Évaluation des critères d’accès à l’allocation pour personnes en situation de handicap et leurs implications.

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Évaluation des critères d’accès à l’allocation pour personnes en situation de handicap et leurs implications.

L’Essentiel : Mme [J] [L] épouse [H] a déposé une demande de prestations à la MDA d’Eure-et-Loir le 1er février 2019. Le 13 février 2020, la CDAPH a refusé l’AAH, estimant qu’elle ne présentait pas de restriction substantielle à l’emploi, malgré un taux d’incapacité d’au moins 50%. Après un rejet de son recours administratif, elle a saisi le tribunal judiciaire de Chartres le 14 mai 2020. Le 16 juin 2023, le tribunal a débouté l’allocataire, qui a interjeté appel, soutenant que ses capacités de travail limitées n’avaient pas été prises en compte. La cour a confirmé le jugement, condamnant l’allocataire aux dépens.

Demande de prestations par l’allocataire

Mme [J] [L] épouse [H] a déposé une demande de prestations auprès de la maison départementale de l’autonomie d’Eure-et-Loir (MDA) le 1er février 2019.

Refus de l’allocation adulte handicapé

Le 13 février 2020, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a refusé l’allocation adulte handicapé (AAH) à l’allocataire, arguant qu’elle ne présentait pas de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, malgré un taux d’incapacité d’au moins 50% et inférieur à 80%.

Recours au tribunal judiciaire

Après le rejet de son recours administratif, l’allocataire a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres le 14 mai 2020 pour contester la décision de la MDA.

Jugement du tribunal

Le 16 juin 2023, le tribunal a débouté l’allocataire de son recours et l’a condamnée aux dépens.

Appel de l’allocataire

L’allocataire a interjeté appel de cette décision, demandant à la cour d’infirmer le jugement et de reconnaître son droit à l’AAH, tout en soutenant que le tribunal n’avait pas correctement pris en compte ses capacités de travail limitées.

Arguments de l’allocataire

Elle a présenté un certificat médical attestant de son syndrome douloureux chronique, de ses limitations de marche, et des effets secondaires de son traitement, ainsi que de la nécessité de pauses régulières.

Position de la MDA

La MDA a demandé la confirmation du jugement, affirmant que l’allocataire avait des capacités de travail suffisantes et ne présentait pas de restriction substantielle pour l’accès à l’emploi.

Évaluation médicale

Le certificat médical a indiqué que l’allocataire ne souffrait pas de déficiences graves et que ses difficultés de déplacement n’interdisaient pas l’accès à l’emploi, avec des aménagements possibles de son poste de travail.

Décision de la cour

La cour a confirmé le jugement du 16 juin 2023, concluant que l’allocataire n’avait pas prouvé l’existence d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, et l’a condamnée aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’attribution de l’Allocation Adulte Handicapé (AAH) selon le Code de la Sécurité Sociale ?

L’Allocation Adulte Handicapé (AAH) est régie par les articles L.82-11 et suivants du Code de la Sécurité Sociale.

Selon l’article L.821-2, l’AAH est accordée à toute personne qui présente :

– Soit un taux d’incapacité d’au moins 80%,

– Soit un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, à condition qu’elle subisse, en raison de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

Cette restriction est définie par l’article D.821-1-2, qui précise que pour évaluer la restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, il faut prendre en compte :

– Les déficiences à l’origine du handicap,

– Les limitations d’activités résultant directement de ces déficiences,

– Les contraintes liées au traitement et à la prise en charge thérapeutique induites par le handicap,

– Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et limitations d’activité.

Il est également stipulé que pour apprécier les difficultés d’accès à l’emploi, il faut les comparer à celles d’une personne sans handicap ayant des caractéristiques similaires.

Comment la MDA a-t-elle justifié le refus de l’AAH à l’allocataire ?

La Maison Départementale de l’Autonomie (MDA) a justifié son refus de l’AAH en se basant sur l’article D.821-1-2 du Code de la Sécurité Sociale.

Elle a considéré que l’allocataire, bien qu’ayant un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, ne présentait pas de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

La MDA a mis en avant plusieurs éléments :

– L’allocataire ne présente pas de déficience sensorielle, cognitive, émotionnelle ou comportementale, selon le certificat médical.

– Bien qu’elle ait des difficultés de déplacement, elle peut marcher sans aide à l’intérieur et n’a besoin d’assistance que pour certaines tâches ménagères.

