Expertise judiciaire et opposabilité des mesures d’instruction dans un contexte de copropriété.

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Expertise judiciaire et opposabilité des mesures d’instruction dans un contexte de copropriété.

L’Essentiel : Le 29 août 2023, le tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise judiciaire entre la société des Chats Bossus et le syndicat de copropriétaires de la Cour Vacher. Cette décision fait suite à une demande de la société, propriétaire de deux volumes d’un immeuble. Les 4 et 7 octobre 2024, la société a assigné d’autres sociétés civiles immobilières pour que l’expertise soit reconnue comme commune. Lors de l’audience du 3 décembre 2024, le juge a statué en faveur de l’expertise, condamnant la société des Chats Bossus aux dépens, l’ordonnance étant exécutoire de droit.

Contexte de l’affaire

Le 29 août 2023, le président du tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise judiciaire dans le cadre d’une instance impliquant la société civile des Chats Bossus et le syndicat de copropriétaires de la Cour Vacher. Cette décision a été prise suite à une demande de la société des Chats Bossus, propriétaire de deux des trois volumes d’un immeuble situé à [Adresse 4] à [Localité 6], dont le volume n°1 est soumis à la copropriété.

Assignation des sociétés civiles immobilières

Les 4 et 7 octobre 2024, la société des Chats Bossus a assigné les sociétés civiles immobilières 46 Grande Chaussée et Grande Chaussée devant le juge des référés de Lille. L’objectif était de déclarer les opérations d’expertise judiciaire comme étant communes et opposables à ces sociétés. L’affaire a été entendue pour la première fois le 3 décembre 2024.

Arguments des parties

Lors de l’audience, la société des Chats Bossus a demandé le bénéfice de son acte introductif d’instance. En réponse, la société 46 Grande Chaussée a exprimé des réserves et a demandé à être reconnue dans ses protestations. L’autre défenderesse a également formulé des réserves lors de l’audience.

Décision du juge des référés

Le juge des référés a statué en se basant sur les articles 472 et 473 du code de procédure civile, considérant que la décision serait réputée contradictoire même en l’absence de comparution du défendeur. Il a également pris en compte les éléments justifiant la demande d’ordonnance commune, notamment les preuves de désordres structurels documentés par l’expert.

Condamnation aux dépens

La société des Chats Bossus a été condamnée aux dépens, car la mesure d’expertise avait été diligentée à sa demande et dans son intérêt. Le juge a également rappelé que les décisions de première instance sont exécutoires de droit à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.

Exécution de l’ordonnance

L’ordonnance rendue par le juge des référés a été signée et scellée, ordonnant aux huissiers de justice de mettre les décisions à exécution. Le greffier a également été chargé de veiller à la bonne application de cette ordonnance, qui est exécutoire par provision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’ordonnance du juge des référés concernant l’expertise judiciaire ?

L’ordonnance du juge des référés, rendue le 7 janvier 2025, déclare les opérations d’expertise judiciaire diligentées sur le fondement de l’ordonnance du 29 août 2023 opposables et communes aux sociétés civiles immobilières (S.C.I.) 46 Grande Chaussée et Grande Chaussée.

Cette décision s’appuie sur l’article 145 du code de procédure civile, qui stipule que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. »

Ainsi, le juge a reconnu que les deux S.C.I. défenderesses, propriétaires des parcelles voisines, avaient un intérêt légitime à être informées des opérations d’expertise, notamment en raison des fissures et de l’humidité documentées.

Il a également été précisé que la société des Chats Bossus devait communiquer sans délai aux nouvelles parties toutes les pièces produites et les notes de l’expert, garantissant ainsi la transparence et l’équité du processus.

Quelles sont les conséquences de la non-comparution du défendeur selon le code de procédure civile ?

La non-comparution du défendeur a des conséquences précises selon les articles 472 et 473 du code de procédure civile.

L’article 472 dispose que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond » et que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. »

De plus, l’article 473 précise que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne. Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur. »

Dans cette affaire, le juge a statué en se fondant sur ces articles, considérant que la décision était réputée contradictoire, car la citation avait été délivrée à la personne du défendeur.

