation. Par ordonnance de 3 mars 2022 le président du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a rétracté l’ordonnance. M. [H], son épouse et la société NATURIVIA ont fait appel. La société ALPHATECH a saisi le président du tribunal de commerce de [Localité 9] afin qu’il ordonne en référé des mesures conservatoires de nature à faire cesser les agissements illicites de M. [H] et de la société NATURIVIA. Par ordonnance du 3 janvier 2022 le président du tribunal de commerce de Saint Brieuc a : – Dit et jugé que les conditions du référé, faute de dommage imminent et de trouble illicite évident, ne sont pas réunies ; – Constaté l’existence de contestations sérieuses et a renvoyé les partes à mieux se pourvoir au fond ; – Dit qu’il n’y avait pas lieu à faire application de l’article 700 du code de procédure civile ; – Condamné la société ALPHATECH aux entier dépens de la présente instance ; – Dit et juger les parties mal fondées en leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif de la présente ordonnance et les a déboutées respectivement; – Liquidés au titre des dépens les frais de greffe au titre de la présente ordonnance à la somme de 91,63 euros. Le 14 janvier 2022 la société ALPHATECH a interjeté appel de l’ordonnance. La société ALPHATECH a refusé la proposition de médiation. Par ordonnance du 8 septembre 2022 la conseillère de la mise en état de la cour d’appel de Rennes a : – Dit que l’appel de la SAS ALPHATECH n’est pas caduc ; – Déclare irrecevable les conclusions des intimés du 23 mai 2022 ; – Rejeté les demandes formées au titre des frais irrepétibles ; – Dit que les dépens de l’incident suivront le sort de ceux de l’arrêt rendu sur le fond. L’ordonnance de clôture est en date du 2 février 2023. Dans un courrier du 20 février 2023 le conseil de la société ALPHATECH sollicite le rejet des pièces constituant le dossier de plaidoirie de son confrère aux motifs que par ordonnance du 8 novembre 2022, confirmée par arrêt du 16 décembre 2022, la cour d’appel de Rennes a déclaré irrecevables les conclusions des intimés et qu’en conséquence les pièces liées aux conclusions irrecevables sont elles mêmes irrecevables. MOYENS ET PRETENTIONS Dans ses écritures notifiées le 27 janvier 2023 la société ALPHATECH demande à la cour d’appel au visa des articles 873 du code de procédure civile et 1240 1625 et 1626 du code civil de : – Dire et juger la société ALPHATECH recevable et bien fondée en son appel. En conséquence, – Infirmer l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Saint-Brieuc du 3 janvier 2022 en tant qu’il a : – dit et jugé que les conditions du référé, faute de dommage imminent et de trouble illicite évident, ne sont pas réunies ; – constaté l’existence de contestations sérieuses ; – renvoyé les parties à se pourvoir au fond ; – dit et jugé les parties mal fondées en leurs demandes plus amples ou contraires et les en a débouté. – Condamné ALPHATECH aux dépens. Statuant à nouveau, – Ordonner sous astreinte de cinq mille (5.000) euros par jour de retard, à M. [H], Mme [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA de détruire, sous contrôle d’huissier et à leurs frais, tous exemplaires ou copies des documents et informations provenant de la société ALPHATECH, quel qu’en soit le support, dont en particulier : – les formules chimiques des produits de la société ALPHATECH, en particulier ceux de la gamme Tonifarm, et leur process de fabrication ; – la liste des produits, la liste des clients, la liste des fournisseurs, et la liste des salariés d’ALPHATECH ; – les propositions commerciales d’ALPHATECH ; – tout document relatif à la politique tarifaire et commerciale d’ALPHATECH, et d’en justifier auprès du Conseil de la société ALPHATECH, dans le délai de quinze (15) jours à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir; – Faire interdiction sous astreinte de cinquante mille (50.000) euros par manquement constaté, à M. [H], Mme [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA d’utiliser, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, et de