Exclusion des services Google : pas d’abus de position dominante

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Exclusion des services Google : pas d’abus de position dominante
L’Essentiel : L’Autorité de la Concurrence a conclu que les actions de Google, telles que le déréférencement de France-Soir et la suspension de son compte YouTube, ne constituent pas un abus de position dominante. Bien que Google détienne une part de marché de 93% dans la recherche en ligne, la jurisprudence stipule qu’une position dominante n’est pas en soi condamnable. Les règles contractuelles de Google, justifiées et transparentes, visent à garantir la qualité des contenus référencés. Ainsi, il n’a pas été prouvé que ces règles soient illégitimes ou abusives, respectant les critères établis par la jurisprudence.

Le déréférencement du titre de presse France-Soir de Google, sa suspension de Youtube et la fermeture son compte Ad par Google ne sont pas constitutifs d’un abus de sa position dominante sur les marché de ces trois services.

Marché de la recherche en ligne

L’Autorité de la Concurrence, dans sa décision du 9 avril 2019, confirmée par la cour d’appel de Paris en 2020, a relevé que, sur le marché de la recherche en ligne, Google était susceptible de disposer d’une position dominante ; en effet cette dernière détient en France sur ce marché 93% des recherche en ligne, son concurrent direct Bing n’en détenant que 3% ;

Selon la jurisprudence de la CJUE, une part de marché supérieure à 50% constitue par elle-même, sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l’existence d’une position dominante ;

En outre, parmi les indices complémentaires pouvant être pris en compte, l’Autorité a relevé l’existence de très fortes barrières à l’entrée ; certes le service de France Soir («Actu») n’est actif que sur un des segments du marché de la recherche en ligne à savoir celui relatif à l’actualité mais que, comme l’un des deux accès à ce service s’opère par un clic sur un des onglets du moteur de recherche généraliste « Search », il en résulte que, du fait de la position écrasante de Google en pourcentage d’internautes utilisant Search, il est inéluctable que, sur un sous-segment du marché, Google se retrouve en position dominante.

Marché du partage de vidéos en ligne

En ce qui concerne You Tube, France-Soir a produit une étude du 1er décembre 2021 de Similarweb sur les sites les plus populaires dans le Monde mais qui d’une part classe ensemble des services internet de natures très différentes (Google, You Tube, Facebook, Twitter, lnstagram, Wikipedia… .) qui ne sont pas sur le même marché, d’autre part ne donne aucun résultat pour la France et enfin ne permet pas de connaître les parts de marché de You Tube ;

Même, s’il ne peut être exclu que You Tube soit en position dominante sur le marché de l’hébergement de vidéos en ligne, France-Soir n’en a pas rapporté la preuve (même si l’hypothèse est«vraisemblable» selon les juges consulaires.

Marché de la publicité en ligne liée aux recherches

En ce qui concerne le service Ad (ex AdSense), l’Autorité de la Concurrence dans sa décision du 31 janvier 2019 a considéré que « Google devait être regardée comme détenant une position dominante sur le marché français de la publicité en ligne liée aux recherches ; en effet son moteur de recherche totalise plus de 90% des recherches ;

Par ailleurs il existe de fortes barrières à l’entrée.

Enfin les annonceurs, compte-tenu de leur nombre et de l’absence d’offres alternatives ne disposent pas d’une puissance d’achat compensatrice.

La juridiction a donc retenue que Google est en position dominante sur les marchés de la recherche en ligne d’actualité et de publicités en ligne et, bien que France-Soir ne l’ait pas démontrée, comme cela lui incombait, vraisemblablement aussi sur l’hébergement de vidéos en ligne.

Seul l’abus est sanctionné

Selon une jurisprudence constante, tant au niveau européen que national, « si l’existence d’une position dominante n’est pas en soi condamnable, il incombe à l’entreprise qui la détient une responsabilité particulière de ne pas exploiter de manière abusive la situation et de ne pas porter atteinte, par son comportement, à une concurrence non faussée sur son marché » ;

En l’espèce France-Soir a fait valoir en vain un abus de Google concernant l’édiction unilatérale de ses Règles.

La CJUE a jugé qu’une entreprise en position dominante ne doit pas être privée du droit de préserver ses propres intérêts commerciaux dès lors que la pratique mise en œuvre repose sur une justification objective et qu’elle est accomplie dans une mesure raisonnable ;

Or, les Règles contractuelles de Google répondent aux critères posés par la jurisprudence pour ne pas constituer, de par leur existence, l’indice d’une pratique constitutive d’un abus de position dominante ; les Règles édictées par Google pour l’usage de ses services sont:

i) Justifiées : le service Actu, à la différence de Search n’est pas un moteur généraliste mais un moteur spécialisé dans l’actualité, a pour politique commerciale de sélectionner les sites et articles qu’elle référence afin de fournir aux internautes des « contenus fiables et de haute qualité contenant des informations pertinentes … » ;

ii) Objectives: les actualités sélectionnées (en matière médicale sur le Covid) ne doivent pas être prohibées et répondre à un consensus scientifique;

iii) Raisonnables: la mesure, consistant à écarter de son moteur de recherche les médias qui contredisent les informations considérées par la communauté scientifique comme exactes et les recommandations des Autorités Publiques, est raisonnable ;

iv) Claires:

v) Transparentes: il suffit d’un clic sur la page d’accueil du moteur de recherche Actu pour accéder aux Règles (selon le Règlement de I’UE P to B, à la différence de ce qui est demandé aux fournisseurs de services d’intermédiation en ligne, les fournisseurs de moteurs de recherche n’ont pas à informer directement leurs utilisateurs, ce qui serait d’ailleurs matériellement impossible) ;

