Expertise judiciaire et responsabilité en matière de diagnostics immobiliers : enjeux et implications.

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Expertise judiciaire et responsabilité en matière de diagnostics immobiliers : enjeux et implications.

L’Essentiel : Le 1er décembre 2020, Mme [U] [A] a acquis un immeuble à [Localité 7] pour 90 000 euros. Avant la vente, un diagnostic amiante a été réalisé, concluant à l’absence de matériaux contenant de l’amiante. Cependant, après l’achat, des désordres ont été découverts, révélant la présence d’amiante chrysotile dans les ardoises. En conséquence, Mme [A] a assigné les vendeurs et la société de diagnostic en justice, demandant une expertise judiciaire et des indemnités pour préjudices. Le juge a ordonné une expertise, rejetant les demandes de sursis et d’indemnités au titre de l’article 700.

Acquisition de l’immeuble

Le 1er décembre 2020, Mme [U] [A] a acquis un immeuble à usage d’habitation à [Localité 7] pour un montant de 90 000 euros, par acte authentique reçu par Me [Z] [C]. Les vendeurs étaient M. [W] [R] et Mme [L] [M] épouse [R].

Diagnostic amiante

Avant la vente, M. et Mme [R] ont fait réaliser un diagnostic amiante par la société Anjou Loire Diagnostic, qui a conclu à l’absence de matériaux contenant de l’amiante. Ce rapport a été annexé à l’acte de vente.

Découverte de désordres

Après l’achat, Mme [A] a constaté des désordres dans l’immeuble et a demandé une expertise amiable à M. [P] [H], expert en bâtiment. Celui-ci a trouvé de l’amiante chrysotile dans les ardoises de couverture, ce qui a conduit Mme [A] à agir en justice.

Assignation en justice

Le 13 novembre 2023, Mme [A] a assigné M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et son assureur Allianz IARD devant le tribunal judiciaire d’Angers, demandant une expertise judiciaire et des indemnités pour préjudices subis.

Demandes d’expertise et de sursis

Dans ses conclusions, Mme [A] a demandé une expertise judiciaire pour établir la nature et l’ampleur des vices, ainsi qu’un sursis à statuer en attendant le rapport de l’expert. Elle a également demandé des indemnités pour préjudice matériel et de jouissance.

Réponse des défendeurs

M. et Mme [R] ont contesté la demande d’expertise, arguant que l’action de Mme [A] était vouée à l’échec, car elle reposait sur une obligation de délivrance inapplicable. Ils ont également soutenu que le délai pour agir pour vices cachés était expiré.

Position de la société de diagnostic

La société Loire Anjou Diagnostic et Allianz IARD ont demandé des précisions sur la mission de l’expert et ont contesté les demandes de Mme [A] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Décision du juge de la mise en état

Le juge a ordonné une mesure d’expertise judiciaire, considérant que le rapport amiable ne suffisait pas à résoudre le litige. Il a également rejeté la demande de sursis à statuer et a débouté les parties de leurs demandes d’indemnités au titre de l’article 700.

Modalités de l’expertise

L’expert désigné devra examiner l’immeuble, vérifier la présence d’amiante, évaluer les désordres et déterminer les responsabilités. Les frais d’expertise seront avancés par Mme [A], avec un délai de 8 mois pour le dépôt du rapport.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 1604 du Code civil dans le cadre de la vente immobilière ?

L’article 1604 du Code civil stipule que « le vendeur est tenu de délivrer la chose vendue ». Cette obligation implique que le vendeur doit remettre au vendeur un bien conforme à ce qui a été convenu dans le contrat de vente.

Dans le cadre de la vente immobilière, cette obligation de délivrance inclut la garantie que le bien est exempt de vices cachés, c’est-à-dire des défauts qui ne sont pas apparents lors de la vente et qui rendent le bien impropre à l’usage auquel il est destiné.

En l’espèce, Mme [A] soutient que l’immeuble qu’elle a acquis présente des désordres liés à la présence d’amiante, ce qui pourrait constituer un vice caché. Si tel est le cas, elle pourrait engager la responsabilité des vendeurs sur le fondement de cet article, en arguant que la délivrance n’a pas été conforme à ce qui était attendu.

