L’Essentiel : L’affaire « Chez Thiou » illustre les enjeux de la propriété intellectuelle culinaire. Après son licenciement, la chef thaïlandaise « Thiou » a contesté le dépôt de la marque éponyme par son ancien employeur. Bien que son contrat stipulait un accord pour l’exploitation du restaurant, la clause sur le dépôt de marque était ambiguë. Les juges ont reconnu que « Thiou » était déjà un pseudonyme connu avant son embauche, invalidant ainsi le dépôt effectué sans son consentement. L’employeur a été jugé de mauvaise foi, entraînant l’interdiction d’utiliser le nom et les recettes de la chef dans ses établissements.
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Affaire Chez ThiouCette histoire de « propriété intellectuelle culinaire » est née il y a près de 20 ans lorsque la chef cuisinière d’origine thaïlandaise « Thiou » après avoir acquis une notoriété auprès des stars de la télévision, avait accepté de prendre la direction opérationnelle de plusieurs restaurants appartenant à la même société. Suite à son licenciement, la chef a obtenu des tribunaux, que son employeur n’utilise plus la marque « Thiou » ainsi que la somme de près de 100 000 euros en réparation de son préjudice d’image. Action en revendication de marqueAu moment où les restaurants avait fait l’objet d’un apport partiel d’actifs à une nouvelle entité, l’employeur de la chef avait déposé la marque « Thiou » pour désigner des services de restauration. Le contrat de travail de la chef stipulait bien l’accord exprès donné à l’employeur « de déposer et d’exploiter le restaurant situé au … » mais cette clause n’était pas parfaitement claire en ce qu’elle utilisait le terme de « déposer ». Il n’était aucunement fait clairement mention d’un dépôt de marque portant sur le terme « Thiou ». Cette rédaction confuse ne pouvait traduire une intention des parties portant sur un dépôt futur, ni être interprétée en ce sens. De plus, la chef, d’origine thaïlandaise, arrivée en France en 1981 et qui n’avait travaillé précédemment que dans le milieu de la restauration ne pouvait à l’évidence pas considérer cette clause comme valant double autorisation, d’enseigne et de dépôt de marque quand bien même tenues du personnel et vaisselle avaient arboré ce signe. Les juges ont confirmé la nullité du dépôt de marque, en reconnaissant que « Thiou » était connue sous ce pseudonyme avant de rejoindre les effectifs de l’employeur. Ce n’est qu’après la rupture de son contrat de travail que la chef avait appris que la marque « Thiou » avait été déposée sans son accord. Or, ce dépôt pouvait l’empêcher d’exercer toute exploitation indépendante de son nom pour des services de restauration. Dépôt de mauvaise foiIl a été jugé que l’employeur avait déposé la marque « Thiou » de mauvaise foi, au mépris des droits de son employée et non aux fins de sécuriser ses investissements à l’égard des tiers. Les restaurants « Thiou » ont été interdits d’utiliser, les recettes de la chef ainsi que la dénomination « Thiou » sur tous supports de communication (vaisselle, serviette ….). Selon l’article L.712-6 al. 2 du code de la propriété intellectuelle, si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice. À moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l’action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d’enregistrement. En matière de pseudonyme, l’article L.711-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit également que ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment g) aux droits de la personnalité. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est l’origine de l’affaire « Chez Thiou » ?L’affaire « Chez Thiou » remonte à près de 20 ans et concerne la chef cuisinière d’origine thaïlandaise, Thiou. Après avoir gagné en notoriété auprès des célébrités de la télévision, elle a été nommée à la direction opérationnelle de plusieurs restaurants appartenant à la même société. Suite à son licenciement, Thiou a engagé une action en justice contre son employeur, qui a abouti à une décision favorable pour elle. Les tribunaux ont ordonné à son ancien employeur de cesser d’utiliser la marque « Thiou » et lui ont accordé près de 100 000 euros en réparation pour préjudice d’image. Cette affaire soulève des questions importantes sur la propriété intellectuelle culinaire et les droits des chefs sur leur nom et leur image. Quelles étaient les circonstances entourant le dépôt de la marque « Thiou » ?Le dépôt de la marque « Thiou » a eu lieu lorsque les restaurants ont fait l’objet d’un apport partiel d’actifs à une nouvelle entité. L’employeur de Thiou a déposé la marque pour désigner des services de restauration, en se basant sur une clause de son contrat de travail. Cette clause stipulait que la chef avait donné son accord pour que l’employeur « dépose et exploite » le restaurant. Cependant, la rédaction de cette clause était floue, car elle n’évoquait pas explicitement le dépôt d’une marque. Les juges ont conclu que cette clause ne pouvait pas être interprétée comme une autorisation pour le dépôt de la marque « Thiou », d’autant plus que la chef était déjà connue sous ce nom avant son embauche. Comment les juges ont-ils statué sur la validité du dépôt de la marque ?Les juges ont déclaré le dépôt de la marque « Thiou » nul, en reconnaissant que la chef cuisinière était déjà connue sous ce pseudonyme avant de rejoindre l’entreprise. Ils ont également noté que Thiou n’avait pas été informée du dépôt de la marque, qui a eu lieu après la rupture de son contrat de travail. Cette décision a été fondée sur le fait que le dépôt de la marque sans l’accord de Thiou aurait pu l’empêcher d’exploiter son nom de manière indépendante dans le secteur de la restauration. Ainsi, la cour a affirmé que l’employeur avait agi de manière inappropriée en déposant la marque sans le consentement de la chef, ce qui a conduit à la nullité du dépôt. Quelles ont été les conséquences du dépôt de marque de mauvaise foi ?Il a été établi que l’employeur avait déposé la marque « Thiou » de mauvaise foi, en violation des droits de son employée. Ce dépôt n’avait pas pour but de sécuriser des investissements, mais plutôt de priver Thiou de ses droits sur son propre nom. En conséquence, les restaurants utilisant le nom « Thiou » ont été interdits d’utiliser ce terme ainsi que les recettes de la chef sur tous les supports de communication, y compris la vaisselle et les serviettes. Cette décision souligne l’importance de la bonne foi dans les dépôts de marque et la protection des droits des individus sur leur nom et leur image, en particulier dans le domaine culinaire. Quels articles du code de la propriété intellectuelle sont pertinents dans cette affaire ?L’affaire « Chez Thiou » fait référence à plusieurs articles du code de la propriété intellectuelle. L’article L.712-6 al. 2 stipule qu’un enregistrement de marque peut être contesté s’il a été demandé en fraude des droits d’un tiers ou en violation d’une obligation légale ou conventionnelle. Cela permet à une personne qui estime avoir un droit sur la marque de revendiquer sa propriété en justice. De plus, l’article L.711-4 précise qu’un signe ne peut être adopté comme marque s’il porte atteinte à des droits antérieurs, notamment les droits de la personnalité. Ces articles renforcent la protection des droits des individus sur leur nom et leur image, en particulier dans des cas de dépôt de marque contesté. |
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