L’Essentiel : La SCI ROISSY COLONNADIA a engagé une procédure judiciaire contre Monsieur [O] [T] pour obtenir son expulsion d’un bien à Roissy. L’assignation, datée du 20 novembre 2024, a été motivée par l’occupation illicite du bien. Monsieur [O] [T] a demandé un délai de 5 mois pour quitter les lieux, invoquant son droit à une vie familiale paisible. Cependant, le tribunal a statué en faveur de la SCI, ordonnant l’expulsion immédiate, considérant l’occupation comme un trouble manifestement illicite. Monsieur [O] [T] a également été condamné à verser 1 500 euros pour frais irrépétibles.
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Contexte de l’affaireLa SCI ROISSY COLONNADIA, propriétaire d’un bien situé à Roissy (95), a engagé une procédure judiciaire contre Monsieur [O] [T] pour obtenir son expulsion ainsi que celle de tous les occupants de son chef. L’assignation a été faite par acte en date du 20 novembre 2024, avec des demandes spécifiques concernant des frais et la suppression de délais d’expulsion. Arguments des partiesMonsieur [O] [T] a demandé un délai de 5 mois pour quitter les lieux, invoquant son droit à une vie privée et familiale paisible, en tant que membre des gens du voyage. Il a également sollicité un délai subsidiaire de 2 mois. La SCI ROISSY COLONNADIA, quant à elle, a soutenu que l’occupation de son bien était illicite, comme constaté par un procès-verbal d’un Commissaire de Justice. Décision du tribunalLe tribunal a statué en faveur de la SCI ROISSY COLONNADIA, considérant que l’occupation du bien constituait un trouble manifestement illicite. Il a ordonné l’expulsion de Monsieur [O] [T] et de tous occupants, sans délai d’attente, en raison de l’absence d’accord pour l’occupation des lieux. Conséquences financièresMonsieur [O] [T] a été condamné à verser 1 500 euros à la SCI ROISSY COLONNADIA au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’à supporter les dépens de la procédure. Le tribunal a également rejeté toutes les autres demandes formulées par les parties. Exécution de l’ordonnanceL’ordonnance stipule que l’expulsion doit être effectuée avec l’assistance de la force publique, et précise que les meubles et objets présents sur les lieux seront traités conformément aux dispositions légales en vigueur. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article 835 du Code de Procédure Civile dans le cadre d’une demande d’expulsion ?L’article 835 du Code de Procédure Civile stipule que : “Le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.” Cet article permet donc au juge d’ordonner des mesures d’expulsion même en cas de contestation, à condition que le trouble soit manifestement illicite. Dans l’affaire en question, la SCI ROISSY COLONNADIA a démontré que son droit de propriété était violé par l’occupation illicite de son bien, ce qui constitue un trouble manifestement illicite. Ainsi, les conditions de l’article 835 sont réunies, permettant au juge d’ordonner l’expulsion. Quelles sont les implications des articles L 412-1 et L 412-6 du Code des procédures civiles d’exécution concernant les délais d’expulsion ?L’article L 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution précise que : “Si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai.” Cet article impose un délai de deux mois pour l’expulsion, sauf si le juge constate que l’occupation est illégale. L’article L 412-6, quant à lui, stipule que : “Nonobstant toute décision d’expulsion passée en force de chose jugée et malgré l’expiration des délais accordés en vertu de l’article L. 412-3, il est sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille.” Dans le cas présent, le juge a constaté que les occupants étaient entrés sans droit ni titre, ce qui justifie la suppression des délais d’expulsion prévus par ces articles. Comment l’article 510 du Code de Procédure Civile s’applique-t-il dans le cadre d’une demande de délai de grâce ?L’article 510 du Code de Procédure Civile dispose que : “Le juge peut accorder un délai de grâce à la personne condamnée à une obligation de faire ou de payer, lorsque celle-ci justifie de sa situation personnelle ou professionnelle.” Dans cette affaire, [O] [T] a sollicité un délai de grâce de 5 mois pour quitter les lieux, en invoquant son droit à une vie familiale normale. Cependant, le juge a estimé que les conditions pour accorder un délai de grâce n’étaient pas réunies, notamment en raison de l’occupation illégale des lieux. Ainsi, la demande de délai de grâce a été rejetée, car l’occupation était manifestement illicite et ne justifiait pas un tel délai. Quelles sont les conséquences de la décision d’expulsion sur le droit au respect du domicile de l’occupant ?Le droit au respect du domicile est protégé par l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, qui stipule que : “Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.” Cependant, ce droit n’est pas absolu et peut être soumis à des restrictions, notamment pour protéger les droits d’autrui. Dans cette affaire, le juge a considéré que l’ingérence dans le droit au respect du domicile de [O] [T] était proportionnée à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété de la SCI ROISSY COLONNADIA. Ainsi, bien que l’expulsion constitue une ingérence dans le droit au respect du domicile, celle-ci est justifiée par la nécessité de protéger le droit de propriété, ce qui a conduit à l’ordonnance d’expulsion. |
N° RG 24/01106 – N° Portalis DB3U-W-B7I-ODR6
Code NAC : 70C
S.C.I. ROISSY COLONNADIA
C/
Monsieur [O] [T]
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE PONTOISE
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ORDONNANCE RÉFÉRÉ
LE JUGE DES REFERES : Didier FORTON, juge
LE GREFFIER : Xavier GARBIT, lors des plaidoiries
LES PARTIES :
DEMANDEUR
S.C.I. ROISSY COLONNADIA, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Maître Séverine GALLAS de la SCP PETIT MARCOT HOUILLON, avocats au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 100, et Me Marie-Victoire CHAZEAU, avocat au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 578
DÉFENDEUR