Il est donc essentiel d’examiner si les vendeurs ont respecté leur obligation de délivrance en fournissant un bien exempt de vices cachés, ce qui pourrait justifier la demande d’expertise judiciaire formulée par Mme [A].

Quelles sont les implications de l’article 1641 du Code civil concernant les vices cachés ?

L’article 1641 du Code civil dispose que « le vendeur est tenu de la garantie des vices cachés de la chose vendue ». Cela signifie que si un vice caché est découvert après la vente, l’acheteur peut demander réparation au vendeur.

Pour que la garantie des vices cachés soit applicable, plusieurs conditions doivent être remplies :

1. Le vice doit être caché, c’est-à-dire non apparent lors de la vente.
2. Le vice doit rendre le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou diminuer cet usage de manière significative.
3. L’acheteur doit agir dans un délai raisonnable après la découverte du vice.

Dans le cas présent, Mme [A] a découvert la présence d’amiante après la vente, ce qui pourrait constituer un vice caché. Elle pourrait donc fonder sa demande sur cet article, en soutenant que les vendeurs n’ont pas respecté leur obligation de garantir un bien exempt de vices cachés.

Il est également important de noter que le délai pour agir sur ce fondement est de deux ans à compter de la découverte du vice, ce qui pourrait être contesté par les vendeurs, qui soutiennent que ce délai est expiré.

Comment l’article 700 du Code de procédure civile s’applique-t-il dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que « le juge peut condamner la partie qui perd à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles ». Cela signifie que si une partie est déboutée de ses demandes, elle peut être condamnée à rembourser les frais engagés par l’autre partie.

Dans le cadre de ce litige, Mme [A] demande une indemnisation au titre de l’article 700, tout comme M. et Mme [R] qui demandent également à être indemnisés si Mme [A] venait à perdre son action.

Le juge a la faculté d’apprécier les circonstances de l’affaire pour décider de l’octroi ou non de cette indemnité. Il peut tenir compte de la bonne ou mauvaise foi des parties, de la complexité de l’affaire, ainsi que des frais réellement engagés.

Dans cette affaire, le juge a débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700, ce qui signifie qu’aucune des parties n’a été reconnue comme ayant droit à une indemnisation pour les frais irrépétibles à ce stade de la procédure.

Quelles sont les conséquences de l’article 789 du Code de procédure civile sur la demande d’expertise judiciaire ?

L’article 789 du Code de procédure civile permet au juge de la mise en état d’ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction, y compris une expertise judiciaire. Cette disposition est essentielle dans le cadre de l’examen des demandes d’expertise, car elle confère au juge une large latitude pour ordonner des mesures nécessaires à la manifestation de la vérité.

Dans le cas présent, Mme [A] a demandé une expertise judiciaire pour établir la présence d’amiante et évaluer les conséquences de cette présence sur l’immeuble. Le juge a considéré que le rapport d’expertise amiable, bien qu’il ait constaté la présence d’amiante, n’était pas suffisant pour trancher le litige de manière définitive.

Ainsi, en vertu de l’article 789, le juge a ordonné une mesure d’expertise judiciaire, permettant ainsi d’obtenir des éléments de preuve contradictoires et d’éclairer la situation. Cette mesure est cruciale pour déterminer les responsabilités des parties et évaluer les préjudices subis par Mme [A].

En conclusion, l’article 789 joue un rôle fondamental dans la procédure, en garantissant que toutes les parties aient la possibilité de faire valoir leurs droits et d’obtenir une décision éclairée sur la base d’éléments de preuve solides.

25 Novembre 2024

AFFAIRE :
[U] [A]

C/
[W] [R]
, [L] [M] épouse [R]
, S.A.S.U. LOIRE ANJOU DIAGNOSTIC
, S.A. ALLIANZ IARD

N° RG 23/02586 – N° Portalis DBY2-W-B7H-HLNB

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ANGERS

1ère Chambre

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

ORDONNANCE DU VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

rendue par Yannick BRISQUET, Premier Vice-Président, au Tribunal Judiciaire d’ANGERS, chargé de la mise en état ;

Etant en son Cabinet au Palais de Justice de ladite ville,

Assisté de Madame PELLEREAU, greffier

ENTRE :

DEMANDERESSE :

Madame [U] [A]
née le 26 Avril 1993 à [Localité 11] (OISE)
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Maître Philippe RANGE de la SELARL LEXCAP, avocats au barreau D’ANGERS

