Évaluation du taux d’incapacité et contestation des critères médicaux

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Évaluation du taux d’incapacité et contestation des critères médicaux

L’Essentiel : Monsieur [Z] [Y] a contesté, par lettre recommandée du 15 septembre 2023, une décision de la Commission Médicale de Recours Amiable, confirmant un taux d’incapacité permanente partielle de 6% suite à une maladie professionnelle. Lors de l’audience du 26 septembre 2024, il a soutenu que ce taux ne reflétait pas l’ampleur de ses séquelles, plaidant pour un taux de 7%. La CPAM a défendu le taux initial, affirmant sa conformité au barème. Après consultation médicale, le tribunal a jugé que le taux de 8% était plus approprié, réformant ainsi la décision de la CPAM.

Contexte du litige

Monsieur [Z] [Y] a contesté, par une lettre recommandée en date du 15 septembre 2023, une décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable. Cette décision confirmait celle de la CPAM du Rhône du 16 janvier 2023, qui avait fixé à 6% le taux d’incapacité permanente partielle suite à une maladie professionnelle survenue le 31 décembre 2019. Les séquelles de cette maladie, décrites par le médecin conseil, incluent une légère limitation de la mobilité de l’épaule gauche, un manque de force et des douleurs à l’effort.

Audience et arguments des parties

Lors de l’audience publique du 26 septembre 2024, Monsieur [Z] [Y] était présent avec un juriste. Il a contesté le taux de 6% en arguant qu’il ne reflétait pas correctement l’ampleur de ses séquelles, soutenant qu’un taux de 7% aurait été plus approprié. Il a également mentionné une perte de force significative et des douleurs persistantes. La CPAM du Rhône, représentée par Monsieur [G], a défendu le taux de 6% en affirmant qu’il était conforme au barème et que la douleur n’était pas nécessairement liée à la maladie professionnelle.

Consultation médicale et conclusions

Le tribunal a ordonné une consultation médicale, réalisée par le Docteur [X] [A], qui a examiné le dossier médical de Monsieur [Z] [Y]. Le médecin consultant a constaté une limitation légère des mouvements de l’épaule gauche et a proposé un taux d’incapacité permanente partielle de 7%, avec un ajout de 1% pour l’atteinte bilatérale des épaules. Après délibération, le tribunal a jugé que le taux de 8% était une évaluation plus juste des séquelles.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré le recours de Monsieur [Z] [Y] recevable et a réformé la décision de la CPAM du Rhône, fixant le taux d’incapacité permanente partielle à 8%. Il a ordonné l’exécution provisoire de cette décision, précisé que les frais de consultation médicale seraient à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie, et a condamné la CPAM du Rhône aux dépens. Le jugement a été rendu public et mis à disposition au greffe.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité du recours

La recevabilité du recours est régie par l’article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) et l’article L142-4 du Code de la Sécurité Sociale.

L’article 125 du NCPC stipule que :

« Le recours contentieux ne peut être formé qu’après l’exercice d’un recours administratif préalable, lorsque la loi l’exige. »

De plus, l’article L142-4 du Code de la Sécurité Sociale précise que :

« Les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accidents du travail ou de maladies professionnelles sont soumis à la procédure de recours amiable préalable. »

Dans le cas présent, Monsieur [Z] [Y] a exercé un recours préalable devant la Commission Médicale de Recours Amiable le 15/03/2023, qui a été rejeté par décision implicite.

Il a ensuite formé un recours contentieux le 15/09/2023.

Ainsi, le tribunal a constaté que le recours était recevable, car toutes les conditions légales étaient remplies.

Sur l’évaluation du taux médical

L’évaluation du taux médical est encadrée par l’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale, qui dispose que :

« Le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. »

Dans cette affaire, le médecin consultant a examiné Monsieur [Z] [Y] et a constaté une limitation légère de la plupart des mouvements de l’épaule gauche.

Il a noté que la rotation externe et interne étaient légèrement diminuées, mais qu’il n’y avait pas d’amyotrophie.

En se basant sur ces éléments, le médecin consultant a proposé un taux d’IPP de 7%, mais a également pris en compte l’atteinte bilatérale des épaules, ce qui a conduit à une proposition de 8%.

Le tribunal a donc conclu que le taux médical de 8% était conforme au barème indicatif, et a réformé la décision de la CPAM en conséquence.

Cette décision est en accord avec les dispositions légales et les constatations médicales effectuées.

Sur l’exécution provisoire

L’exécution provisoire est prévue par l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale, qui stipule que :

« Les décisions de justice relatives aux litiges en matière de sécurité sociale peuvent être exécutées provisoirement. »

Dans le jugement rendu, le tribunal a ordonné l’exécution provisoire en raison de l’ancienneté du litige.

Cette mesure vise à garantir que les droits de Monsieur [Z] [Y] soient respectés sans délai, en attendant que la décision soit définitive.

L’exécution provisoire permet ainsi d’assurer une protection effective des droits des assurés sociaux, conformément aux objectifs de la législation en matière de sécurité sociale.

Sur les frais de consultation médicale

L’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale, introduit par la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019, précise que :

« Les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie. »

Dans cette affaire, le tribunal a rappelé que la CPAM du Rhône devait prendre en charge les frais de la consultation médicale ordonnée.

Cette disposition vise à garantir que les assurés ne soient pas pénalisés financièrement pour l’exercice de leurs droits, en assurant que les coûts liés aux expertises médicales soient couverts par l’organisme de sécurité sociale concerné.