En conclusion, il n’était pas démontré que les Règles stipulées par Google pour avoir accès à ses services ne seraient pas légitimes et seraient en elle-même constitutives d’un abus de position dominante.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les décisions de l’Autorité de la Concurrence concernant Google ?

L’Autorité de la Concurrence a pris plusieurs décisions importantes concernant Google, notamment le 9 avril 2019, où elle a constaté que Google détenait une position dominante sur le marché de la recherche en ligne, avec une part de marché de 93% en France. Cette position dominante a été confirmée par la cour d’appel de Paris en 2020. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), une part de marché supérieure à 50% est généralement considérée comme une preuve d’une position dominante, sauf circonstances exceptionnelles. De plus, l’Autorité a noté l’existence de barrières à l’entrée très élevées sur ce marché, ce qui renforce la position de Google. Bien que France-Soir soit actif dans un sous-segment du marché, à savoir l’actualité, la domination de Google sur le moteur de recherche généraliste « Search » lui confère également une position dominante dans ce sous-segment.

Comment se positionne YouTube sur le marché de l’hébergement de vidéos ?

Concernant YouTube, France-Soir a présenté une étude de Similarweb qui classe divers services internet, mais cette étude présente des limitations. Elle ne fournit pas de résultats spécifiques pour la France et ne permet pas de déterminer les parts de marché de YouTube. Bien qu’il soit possible que YouTube soit en position dominante sur le marché de l’hébergement de vidéos, France-Soir n’a pas réussi à prouver cette position. Les juges ont noté que l’hypothèse d’une position dominante est « vraisemblable », mais sans preuves concrètes, il est difficile de conclure à une position dominante de YouTube sur ce marché.

Quelles sont les conclusions concernant le marché de la publicité en ligne ?

L’Autorité de la Concurrence a également examiné le marché de la publicité en ligne liée aux recherches, en particulier le service Ad (ex AdSense) de Google. Dans sa décision du 31 janvier 2019, elle a conclu que Google détenait une position dominante sur ce marché, avec plus de 90% des recherches effectuées via son moteur de recherche. Les barrières à l’entrée sur ce marché sont également considérées comme élevées, ce qui complique l’accès pour de nouveaux entrants. De plus, les annonceurs, en raison de leur nombre limité et de l’absence d’alternatives viables, n’ont pas de pouvoir d’achat suffisant pour contrecarrer la position de Google. Ainsi, la juridiction a retenu que Google est en position dominante sur les marchés de la recherche en ligne et de la publicité en ligne, et il est probable qu’elle soit également dominante sur le marché de l’hébergement de vidéos, bien que cela n’ait pas été prouvé par France-Soir.

Quelles sont les implications de la position dominante de Google ?

Selon la jurisprudence, la détention d’une position dominante n’est pas en soi illégale. Cependant, les entreprises en position dominante ont une responsabilité particulière de ne pas abuser de cette position. Cela signifie qu’elles doivent éviter de porter atteinte à une concurrence non faussée sur leur marché. Dans le cas de France-Soir, l’entreprise a tenté de prouver qu’il y avait un abus de la part de Google en raison de l’édiction unilatérale de ses règles. Cependant, la CJUE a statué qu’une entreprise en position dominante peut protéger ses intérêts commerciaux tant que ses pratiques sont justifiées et raisonnables. Les règles contractuelles de Google ont été jugées justifiées, objectives, raisonnables, claires et transparentes. Par conséquent, il n’a pas été démontré que ces règles constituaient un abus de position dominante.

Quelles sont les caractéristiques des règles contractuelles de Google ?

Les règles contractuelles de Google pour l’utilisation de ses services sont conçues pour répondre à plusieurs critères. Premièrement, elles sont justifiées, car le service Actu de Google se concentre sur l’actualité et vise à fournir des contenus fiables et de haute qualité. Deuxièmement, ces règles sont objectives, car elles stipulent que les actualités sélectionnées doivent répondre à un consensus scientifique, en particulier dans des domaines sensibles comme la santé. Troisièmement, la mesure consistant à écarter les médias qui contredisent les informations scientifiques acceptées est considérée comme raisonnable. Quatrièmement, les règles sont claires et accessibles, permettant aux utilisateurs de comprendre les conditions d’utilisation. Enfin, elles sont transparentes, car il suffit d’un clic sur la page d’accueil pour accéder à ces règles, ce qui respecte les exigences du Règlement de l’UE P to B. En conclusion, les règles de Google n’ont pas été jugées comme abusives ou illégitimes.

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