Évaluation des demandes de relogement et de délais dans un contexte de loyers impayés et de droits sociaux.

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Évaluation des demandes de relogement et de délais dans un contexte de loyers impayés et de droits sociaux.

Contexte de l’affaire

La SA SIGH a délivré un commandement de quitter les lieux à Mme [T] [L] le 28 août 2024, en vertu d’un jugement du 30 septembre 2021. Ce commandement concerne un logement situé à [Adresse 5] à [Localité 3].

Demande de délai supplémentaire

Mme [T] [L] a saisi le juge de l’exécution le 6 septembre 2024, demandant un délai supplémentaire de 12 mois pour quitter le logement. Les parties ont été convoquées à une audience le 1er octobre 2024, qui a été renvoyée au 15 octobre 2024.

Arguments de Mme [T] [L]

Lors de l’audience, Mme [T] [L] a demandé la suspension des effets du commandement et un délai d’un an pour quitter les lieux, invoquant sa situation de mère célibataire sans emploi, ses deux enfants à charge, et l’attente d’une régularisation de ses droits APL. Elle a également mentionné que l’expulsion ne pouvait pas avoir lieu durant la trêve hivernale.

Position de la SA SIGH

La SA SIGH a contesté les demandes de Mme [T] [L], soulignant qu’elle avait déjà bénéficié de délais et que, malgré la patience du bailleur, elle n’avait jamais été à jour dans le paiement de son loyer. Le bailleur a également noté que Mme [T] [L] avait fait preuve de négligence en ne régularisant pas sa situation.

Décision du juge de l’exécution

Le juge a déclaré la demande de suspension des effets du commandement irrecevable, précisant que cela ne relevait pas de sa compétence. Concernant la demande de délais pour quitter les lieux, le juge a rejeté la demande de Mme [T] [L], notant qu’elle n’avait pas justifié d’efforts de relogement et que sa situation financière était déjà déficitaire.

Condamnation aux dépens

En vertu de l’article 696 du code de procédure civile, Mme [T] [L] a été condamnée aux dépens, la partie perdante étant responsable des frais engagés.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

5 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Valenciennes
RG n°
24/02589
N° RG 24/02589 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GNEQ

Minute n° 24/00104

AFFAIRE : [T] [L] / S.A. SIGH
Code NAC : 78K Nature particulière :5H

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES

LE JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT DU 05 NOVEMBRE 2024

JUGE DE L’EXÉCUTION : Madame Agnès DEIANA, Juge,

GREFFIER : Madame Anne Sophie BIELITZKI

DEMANDERESSE

Mme [T] [L], née le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 4], demeurant [Adresse 5] ;
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/005128 du 30/09/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Valenciennes)

Représentée par Me Virginie LHUSSIEZ, avocat au barreau de VALENCIENNES, vestiaire : 26 ;

DÉFENDERESSE

La S.A. SIGH, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège ;

Représentée par Maître Manuel DE ABREU de l’AARPI DE ABREU – GUILLEMINOT- PHILIPPE, avocats au barreau de VALENCIENNES, vestiaire : 24 ;

Le juge de l’exécution après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 15 octobre 2024 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement sera prononcé par mise à disposition au greffe le 05 novembre 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit:

EXPOSE DU LITIGE

Déclarant agir en vertu d’un jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valenciennes en date du 30 septembre 2021, la SA SIGH a, le 28 août 2024, délivré à Mme [T] [L] un commandement de quitter les lieux portant sur un logement sis [Adresse 5] à [Localité 3].

Par requête réceptionnée au greffe le 6 septembre 2024, Mme [T] [L] a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Valenciennes aux fins de lui accorder un délai de 12 mois supplémentaires pour quitter le logement susvisé.

Les parties ont été convoquées par lettres recommandées avec demande d’avis de réception à l’audience du 1er octobre 2024.

L’affaire a été renvoyée à la demande des parties au 15 octobre 2024.

A l’audience, Mme [T] [L], représentée par son conseil substituée, sollicite le bénéfice de ses écritures déposées aux termes desquelles elle demande au juge de l’exécution la suspension des effets du commandement de quitter les lieux ainsi qu’un délai d’un an pour quitter les lieux.

Elle fait valoir être seule, sans emploi, avoir deux enfants et attendre une régularisation de ses droits APL pour épurer sa dette, qu’au surplus elle ne peut pas être expulsée durant la trêve hibernale.