DÉFENDEURS :

Monsieur [W] [R]
né le 01 Août 1947 à [Localité 10] (PARIS)
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Maître Aurélie BLIN de la SELARL LEX PUBLICA, avocats au barreau D’ANGERS

Madame [L] [M] épouse [R]
née le 16 Octobre 1947 à [Localité 8] (MAYENNE)
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentant : Maître Aurélie BLIN de la SELARL LEX PUBLICA, avocats au barreau D’ANGERS

S.A.S.U. LOIRE ANJOU DIAGNOSTIC
[Adresse 9]
[Localité 7]
Représentant : Maître Arnaud BARBE de la SCP PROXIM AVOCATS, avocats au barreau D’ANGERS

S.A. ALLIANZ IARD
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Maître Arnaud BARBE de la SCP PROXIM AVOCATS, avocats au barreau D’ANGERS

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte authentique en date du 1er décembre 2020, reçu par Me [Z] [C], notaire à [Localité 7], Mme [U] [A] a acquis de M. [W] [R] et de Mme [L] [M] épouse [R], un immeuble à usage d’habitation situé au [Adresse 2] à [Localité 7], moyennant le prix de 90 000 euros.

Préalablement à la vente, M. et Mme [R] ont sollicité la société Anjou Loire Diagnostic, exerçant sous l’enseigne Arliane Anjou, pour réaliser un diagnostic amiante.

La société Anjou Loire Diagnostic a conclu à l’absence de matériaux et produits susceptibles de contenir de l’amiante. Le rapport de la société Anjou Loire Diagnostic a été annexé à l’acte authentique de vente.

Estimant que l’immeuble était affecté de certains désordres, Mme [A] a sollicité M. [P] [H], expert en bâtiment et travaux publics près de la cour d’appel d’Angers, pour procéder à une expertise amiable de l’immeuble. À l’occasion de celle-ci, l’expert a prélevé des ardoises qu’il a fait examiner par un laboratoire d’analyse qui a conclu à la présence d’amiante chrysotile dans les ardoises de couverture du versant arrière.

Après échec d’une tentative de résolution amiable du litige et de saisine d’un conciliateur de justice, Mme [A] a, par acte de commissaire de justice en date du 13 novembre 2023, fait assigner M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD en qualité d’assureur de cette dernière devant le tribunal judiciaire d’Angers aux fins, au visa de l’article 1604 du code civil, de voir :
– avant de dire droit, ordonner une mesure d’expertise judiciaire ;
au fond :
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD à l’indemniser de ses préjudices ;
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD à lui payer une somme à parfaire de 17 581,16 euros TTC au titre du préjudice matériel ;
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD à lui payer une somme de 1500 euros au titre de son préjudice de jouissance ;
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD à lui payer une somme de 2000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Lexcap (Maitre Philippe Rangé), conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
– dire qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 12 septembre 2024, Mme [A] demande au juge de la mise en état, au visa des articles 378 et 789 du code de procédure civile et 1641 du code civil, de voir :
– ordonner une mesure d’expertise du bâtiment litigieux en désignant tel expert qu’il plaira au tribunal ;
– ordonner un sursis à statuer dans l’attente du dépôt du rapport de l’expert judiciaire ;
– condamner in solidum M. [W] [R], Mme [L] [M] épouse [R], la société Loire Anjou Diagnostic et la société Allianz IARD à lui payer une somme de 1500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– les condamner in solidum aux dépens de l’incident.

Mme [A] justifie sa demande d’expertise judiciaire par le fait qu’il résulte d’une jurisprudence désormais constante que le juge ne peut se fonder exclusivement sur les rapports d’expertise non contradictoires réalisés à la demande des parties, à moins qu’ils ne soient corroborés par des éléments de preuve extérieurs. Elle ajoute qu’elle est en droit de modifier le fondement juridique de sa demande en cours de procédure, qu’elle pourrait donc au vu du rapport d’expertise décider de fonder son action sur la garantie des vices cachés plutôt que sur l’obligation de délivrance dès lors que l’expertise judiciaire lui permettra d’avoir une connaissance du vice dans toute son ampleur et toutes ses conséquences. Elle fait valoir également que la demande d’expertise a un effet interruptif de prescription.

