Évaluation du taux d’incapacité et impact professionnel : enjeux de la reconnaissance des séquelles médicales.

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Évaluation du taux d’incapacité et impact professionnel : enjeux de la reconnaissance des séquelles médicales.

L’Essentiel : Monsieur [O] [G] a reçu le 8 juin 2020 une notification de la CPAM lui attribuant un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 12 %. Après un recours rejeté par la Commission Médicale de Recours Amiable, il a porté l’affaire devant le pôle social. Lors de l’audience du 12 décembre 2023, le Dr [E] a évalué son taux d’IPP à 15 %. Le tribunal a finalement reconnu un taux d’IP de 15 % pour Monsieur [G], infirmant la décision de la CPAM, qui a été condamnée aux dépens et à verser 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Notification du Taux d’Incapacité

Monsieur [O] [G] a reçu le 8 juin 2020 une notification de la CPAM de Loire-Atlantique, lui attribuant un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 12 % à compter du 19 novembre 2019, en lien avec une maladie professionnelle survenue le 5 novembre 2016.

Recours et Rejet

Le 21 juillet 2020, Monsieur [G] a saisi la Commission Médicale de Recours Amiable, qui a rejeté son recours le 15 octobre 2020. Par la suite, il a porté l’affaire devant le pôle social le 15 décembre 2020.

Audience et Examen Médical

Les parties ont été convoquées à une audience le 12 décembre 2023, où le Dr [E], médecin consultant, a été désigné pour examiner Monsieur [G] et évaluer son taux d’incapacité. L’affaire a été retenue pour une audience ultérieure prévue le 12 novembre 2024.

Demandes de Monsieur [G]

Monsieur [G] demande l’annulation des décisions de la CPAM et de la CMRA, la reconnaissance d’un taux d’IPP supérieur à 20 %, la fixation d’un taux professionnel de 7 %, et, subsidiairement, une expertise médico-légale. Il réclame également 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et souhaite que la CPAM soit déboutée de toutes ses demandes.

Arguments de Monsieur [G]

Il soutient que sa déficience modérée impacte ses activités quotidiennes et sa vie professionnelle. Lors de l’examen du 12 décembre 2023, le Dr [E] a évalué son taux d’IPP à 15 %. Monsieur [G] évoque des facteurs aggravants, tels que son âge et d’autres pathologies, justifiant un taux de 20 %.

Position de la CPAM

La CPAM demande la confirmation de la décision de la CMRA, arguant que le taux de 12 % n’est pas sous-évalué. Elle souligne que l’inaptitude professionnelle de Monsieur [G] n’est pas directement liée à sa maladie, étant donné le délai écoulé depuis la fixation du taux d’IPP.

Motifs de la Décision

Le tribunal a examiné les éléments médicaux et a conclu que le taux d’IPP de 12 % ne correspondait pas aux séquelles constatées. Il a donc attribué à Monsieur [G] un taux d’incapacité de 15 %. Concernant le taux professionnel, le tribunal a estimé que l’inaptitude n’était pas imputable à la maladie professionnelle.

Condamnation de la CPAM

La CPAM a été condamnée aux dépens et à verser à Monsieur [G] 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Les frais de consultation médicale ont également été pris en charge par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie.

Conclusion du Tribunal

Le tribunal a infirmé la décision de la CPAM, reconnu un taux d’IP de 15 % pour Monsieur [G], et a statué sur les frais et dépens, tout en rappelant aux parties leur droit d’appel dans un délai d’un mois.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la méthode de détermination du taux d’incapacité permanente partielle (IPP) selon le Code de la Sécurité sociale ?

L’article L.434-2 alinéa 1 du Code de la Sécurité sociale précise que le taux d’incapacité permanente est déterminé en fonction de plusieurs critères.

Ces critères incluent la nature de l’infirmité, l’état général de la victime, son âge, ainsi que ses facultés physiques et mentales.

Il est également tenu compte des aptitudes et de la qualification professionnelle de la victime, le tout étant évalué selon un barème indicatif d’invalidité.

Ainsi, pour Monsieur [G], le taux d’IPP a été fixé à 12 % par la CPAM, mais le tribunal a finalement retenu un taux de 15 % après avoir examiné les éléments médicaux et les circonstances de son état de santé.

Quelles sont les implications de l’inaptitude professionnelle sur le taux d’incapacité permanente partielle ?

Le taux d’incapacité permanente partielle peut compenser en partie une perte de salaire liée aux conséquences d’un accident du travail.

Dans le cas de Monsieur [G], il a été déclaré inapte à son poste de coffreur par le médecin du travail le 4 juillet 2022, et a été licencié pour inaptitude le 1er décembre 2022.

Cependant, le tribunal a noté qu’un délai de près de trois ans s’était écoulé depuis la date de consolidation de son état de santé, ce qui rendait difficile d’établir un lien direct entre son inaptitude et la maladie professionnelle.

Ainsi, l’incidence professionnelle n’a pas été retenue, et il n’a pas été justifié d’attribuer un taux professionnel à Monsieur [G].

