Expertise judiciaire et responsabilité décennale : enjeux de la mise en cause des assureurs.

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Expertise judiciaire et responsabilité décennale : enjeux de la mise en cause des assureurs.

L’Essentiel : L’affaire oppose la S.C.I. Royale à plusieurs sociétés d’assurance, dont Axa France Iard, dans le cadre d’une expertise judiciaire sur trois immeubles. Le 26 septembre 2023, le tribunal de Lille a désigné M. [W] [X] comme expert. Le lendemain, la S.C.I. Royale a demandé l’extension de l’expertise à la S.A. Fosse, assurée par Axa pour sa responsabilité décennale. Malgré l’absence des défenderesses lors de l’audience du 3 décembre 2024, le juge a statué sur le fond. Il a ordonné une expertise commune et a imposé à l’expert de convoquer les sociétés concernées pour la prochaine réunion.

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne la S.C.I. Royale et plusieurs sociétés d’assurance, dont la S.A. Axa France Iard, dans le cadre d’une expertise judiciaire relative à trois immeubles situés à [Adresse 7] à [Localité 5] (Nord). Le président du tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise le 26 septembre 2023, désignant M. [W] [X] comme expert.

Demande d’expertise commune

Le 27 septembre 2023, la S.C.I. Royale a assigné les défenderesses, demandant que les opérations d’expertise soient étendues à la S.A. Fosse, qui est assurée par la S.A. Axa France Iard pour sa responsabilité décennale. L’affaire a été plaidée lors de l’audience publique du 3 décembre 2024.

Non-comparution des défenderesses

Les défenderesses, bien que régulièrement citées, n’ont pas constitué avocat. Selon le code de procédure civile, le juge a statué sur le fond malgré leur absence, considérant la décision comme contradictoire en raison de la citation délivrée à leur personne.

Motifs de la décision

La S.C.I. Royale a justifié sa demande d’ordonnance commune en démontrant un motif légitime, notamment en raison de l’intervention de la S.A. Fosse pour la pose de gardes corps dans les immeubles concernés. L’expert a également donné un avis favorable à la mise en cause de la S.A. Fosse.

Dépens et exécution provisoire

Le juge a statué que les dépens de la procédure seraient à la charge de la S.C.I. Royale, demanderesse à l’extension de l’expertise. L’exécution provisoire a été déclarée de droit, conformément aux dispositions du code de procédure civile.

Conclusion de l’ordonnance

Le juge des référés a ordonné que les opérations d’expertise soient communes à la S.A. Fosse et à la S.A. Axa France Iard, et a imposé à l’expert de convoquer ces sociétés à la prochaine réunion d’expertise. Un délai supplémentaire d’un mois a été accordé à l’expert pour déposer son rapport.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la non-comparution du défendeur et l’office du juge

L’article 472 du Code de procédure civile stipule que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond » et que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».

Cet article souligne que même en l’absence du défendeur, le juge a l’obligation de se prononcer sur la demande, mais uniquement si celle-ci est conforme aux exigences légales.

De plus, l’article 473 précise que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne.

Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur ».

Dans cette affaire, le juge a donc statué conformément à l’article 472, en rendant une décision réputée contradictoire selon les conditions de l’article 473, car la citation avait été délivrée à la personne du défendeur.

Sur la demande d’ordonnance commune

L’article 145 du Code de procédure civile dispose que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé ».

Cet article permet à une partie de demander des mesures d’instruction préalables si elle peut justifier d’un motif légitime, ce qui est le cas ici pour la S.C.I. Royale.

Il est également mentionné que l’expert a donné son avis favorable à la mise en cause, conformément à l’article 245 alinéa 3 du Code de procédure civile, qui précise que « l’expert peut être chargé de toute mesure d’instruction qui lui paraît utile ».

Ainsi, la S.C.I. Royale a démontré un motif légitime pour rendre communes les opérations d’expertise aux défenderesses, ce qui a été accepté par le juge.

Sur les dépens

L’article 491 du Code de procédure civile impose au juge des référés de statuer sur les dépens. Il est précisé qu’une demande tendant à voir réservé le sort des dépens ne peut prospérer.

En l’espèce, le juge a décidé que les dépens de la présente procédure seraient laissés à la charge de la S.C.I. Royale, demanderesse à l’extension de l’expertise.

Cela signifie que la S.C.I. Royale devra supporter les frais liés à la procédure, conformément aux dispositions légales en vigueur.

Sur l’exécution provisoire

Les articles 488-1 et 514 du Code de procédure civile prévoient que l’exécution provisoire sera de droit, sauf disposition contraire.

Cela signifie que la décision rendue par le juge des référés est immédiatement exécutoire, même si elle peut faire l’objet d’un appel.

