L’Essentiel : La ville de Paris a engagé une procédure d’expulsion contre M. [U] [I] et Mme [E] [O] pour occupation illégale d’un ancien local EDF. Un constat a révélé que les défendeurs avaient pénétré dans les lieux par effraction, y vivant dans des conditions indignes, sans sanitaires et avec des installations électriques dangereuses. Le tribunal a jugé leur occupation comme un trouble manifestement illicite, justifiant une expulsion immédiate. En raison de l’entrée par voie de fait, le délai habituel de deux mois ne s’appliquait pas. Le tribunal a ordonné l’expulsion avec le concours de la force publique si nécessaire.
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Contexte de l’affaireLa ville de Paris a assigné M. [U] [I] et Mme [E] [O] devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir leur expulsion immédiate d’un ancien local EDF, situé sur une parcelle désormais propriété de la ville. Cette action a été engagée en raison de l’occupation sans droit ni titre des défendeurs, qui ont pénétré dans les lieux par voie de fait. Occupation illégale et constatationsUn constat d’infraction a révélé que les défendeurs avaient ouvert une entrée dans la façade murée du local et y résidaient dans des conditions précaires. Des éléments de preuve, tels que des photographies, ont montré que le couple vivait dans des conditions indignes, sans sanitaires et avec des installations électriques non conformes. Justification de l’expulsionL’occupation des lieux par M. [I] et Mme [O] a été qualifiée de trouble manifestement illicite, justifiant ainsi la demande d’expulsion. De plus, la situation présentait un risque pour la sécurité des personnes et des biens, ce qui a renforcé la nécessité d’une expulsion immédiate. Application des délais d’expulsionLe tribunal a constaté que le délai de deux mois prévu par le code des procédures civiles d’exécution ne s’appliquait pas, car les défendeurs étaient entrés dans les locaux par voie de fait, ce qui a été corroboré par des preuves de dégradations et d’effraction. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné l’expulsion immédiate de M. [U] [I] et Mme [E] [O], ainsi que de tous occupants, avec le concours de la force publique si nécessaire. Les défendeurs ont également été condamnés aux dépens de l’instance, et l’ordonnance a été déclarée exécutoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la base juridique de la demande d’expulsion des occupants sans droit ni titre ?La demande d’expulsion des occupants sans droit ni titre repose principalement sur l’article 835 du code de procédure civile, qui stipule : « Le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » L’occupation sans droit ni titre de la propriété d’autrui constitue un trouble manifestement illicite. Dans le cas présent, la ville de Paris a démontré qu’elle est propriétaire de la parcelle concernée, sur laquelle se trouve un ancien local EDF. Cette parcelle a été déclassée du domaine public et appartient désormais au domaine privé de la ville. Les constatations faites par le commissaire de justice, notamment l’ouverture effectuée sur la façade murée et l’installation de M. [I] et Mme [O] dans les lieux, justifient l’expulsion. Les conditions précaires de vie des occupants, ainsi que les dégradations constatées, renforcent l’urgence de la mesure. Quelles sont les implications de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution dans ce cas ?L’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution précise : « Si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire ou lorsque la procédure d’expulsion porte sur un lieu habité en vertu du dispositif visant à assurer la protection et la préservation de locaux vacants par l’occupation de résidents temporaires, régi par l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, réduire ou supprimer ce délai. Le délai prévu au premier alinéa du présent article ne s’applique pas lorsque le juge qui ordonne l’expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée ou que les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte. » Dans cette affaire, le tribunal a constaté que les défendeurs sont entrés dans les locaux par voie de fait, ce qui exclut l’application du délai de deux mois. Les dégradations constatées, telles que l’effraction et les ouvertures créées, constituent des actes matériels de violence. Ainsi, le juge a pu ordonner l’expulsion immédiate sans respecter le délai habituel. Quels sont les frais et dépens liés à cette procédure ?Les frais et dépens de l’instance sont régis par l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule : « La partie perdante est condamnée aux dépens. » Dans le cas présent, les défendeurs, M. [I] et Mme [O], ont été condamnés aux dépens de l’instance. Cela signifie qu’ils devront prendre en charge les frais engagés par la ville de Paris pour mener à bien cette procédure d’expulsion. Cette disposition vise à garantir que la partie qui succombe dans ses prétentions supporte les conséquences financières de son échec. Ainsi, la ville de Paris pourra récupérer les frais liés à l’expulsion, ce qui est une pratique courante dans les procédures judiciaires. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/57824
N° Portalis 352J-W-B7I-C5Z4W
N° : 17
Assignation du :
13 novembre 2024
[1]
[1] 1 copie exécutoire
délivrée le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 janvier 2025
par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.