Quels sont les frais de justice et les frais de consultation médicale pris en charge par la CPAM ?

Les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions compétentes sont pris en charge par l’organisme mentionné à l’article L.221-1 du Code de la Sécurité sociale.

En ce qui concerne les frais de consultation médicale, le tribunal a décidé que les frais de la consultation médicale confiée au Docteur [E] seraient supportés par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie.

De plus, conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, la CPAM, en tant que partie perdante, a été condamnée aux dépens de l’instance.

Monsieur [G] a également été condamné à recevoir 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour couvrir ses frais irrépétibles.

Quelles sont les voies de recours possibles suite à cette décision ?

Conformément aux dispositions des articles 34 et 538 du Code de procédure civile, ainsi que de l’article R.211-3 du Code de l’organisation judiciaire, les parties disposent d’un délai d’un mois à compter de la notification de la décision pour interjeter appel.

Cela signifie que Monsieur [G] et la CPAM ont la possibilité de contester la décision rendue par le tribunal dans ce délai imparti.

Il est essentiel pour les parties de respecter ce délai pour préserver leurs droits et envisager une éventuelle révision de la décision.

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
POLE SOCIAL

Jugement du 10 Janvier 2025

N° RG 20/01264 – N° Portalis DBYS-W-B7E-K5PW
Code affaire : 89Z

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : Dominique RICHARD
Assesseur : Frédéric JANNET
Assesseur : Daniel TROUILLARD
Greffier : Sylvain BOUVARD

DEBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 12 Novembre 2024.

JUGEMENT

Prononcé par Dominique RICHARD, par mise à disposition au Greffe le 10 Janvier 2025.

Demandeur :

Monsieur [O] [G]
32, rue de Genève
44100 NANTES
Représenté par Maître Gwenaela PARENT, avocate au barreau de NANTES

Défenderesse :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA LOIRE ATLANTIQUE
Service contentieux
9 Rue Gaëtan Rondeau
44958 NANTES CEDEX 9
non comparante (dispensée de comparaître)

La Présidente et les assesseurs, après avoir entendu le DOUZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE la partie présente en ses observations, l’ont avisée, de la date à laquelle le jugement serait prononcé, ont délibéré conformément à la loi et ont statué le DIX JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ, dans les termes suivants :

EXPOSE DES FAITS

Monsieur [O] [G] s’est vu notifier le 8 juin 2020 par la CPAM de Loire-Atlantique un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 12 % à compter du 19 novembre 2019 pour une maladie professionnelle du 5 novembre 2016.

Il a saisi le 21 juillet 2020 la Commission Médicale de Recours Amiable qui a rejeté son recours le 15 octobre 2020.

Monsieur [G] a saisi le pôle social le 15 décembre 2020.

Les parties ont été régulièrement convoquées devant le pôle social à l’audience du 12 décembre 2023 pour laquelle le Dr [E], médecin consultant du tribunal, a été désigné pour examiner Monsieur [G] et donner un avis sur le taux d’incapacité.

L’affaire a été en définitive retenue à l’audience du 12 novembre 2024.
Monsieur [G] demande de :
– Annuler les décisions prises par la CPAM et la CMRA,
– Juger qu’il présente un taux d’IPP supérieur à 20 %,
– Fixer un taux professionnel de 7 %,
– Subsidiairement ordonner une expertise médico-légale afin de déterminer le taux d’IPP résultant de sa maladie professionnelle,
– Condamner la CPAM à lui verser la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Débouter la CPAM de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– La condamner aux dépens.
Il soutient qu’il présente une déficience modérée impactant un certain nombre d’activités quotidiennes et sa vie professionnelle, que lors de l’examen clinique du 12 décembre 2023 le Dr [E] a retenu un taux d’IPP de 15 %, que les séquelles qualifiées de légères doivent donner lieu à un taux d’IPP compris entre 10 et 20 % mais il existe des facteurs aggravants tels que son âge, l’existence d’autres pathologies et sa qualification professionnelle puisqu’il exerce une profession dans le bâtiment ce qui justifie un taux de 20 %.

Il fait valoir s’agissant du taux professionnel qu’il n’a pas travaillé depuis 2016, qu’il a eu un avis d’inaptitude du médecin du travail le 4 juillet 2022 et a dû refuser le reclassement proposé car le poste comportait notamment des taches de manutention incompatibles avec les préconisations du médecin du travail et sa vie familiale et a été licencié le 1er décembre 2022 par son employeur qui n’a pas considéré son refus comme abusif, et que l’ouverture d’un droit à pension d’invalidité dont il bénéficie depuis le 1er juillet 2022 n’est pas de nature à exclure la reconnaissance d’un taux professionnel.
La CPAM demande la confirmation de la décision rendue par la CMRA et le rejet de toutes les demandes de Monsieur [G].
Elle invoque l’avis de son médecin conseil pour considérer que le taux de 12 % n’apparait pas sous évalué compte tenu de la limitation séquellaire légère de l’abduction et antépulsion de l’épaule droite dominante et soutient que l’existence d’un retentissement professionnel né directement de son état de santé consolidé au 18 novembre 2019 n’est pas établi, des lors que Monsieur [G] a refusé le poste proposé par son employeur dans le cadre d’un reclassement et que le licenciement pour inaptitude est intervenu plus de 3 ans après la fixation du taux d’IPP. Elle ajoute que Monsieur [G] bénéficie par ailleurs d’une pension d’invalidité de catégorie 2 depuis le 1er juillet 2022.

