Évaluation des Conditions d’Hospitalisation Psychiatrique – Questions / Réponses juridiques

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Évaluation des Conditions d’Hospitalisation Psychiatrique – Questions / Réponses juridiques

Le 27 novembre 2024, le juge Isabelle Rihm a examiné la situation de M. [K] [X], hospitalisé à l’EPSAN depuis mai 2010 pour des soins psychiatriques. Bien que des certificats médicaux mensuels aient recommandé la poursuite de l’hospitalisation, celui de novembre 2024 préconisait sa levée. Des irrégularités procédurales ont été constatées, notamment le non-respect des délais de décision par le représentant de l’État. En conséquence, le juge a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation, avec un effet différé de 24 heures pour organiser un programme de soins, décision susceptible d’appel dans les 10 jours.. Consulter la source documentaire.

Quel est le contexte de l’affaire concernant M. [K] [X] ?

Le 27 novembre 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, Isabelle Rihm, a examiné la situation de M. [K] [X], né le 25 juillet 1954, actuellement hospitalisé à l’EPSAN de [Localité 3].

Cette procédure a été initiée suite à une requête du Préfet du Bas-Rhin, en lien avec l’hospitalisation complète de M. [K] [X] pour des soins psychiatriques.

Quel est l’historique de l’hospitalisation de M. [K] [X] ?

M. [K] [X] a été admis en hospitalisation complète en mai 2010 à la demande de l’État, après une expertise psychiatrique concluant à son irresponsabilité pénale et à sa dangerosité.

Depuis lors, il a été régulièrement soumis à des certificats médicaux mensuels, tous recommandant la poursuite de l’hospitalisation, jusqu’à celui de novembre 2024 qui préconisait la levée de la mesure.

Quelles irrégularités ont été relevées dans la procédure de maintien de l’hospitalisation ?

Les certificats médicaux récents ont indiqué que M. [K] [X] ne présentait plus de troubles du comportement et acceptait son suivi.

Cependant, des irrégularités ont été relevées dans la procédure de maintien de l’hospitalisation, notamment le non-respect des délais pour la décision du représentant de l’État après réception des certificats médicaux, ce qui a porté atteinte aux droits du patient.

Quelle a été la décision du juge concernant M. [K] [X] ?

En raison des irrégularités constatées et des avis médicaux favorables à la levée de l’hospitalisation, le juge a ordonné la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète, avec un effet différé de 24 heures pour permettre la mise en place d’un programme de soins.

Cette décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Quels articles du code de la santé publique sont mentionnés dans le jugement ?

L’article L. 3211-12-1 I du code de la santé publique dispose que « l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement (…), ait statué sur cette mesure :

1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;

2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3 ;

3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision.

Comment la régularité des décisions administratives est-elle encadrée par la loi ?

L’article L.3216-1 du même code dispose que « la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.

Le juge connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1. Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet.

Comment le juge évalue le bien-fondé de la mesure d’hospitalisation complète ?

Le juge qui se prononce sur le maintien de l’hospitalisation complète doit apprécier le bien-fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer, à l’évaluation des médecins, sa propre appréciation sur l’existence des troubles psychiques, la justification thérapeutique des traitements ou la capacité du patient à consentir aux soins.

Ces différents éléments relèvent d’une appréciation strictement médicale.

Quelles conclusions peuvent être tirées des certificats médicaux concernant M. [K] [X] ?

Il ressort des éléments joints à la saisine et des pièces du dossier que :

– Le 28 mai 2010, M. [K] [X] a été admis au bénéfice des soins psychiatriques contraints sous la forme d’une hospitalisation complète à la demande du représentant de l’État, sur signalement du procureur de la République d’une décision de classement sans suite au vu d’une expertise psychiatrique réalisée dans le cadre d’une procédure pénale, concluant à l’irresponsabilité pénale de l’intéressé, à sa dangerosité psychiatrique et recommandant son hospitalisation d’office.

– En dernier lieu, par décision en date du 31 mai 2024, le juge des libertés et de la détention a déclaré que les soins pouvaient se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète.

– Depuis lors, les certificats médicaux mensuels établis des mois de juin à octobre 2024 ont tous conclu à la nécessité de la poursuite des soins psychiatriques contraints sous la forme d’une hospitalisation complète, seul le certificat médical du mois de novembre concluant à la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète.

Quelles irrégularités ont été constatées dans la procédure de maintien de l’hospitalisation ?

Il résulte des pièces du dossier que :

– Au vu des pièces produites par le requérant, il n’est pas possible de savoir si le déroulement de la mesure de soins se situe dans le cadre du régime de droit commun ou de celui dit “renforcé”.

– En tout état de cause, depuis le certificat mensuel du mois d’octobre dernier se prononçant en faveur de la levée de la mesure de soins, aucune des procédures susvisées n’a été respectée.

– Le représentant de l’État n’ayant pas statué dans un délai de trois jours francs après la réception du certificat médical, lequel devait lui être transféré par le directeur d’établissement, et n’ayant pas ordonné une expertise médicale de l’état mental de la personne par deux psychiatres.

Quelle conclusion le juge a-t-il tirée des irrégularités constatées ?

Ces irrégularités portent manifestement atteinte aux droits du patient qui se trouve privé de sa liberté alors même que plusieurs médecins se sont prononcés en faveur de la levée de la mesure d’hospitalisation complète.

Il y a lieu dans ces conditions d’ordonner la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète dont fait l’objet le patient, avec toutefois un effet différé à 24 heures pour la mise en place le cas échéant d’un programme de soins, tel que le permet l’article L. 3211-12-1 III du code de la santé publique.


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