DEMANDERESSE
La VILLE DE [Localité 7]
Direction des Affaires Juridiques
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Maître Philippe MARIN, avocat au barreau de PARIS – #D2004
DEFENDEURS
Monsieur [U] [I]
Angle d’un immeuble [Adresse 4] et [Adresse 3]
[Localité 8]
Madame [E] [O]
Angle d’un immeuble [Adresse 4] et [Adresse 3]
[Localité 8]
non représentés
DÉBATS
A l’audience du 04 décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,
Par acte du 13 novembre 2024, la ville de Paris a assigné M. [U] [I] et Mme [E] [O] devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de voir, sur le fondement des articles 834 et 835 du code de procédure civile et 544 du code civil :
ordonner l’expulsion immédiate et sans délai des défendeurs et de tous occupants de leur chef de l’ancien local EDF en brique entièrement muré, installé sur la parcelle cadastrée [Cadastre 1]-CJ-[Cadastre 5] située [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 8], avec le concours de la force publique si besoin est ;dire que le délai de deux mois de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ne s’appliquera pas en raison de l’entrée dans les lieux par voie de fait.
A l’audience, la demanderesse maintient ses demandes dans les termes de son assignation.
Les défendeurs, cités à étude, ne sont pas représentés.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est renvoyé à l’acte introductif d’instance pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens.
Sur la demande d’expulsion des occupants sans droit ni titre
Selon l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
L’occupation sans droit ni titre de la propriété d’autrui constitue un trouble manifestement illicite qu’il appartient au juge des référés de faire cesser.
Au cas présent, la ville de [Localité 7] justifie être propriétaire d’une parcelle cadastrée [Cadastre 1]-CJ-[Cadastre 5] située [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 8] sur laquelle se trouve un ancien local EDF en brique entièrement muré. Cette parcelle a été déclassée du domaine public de voirie et appartient désormais au domaine privé de la ville.
Or, il ressort du compte-rendu d’infraction du 31 mai 2024 pour dégradation du bien d’autrui et du procès-verbal de constat établi par Maître [V], commissaire de justice, le 27 août 2024, qu’une ouverture a été effectuée sur le côté droit de la façade, qui était entièrement murée, et qu’un homme s’est installé dans le local, où il réside avec sa compagne. Le commissaire de justice a relevé l’identité de l’homme présent lors de son passage et il s’agit de M. [I], qui a déclaré occuper les lieux avec Mme [O].
Les photographies annexées au procès-verbal de constat démontrent que le couple vit dans les lieux dans des conditions extrêmement précaires, des couchages étant présents à même le sol, dont une partie est détrempée en raison des « douches » sommaires qui y sont pratiquées, en l’absence de sanitaires. Un réfrigérateur a été installé par un branchement sauvage.
L’occupation sans droit ni titre des lieux constitue donc un trouble manifestement illicite justifiant l’expulsion des occupants.
De plus, les lieux présentant un risque pour la sécurité des personnes et des biens, le dommage imminent est caractérisé, justifiant également la mesure.
Sur l’absence d’application des délais prévus par l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution
Aux termes de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution :
« Si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire ou lorsque la procédure d’expulsion porte sur un lieu habité en vertu du dispositif visant à assurer la protection et la préservation de locaux vacants par l’occupation de résidents temporaires, régi par l’article 29 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, réduire ou supprimer ce délai.
Le délai prévu au premier alinéa du présent article ne s’applique pas lorsque le juge qui ordonne l’expulsion constate la mauvaise foi de la personne expulsée ou que les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte ».
La voie de fait suppose des actes matériels positifs de violence ou d’effraction de la part des occupants.
Au cas présent, le procès-verbal de constat et le procès-verbal de dépôt de plainte produits par la ville de [Localité 7] démontrent que des dégradations ont eu lieu, l’entrée du local ayant été démurée et deux ouvertures ayant été créées.
Le délai de deux mois prévu par le texte précité n’est donc pas applicable, les défendeurs étant entrés dans les locaux par voie de fait.
Sur les frais et dépens
Les défendeurs seront tenus aux dépens de l’instance en application de l’article 696 du code de procédure civile.
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance de référé réputée contradictoire et en premier ressort,
Ordonnons l’expulsion immédiate et sans délai de M. [U] [I] et Mme [E] [O], et de tous occupants de leur chef, de l’ancien local EDF en brique entièrement muré, installé sur la parcelle cadastrée [Cadastre 1]-CJ-[Cadastre 5] située [Adresse 3] et [Adresse 4] à [Localité 8], avec le concours d’un serrurier et de la force publique si besoin est ;
Disons que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera régi conformément aux articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;
Disons que le délai de deux mois de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ne s’applique pas en raison de l’entrée dans les lieux par voie de fait ;
Condamnons M. [U] [I] et Mme [E] [O] aux dépens ;
Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.
Fait à Paris le 08 janvier 2025.
Le Greffier, Le Président,
Arnaud FUZAT Rachel LE COTTY
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