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Par conclusions d’incident du 5 septembre 2024, M. [W] [R] et Mme [L] [M] épouse [R] demandent au juge de la mise en état de :
– débouter Mme [A] de sa demande d’expertise judiciaire ;
– débouter Mme [A] de l’ensemble de ses autres demandes, fins de non-recevoir et conclusions formulées à leur encontre ;
– condamner Mme [A] ou tout succombant à leur payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner Mme [A] ou tout succombant aux entiers dépens.

À l’appui de leurs demandes, M. et Mme [R] soutiennent que l’action engagée par Mme [A] à leur encontre est manifestement vouée à l’échec dès lors qu’elle repose sur l’obligation de délivrance, laquelle est selon eux inapplicable en l’espèce puisque faute d’un engagement explicite de livrer un immeuble exempt d’amiante, le vendeur satisfait à son obligation en transmettant l’état d’exposition à l’amiante établi par un prestataire certifié, que les informations contenues dans ce rapport soient exactes ou non.

Ils considèrent qu’en raison de la nature des désordres, Mme [A] ne peut exercer qu’une action pour vices cachés mais que le délai pour agir sur ce fondement est expiré dès lors que les vices ont été révélés par le rapport d’expertise de M. [H] daté du 26 avril 2021 et qu’ils n’ont été assignés que le 13 avril 2023, soit plus de deux ans après cette révélation. Ils estiment en outre que les conclusions claires du rapport d’expertise amiable de M. [H] fournissent au juge des éléments suffisants pour statuer.

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Par conclusions d’incident en date du 20 septembre 2024, la société Loire Anjou Diagnostic et son assureur la société Allianz IARD demandent au juge de la mise en état de :
– leur donner acte de leurs protestations et réserves,
– compléter et préciser la mission du technicien en lui prescrivant de :
déterminer le contexte dans lequel le diagnostic Arliane s’est déroulé en mai 2020, afin d’établir ce qui était visuellement décelable, sans sondages destructifs,déterminer les circonstances dans lesquelles les matériaux amiantés ont été mis au jour,dire si des travaux ont été effectués dans les combles ou sur la toiture avant la vente,déterminer si les époux [R] avaient connaissance de la présence de matériaux amiantés dans la maison litigieuse,se faire remettre une copie du diagnostic amiante annexé à l’acte de vente,déterminer l’existence d’un risque sanitaire en l’état actuel des matériaux et produits amiantés présents dans le bien vendu,déterminer la nécessité d’un désamiantage immédiat au regard des critères du droit positif (cf. article R. 1334-28 du code de la santé publique),- débouter Mme [A] et M. et Mme [R] de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. Sur la demande d’expertise

L’article 789 5° du code de procédure civile permet au juge de la mise en état d’ordonner, même d’office, toute mesure d’instruction.

En outre, le juge peut en tout état de cause ordonner une mesure d’instruction dès lors qu’il ne dispose pas des éléments suffisants pour statuer et ce, en application des dispositions de l’article 144 du code de procédure civile.

S’il n’est pas contestable qu’en vertu des dispositions de l’article 146 du code de procédure civile, une mesure d’instruction ne peut en aucun cas être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve, il n’en demeure pas moins que le juge apprécie souverainement cette carence ainsi que la faculté pour le demandeur d’accéder aux pièces demandées.

Le rapport d’expertise amiable, qui n’a pas été contesté, constate la présence d’amiante dans l’immeuble, alors même que le diagnostic amiante réalisé par la société Anjou Loire Diagnostic et annexé à l’acte authentique de vente avait conclu à l’absence de matériaux ou produits susceptibles de contenir de l’amiante.

Ainsi, l’action en réparation des préjudices subis, dirigée à la fois à l’encontre de M. [W] [R], de Mme [L] [M], épouse [R], de la société Loire Anjou Diagnostic et de son assureur, la société Allianz IARD, n’est pas manifestement vouée à l’échec. Mme [U] [A], dont les allégations ne sont ni imaginaires ni infondées, justifie, notamment par un rapport d’expertise amiable, du caractère légitime de sa demande.

Toutefois, bien que le rapport d’expertise amiable n’ait pas été contesté par les parties, il n’a pas permis de résoudre le litige de manière amiable. La mesure d’instruction sollicitée par Mme [U] [A] ne se heurte à aucune opposition légitime et s’impose dès lors que seule l’intervention d’un expert judiciaire permettrait de vérifier contradictoirement la réalité des faits et les conséquences de la situation évoquée dans ses écritures.
En conséquence, il y a lieu d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire.

