L’Essentiel : Le litige concerne l’expulsion de Madame [F] [J], occupant sans droit un appartement à [Adresse 1] depuis le décès de son époux, locataire en titre, le 26 janvier 2020. Le tribunal a ordonné son expulsion immédiate le 6 août 2024, fixant une indemnité d’occupation de 530,86 euros par mois. Malgré sa demande de délai en raison de sa situation précaire, le juge a rejeté sa requête, soulignant l’absence de paiement des loyers dus et la durée prolongée de son occupation. Le jugement final du 17 janvier 2025 a confirmé cette décision, la condamnant aux dépens.
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Contexte du litigeLe litige concerne l’expulsion de Madame [F] [J], qui occupe un appartement à [Adresse 1] à [Localité 4] sans droit ni titre, suite au décès de son époux, Monsieur [S] [N], locataire en titre, survenu le 26 janvier 2020. Le bail d’habitation a été résilié de plein droit à cette date. Madame [F] [J] ne disposait pas de titre de séjour en France au moment du décès et a été déclarée occupante sans droit ni titre. Décisions judiciaires initialesPar ordonnance de référé du 6 août 2024, le tribunal a ordonné l’expulsion immédiate de Madame [F] [J] et a fixé une indemnité mensuelle d’occupation à 530,86 euros. Elle a également été condamnée à payer une somme de 13.671,88 euros pour les indemnités d’occupation échues jusqu’au 29 février 2024, ainsi qu’une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Commandement de quitter les lieuxLe 13 août 2024, la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE a signifié le jugement à Madame [F] [J] et a délivré un commandement de quitter les lieux. En réponse, Madame [F] [J] a saisi le juge de l’exécution le 3 octobre 2024, demandant un délai de six mois pour quitter l’appartement. Audience et arguments des partiesLors de l’audience du 6 décembre 2024, Madame [F] [J] a plaidé pour obtenir un délai, évoquant sa situation précaire et son manque de ressources. Elle a mentionné qu’elle n’avait pas réglé l’indemnité d’occupation, mais espérait pouvoir le faire après avoir reçu une pension de réversion. En revanche, la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE a demandé le rejet de sa demande, soulignant l’augmentation de la dette locative, qui s’élevait à plus de 17.000 euros. Motifs de la décisionLe juge a examiné la demande de délai avant l’expulsion en tenant compte des dispositions du code des procédures civiles d’exécution. Il a noté que Madame [F] [J] occupait l’appartement sans droit ni titre depuis le décès de son époux et n’avait pas réglé les loyers dus. En conséquence, la demande de délai a été rejetée, considérant l’absence de paiement des indemnités d’occupation et la durée prolongée de son occupation. Décision finaleLe jugement a été rendu le 17 janvier 2025, rejetant la demande de délai de Madame [F] [J] et la condamnant aux dépens. La demande de la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE au titre de l’article 700 a également été rejetée. La décision est exécutoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution concernant les délais d’expulsion ?L’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution stipule que le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement. Ces délais sont accordés lorsque le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales et à condition que les occupants n’aient pas pénétré dans les locaux par des manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte. Il est donc essentiel que le juge évalue la situation de l’occupant, notamment en tenant compte de sa bonne ou mauvaise volonté à exécuter ses obligations. Les circonstances personnelles, telles que l’âge, l’état de santé, et la situation familiale, doivent également être prises en compte pour déterminer si un délai est justifié. Quelles sont les conditions de fixation des délais selon l’article L.412-4 du code des procédures civiles d’exécution ?L’article L.412-4 du code des procédures civiles d’exécution précise que la durée des délais accordés ne peut être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour fixer ces délais, le juge doit considérer plusieurs éléments, notamment : – La bonne ou mauvaise volonté de l’occupant dans l’exécution de ses obligations. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, ainsi que des délais liés aux recours engagés selon les articles L.441-2-3 et L.441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation. Comment l’article L.412-6 du code des procédures civiles d’exécution impacte-t-il les expulsions durant l’hiver ?L’article L.412-6 du code des procédures civiles d’exécution établit qu’il est sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée entre le 1er novembre et le 31 mars de chaque année, sauf si le relogement des intéressés est assuré dans des conditions suffisantes. Ce sursis vise à protéger les occupants durant la période hivernale, où les conditions climatiques peuvent rendre l’expulsion particulièrement difficile et dangereuse. Cependant, le juge peut supprimer ou réduire ce bénéfice si les personnes concernées ont pénétré dans les locaux par des manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte. Il est donc crucial pour le juge de trouver un équilibre entre les droits du propriétaire et ceux de l’occupant, en tenant compte des circonstances particulières de chaque cas. Quels sont les effets de la décision de rejet de la demande de délai d’expulsion pour Madame [F] [J] ?Le rejet de la demande de délai d’expulsion pour Madame [F] [J] signifie qu’elle doit quitter les lieux immédiatement, sans possibilité de prolongation. Cette décision est fondée sur le fait qu’elle occupe le logement sans droit ni titre depuis le décès de son époux, sans avoir réglé les loyers ou indemnités d’occupation, qui s’élèvent à 17.494,39 euros. En conséquence, Madame [F] [J] est également condamnée aux dépens, ce qui implique qu’elle devra assumer les frais de la procédure. La décision est exécutoire de plein droit, conformément à l’article R.121-21 du code des procédures civiles d’exécution, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre immédiatement, sans attendre l’éventuel appel. |
AFFAIRE : [F] [J] / La SOCIETE D’ECONOMIE MIXTE SEINE OUEST HABITAT EN PATRIMOINE (SEM-SOPH)
Minute n°
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE
LE JUGE DE L’EXECUTION
JUGEMENT DU 17 JANVIER 2025
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRESIDENT : Amélie DRZAZGA
GREFFIER : Marie-Christine YATIM
DEMANDERESSE
Madame [F] [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1] chez Mr [N] [S]
[Localité 4]
comparante et non assistée par Maître Laura DUCHACEK de la SELARL SLRD AVOCATS, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 782
DEFENDERESSE
La SOCIETE D’ECONOMIE MIXTE SEINE OUEST HABITAT EN PATRIMOINE (SEM-SOPH)
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Charles BISMUTH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1181
Le Tribunal après avoir entendu les parties et/ou leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 06 Décembre 2024 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu le 17 Janvier 2025, par mise à disposition au Greffe.
Par ordonnance de référé du 06 août 2024, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de VANVES a :
– constaté que le bail d’habitation conclu le 27 janvier 1989 portant sur l’appartement sis [Adresse 1] à [Localité 4] s’est trouvé résilié de plein droit par le décès de Monsieur [S] [N], locataire en titre, survenu le 26 janvier 2020 ;
– déclaré Madame [F] [J] veuve [S] [N], dépourvue de titre de séjour pour résider en France à la date du décès de son époux, occupante sans droit ni titre du logement;
– ordonné, en conséquence, son expulsion immédiate et supprimé le délai de deux mois pour quitter les lieux prévu par l’article L 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;
– fixé l’indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle à une somme égale au montant du dernier terme appelé, soit 530,86 euros, charges comprises, sans préjudice de la régularisation des charges;
– condamné Madame [F] [J] à payer en deniers ou quittances à la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE l’indemnité mensuelle d’occupation depuis le 1er mars 2024 jusqu’à la libération effective des locaux par la remise des clefs au bailleur ou par l’effet de l’expulsion ;
– condamné Madame [F] [J] à payer à titre provisionnel à la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE la somme de 13.671,88 euros au titre des indemnités d’occupation échues au 29 février 2024 ;
– condamné Madame [F] [J] à payer à la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE une somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Le 13 août 2024, la SOCIETE SEINE QUEST HABITAT ET PATRIMOINE a fait signifier le jugement à Madame [F] [J].
Par acte d’huissier en date du 13 août 2024, au visa de cette ordonnance, la SOCIETE SEINE QUEST HABITAT ET PATRIMOINE a fait délivrer à Madame [F] [J] un commandement de quitter les lieux.
Par requête enregistrée au greffe le 3 octobre 2024, Madame [F] [J] a saisi le juge de l’exécution afin de se voir accorder un délai de six mois pour quitter les lieux qu’elle occupe, situés [Adresse 1].