Comment le juge des référés a-t-il statué sur les dépens dans cette affaire ?

Concernant les dépens, l’article 491 du code de procédure civile impose au juge des référés de statuer sur cette question.

Cet article stipule que « le juge des référés statue sur les dépens. » En l’espèce, le juge a condamné la société des Chats Bossus aux dépens, car la mesure d’expertise avait été diligentée à sa demande et, à ce stade, dans son intérêt.

Cette décision souligne le principe selon lequel la partie qui sollicite une mesure judiciaire doit en assumer les coûts, renforçant ainsi la responsabilité des demandeurs dans le cadre des procédures judiciaires.

Quelles sont les implications de l’exécution provisoire de l’ordonnance ?

L’exécution provisoire de l’ordonnance est régie par l’article 514 du code de procédure civile, qui énonce que « les décisions de première instance sont exécutoires de droit à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »

L’article 514-1 précise que « le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé. »

Dans cette affaire, le juge a rappelé que l’ordonnance est exécutoire par provision, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre immédiatement, même si elle est susceptible d’appel. Cela permet d’assurer une certaine efficacité et rapidité dans la mise en œuvre des décisions judiciaires, particulièrement dans des situations où des mesures urgentes sont nécessaires.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Référés expertises – OC RG initial n°23/932
N° RG 24/01648 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YZUK
SL/ST

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DU 07 JANVIER 2025

DEMANDERESSE :

S.C. DES CHATS BOSSUS
[Adresse 3]
[Localité 7]
représentée par Me François-xavier LAGARDE, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSES :

S.C.I. GRANDE CHAUSSEE
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Delphine CHAMBON, avocat au barreau de LILLE

S.C.I. 46 GRANDE CHAUSSEE
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Olivier BERNE, avocat au barreau de LILLE

JUGE DES RÉFÉRÉS : Samuel TILLIE, Premier Vice-Président adjoint, suppléant le président en vertu des articles R. 212-4 et R. 212-5 du code de l’organisation judiciaire

GREFFIER : Sébastien LESAGE

DÉBATS à l’audience publique du 03 Décembre 2024

ORDONNANCE du 07 Janvier 2025

LE JUGE DES RÉFÉRÉS

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil et avoir mis l’affaire en délibéré, a statué en ces termes :
Par ordonnance du 29 août 2023 rendue dans l’instance portant le numéro de registre général 23/932, le président du tribunal judiciaire de Lille statuant en référé, saisi par la société civile (S.C.) des Chats Bossus à l’égard du syndicat de copropriétaires de la Cour Vacher, pris en la personne de son syndic, a ordonné une expertise judiciaire et commis M. [G] [E] afin de l’accomplir.

L’immeuble concerné par l’expertise judiciaire est situé [Adresse 4] à [Localité 6]. Il a fait l’objet d’une division en trois volumes. La société demanderesse est propriétaire des volumes n°2 et n°3. Le volume n°1 est soumis au régime de la copropriété s’incarnant dans le syndicat de copropriétaires de la Cour Vacher.

Par actes délivrés les 4 et 7 octobre 2024 à sa demande, la société des Chats Bossus a fait assigner les sociétés civiles immobilières (S.C.I.) 46 Grande Chaussée et Grande Chaussée devant le juge des référés de Lille notamment afin de leur déclarer les opérations d’expertise judiciaire communes et opposables.

L’affaire a été appelée la première fois à l’audience du 3 décembre 2024 où elle a été retenue.

Représentée, la société des Chats Bossus demande le bénéfice de son acte introductif d’instance.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 décembre 2024, représentée, la société 46 Grande Chaussée sollicite qu’il lui soit donné acte de ses protestations et réserves d’usage outre la condamnation de la demanderesse aux dépens. L’autre défenderesse a formulé protestations et réserves lors de l’audience.

Au visa de l’article 455 du code de procédure civile, il y est renvoyé pour plus de précisions sur les prétentions, moyens et arguments soulevés.