communiquer à des tiers, les formules chimiques des produits de la société ALPHATECH, en particulier ceux de la gamme Tonifarm; – Faire interdiction sous astreinte de cinquante mille (50.000) euros par manquement constaté, à M. [H], Mme [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA de dénigrer la société ALPHATECH, les sociétés du groupe auquel ALPHATECH appartient, et leurs dirigeants ; – Faire interdiction sous astreinte de cinquante mille (50.000) euros par manquement constaté, à M. [H], Mme [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA de fabriquer, de mettre sur le marché, d’offrir, de vendre et de commercialiser, par tous moyens et sur tous supports, pour compte propre ou pour compte de tiers, des produits identiques dans leur formule à ceux de la société ALPHATECH, en particulier les produits à base d’extraits de plantes de la gamme Tonifarm, et des produits dont la composition reprend essentiellement celle des produits de la société ALPHATECH, en particulier les produits à base d’extraits de plantes de la gamme Tonifarm ; – Faire interdiction sous astreinte de cinquante mille (50.000) euros par manquement constaté, à la société NATURIVIA et à la société INOVEA, de fabriquer, directement ou par l’intermédiaire d’un sous-traitant ou d’un partenaire, tous produits asséchants de litière animale, tous produits alimentaires pour animaux de rente (aliments complets, aliments complémentaires, aliments diététiques, pré-mélanges d’additifs), et plus particulièrement des produits à base d’orge germée, d’extraits végétaux et d’huiles essentielles, sous quelque forme que ce soit, pendant une période de vingt-quatre (24) mois à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir ; – Ordonner sous astreinte de cinq mille (5.000) euros par jour de retard, à M. [H] de mettre fin à ses fonctions de dirigeant social de la société NATURIVIA, et d’en justifier auprès du Conseil de la société ALPHATECH, dans le délai de quinze (15) jours à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir ; – Faire interdiction sous astreinte de cinquante mille (50.000) euros par manquement constaté, à M. [H] d’exercer toute activité, rémunérée ou non, au sein et/ou pour le compte des sociétés NATURIVIA et INOVEA, passé le délai de quinze (15) jours à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir ; – Ordonner la publication dans La Revue de l’Alimentation Animale et dans le journal Paysan Breton, aux frais exclusifs de M. [H], de Mme [B], de la société NATURIVIA et de la société INOVEA, dans un délai de 15 jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir et à peine d’astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai, des interdictions et injonctions énoncées au dispositif de l’arrêt à intervenir ; – Ordonner la publication des interdictions et injonctions susvisées sur la page d’accueil du site Internet de la société NATURIVIA (www.naturivia.fr), aux frais exclusifs de celle-ci, sur un bandeau fixe et dans un espace correspondant à la moitié de l’écran, pendant une durée ininterrompue de 2 mois, dans un délai de 2 jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir et à peine d’astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé ce délai ; – Condamner in solidum M. [G] [H], Mme [X] [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA à régler à la société ALPHATECH la somme de trente-mille (30.000) euros en application de l’article 700 du code de procédure civile – Condamner in solidum M. [G] [H], Mme [X] [B], la société NATURIVIA et la société INOVEA aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Me Stéphanie Preneux dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile. Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de la société ALPHATEC il est renvoyé à ses dernières conclusions visées supra. DISCUSSION La procédure d’appel L’article 906 du code de procédure civile stipule : Les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l’avocat de chacune des parties à celui de l’autre partie ; en cas de pluralité de demandeurs ou de défendeurs, elles doivent l’être à tous les avocats constitués. Copie des conclusions est remise au greffe avec la justification de leur notification. Les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables sont elles-mêmes irrecevables. Les écritures des intimés du 23 mai 2022 ont été déclarées irrecevable. En conséquence leurs pièces le sont aussi. Les intimés sont donc réputés s’approprier les motifs du jugement et en demander la confirmation sans pouvoir émettre d’appel incident. Les demandes de la société ALPHATECH La société ALPHATECH fait valoir que M. [H], Mme [B] et les sociétés INOVEA et NATURAVIA se livrent à des actes de concurrence déloyale, de parasitisme et de dénigrement ce qui justifie les mesures provisoires qu’elle sollicite en raison d’un dommage imminent et d’un trouble manifestement illicite. L’article 873 du code de procédure civile prévoit : Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire. Les mesures que la société ALPHATECH sollicite supposent qu’elle démontre que M. [H] son épouse et leurs sociétés détiennent et exploitent des documents ou formules qu’elle a élaborées aux fins de fabriquer leurs propres produits et de les commercialiser auprès de clients dont ils auraient détournés les fichiers en dénigrant ALPHATECH. Les contentieux qui émaillent les relations entre les parties démontrent que le litige est complexe, les parties initiant tour à tour des procédures les opposant. Ainsi l’ordonnance du 24 mars 2021 qui avait fait droit à la demande de la société ALPHATECH soupçonnant des actes de concurrence déloyale des intimés a été rétractée par arrêt du 25 janvier 2022 de la cour d’appel de Rennes qui a fait interdiction à la société ALPHATECH d’utiliser les procès-verbaux de constat établis par l’huissier en exécution de l’ordonnance du 24 mars 2021, ainsi que les données, documents et fichiers obtenus lors des opérations de constat du 7 avril 2021. Par conséquent il ne peut être tenu retenu à titre d’éléments de preuve, des pièces émanant de l’ordinateur de M. [H], l’examen du matériel ayant été réalisé à son départ de l’entreprise sans contradiction et sans qu’il soit donc certain que cet ordinateur n’a pas été utilisé par une autre personne à son insu. En outre à son départ de la société ALPHATECH, M [H] était tenu au respect de certaines obligations en vertu du protocole transactionnel du 25 septembre 2020 : Article 3.2 : A défaut de clause de non concurrence, il est rappelé à Monsieur [G] [H] et à sa société Kastell-Vran leurs obligations au titre de la garantie légale d’éviction du vendeur réglementée par les articles 1625 et 1626 du Code civil. Il leur est également rappelé les obligations auxquelles ils sont tenus en matière de responsabilité civile délictuelle leur interdisant de commettre des actes déloyaux, tels que : – des actes délibérés de concurrence déloyale visant à désorganiser Alphatech ou à détourner la clientèle d’Alphatech ; et/ou – des actes de parasitisme d’Alphatech. Monsieur [G] [H] reconnaît qu’il dispose de par ses fonctions passées d’informations confidentielles sur la situation d’Alphatech et des sociétés du groupe auquel appartient Alphatech, se rapportant notamment aux perspectives, à la stratégie, au savoir-faire, et aux méthodes de gestion de ces entreprises. Monsieur [G] [H] s’engage à conserver ces informations strictement confidentielles, tant que celles-ci ne sont pas tombées dans le domaine public ou mis à la libre disposition ou à l’information de tout tiers, et à ne pas les utiliser à quelque titre que ce soit. Sauf accord préalable écrit d’Alphatech, Monsieur [G] [H] et/ou sa société s’interdisent également solidairement de solliciter ou de tenter d’embaucher l’un quelconque des salariés ou des prestataires d’Alphatech (ou de toute autre société du groupe auquel appartient Alphatech) Article 4.4 : …Les Parties s’engagent l’une envers l’autre à ne se livrer à aucun comportement et/ou indiscrétion fautifs ayant pour objet de nuire à l’une quelconque des autres Parties ou de porter atteinte à sa réputation (‘). Mais le simple fait que