Évaluation de la légalité de la rétention administrative face aux droits individuels et à l’ordre public.

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Évaluation de la légalité de la rétention administrative face aux droits individuels et à l’ordre public.

L’Essentiel : L’audience publique a été convoquée pour rappeler à la personne retenue ses droits selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers. Le juge a examiné la légalité de la rétention, la déclarant recevable et régulière. Pour une troisième prolongation, certaines conditions doivent être remplies, notamment des obstructions à l’éloignement. L’administration a justifié la prolongation par une menace à l’ordre public, en tenant compte des antécédents de M. [C] [H], condamné pour apologie d’actes de terrorisme. Le juge a ordonné une prolongation de quinze jours, avec possibilité d’appel dans les 24 heures.

Contexte de l’audience

En présence de Monsieur [A] [B], interprète assermenté pour la langue arabe, l’audience publique a été convoquée pour rappeler à la personne retenue ses droits selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Les avocats de la personne retenue et du Préfet de l’Essonne ont été entendus, ainsi que M. [C] [H].

Examen de la légalité de la rétention

Le juge, en tant que gardien de la liberté individuelle, a examiné la légalité de la rétention. La procédure a été jugée recevable et régulière, et aucune irrégularité antérieure à l’audience n’a pu être soulevée concernant la prolongation de la rétention.

Conditions de prolongation de la rétention

Selon l’article L. 742-5, le magistrat peut être saisi pour une troisième prolongation de la rétention si certaines conditions sont remplies. Ces conditions incluent des obstructions à l’éloignement, des demandes d’asile, ou des situations d’urgence. Il a été précisé que ces conditions ne sont pas cumulatives.

Menace à l’ordre public

L’administration a invoqué une menace à l’ordre public pour justifier la demande de prolongation. Cette menace doit être appréciée en fonction des faits allégués, de leur gravité et de leur actualité. La commission d’infractions pénales ne suffit pas à établir une menace pour l’ordre public.

Comportement de M. [C] [H]

M. [C] [H] a été condamné à 12 mois d’emprisonnement pour apologie d’actes de terrorisme et menaces de mort, entraînant une interdiction du territoire français pour 5 ans. Ces éléments ont été considérés comme justifiant la prolongation de la rétention en raison de la dangerosité de l’intéressé.

Procédures administratives en cours

Les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies, et des relances ont été effectuées pour faciliter l’éloignement de M. [C] [H]. La prolongation de la rétention vise à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement.

Décision du juge

Le juge a déclaré la requête recevable et a ordonné une troisième prolongation de la rétention de M. [C] [H] pour une durée de quinze jours, à compter du 30 décembre 2024, dans un centre de rétention administrative.

Voies de recours

L’ordonnance est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris dans les 24 heures suivant sa notification. Pendant la rétention, la personne retenue peut demander l’assistance d’un interprète, d’un avocat, et communiquer avec son consulat.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de légalité de la rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?

La légalité de la rétention administrative est encadrée par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Selon l’article L. 743-11, à peine d’irrecevabilité, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la troisième prolongation.

Cela signifie que les questions de légalité doivent être examinées dans le cadre des audiences appropriées, et que les irrégularités antérieures ne peuvent pas être invoquées à ce stade.

De plus, l’article L. 742-5 précise que le magistrat peut être saisi pour une troisième prolongation de la rétention dans des cas spécifiques, tels que l’obstruction à l’exécution de la mesure d’éloignement ou des demandes d’asile présentées dans le but de faire échec à cette mesure.

Ces conditions ne sont pas cumulatives, ce qui permet une certaine flexibilité dans l’appréciation des situations individuelles.

Comment le juge apprécie-t-il la menace à l’ordre public dans le cadre de la rétention administrative ?

L’appréciation de la menace à l’ordre public est un élément crucial dans la décision de prolongation de la rétention administrative.