Dans cette affaire, le juge a donc ordonné que l’exécution provisoire soit appliquée, permettant ainsi à la S.C.I. Royale de bénéficier rapidement des mesures décidées, sans attendre l’issue d’un éventuel appel.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référés expertises – OC RG initial n°23/705
N° RG 24/01561 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YZHW
SL/ST

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 07 JANVIER 2025

DEMANDERESSE :

S.C.I. ROYALE
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSES :

S.A. FOSSE
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparante

S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 3]
[Localité 6]
non comparante

JUGE DES RÉFÉRÉS : Samuel TILLIE, Premier Vice-Président adjoint, suppléant le président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du code de l’organisation judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 03 Décembre 2024

ORDONNANCE du 07 Janvier 2025

LE JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :

Sur demande de la S.C.I. Royale à l’égard des S.A. Axa France Iard, S.A.R.L. SGFC, S.A. BPCE Iard, entreprise Cote d’Opale Isolation, la S.A. Generali, la S.A. Allianz iard et la S.A.R.L. Imocrea, dans l’affaire portant le numéro de registre général 23/705, par ordonnance rendue le 26 septembre 2023, le président du tribunal judiciaire de Lille statuant en référé a notamment commis M. [W] [X] pour réaliser une expertise judicaire concernant trois immeubles situés [Adresse 7] à [Localité 5] (Nord).

Par assignations délivrées le 27 septembre 2023, la S.C.I. Royale demande que les opérations d’expertise soient rendues communes à la S.A. Fosse et à la S.A. Axa France Iard en qualité d’assureur de responsabilité décennale de la société Fosse.

L’affaire a été appelée à l’audience du 3 décembre 2024 pour y être plaidée.

La S.C.I. Royale représentée sollicite le bénéfice de son exploit introductif d’instance.

Les défenderesses, régulièrement citées par remise de l’acte à personne habilitée, n’ont pas constitué avocat.

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est fait référence à l’acte introductif d’instance et aux écritures des parties qui ont été soutenues oralement.

La décision a été mise en délibéré pour être prononcée par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la non-comparution du défendeur et l’office du juge

L’article 472 du code de procédure civile énonce que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond » et que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
L’article 473 du même code dispose que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne. Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur ».

En l’espèce, il convient donc de statuer dans les conditions de l’article 472 par décision réputée contradictoire conformément à l’article 473.

Sur la demande d’ordonnance commune

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.

Il ressort des documents soumis aux débats, que la S.A. Fosse est intervenue pour la pose de gardes corps dans les immeubles concernés par l’expertise et qu’elle est assurée auprès de la S.A. Axa France iard pour sa responsabilité civile décennale (pièce demanderesse n°8).

L’expert a donné son avis favorable à la mise en cause, suivant note du 25 septembre 2024, conformément aux dispositions de l’article 245 alinéa 3 du code de procédure civile (pièce demandeur n°9).

En l’espèce, la S.C.I. Royale justifie d’un motif légitime de rendre communes aux défenderesses les opérations d’expertise.

Sur les dépens

L’article 491 du code de procédure civile fait obligation au juge des référés de statuer sur les dépens.
Une demande tendant à voir réservé le sort des dépens ne peut donc prospérer.

Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de la S.C.I. Royale, demanderesse à l’extension de l’expertise.

Sur l’exécution provisoire

En vertu des dispositions des articles 488-1 et 514 du Code de procédure civile, l’exécution provisoire sera de droit.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant par ordonnance réputée contradictoire prononcée par mise à disposition au greffe, après débats en audience publique, en premier ressort ;

Vu l’ordonnance de référé du 26 septembre 2023 (RG n° 23/705) ;

Renvoie les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

Par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

Déclare communes à la S.A. Fosse et à la S.A. Axa France iard les opérations d’expertise précédemment ordonnées par ordonnance de référé en date du 26 septembre 2023 (RG n° 23/00705) pour les opérations accomplies postérieurement à son intervention ;

Dit que la S.C.I. Royale communiquera sans délai à la S.A. Fosse et à la S.A. Axa France iard l’ensemble des pièces déjà produites par les parties ainsi que les notes rédigées par l’expert ;

Dit que l’expert devra convoquer la S.A. Fosse et à la S.A. Axa France iard à la prochaine réunion d’expertise au cours de laquelle elle sera informée des diligences déjà accomplies et invitées à formuler ses observations ;

Impartit à l’expert un délai supplémentaire d’un mois pour déposer son rapport ;

Dit n’y avoir lieu à la provision complémentaire ;

Dit que dans l’hypothèse où la présente décision est portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ses dispositions seront caduques ;

Laisse à la S.C.I. Royale la charge des dépens ;

Rappelle que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

La présente ordonnance a été signée par le juge et le greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Samuel TILLIE


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