– Les aménagements de poste et adaptations des conditions de travail sont possibles, permettant ainsi un accès à l’emploi.

Ces éléments ont conduit la MDA à conclure que l’allocataire n’était pas dans une situation d’impossibilité d’accès à l’emploi.

Quels sont les recours possibles en cas de refus de l’AAH ?

En cas de refus de l’AAH, l’allocataire peut exercer plusieurs recours, conformément aux dispositions du Code de la Sécurité Sociale et du Code de procédure civile.

Tout d’abord, l’article L.821-5 du Code de la Sécurité Sociale prévoit qu’un recours administratif préalable obligatoire doit être formé.

Si ce recours est rejeté, comme cela a été le cas pour l’allocataire, elle peut saisir le tribunal judiciaire, comme le stipule l’article 1er du Code de procédure civile.

L’allocataire a effectivement saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres pour contester la décision de la MDA.

Elle a le droit de demander l’infirmation du jugement et de prouver qu’elle remplit les conditions d’attribution de l’AAH, notamment en démontrant l’existence d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

Quels éléments médicaux ont été pris en compte par le tribunal pour rendre sa décision ?

Le tribunal a pris en compte plusieurs éléments médicaux pour évaluer la situation de l’allocataire.

Le certificat médical du docteur [V] a été central dans l’analyse.

Il a indiqué que l’allocataire souffre d’un syndrome douloureux chronique, avec des douleurs quasi quotidiennes, et a précisé :

– Un périmètre de marche limité à 500-600 mètres,

– Des difficultés de flexion du genou gauche,

– La nécessité de pauses régulières pour les déplacements.

Cependant, le médecin a également noté qu’elle ne nécessitait pas d’aide humaine pour se déplacer à l’intérieur et qu’il n’y avait pas de retentissement sur sa vie sociale.

Ces éléments ont conduit le tribunal à conclure que l’allocataire n’apportait pas de preuves suffisantes pour justifier une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, conformément aux critères établis par le Code de la Sécurité Sociale.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88M

Ch.protection sociale 4-7

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 NOVEMBRE 2024

N° RG 23/02390 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WBBI

AFFAIRE :

[J] [L] épouse [H]

C/

MAISON DEPARTEMENTALE DE L’AUTONOMIE D’EURE ET LOIR

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Juin 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de CHARTRES

N° RG : 20/00187

Copies exécutoires délivrées à :

Me Bertrand LEBAILLY

MAISON DEPARTEMENTALE DE L’AUTONOMIE D’EURE ET LOIR

Copies certifiées conformes délivrées à :

[J] [L] épouse [H]

MAISON DEPARTEMENTALE DE L’AUTONOMIE D’EURE ET LOIR

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [J] [L] épouse [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Bertrand LEBAILLY de la SELARL UBILEX AVOCATS, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000016

APPELANTE

****************

MAISON DÉPARTEMENTALE DE L’AUTONOMIE D’EURE ET LOIR

[Adresse 4]

[Localité 2]

non comparante, ni représentée

Dispensée de comparaître par ordonnance du 03 juillet 2024

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Septembre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Charlotte MASQUART, conseillère chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente,

Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,

Madame Charlotte MASQUART, conseillère,

Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [J] [L] épouse [H] (l’allocataire) a formé, le 1er février 2019 , auprès de la maison départementale de l’autonomie d’Eure-et-Loir (la MDA) une demande de prestations.

Par décision du 13 février 2020 notifiée le 17 février 2020, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (la CDAPH) de la MDA a refusé l’allocation adulte handicapé (AAH) à l’allocataire, au motif que si son taux d’incapacité était au moins égal à 50% et inférieur à 80% elle ne présentait pas de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

Après rejet de son recours administratif préalable obligatoire, le 14 mai 2020, l’allocataire a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres aux fins de contester cette décision.

Par jugement du 16 juin 2023, le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres a :

– débouté l’allocataire de son recours ;

– condamné l’allocataire aux dépens. .

L’allocataire a relevé appel de cette décision. Les parties ont été convoquées à l’audience du 18 septembre 2024, date à laquelle elles ont comparu.

Par conclusions écrites, déposées et soutenues oralement, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, l’allocataire demande à la cour de:

– infirmer le jugement du 16 juin 2023,

– dire et juger qu’elle présentait au 29 janvier 2019 un taux d’incapacité compris entre 50 et 79% ainsi qu’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi,

– dire que la MDA doit lui verser l’AAH ainsi que le complément,

-condamner la MDA aux dépens.