Selon la jurisprudence, cette appréciation doit être faite in concreto, c’est-à-dire en tenant compte d’un ensemble d’éléments qui font ressortir la réalité des faits allégués, leur gravité, leur récurrence ou leur réitération, ainsi que l’actualité de la menace que constitue le comportement de l’étranger pour l’ordre public.

Il est important de noter que la commission d’une infraction pénale, à elle seule, ne suffit pas à établir que le comportement de l’intéressé constitue une menace pour l’ordre public.

La jurisprudence (CE 16 mars 2005 n° 269313, CE 12 février 2014 n° 365644) souligne que l’appréciation doit également prendre en compte les risques objectifs que l’étranger en situation irrégulière fait peser sur l’ordre public (CE 7 mai 2015 n° 389959).

Quels sont les droits de la personne retenue pendant la rétention administrative ?

La personne retenue bénéficie de plusieurs droits pendant la durée de sa rétention administrative, conformément aux dispositions du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Elle a le droit de demander l’assistance d’un interprète, d’un avocat, ainsi que d’un médecin.

De plus, elle peut communiquer avec son consulat ou toute personne de son choix.

Ces droits sont essentiels pour garantir que la personne retenue puisse faire valoir ses droits et obtenir l’assistance nécessaire.

En outre, le retenu a le droit de contacter toute organisation et instance nationale, internationale ou non gouvernementale compétente pour visiter les lieux de rétention.

Cela inclut des organismes tels que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et le Défenseur des droits, qui sont là pour veiller au respect des droits des personnes retenues.

Quelles sont les voies de recours contre la décision de prolongation de la rétention administrative ?

La décision de prolongation de la rétention administrative est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris.

Selon les dispositions applicables, l’appel doit être formé dans les 24 heures suivant la notification de la décision.

Il est important de noter que le délai d’appel est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant si l’expiration du délai tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié.

L’appel doit être formulé par une déclaration écrite motivée, transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de Paris, notamment par télécopie ou par courriel.

Il est également précisé que cet appel n’est pas suspensif, ce qui signifie que la décision de prolongation de la rétention reste en vigueur pendant la durée de l’appel.

Annexe TJ Meaux – (rétentions administratives)
N° RG 24/03548 Page
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
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CONTENTIEUX DE LA RETENTION ADMINISTRATIVE
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[Adresse 16]

Ordonnance statuant sur la troisième prolongation
d’une mesure de rétention administrative

Ordonnance du 31 Décembre 2024
Dossier N° RG 24/03548

Nous, Claire ESCARAVAGE-CHARIAU, magistrat du siège au tribunal judiciaire de Meaux, assisté de Anastasia CALIXTE, greffier ;

Vu les articles L 742-2, L 742-5, R 741-1, R 741-2, R 742-1 à R 743-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu le jugement rendu le 20 mars 2024 par la chambre 2 – pôle 2 de la Cour d’appel de PARIS prononçant à l’encontre de M. [C] [H] une interdiction du territoire français pour une durée de 5 ans, à titre de peine complémentaire ;

Vu la décision de placement en rétention administrative prise le 24 octobre 2024 par le PRÉFET DE L’ESSONNE à l’encontre de M. [C] [H], notifiée à l’intéressé le 31 octobre 2024 à 11h27 ;

Vu l’ordonnance rendue le 1er décembre 2024 par le magistrat du siège de MEAUX prolongeant la rétention administrative de M. [C] [H] pour une durée de trente jours à compter du 30 novembre 2024 ;

Vu la requête du PRÉFET DE L’ESSONNE datée du 30 décembre 2024, reçue et enregistrée le 30 décembre 2024 à 15h24 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation pour une durée de quinze jours supplémentaires, à compter du 30 décembre 2024, la rétention administrative de :

Monsieur [C] [H], né le 20 Mai 2005 à [Localité 19](TUNISIE), de nationalité Tunisienne

Vu l’extrait individualisé du registre prévu par l’article L. 744-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

En l’absence du procureur de la République régulièrement avisé par le greffier, dès réception de la requête, de la date, de l’heure, du lieu et de l’objet de la présente audience ;