Il importe que les opérations d’expertise soient contradictoires à l’ensemble des parties à la procédure afin que les conclusions du rapport puissent leur être opposées.

Les frais seront avancés par Mme [U] [A], demanderesse à la mesure.

II. Sur la demande de sursis à statuer

Le sursis à statuer ne se justifie que dans l’attente d’un événement extérieur, ce qui peut notamment survenir lorsqu’une expertise susceptible d’avoir une incidence sur la solution du litige a été ordonnée par une autre juridiction que celle qui est saisie de l’affaire. Il n’y a pas lieu en revanche de prononcer un sursis à statuer dans l’attente d’une mesure d’instruction que la juridiction a elle-même ordonnée, ce qui est le cas en l’espèce.

III. Sur les demandes accessoires

A ce stade de la procédure, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais irrépétibles. Elles seront en conséquence déboutées de leurs demandes de ce chef.

Il y a lieu de réserver les dépens.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant publiquement par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Vu l’article 789 du code de procédure civile,

Ordonne une mesure d’expertise, et commet pour y procéder, M. [I] [V], [Adresse 5] à [Localité 6] (49) expert inscrit sur la liste de la cour d’appel d’Angers, avec mission de :

– convoquer et entendre les parties assistées le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion des opérations ou lors de la tenue des réunions d’expertise;

– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, y compris une copie du diagnostic amiante annexé à l’acte de vente du 1er décembre 2020, ainsi que tout rapport technique ou rapport d’expertise déjà effectué à la demande de l’une ou l’autre des parties ;

– se rendre sur les lieux : [Adresse 2] à [Localité 7] ;

– faire une visite et une description des lieux ;

– produire des photographies, croquis et plans nécessaires pour illustrer son rapport ;

– vérifier si les désordres allégués tenant à la présence d’amiante existent ; dans l’affirmative, les décrire et déterminer leur nature, leur origine et leur importance ;

– donner toutes précisions sur le point de savoir si ces désordres étaient ou non apparents lors de l’achat du bien par Mme [U] [A] le 1er décembre 2020 ;

– donner toutes précisions sur le point de savoir si ces désordres pouvaient ou non être connus à cette date par M. et Mme [R], vendeurs du bien ;

– déterminer le contexte dans lequel le diagnostic de la société Anjou Loire Diagnostic, exerçant sous l’enseigne Arliane Anjou, s’est déroulé en mai 2020, en donnant son avis à propos de ce qui était visuellement décelable, sans sondages destructifs ;

– déterminer les circonstances dans lesquelles les matériaux amiantés ont été mis au jour;

– dire si des travaux ont été effectués dans les combles ou sur la toiture avant la vente ;
– dire s’il résulte de la présence de ces matériaux et produits de l’amiante, une gêne à l’usage et dans cette hypothèse, évaluer le préjudice qui en résulte ;

– se prononcer sur l’existence ou non d’un risque sanitaire en l’état actuel des matériaux et produits amiantés présents dans le bien vendu ;

– se prononcer sur la nécessité ou non d’un désamiantage immédiat au regard des critères du droit positif (article R. 1334-28 du code de la santé publique) ;

– décrire les travaux nécessaires pour remédier aux désordres et en évaluer le coût ; évaluer les préjudices subis ;

– fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction de déterminer les responsabilités encourues, y compris celle du diagnostiqueur ;

Rappelle que l’expert peut s’adjoindre d’initiave, si besoin est, un technicien dans une autre spécialité que la sienne, dont le rapport sera joint au rapport (articles 278 et 282 du code de procédure civile) et/ou se faire assister par une personne de son choix intervenant sous son contrôle et sa responsabilité (article 278-1 du code de procédure civile) ;
Rappelle que :
1) le coût final des opérations d’expertise ne sera déterminé qu’à l’issue de la procédure, même si la présente décision s’est efforcée de fixer le montant de la provision à une valeur aussi proche que possible du coût prévisible de l’expertise ;

2) la partie qui est invitée par cette décision à faire l’avance des honoraires de l’expert n’est pas nécessairement celle qui en supportera la charge finale, à l’issue du procès ;