MOTIFS DE LA DECISION
L’article L.434-2 al 1 du Code de la Sécurité sociale dispose que le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.

La notification du taux d’IPP indique :
« Rupture de coiffe épaule droite. Limitation doulureuse légère sur plusieurs mouvements d’épaule droite,dominante ».
Le Dr [E], médecin consultant du tribunal, a indiqué que l’examen du médecin conseil du 14 novembre 2019 relevait une limitation de 4 mouvements : abduction et antépulsion à 120 ° en passif, rotation externe à 60 ° et rétropulsion pouce en L 5 (pouce en D 8 à gauche) et des manœuvres complexes complètes, qu’à l’examen par lui même le 12 décembre 2023 ces mouvements étaient plus limités et que Monsieur [G] devait bénéficier d’un taux d’IPP de 15 % conformément au barème des accidents du travail chapitre 1.1.2 ou du chapitre 8.2 du barème des maladies professionnelles.
Le Dr [R], médecin conseil, dans son avis du 29 avril 2024, indique que
l’examen clinique du médecin conseil relève une abduction et une antépulsion à 120°, une rotation externe à 60 ° et des manœuvres complexes complètes , que les séquelles imputables sont des douleurs mécaniques de l’épaule droite traitées par antalgiques de palier 1 et 2 et une limitation mesurée en passif qualifiable de légère, l’examen mettant bien en évidence une limitation séquellaire légère de l’abduction et antépulsion de l’épaule droite dominante.

Les documents médicaux produits par Monsieur [G] sont postérieurs à la date de consolidation (2021 et 2023) et concernent les séquelles d’un accident du travail. Ils ne peuvent par conséquent remettre en cause les constatations effectuées à la date de la consolidation.
Ainsi il ressort de l’examen médical et de l’analyse des pièces du dossier que Monsieur [G] présentait à cette date une limitation légère de 4 mouvements de l’épaule dominante sur 6.

Le guide barème des accidents du travail chapitre 1.1.2 ATTEINTE DES FONCTIONS ARTICULAIRES. prévoit un taux compris entre 10 % et 15 % pour la limitation légère de tous les mouvements de l’épaule dominante.

Par conséquent le taux retenu de 12 % ne correspond pas à l’importance des séquelles constatées par le médecin consultant et il est dans ces conditions justifié d‘attribuer à Monsieur [G] à la date de sa consolidation un taux d’incapacité de 15 %.

Par ailleurs le taux d’incapacité permanente partielle peut compenser en partie une perte de salaire liée aux conséquences d’un accident du travail.

Monsieur [G] justifie que le médecin du travail l’a déclaré inapte à son poste de coffreur le 4 juillet 2022 et qu’il a été licencié pour inaptitude le 1er décembre 2022.
Cependant le délai de près de trois ans s’étant écoulé depuis la date de consolidation ne permet pas de retenir que l’inaptitude soit imputable de façon certaine à la maladie professionnelle.
Dans ces conditions l’incidence professionnelle ne peut être retenue et il n’est pas justifié de lui attribuer un taux professionnel.
Sur les dépens et les frais de consultation :
Les frais résultant des consultations et expertises ordonnées par les juridictions compétentes en application des articles L.141-1 et L.141-2 ainsi que dans le cadre des contentieux mentionnés à l’article L.142-2, à l’exclusion du 4°, sont pris en charge par l’organisme mentionné à l’article L.221-1.

La CPAM, partie perdante, sera condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile.

Les frais de la consultation médicale confiée au Docteur [E] seront en conséquence supportés par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [G] la totalité de ses frais irrépétibles. La CPAM sera par conséquent condamnée à lui verser la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire susceptible d’appel, rendu par mise à disposition au greffe du Tribunal,
INFIRME la décision de la CPAM de Loire-Atlantique ;
DIT que l’état de santé de Monsieur [O] [G] suite à la maladie professionnelle reconnue le 5 novembre 2016 justifie l’attribution d’un taux d’IP de 15%;
CONDAMNE la CPAM de Loire-Atlantique aux dépens de l’instance, conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile ;
DIT que les frais de la consultation du Docteur [E] seront supportés par la Caisse Nationale d’Assurance maladie ;
CONDAMNE la CPAM de Loire-Atlantique à verser à Monsieur [O] [G] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE que conformément aux dispositions des articles 34 et 538 du Code de procédure civile et R.211-3 du Code de l’organisation judiciaire, les parties disposent d’un délai de UN MOIS à compter de la notification de la présente décision pour en INTERJETER APPEL ;
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ par mise à disposition du jugement au greffe du Tribunal le 10 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, la minute étant signée par Dominique RICHARD, présidente, et par Sylvain BOUVARD, greffier.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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