Évaluation du taux d’incapacité permanente partielle suite à un accident du travail

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Évaluation du taux d’incapacité permanente partielle suite à un accident du travail

L’Essentiel : La société [8] a contesté une décision de la CPAM de l’Allier attribuant un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 13 % à Monsieur [G] [Y] suite à un accident du travail. Malgré la demande de réduction à 6 % de l’employeur, le tribunal a maintenu le taux à 13 %, s’appuyant sur les conclusions du Professeur [D], qui a confirmé le lien entre les séquelles et l’accident. Le recours a été déclaré recevable, et la CPAM a soutenu le maintien du taux, entraînant le rejet de la demande d’expertise médicale et la condamnation de la société aux dépens.

Contexte du litige

La société [8] a contesté une décision de la CPAM de l’Allier datée du 04/11/2021, qui avait attribué un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 13 % à Monsieur [G] [Y] suite à un accident du travail survenu le 23/02/2021. Les séquelles de cet accident incluent une amputation partielle de l’index gauche, des douleurs permanentes et une raideur du 3ème doigt. La Commission Médicale de Recours Amiable (CMRA) a confirmé cette décision le 17/03/2022.

Procédure judiciaire

Le tribunal a convoqué les parties pour une audience le 12/11/2024. La société [8], représentée par Me ROY et Me SARR, a demandé une réduction du taux d’IPP à 6 %, s’appuyant sur un rapport médical qui contestait le lien entre certains symptômes et l’accident. La société [7], utilisatrice, et la CPAM de l’Allier n’ont pas comparu. La CPAM a demandé le rejet de la demande d’expertise médicale, soutenant le maintien du taux de 13 %.

Consultation médicale

Le tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces, confiée au Professeur [V] [D]. Ce dernier a examiné le dossier médical de Monsieur [G] [Y] et a présenté ses constatations. Ses conclusions écrites ont été jointes au jugement.

Recevabilité du recours

Le tribunal a vérifié la recevabilité du recours, qui n’a pas été contestée par la CPAM. L’employeur avait exercé un recours contentieux après le rejet implicite de la CMRA, et le recours a été déclaré recevable.

Évaluation du taux d’incapacité

Le tribunal a examiné l’évaluation du taux d’IPP, avec l’employeur demandant une réduction à 6 % et la CPAM maintenant le taux à 13 %. Le Professeur [D] a noté une amputation de l’index gauche et a proposé de maintenir le taux à 13 %, conforme au barème. Les éléments médicaux ont justifié ce taux, qui a été maintenu à compter de la date de consolidation.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré le recours recevable, a confirmé la décision de la CPAM et a maintenu le taux d’IPP à 13 %. Il a rejeté la demande d’expertise médicale, ordonné l’exécution provisoire de la décision et condamné la société [8] aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité du recours formé par la société [8] ?

La recevabilité du recours est confirmée par le tribunal, qui souligne qu’il appartient au juge de vérifier d’office cette recevabilité.

En vertu de l’article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC), l’exercice d’un recours administratif préalable est une condition nécessaire pour le recours contentieux.

L’article L142-4 du Code de la Sécurité Sociale précise que ce dernier s’applique aux litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accidents du travail ou de maladies professionnelles.

Dans cette affaire, l’employeur a contesté la décision de la CPAM devant la Commission Médicale de Recours Amiable (CMRA), qui a confirmé la décision de la caisse.

Le recours a été exercé le 28/04/2022, après le rejet implicite de la CMRA, et a été maintenu après la décision explicite de celle-ci.

Ainsi, le tribunal déclare le recours recevable, car toutes les conditions légales ont été respectées.

Comment le tribunal évalue-t-il le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) ?

L’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle (IPP) est régie par l’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale.

Cet article stipule que le taux d’incapacité permanente est déterminé en fonction de plusieurs critères, notamment la nature de l’infirmité, l’état général de la victime, son âge, ainsi que ses facultés physiques et mentales.

Le barème indicatif d’invalidité est également pris en compte pour établir ce taux.

Dans le cas présent, le Professeur [V] [D], médecin consultant, a noté une amputation de la dernière phalange de l’index gauche, pour laquelle le barème prévoit un taux de 7 %.

Cependant, il a également mentionné l’ambidextrie professionnelle de l’assuré, qui était ébéniste, et a relevé des éléments tels qu’une hypersensibilité aux chocs et une perte de force de la main.

Ces éléments médicaux ont conduit le médecin consultant à proposer de maintenir le taux d’IPP à 13 %, conforme au barème.

Le tribunal a donc jugé que les séquelles étaient en rapport avec l’accident de travail et justifiaient le maintien du taux à 13 % à compter de la date de consolidation.

Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal concernant l’expertise médicale ?

Le tribunal a décidé de rejeter la demande d’expertise médicale formulée par la société [8].

Cette décision est fondée sur le fait que le tribunal disposait déjà de suffisamment d’éléments pour statuer sur l’affaire, notamment les rapports médicaux et les constatations du médecin consultant.

L’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale, introduit par la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019, précise que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie.

Ainsi, le tribunal a également rappelé cette disposition dans son jugement, soulignant que les frais liés à la consultation médicale effectuée durant l’audience seraient pris en charge par la CPAM.

En conséquence, la demande d’expertise médicale a été rejetée, et le tribunal a ordonné l’exécution provisoire de la décision, compte tenu de l’ancienneté du litige.

Cela signifie que la décision est immédiatement applicable, même si un appel est interjeté.