Au soutien de ses prétentions elle expose que pour rejeter sa demande le tribunal a considéré et sans réelle motivation qu’elle présentait des capacités pour travailler dans la mesure où elle avait indiqué dans sa demande que celle-ci avait pour but de lui venir en aide dans ses démarches professionnelles.

L’allocataire a rappelé les termes du certificat médical produit au soutien de sa demande lequel faisait état :

– d’un syndrome douloureux chronique avec des douleurs quasi quotidiennes,

– d’un périmètre de marche très limité de 500 à 600 mètres maximum,

– de difficultés de flexion du genou gauche,

– de la nécessité de pause régulière pour les déplacements.

Elle a ajouté que son traitement médical entraînait de nombreux effets secondaires, qu’elle poursuivait des séances de kinésithérapie de manière régulière pour récupérer son amplitude articulaire.

Par conclusions écrites, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la MDA, dispensée de comparution par ordonnance du 3 juillet 2024, demande à la cour de confirmer le jugement déféré.

Au soutien de ses prétentions elle expose que l’allocataire a les capacités de travailler selon les critères d’appréciation fixés à l’article D.821-1-2 du code de la sécurité sociale pour une durée supérieure ou égale à un mi-temps et ne présente pas de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions des articles L.82-11 et suivants du code de la sécurité sociale, l’allocation adultes handicapés est accordée à la personne présentant :

– soit un taux d’incapacité d’au moins 80%,

– soit un taux d’incapacité égal ou supérieur à 50% et inférieur à 80%, lorsqu’elle subit en outre, en raison de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi. Selon l’article D.821-1-2 du code de la sécurité sociale, pour l’application des dispositions de l’article L.821-2 précité, il convient de prendre en considération pour estimer la restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi subi par la personne handicapée :

– les déficiences à l’origine du handicap,

– les limitations d’activités résultant directement de ces déficiences,

– les contraintes liées au traitement et prise en charge thérapeutique induite par le handicap,

– les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d’activité.

Pour apprécier si les difficultés importantes d’accès à l’emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d’une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d’accès à l’emploi.

Le même article précise que sont compatibles avec la reconnaissance d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi:

– l’activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l’article L. 243-4 du code de l’action sociale et des familles,

– l’activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur,

– le suivi d’une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d’une décision d’orientation prise par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées mentionnée à l’article L.241-5 du code de l’action sociale et des familles.

En l’espèce, la MDA a reconnu à l’allocataire un taux d’incapacité au mois égal à 50 % et inférieur à 80 % .

L’attribution du taux n’est pas contesté devant la cour, les débats portant sur l’existence d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

Il ressort du certificat médical renseigné par le docteur [V] le 08 janvier 2019 que l’allocataire ne présente pas de déficience sensorielle, cognitive, émotionnelle ou comportementale.

Elle présente des difficultés de déplacement, marche avec boiterie et difficultés de flexion du genou gauche. Son périmètre de marche sans pause est limité à 500-600 mètres. Elle n’a cependant pas besoin d’aide humaine et peut se déplacer à l’intérieur sans difficulté et sans aide.

Le retentissement sur sa vie quotidienne est limité aux tâches ménagères et aux courses pour lesquelles elle a besoin d’une aide humaine. Aucun retentissement sur sa vie sociale et relationnelle n’est constaté par le médecin.

Son traitement repose sur la prise d’antalgiques de palier 1 en raison d’une intolérance aux antalgiques de palier 2, un suivi orthopédique annuel, des séances de kinésithérapie dont la fréquence n’est pas renseignée et le port d’une atèle de Zimmer.

Ainsi que le relève la MDA dans ses écritures des aménagements du poste de travail de l’allocataire et une adaptation de ses conditions de travail sont possibles et de nature à limiter les conséquences professionnelles liées à sa situation de handicap telles qu’elles sont décrites dans le certificat médical du docteur [V].

Sa situation n’interdit pas l’accès à l’emploi ou le maintien dans l’emploi pour une durée de travail égale ou supérieure à un mi-temps.

L’allocataire n’apporte aucun élément de nature à justifier d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi ou à contredire les éléments médicaux soulignés par le docteur [V].

Il convient en conséquence de confirmer le jugement rendu le 16 juin 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de Chartres.

L’allocataire sera condamnée aux dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [J] [L] aux dépens exposés en cause d’appel;

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.

La greffière La conseillère


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