M. [H] dirige une société concurrence ne permet pas de penser qu’il se livre à des actes de concurrence déloyale, de parasitisme ou de dénigrement et qu’il aurait pillé un savoir-faire. Encore faudrait il établir que le savoir-faire revendiqué par ALPHATECH soit établi ce qui nécessite une appréciation de la réalité et de l’importance des recherches qu’elle affirme développer depuis des années. Sur ce point la société ALPHATECH insiste sur les compétences limitées de M. [H] qui ne lui permettraient pas de mettre au point des formules similaires à celles qu’elle fabrique, ce qui démontre qu’il respecte pas ses obligations. Mais M. [H] a travaillé comme directeur général durant des années au sein de la société ALPHATECH, fonction le faisant intervenir dans de nombreux secteurs d’activité de cette société en lui apportant des connaissances approfondies dans le domaine des produits d’élevage sans qu’il soit obligé de procéder à des détournements pour diriger et faire fonctionner sa propre société à son départ d’ALPHATECH. En outre la société ALPHATECH verse des pièces qui appellent une comparaison des process de fabrication des produits commercialisés par les deux société pour les comparer et déterminer s’ils sont identiques par domaine (bovins, porcs et volailles) et dans ce cas s’il y a eu parasitisme pour chaque fabrication de produits alimentaires en poudre ou en liquide et de litières ce qui nécessite que le juge compare leurs formules de fabrication et leur composition. Les pièces au débat ne permettent pas de vérifier quelles sont exactement les préparations utilisées par NATURIVIA pour la fabrication de ses produits ni par suite leur proportion pour chaque produit, la société ALPHATECH ne fournissant que des catalogues publicitaires ou de présentation, assez succints émanant de la société NATURIVIA. Ce travail doit en outre être effectué à la lumière des procédures que les concurrentes ont mise oeuvre pour protéger leurs innovations (brevet, marques …) Enfin les griefs reprochés par ALPHATECH aux intimés obligent également le juge à examiner les conditions de mise sur le marché des différents produits, démarchage, conditionnement, publicité, la société ALPHATECH affirmant que les intimés reprennent leurs logos, codes couleurs et incitent sa clientèle à contracter avec eux. Cet examen échappe à la compétence du juge des référés. Dans ces conditions à défaut de rapporter la preuve que M. [H], son épouse et leurs sociétés se livrent à des actes de concurrence déloyale, de parasitisme et de dénigrement, la société ALPHATECH n’établit pas son dommage imminent et/ou de trouble manifestement illicite. Ces griefs supposent une appréciations au fond des fautes éventuellement commises par les intimés qui excèdent la compétence du juge des référés. L’ordonnance est confirmée. Les demandes annexes Il n’est pas inéquitable de rejeter la demande de la société ALPHATECH au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Elle est condamnée aux dépens d’appel. PAR CES MOTIFS La cour : – Rejette les pièces déposées par les intimés ; – Confirme l’ordonnance ; – Condamne la société ALPHATECH aux dépens d’appel ; – Rejette les autres demandes. LE GREFFIER LE PRESIDENT |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les raisons pour lesquelles les pièces émanant de l’ordinateur de M. [H] ne peuvent pas être retenues comme éléments de preuve ?Les pièces émanant de l’ordinateur de M. [H] ne peuvent pas être retenues comme éléments de preuve en raison de plusieurs facteurs juridiques et procéduraux. Tout d’abord, l’examen de l’ordinateur a été réalisé à son départ de l’entreprise sans contradiction, ce qui soulève des questions sur la validité de cette preuve. En effet, pour qu’une preuve soit recevable, il est essentiel qu’elle ait été obtenue dans le respect des droits de la défense. Dans ce cas, il n’est pas certain que l’ordinateur n’ait pas été utilisé par une autre personne à l’insu de M. [H], ce qui remet en question l’authenticité et l’intégrité des données récupérées. De plus, la cour a souligné que les