En présence de Monsieur [A] [B], interprète inscrit sur la liste établie par la cour d’appel de PARIS, assermenté pour la langue arabe déclarée comprise par la personne retenue à l’inverse du français ;

Après avoir, en audience publique, rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, puis entendu en leurs observations, moyens et arguments :
– Me Eugénie DUBOIS-TOUBE, avocat de permanence au barreau de Meaux désigné d’office à la demande de la personne retenue pour l’assister ;

– Me Isabelle ZERAD ( Cabinet Centaure), avocat représentant le PRÉFET DE L’ESSONNE ;
– M. [C] [H];

Annexe TJ Meaux – (rétentions administratives)
N° RG 24/03548 Page

MOTIFS DE LA DÉCISIO

Attendu qu’indépendamment de tout recours contre la décision de placement, le juge doit se prononcer en tant que gardien de la liberté individuelle sur la légalité de la rétention;

Attendu qu’après examen des éléments du dossier tels que complétés ou éclairés à l’audience contradictoirement, la procédure contrôlée est recevable et régulière ;

Attendu que selon l’article L. 743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, à peine d’irrecevabilité, prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la troisième prolongation ;

Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces jointes à la requête et des mentions figurant au registre prévu à l’article L. 744-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que la personne retenue, pleinement informée de ses droits lors la notification de son placement, n’a cessé d’être placée en état de les faire valoir depuis de son arrivée au lieu de rétention ;

Attendu qu’en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, c’est au juge administratif qu’il revient d’apprécier la légalité et l’opportunité, ou la nécessité, pour l’administration d’éloigner de France un étranger et de le placer à cette fin en rétention, y compris lorsque celui-ci invoque une situation personnelle ou familiale présentée comme incompatible avec son départ en regard de dispositions légales ou conventionnelles ;

Attendu qu’aux termes de l’article L. 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile le magistrat du siège et de la détention peut à titre exceptionnel être à nouveau saisi pour une troisième prolongation de quinze jours de la rétention lorsque dans les quinze derniers jours, l’étranger, soit a fait obstruction à l’exécution d’office de la mesure d’éloignement, soit a présenté dans le seul but de faire échec à la mesure d’éloignement, une demande d’asile, ou une demande visant à voir constater que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et qu’il ne pourra bénéficier de soins appropriés dans son pays de renvoi, ou encore si la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai ; le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public;

Attendu que ces conditions ne sont pas cumulatives ;

Attendu que s’agissant de la menace à l’ordre public invoquée par l’administration pour fonder sa demande en troisième prolongation exceptionnelle, cette qualification doit faire l’objet d’une appréciation in concreto tirée d’un ensemble d’éléments faisant ressortir la réalité des faits allégués, leur gravité, leur récurrence ou leur réitération ainsi que l’actualité de la menace que constitue le comportement personnel de l’étranger pour l’ordre public ;

Attendu que si la commission d’une infraction pénale n’est pas de nature à elle seule à établir que le comportement de l’intéressé présenterait une menace pour l’ordre public (CE 16 mars 2005 n° 269313, CE 12 février 2014 n° 365644) et que l’appréciation de la menace doit prendre en considération les risques objectifs que l’étranger en situation irrégulière fait peser sur l’ordre public (CE 7 mai 2015 n° 389959), il résulte en l’espèce des pièces de la procédure que M. [C] [H] a fait l’objet d’une condamnation à 12 mois d’emprisonnement par le tribunal correctionnel de Paris le 1er décembre 2023 (confirmée par la cour d’appel de Paris le 20 mars 2024) pour des faits de apologie publique d’un acte de terrorisme et menace de mort réitérée commise en raison de la race, l’ethnie, la nation ou la réligion et port sans motif légitime d’arme blanche ou incapacitante de catégorie Det à une peine d’interdiction du territoire français pour une durée de 5 ans à titre de peine complémentaire ainsi que l’interdiction de détenir ou porter une arme pour une durée de 5 ans ;