Ainsi, la CPAM a été condamnée aux entiers dépens à compter du 01/01/2019, conformément à la législation en vigueur.

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL

Jugement du 26 Novembre 2024

Minute n° :
Audience du : 26 septembre 2024

Requête n° : N° RG 23/03012 – N° Portalis DB2H-W-B7H-YVCV

PARTIES EN CAUSE

partie demanderesse

Monsieur [Z] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 2]

assisté de Monsieur [E] [C], juriste de la [5]

partie défenderesse

CPAM DU RHONE
Service Contentieux Général
[Localité 3]

représentée par Monsieur [G], audiencier muni d’un pouvoir

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Caroline LAMANDE
Assesseur collège salarié : Bruno MARCHE

Assistés lors des débats et du délibéré de : Maéva GIANNONE, Greffière

Notification le :
Une copie certifiée conforme à :

[Z] [Y]
CPAM DU RHONE
Une copie certifiée conforme au dossier

EXPOSÉ DU LITIGE

Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15/09/2023, Monsieur [Z] [Y] a formé un recours à l’encontre d’une décision implicite de rejet de la Commission Médicale de Recours Amiable confirmant la décision notifiée de la CPAM du RHONE du 16/01/2023, et qui a fixé à 6% le taux d’incapacité permanente partielle suite à une maladie professionnelle MP57A du 31/12/2019 consolidée le 06/01/2023, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante par le médecin conseil : « séquelles d’une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche traitée chirurgicalement, chez un droitier boulanger de 57 ans, consistant principalement en une légère limitation de la mobilité, un manque de force du membre supérieur gauche et des douleurs à l’effort ».

Le greffe de la juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 26/09/2024.

À cette date, en audience publique :

– Monsieur [Z] [Y] était présent assisté de Monsieur [E], juriste de la [4]. Il a fait valoir que sa situation n’avait pas été exactement évaluée et conteste le taux médical de 6% qui lui a été attribué qui est à son sens insuffisant au regard des séquelles qu’il présente. Il argue que le barème prévoit un taux compris entre 8% et 10% pour une limitation légère de tous les mouvements de l’épaule non dominante. Il soutient qu’un taux a minima de 7% aurait dû être attribué en comparaison du taux de 9% attribué pour l’épaule droite. Il expose avoir une perte anormale de force, avec d’importantes douleurs, un lourd traitement médicamenteux.

– La CPAM du RHONE était comparante et représentée par Monsieur [G]. Elle sollicite la confirmation du taux médical qui est conforme au barème. La caisse expose également que la douleur n’est pas nécessairement rattachable à la maladie professionnelle.

En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale confiée au Docteur [X] [A], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.

A l’issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [Z] [Y], a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales, dont les parties ont pu discuter.

Les conclusions écrites du médecin consultant auprès du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.

Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 26/11/2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

– Sur la recevabilité du recours

La recevabilité du recours n’est pas discutée par la caisse. Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d’office, l’exercice d’un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l’article 125 du NCPC et de l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2020.

En l’espèce Monsieur [Z] [Y] justifie avoir exercé un recours préalable devant la commission médicale de recours amiable le 15/03/2023, qui a été rejeté par décision implicite. Il a formé un recours contentieux le 15/09/2023.

Le recours est déclaré recevable.

Sur l’évaluation du taux médical

La juridiction saisie du recours, doit vérifier l’application du barème et des dispositions de l’article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale.

En application de l’article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.

En l’espèce, le Docteur [X] [A], médecin consultant, relève d’après l’examen clinique réalisé par le médecin conseil, une limitation légère de la plupart des mouvements. La rotation externe est légèrement diminuée à gauche, rotation interne un peu diminuée avec atteinte de L1 en manœuvre main-lombes à gauche. La rétropulsion est de 40° bilatérale. Il n’observe pas d’amyotrophie, les mouvements complexes ne sont pas mentionnés, considérés donc comme réalisés.

Compte tenu de ces éléments, le médecin consultant propose d’appliquer un taux d’IPP de 7%, plus conforme au barème, auquel il ajoute un taux de 1% compte tenu de l’atteinte bilatérale de l’épaule droite et l’épaule gauche.

Il ressort ainsi des observations et constatations du médecin consultant, des pièces fournies, du rapport du médecin-conseil et des débats à l’audience de ce jour, que le taux médical de 8% correspond à une plus juste évaluation des séquelles de l’assuré à la date de consolidation, conformément au barème indicatif.

En conséquence, il convient de réformer la décision contestée et d’attribuer un taux médical de 8% à Monsieur [Z] [Y].

Il convient par ailleurs d’ordonner l’exécution provisoire vu l’ancienneté du litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort,

– DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par Monsieur [Z] [Y] ;

– REFORME la décision notifiée par la CPAM du RHONE le 16/01/2023 confirmée par la décision implicite de la Commission Médicale de Recours Amiable et FIXE à 8% le taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [Z] [Y] en raison de la maladie professionnelle du 31/12/2019 consolidée le 06/01/2023;

– ORDONNE l’exécution provisoire ;

– RAPPELLE, en application de l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l’article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie ;

– CONDAMNE la CPAM du Rhône aux entiers dépens à compter du 01/01/2019.

Jugement rendu par mise à la disposition au greffe dont la minute a été signée par la présidente et la greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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