La SA SIGH, représentée par son conseil, se référant à ses écritures déposées, demande pour sa part au juge de l’exécution de débouter Mme [T] [L] de l’ensemble de ses demandes.

Elle indique que Mme [T] [L] a déjà bénéficié de délais de fait, qu’en sa qualité de bailleur elle a fait preuve de patience et de compréhension face aux difficultés rencontrées par Mme [T] [L], que toutefois elle rappelle que Mme [T] [L] n’a jamais été à jour dans le paiement de son loyer, qu’elle a toujours présenté un compte locataire débiteur, qu’elle n’a jamais respecté les multiples échéanciers mis en place et qu’elle fait preuve de négligence en étant injoignable et en ne régularisant pas sa situation administrative.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

MOTIVATION

Sur la demande de suspension des effets du commandement de quitter les lieux :

Aux termes de l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire :  » Le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en œuvre.
Le juge de l’exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s’élèvent à l’occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s’y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle.
Il connaît, sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageable des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires. Il connaît de la saisie des rémunérations, à l’exception des demandes ou moyens de défense échappant à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
Le juge de l’exécution exerce également les compétences particulières qui lui sont dévolues par le code des procédures civiles d’exécution « .

Aux termes des dispositions de l’article R 121-1 du code des procédures civiles d’exécution le juge de l’exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l’exécution.

En l’espèce, la demande de suspension des effets du commandement de quitter les lieux, fondée sur un titre exécutoire régulier n’entre pas dans les compétences du juge de l’exécution.

D’où il suit que la demande est irrecevable.

Sur la demande de délais pour quitter les lieux :

Aux termes de l’article L 412-3 du code des procédures civiles d’exécution le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales, sans que lesdits occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.

Selon l’article L 412-4 du même code, la durée des délais prévus à l’article précédent ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais il doit être tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L 441-2-3 et L 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés ;

En l’espèce, Mme [T] [L] produit au titre de ses ressources des attestations de la CAF des mois de juin à août 2024 dont il résulte qu’elle perçoit l’allocation de soutien familial, le RSA et une prime d’activité de sorte qu’elle perçoit des prestations sociales en moyenne à hauteur de 1000 euros. Elle a deux enfants à charge. Elle ne justifie pas de ses ressources issues de son travail alors que percevant une prise d’activité elle perçoit nécessairement des revenus de son travail. Au titre des charges, elle ne paie pas d’impôt. Le montant de son loyer est de 594,28 € toutefois le décompte indique qu’elle a droit à l’aide au logement à hauteur de 472,88 € ce qui fait un reliquat à sa charge de 121,40 €, hors pénalités qui lui sont appliquées en raison de son défaut de diligences et dont elle est responsable (défaut assurance – défaut de réponse à l’enquête sociale).

Elle justifie avoir effectué un paiement en avril, en juillet et en août. Sa dette de loyer s’élève à la somme de 3830,28 € au 31/08/2024.

Elle ne justifie d’aucune démarche de relogement mais évoque que durant la trêve hivernale il ne peut être procédé à son expulsion. Le bailleur produit le décompte de sa locataire depuis son entrée dans les lieux en juin 2018 démontrant que Mme [T] [L] n’a jamais été à jour du paiement de son loyer, qu’elle a bénéficié de multiples dispositifs d’aides et de délais en sus de ceux accordés par le juge des contentieux de la protection. L’historique tend à démontrer que son budget est déséquilibré et nécessairement déficitaire de sorte que lui accorder de larges délais viendrait aggraver sa situation financière en accroissant un déficit endémique alors même qu’elle ne démontre pas l’impossibilité pour elle de se reloger.

D’où il suit qu’il n’y a pas lieu de lui accorder de nouveaux délais.

Sur les dépens :

L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Mme [T] [L] sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Le juge de l’exécution statuant par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Le dit jugement étant exécutoire de plein droit en vertu de l’article R. 121-21 du code des procédures civiles d’exécution et de l’article 504 du code de procédure civile,

Déclare la demande de suspension des effets du commandement irrecevable ;

Rejette la demande de délais formulée par Mme [T] [L] ;

Condamne Mme [T] [L] aux seuls dépens effectivement exposés par Mme [T] [L] en vertu de l’article 696 du code de procédure civile et de l’article 42 premier alinéa de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits et ont signé après lecture faite le Juge et le Greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION


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