Et que le fait que l’une des parties bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle ou totale n’implique pas nécessairement que cette partie soit dispensée, à l’issue du litige, de la charge totale ou partielle du coût de la mesure d’instruction ;

Accorde à l’expert pour le dépôt de son rapport au service du contrôle des expertises un délai de 8 mois à compter de la réception de l’avis de consignation envoyé par le greffe;

Dit que l’expert devra solliciter du magistrat chargé du contrôle de l’expertise une prorogation de ce délai si celui-ci s’avère insuffisant ;

Fixe à 3 000 euros (trois mille euros) le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que Mme [U] [A] devra consigner au greffe de ce tribunal dans le délai de 2 mois à compter de la date de la notification de la présente ordonnance aux avocats ; les chèques devant être établis à l’ordre de la régie d’avance et de recettes du tribunal judiciaire d’Angers ;

Dit qu’à défaut de consignation dans ce délai et selon les modalités imparties, la désignation de l’expert sera caduque ;

Dit que s’il estime insuffisante la provision ainsi fixée, l’expert devra, lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion, dresser un programme de ses investigations et évaluer d’une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et débours ;
 
Dit qu’à l’issue de cette réunion, l’expert fera connaître aux parties et au magistrat chargé du contrôle de l’expertise la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et de ses débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d’une consignation supplémentaire ;

Dit que l’expert provoquera la première réunion sur place dans un délai maximum de 5 semaines à partir de sa saisine, constituée par l’avis donné à l’expert du versement de la consignation, et que les parties lui communiqueront préalablement toutes les pièces dont elles entendent faire état ;

Dit que les parties communiqueront ensuite sans retard les pièces demandées par l’expert et que, en cas de défaillance, le juge du suivi de l’expertise pourra être saisi aux fins de fixation d’une astreinte ;

Dit que les pièces seront accompagnées d’un bordereau avec la justification de la communication à toutes les parties en cause ;

Dit que lors de la première réunion et en tout cas dès que possible, l’expert exposera sa méthodologie et fixera le calendrier de ses opérations, avec la date de diffusion du projet de rapport, le délai imparti aux parties pour lui faire parvenir leurs dires et la date du dépôt du rapport définitif ;

Dit que les parties procéderont aux mises en cause nécessaires dans les deux mois de la saisine de l’expert, ou, si la nécessité s’en révèle ultérieurement, dès que l’expert donnera son accord ;

Dit qu’à la fin de ses opérations, l’expert organisera une réunion de clôture ou adressera aux parties une note de synthèse pour les informer du résultat de ses investigations. Les parties disposeront alors d’un délai de 3 semaines pour faire parvenir leurs observations récapitulatives. Le tout devant être consigné dans son rapport d’expertise ;

Dit que faute pour une partie d’avoir communiqué à l’expert les pièces demandées ou fait parvenir son dire dans les délais impartis, elle sera réputée y avoir renoncé sauf si elle a justifié préalablement à l’expiration du délai d’un motif résultant d’une cause extérieure;

Dit que l’expert déposera au service des expertises du tribunal son rapport dans le délai fixé, sauf prorogation accordée préalablement à l’expiration de ce délai, en un seul original, après en avoir envoyé un exemplaire à chaque partie ;

Dit que l’expert joindra à cet envoi la copie de sa demande de rémunération et que les parties disposeront d’un délai de 15 jours pour formuler des observations sur cette demande ;

Dit qu’en cas d’empêchement ou refus, l’expert commis pourra être remplacé par ordonnance à la demande de la partie la plus diligente ;

Désigne, pour contrôler les opérations d’expertise, le juge chargé des expertises de ce tribunal ;

Rejette la demande de sursis à statuer ;

Dit que le présent dossier sera rappelé à la mise en état du 25 septembre 2025 après le dépôt du rapport d’expertise judiciaire pour les conclusions de Me Rangé, conseil de Mme [U] [A] ;

Déboute Mme [U] [A] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [W] [R] et Mme [L] [M] épouse [R] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Réserve les dépens.

Ordonnance rendue par mise à disposition le VINGT CINQ NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE, après débats à l’audience du 23/09/2024, à l’issue de laquelle il a été indiqué que la décision serait rendue le 25 Novembre 2024.

LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ETAT


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