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL

Jugement du 20 Janvier 2025

Minute n° :
Audience du : 12 novembre 2024
Salarié : M. [G] [Y]

Requête n° : N° RG 22/00902 – N° Portalis DB2H-W-B7G-W2AN

PARTIES EN CAUSE

partie demanderesse

Société [8]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Me Hervé ROY, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Fatou SARR, avocate au barreau de LYON

partie défenderesse

CPAM DE L’ALLIER
[Adresse 6]
[Localité 1]

non comparante, ni représentée

partie intervenante

S.A.R.L. [7]
[Adresse 4]
[Localité 2]

non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Lydie REINBOLD
Assesseur collège salarié : Fouzia MOHAMED ROKBI

Assistés lors des débats et du délibéré de : Anne DESHAYES, Greffière

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

Société [8]
Me Hervé ROY ([Localité 9])
CPAM DE L’ALLIER
S.A.R.L. [7]
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSÉ DU LITIGE

Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 28/04/2022, la société [8] a formé un recours à l’encontre d’une décision de la CPAM de l’Allier du 04/11/2021 confirmée implicitement par la Commission Médicale de Recours Amiable et qui attribue un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 13% au profit de Monsieur [G] [Y] à compter de la date de consolidation fixée le 30/10/2021, en raison d’un accident du travail du 23/02/2021, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante :  » Amputation partielle de l’index gauche, douleur permanente, raideur du 3ème doigt « .

La CMRA a rendu une décision explicite le 17/03/2022 notifiée le 29/04/2022.

Le greffe de cette juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 12/11/2024.

À cette date, en audience publique :

– la société [8] représentée par Me ROY substitué par Me SARR conclut oralement à la diminution du taux d’IPP médical à 6 %. Elle se fonde sur le rapport du docteur [S] qui note que les symptômes pour les doigts 3 et 4 sont sans lien avec la description du certificat médical initial, et donc non imputables.

A titre subsidiaire, la société requérante sollicite une expertise judiciaire.

– la société [7], société utilisatrice, n’a pas comparu, ni sollicité de dispense.

– la CPAM de l’Allier était non comparante et ne demandait pas de dispense de comparution. Elle sollicitait par mail du 30/05/2022 le rejet de la demande d’expertise médicale compte tenu de l’avis de la CMRA qui confirmait le taux de 13 %.

En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces confiée au Professeur [V] [D], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.

A l’issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [G] [Y] a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales.

Les conclusions écrites du médecin consultant du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.

Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 20/01/2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité du recours

La recevabilité du recours n’est pas discutée par la caisse.

Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d’office, l’exercice d’un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l’article 125 du NCPC et de l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2019.
En l’espèce, l’employeur a contesté la décision de la CPAM devant la CMRA laquelle a confirmé la décision de la caisse par décision le 17/03/2022 notifiée le 29/04/2022. Il a exercé un recours contentieux le 28/04/2022 après le rejet implicite de la CMRA et a maintenu son recours après la décision explicite de la CMRA.
Le recours est déclaré recevable.

Sur l’évaluation du taux médical d’IPP

La juridiction saisie du recours, doit vérifier l’application du barème et des dispositions de l’article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale, l’employeur soutenant une réduction du taux notifié à 6 % et la CPAM le maintien du taux de 13 %.

En application de l’article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.

En l’espèce, le Professeur [V] [D], médecin consultant, note une amputation de la dernière phalange de l’index gauche. Il rappelle que le barème prévoit un taux de 7 % pour une amputation. Il mentionne également l’ambidextrie professionnelle pour les métiers du bois (l’assuré était ébéniste au moment de son accident de travail).

D’après l’examen clinique réalisé par le médecin conseil, le médecin consultant relève une hypersensibilité aux chocs et une perte de force de la main.

Compte tenu de ces éléments, le Professeur [D] propose de maintenir le taux de 13 %, conforme au barème.

Ainsi en l’état des éléments médicaux objectifs, spécialement ceux retenus lors de l’examen clinique et figurant dans le rapport du médecin conseil de la caisse, dans l’avis du médecin désigné par l’employeur et dans le rapport de l’expert consulté par la juridiction, les séquelles qualifiées dans la décision attaquée et en rapport avec l’accident de travail justifient un taux médical de 13 % à compter de la date de consolidation, en application du barème indicatif et des dispositions de l’article L 434-2 du Code la Sécurité Sociale.

En conséquence le tribunal considère qu’il dispose de suffisamment d’éléments pour déclarer que le taux d’incapacité permanente partielle opposable à l’employeur doit être maintenu à 13 %.

La demande d’expertise médicale sera rejetée, le tribunal disposant de suffisamment d’éléments pour statuer.

Il convient par ailleurs d’ordonner l’exécution provisoire compte tenu de l’ancienneté du litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire en premier ressort,

– DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par la société [8].

– DECLARE le présent jugement opposable à la société utilisatrice [7].

– CONFIRME la décision de la CPAM de l’Allier du 04/11/2021 confirmée par la Commission Médicale de Recours Amiable le 17/03/2022 et MAINTIENT à 13 % le taux opposable à l’employeur au titre de l’incapacité permanente partielle de Monsieur [G] [Y] à compter de la date de consolidation fixée le 30/10/2021, en raison de son accident du travail du 23/02/2021.

– REJETTE toute autre demande.

– RAPPELLE, en application de l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l’article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie.

– ORDONNE l’exécution provisoire de la décision.

– CONDAMNE la société [8] aux dépens exposés à compter du 1er janvier 2019.

Jugement rendu par mise à la disposition au greffe le 20 janvier 2025 dont la minute a été signée par la présidente et par la greffière.

La Greffière La Présidente


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