A l’issue du débat, la décision a été mise en délibéré pour être prononcée par mise à disposition au greffe le 7 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la non-comparution du défendeur et l’office du juge

L’article 472 du code de procédure civile énonce que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond » et que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
L’article 473 du même code dispose que « lorsque le défendeur ne comparaît pas, le jugement est rendu par défaut si la décision est en dernier ressort et si la citation n’a pas été délivrée à personne. Le jugement est réputé contradictoire lorsque la décision est susceptible d’appel ou lorsque la citation a été délivrée à la personne du défendeur ».

En l’espèce, il convient donc de statuer dans les conditions de l’article 472 par décision réputée contradictoire conformément à l’article 473.

Sur la demande d’ordonnance commune

Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution du litige les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.

En l’espèce, les deux sociétés défenderesses sont propriétaires des parcelles voisines de l’immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 6]. La société des Chats Bossus justifie de diligences entreprises depuis 2022 et, notamment de celles déjà accomplies dans le cadre des opérations d’expertise judiciaire, au cours desquelles des fissures et une présence anormale d’humidité sont documentées, intéressant les deux défenderesses. Il ressort notamment de la note n°1 rédigée par l’expert l’accord des parties originaires à l’expertise judiciaire sur un élargissement de la mission de l’expert afin de pouvoir investiguer les désordres structurels.

Au vu de ces éléments, il convient de faire droit à la demande présentée par la société des Chats Bossus comme repris au dispositif.

Sur les dépens

L’article 491 du code de procédure civile fait obligation au juge des référés de statuer sur les dépens.

En l’espèce, il convient de condamner la société des Chats Bossus aux dépens, la mesure d’expertise étant diligentée à sa demande et, à ce stade, dans son intérêt.

Sur l’exécution provisoire

En vertu de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont exécutoires de droit à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. Toutefois, l’article 514-1 du même code précise le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé.

La présente ordonnance sera donc exécutoire par provision.

DECISION

Par ces motifs, le juge des référés, statuant après débat en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire prononcée par mise à disposition au greffe rendue en premier ressort,

Vu l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Lille statuant en référé le 29 août 2023 dans l’instance enregistrée sous le numéro de registre général 23/932 ;

Déclare les opérations d’expertise judiciaire diligentées sur le fondement de l’ordonnance précitée opposables et communes aux S.C.I. 46 Grande Chaussée et S.C.I. Grande Chaussée pour les opérations accomplies postérieurement à la présente ordonnance ;

Dit que la S.C. des Chats Bossus communiquera sans délai aux nouvelles parties à l’expertise l’ensemble des pièces déjà produites par toutes les autres parties ainsi que les notes déjà rédigées par l’expert ;

Dit que l’expert devra convoquer les nouvelles parties à la prochaine réunion d’expertise au cours de laquelle il s’assurera de leur information sur les diligences déjà accomplies et de recueillir leurs observations ;

Accorde à l’expert un délai supplémentaire de deux mois pour déposer son rapport ;

Dit que, dans l’hypothèse où la présente décision serait portée à la connaissance de l’expert après dépôt de son rapport, ses dispositions seront caduques ;

Condamne la S.C. des Chats Bossus aux dépens ;

Rappelle que la présente ordonnance est exécutoire par provision ;

La présente ordonnance a été signée par le juge et le greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DES RÉFÉRÉS

Sébastien LESAGE Samuel TILLIE
Référés expertises

N° RG 24/01648 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YZUK
S.C. DES CHATS BOSSUS C/ S.C.I. GRANDE CHAUSSEE, S.C.I. SCI 46 GRANDE CHAUSSEE

EN CONSÉQUENCE

LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE MANDE ET ORDONNE

A tous huissiers de justice sur ce requis, de mettre les présentes à exécution ;

Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près des tribunaux judiciaires d’y tenir la main ;

A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis ;

En foi de quoi les présentes ont été signées et scellées du sceau du tribunal ;

POUR EXPÉDITION CONFORME

Le Greffier

Sébastien LESAGE

Vu pour Pages, celle-ci incluse


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