Qu’ainsi la réalité, la gravité et l’actualité de la menace que constitue le comportement personnel de l’étranger pour l’ordre public sont caractérisées d’autant que les infractions commises constituent tant une atteinte fondamentale aux droits de la personne qu’une atteinte à l’Etat, la Nation et la paix publique et interrogent par ailleurs sur la dangerosité de l’intéressé ; que ces éléments justifient que la requête préfectorale en troisième prolongation de la rétention administrative soit accueillie ;

Qu’il convient de préciser par ailleurs que les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies le 10 juin 2024 et la DGEF (Direction Générale des Etrangers en France) le 3 octobre 2024 que des relances ont été opérées respectivement les 19 novembre 2024 et 19 décembre 2024 ;

Attendu que la troisième prolongation de la rétention étant de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement, il convient, par conséquent, de faire droit à la requête et de prolonger la rétention de la personne retenue ;

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS la requête recevable et la procédure régulière ;

ORDONNONS une troisième prolongation de la rétention de M. [C] [H], au centre de rétention administrative n° 3 du [Localité 18] (77) ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire, pour une durée de quinze jours à compter du 30 décembre 2024 ;

Prononcé publiquement au palais de justice du Mesnil-Amelot, le 31 Décembre 2024 à  10h 31

Le greffier, Le juge,

qui ont signé l’original de l’ordonnance.

Pour information :

– La présente ordonnance est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris dans les 24 heures de sa notification. Le délai d’appel qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant. Le premier président est saisi par une déclaration écrite motivée, transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de Paris (Service des étrangers – Pôle 1 Chambre 11), notamment par télécopie au 01.44.32.78.05 ou par courriel à l’adresse mail [Courriel 17] . Cet appel n’est pas suspensif. L’intéressé est maintenu à disposition de la justice jusqu’à l’audience qui se tiendra à la cour d’appel.
– Pendant toute la durée de sa rétention, le retenu peut demander l’assistance d’un interprète, d’un avocat ainsi que d’un médecin, et communiquer avec son consulat ou toute personne de votre choix.
– Le retenu bénéficie également du droit de contacter toute organisation et instance nationale, internationale ou non gouvernementale compétente pour visiter les lieux de rétention, notamment :
• le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ([Adresse 11] ; www.cglpl.fr ; tél. : [XXXXXXXX04] ; fax : [XXXXXXXX02]) ;
• le Défenseur des droits ([Adresse 14] ; tél. : [XXXXXXXX07]) ;
• France Terre d’Asile ([Adresse 12] ; tél. : [XXXXXXXX03]) ;
• Forum Réfugiés Cosi ([Adresse 13] ; tél. : [XXXXXXXX06]) ;
• Médecins sans frontières – MSF ([Adresse 15] ; tél. : [XXXXXXXX01]).
– La CIMADE, association indépendante de l’administration présente dans chacun des centres de rétention du Mesnil-Amelot (Tél. CIMADE CRA2 : [XXXXXXXX09] / [XXXXXXXX010] – Tél. CIMADE CRA 3 : [XXXXXXXX08] / [XXXXXXXX05]), est à la disposition des retenus, sans formalité, pour les aider dans l’exercice effectif de leurs droits, aux heures d’accueil précisées par le règlement intérieur.
– Chaque retenu est en droit de demander, à tout moment, qu’il soit mis fin à sa rétention par simple requête, motivée et signée, adressée au magistrat du siège par tout moyen, accompagnée de toutes les pièces justificatives.

Reçu, le 31 décembre 2024, dans une langue comprise, notification orale des motifs et du dispositif de la présente ordonnance, avec remise d’une copie intégrale, information des voies de recours et de leurs incidences, ainsi que rappel des droits pouvant être exercés pendant le maintien en rétention.
La personne retenue, L’interprète ayant prêté son concours

Reçu copie intégrale de la présente ordonnance le 31 décembre 2024.
L’avocat du PRÉFET DE L’ESSONNE,

Reçu copie intégrale de la présente ordonnance le 31 décembre 2024.
L’avocat de la personne retenue,


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