L’affaire a été retenue, sans renvoi, à l’audience du 6 décembre 2024, lors de laquelle les parties ont été entendues. Madame [F] [J] a comparu en personne, l’avocat s’étant constitué pour l’assister n’ayant pris attache ni avec elle ni avec son contradicteur et ne s’étant pas présenté à l’audience, sans aviser la juridiction. La société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE a comparu représentée par son avocat.
Madame [F] [J] a soutenu oralement les demandes figurant à sa requête visée par le greffe, sollicitant un délai de six mois pour quitter les lieux. Elle fait valoir qu’elle est aidée par une association, que son mari étant décédé, elle vit seule, percevant 350 euros par mois d’un emploi d’aide à la personne sans contrat de travail. Elle ne s’explique pas sur la régularité de sa situation en France. Elle admet ne pas avoir réglé l’indemnité d’occupation mais souligne qu’une fois qu’elle percevra la pension de réversion de son mari, elle pourra s’acquitter de ses dettes. Elle indique avoir constitué un dossier DALO sans réponse pour le moment.
En réplique, la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE, représentée par son conseil, a soutenu oralement des conclusions dûment visées, au terme desquelles elle sollicite que Madame [F] [J] soit déboutée de toutes ses demandes et qu’elle soit condamnée à lui payer la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE fait essentiellement valoir que la dette augmente et qu’elle est actuellement de plus de 17.000 euros. Elle soutient que la demanderesse ne justifie d’aucune démarche pour un relogement, d’autant plus qu’en situation irrégulière sur le territoire français, elle n’a pas droit au DALO.
Pour un exposé complet du litige, il convient de se reporter à la requête de Madame [F] [J] et aux conclusions de la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré au 17 janvier 2025, par mise à disposition au greffe.
Sur la demande de délais avant expulsion
En application de l’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution, dans sa version issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 applicable en l’espèce, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales et à condition que lesdits occupants ne soient pas entrés dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.
Aux termes de l’article L.412-4 du même code, dans la même version que précédemment, applicable depuis le 29 juillet 2023, la durée des délais prévus à l’article L.412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L.441-2-3 et L.441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.
L’article L.412-6 du code des procédures civiles d’exécution dispose que nonobstant toute décision d’expulsion passée en force de chose jugée et malgré l’expiration des délais accordés en vertu de l’article L.412-3, il est sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille. Toutefois, le juge peut supprimer ou réduire le bénéfice du sursis lorsque les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.
Il appartient donc au juge de respecter un juste équilibre entre deux revendications contraires en veillant à ce que l’atteinte au droit du propriétaire soit proportionnée et justifiée par la sauvegarde des droits du locataire, dès lors que ces derniers apparaissent légitimes.
Il convient de rechercher si la situation de Madame [F] [J] lui permet de bénéficier de délais avant l’expulsion qui doit être entreprise et dont le principe n’est pas contesté.
En l’espèce, il ressort des éléments versés aux débats que Madame [F] [J] a formulé un recours amiable devant la commission départementale de médiation en vue d’un accueil en foyer d’urgence.
Néanmoins, cette dernière occupe sans droit ni titre l’appartement depuis le décès de son époux qui était le locataire du logement, sans en régler les loyers/indemnités d’occupation. L’arriéré locatif s’élève à présent à la somme de 17.494,39 euros, selon décompte arrêté en septembre 2024.
Compte tenu de la durée d’occupation des lieux, déjà prolongée et de l’absence totale de règlement des indemnités d’occupation, il y a lieu de rejeter la demande de Madame [F] [J] tendant à obtenir des délais avant d’être expulsé.
Sur les demandes accessoires
La nature de la demande impose de laisser les dépens à la charge de Madame [F] [J].
La situation économique de Madame [F] [J] tenant à la prise en compte de ses ressources commande de dire n’y avoir lieu à une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en vertu de l’article R.121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La juge de l’exécution, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort ;
REJETTE la demande de délai avant d’être expulsé formée par Madame [F] [J];
CONDAMNE Madame [F] [J] aux dépens ;
REJETTE la demande de la société SEINE OUEST HABITAT ET PATRIMOINE au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que les décisions du juge de l’exécution sont exécutoires de plein droit.
Ainsi jugé et signé le 17 janvier 2025
Le Greffier La Juge de l’Exécution
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