éléments de preuve doivent être obtenus de manière transparente et contradictoire, ce qui n’a pas été le cas ici. Cela signifie que les parties concernées n’ont pas eu l’opportunité de contester ou de vérifier les informations avant leur utilisation dans le cadre du litige. Quel était le contexte de la relation entre M. [H] et la société ALPHATECH ?M. [H] a été recruté en tant que directeur général salarié de la société ALPHATECH, qui fabrique des produits asséchants de litières animales et des compléments alimentaires pour l’élevage. En 2004, le groupe WINFARM a acquis 100 % des actions d’ALPHATECH, et M. [H] a reçu 20 % des titres de la société dans le cadre de son recrutement. Cependant, des tensions sont apparues entre M. [H] et WINFARM concernant un projet d’admission de WINFARM sur le marché boursier Euronext. Ces tensions ont conduit à des négociations pour le départ de M. [H] de l’entreprise, qui a été officialisé par un protocole transactionnel en septembre 2020. Ce protocole stipulait que M. [H] devait céder ses actions et ses parts dans une SCI, et il a été convenu qu’il quitterait ses fonctions au plus tard le 31 mars 2021. Quelles obligations M. [H] avait-il après son départ d’ALPHATECH ?Après son départ d’ALPHATECH, M. [H] avait plusieurs obligations stipulées dans le protocole transactionnel du 25 septembre 2020. Bien qu’il n’y ait pas eu de clause de non-concurrence, il était tenu de respecter certaines obligations légales et déontologiques. Ces obligations incluaient la garantie légale d’éviction du vendeur, ainsi que l’interdiction de se livrer à des actes de concurrence déloyale, de parasitisme ou de dénigrement envers ALPHATECH. M. [H] reconnaissait également qu’il avait accès à des informations confidentielles sur la société, qu’il devait garder secrètes tant qu’elles n’étaient pas devenues publiques. Il s’engageait également à ne pas solliciter ou tenter d’embaucher des employés d’ALPHATECH, ce qui visait à protéger les intérêts de l’entreprise et à éviter tout comportement nuisible à sa réputation. Quels étaient les griefs de la société ALPHATECH contre M. [H] et les autres intimés ?La société ALPHATECH a formulé plusieurs griefs contre M. [H], son épouse et les sociétés INOVEA et NATURIVIA. Elle les accusait de se livrer à des actes de concurrence déloyale, de parasitisme et de dénigrement. ALPHATECH soupçonnait que M. [H] et les autres intimés utilisaient des informations confidentielles pour développer des produits concurrents, détournant ainsi la clientèle d’ALPHATECH. Les accusations incluaient également des allégations selon lesquelles ils auraient repris des éléments de la stratégie commerciale, des logos et des codes couleurs d’ALPHATECH pour attirer des clients. Ces griefs étaient basés sur des soupçons d’utilisation illégale de données et d’informations, ainsi que sur des comportements jugés déloyaux qui auraient pu nuire à la réputation et aux affaires d’ALPHATECH. Toutefois, la cour a noté que ces accusations nécessitaient une évaluation plus approfondie des faits, ce qui dépassait le cadre des procédures en référé. Quelle a été la décision finale de la cour d’appel de Rennes concernant cette affaire ?La cour d’appel de Rennes a confirmé l’ordonnance du tribunal de commerce de Saint-Brieuc, rejetant les demandes de la société ALPHATECH. Elle a statué que les conditions pour établir un dommage imminent ou un trouble manifestement illicite n’étaient pas réunies. La cour a également souligné que les preuves présentées par ALPHATECH, notamment celles issues de l’ordinateur de M. [H], ne pouvaient pas être retenues en raison de leur obtention contestable. En conséquence, la cour a rejeté les demandes de mesures conservatoires et a condamné ALPHATECH aux dépens d’appel. Cette décision a mis en lumière la nécessité pour ALPHATECH de prouver de manière substantielle ses allégations de concurrence déloyale, ce qui nécessiterait une évaluation plus approfondie des faits et des preuves dans le cadre d’une procédure au fond. |
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