Monsieur [O] [T], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Virginie DE SOUSA OLIVEIRA, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 154
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Débats tenus à l’audience du 18 décembre 2024
Date de délibéré indiquée par le Président par mise à disposition au greffe
le 14 Janvier 2025
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La SCI ROISSY COLONNADIA est propriétaire d’un bien sis [Adresse 2] (95) ;
Par acte en date du 20 novembre 2024, la SCI ROISSY COLONNADIA a fait assigner [O] [T] aux fins notamment de voir :
– ordonner leur expulsion ainsi que tous occupants de leurs chefs ;
– condamner [O] [T] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter la charge des dépens ;
– supprimer les délais prévus aux articles L 412-1 à 412-8 du code des procédures civile d’exécution ;
Par conclusions déposées à l’audience et soutenues oralement [O] [T] sollicite sur le fondement de l’article 510 du code de procédure civile un délai de 5 mois pour quitter les lieux, et subsidiairement un délai de 2 mois et ce, au motif, sur le fondement de l’article 8 de la CDEH, que son occupation est paisible ; qu’il a le droit de mener une vie privée, familiale et domiciliaire normale ainsi que la liberté d’aller et de venir et ce, dans le cadre de son appartenance aux gens du voyage ;
Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ;
Sur la demande principale :
En vertu des dispositions de l’article 835 du Code de Procédure Civile “Le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire” ;
Le trouble manifestement illicite visé par cet article désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit ;
En l’espèce, le droit de propriété de la SCI ROISSY COLONNADIA, droit à valeur constitutionnelle, est violé par l’occupation illicite, constatée aux termes d’un procès-verbal dressé par Commissaire de Justice le 15 octobre 2024 ce qui constitue, en soi, le trouble manifestement illicite ;
Dès lors, il apparaît que les conditions de l’article 835 du code de procédure civile sont réunies ;
Par ailleurs, il apparaît que l’expulsion sollicitée est la seule mesure de nature à permettre à la SCI ROISSY COLONNADIA de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement alors que l’ingérence qui en résulte dans le droit au respect du domicile de l’occupant ne saurait être disproportionnée eu égard à la gravité de l’atteinte portée au droit de propriété et il sera donc fait droit à la demande d’expulsion dans les termes du dispositif ci-dessous sans toutefois, au vu des éléments de l’espèce et alors que la demanderesse pourra faire appel à l’assistance de la force publique, que cette décision soit assortie d’une astreinte ;
Sur les autres demandes :
Selon l’article L 412-1 du code des procédures civile d’exécution :
“Si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai.
Le délai prévu au premier alinéa du présent article ne s’applique pas lorsque le juge qui ordonne l’expulsion constate que les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait” ;
Par ailleurs, selon l’article L 412-6 du code des procédures civile d’exécution :
“Nonobstant toute décision d’expulsion passée en force de chose jugée et malgré l’expiration des délais accordés en vertu de l’article L. 412-3, il est sursis à toute mesure d’expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille.
Par dérogation au premier alinéa du présent article, ce sursis ne s’applique pas lorsque la mesure d’expulsion a été prononcée en raison d’une introduction sans droit ni titre dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.
Le juge peut supprimer ou réduire le bénéfice du sursis mentionné au même premier alinéa lorsque les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans tout autre lieu que le domicile à l’aide des procédés mentionnés au deuxième alinéa.” ;
En l’espèce il apparaît que les occupants de l’immeuble litigieux sont entrés dans les lieux sans avoir jamais eu l’accord du propriétaire ni été titulaires d’un titre quelconque ;
Par ailleurs, la preuve de la voie de fait est rapportée par le procès-verbal dressé par Commissaire de Justice le 15 octobre 2024 précité qui a constaté le contournement de blocs de béton protégeant une partie du site, le dommage causé à la pelouse en raison du passage des véhicules et caravanes et la présence de multiples rallonges électriques et tuyaux d’eau afin d’alimenter les caravannes ;
Il y aura lieu en conséquence de supprimer le délai prévu par l’article L 412-1 du code des procédures civile d’exécution ainsi que le bénéfice du sursis prévu par l’article L 412-6 du même code ;
Pour les mêmes motifs, il ne sera pas fait droit à la demande de l’octroi de délai de grâce prévu par l’article 510 du code de procédure civile ;
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SCI ROISSY COLONNADIA le montant des frais irrépétibles et il y aura lieu de condamner [O] [T] à lui payer 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
[O] [T] succombe à la procédure et sera donc condamné aux dépens ;
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort ,
Ordonnons l’expulsion de [O] [T] et de tous occupants de son chef du bien appartenant à La SCI ROISSY COLONNADIA sis [Adresse 2] à ROISSY (95) à compter de la signification de la présente ordonnance, et ce avec l’assistance de la Force Publique ;
Supprimons le délai prévu par cet article l’article L 412-1 du code des procédures civile d’exécution ainsi que le bénéfice du sursis prévu par l’article L 412-6 du même code ;
Disons n’y avoir lieu à l’application de l’article 510 du code de procédure civile ;
Disons n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte ;
Disons que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l’application des dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;
Condamnons [O] [T] à payer à la SCI ROISSY COLONNADIA 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Rejetons toutes autres demandes ;
Condamnons [O] [T] aux dépens.
Et l’ordonnance est signée par le président et la greffière.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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