Établissement de la nationalité française : enjeux de preuve et d’état civil.

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Établissement de la nationalité française : enjeux de preuve et d’état civil.

L’Essentiel : Le tribunal a examiné les conclusions de M. [S] [T] et du ministère public, en lien avec sa demande de nationalité française. M. [S] [T], né le 9 février 1964 à [Localité 7], a fourni des preuves de sa naissance et de celle de son père, né en Algérie. Le ministère public n’a pas contesté sa nationalité. En vertu de l’article 23 du code de la nationalité française, le tribunal a reconnu M. [S] [T] comme de nationalité française, ordonnant la mention de cette décision sur son acte de naissance, tout en précisant que chaque partie conserverait ses propres frais.

Contexte de la procédure

Le tribunal a examiné les articles 56, 455 et 768 du code de procédure civile en lien avec les conclusions de M. [S] [T] et du ministère public. M. [S] [T] a déposé une assignation le 11 janvier 2023, suivie d’une communication de pièces le 11 septembre 2023. Le ministère public a notifié ses dernières conclusions le 4 juillet 2024, et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoiries du 13 novembre 2024.

Demande de constatation

Le ministère public a demandé au tribunal de constater la délivrance du récépissé prévu par l’article 1040 du code de procédure civile. Cette demande, bien que non constitutive d’une prétention, a été examinée. Le tribunal a confirmé que le ministère de la justice avait délivré le récépissé le 3 juillet 2023, rendant la procédure régulière.

Revendiquer la nationalité française

M. [S] [T] revendique la nationalité française, affirmant être né le 9 février 1964 à [Localité 7] de parents nés en Algérie, alors département français. Le ministère public n’a pas contesté cette nationalité et a demandé au tribunal d’apprécier la situation de M. [S] [T].

Charge de la preuve

Selon l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve incombe à M. [S] [T], qui doit prouver sa naissance en France et celle de l’un de ses parents en Algérie. Il doit également établir un lien de filiation avec des actes d’état civil conformes aux exigences légales.

Éléments de preuve fournis

M. [S] [T] a fourni des preuves de sa naissance et de celle de son père, M. [I] [T], né en Algérie. La déclaration de naissance a été faite par le père, établissant ainsi le lien de filiation paternelle. Les documents fournis respectent les exigences de l’article 47 du code civil.

Décision du tribunal

Le tribunal a jugé que M. [S] [T] est de nationalité française en vertu de l’article 23 du code de la nationalité française. Il a ordonné la mention de cette décision en marge de l’acte de naissance de M. [S] [T].

Conséquences financières

Concernant les dépens, chaque partie conservera la charge de ses propres frais. La demande de M. [S] [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée.

Conclusion

Le tribunal a statué publiquement, confirmant la régularité de la procédure et la nationalité française de M. [S] [T], tout en ordonnant les mentions nécessaires et en précisant la répartition des dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de régularité de la procédure selon l’article 1040 du code de procédure civile ?

La régularité de la procédure est établie par l’article 1040 du code de procédure civile, qui stipule que dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité,

une copie de l’assignation doit être déposée au ministère de la justice, qui en délivre récépissé. En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 3 juillet 2023,

ce qui signifie que la condition de l’article 1040 est respectée. Ainsi, le tribunal a jugé que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Comment se définit la charge de la preuve en matière de nationalité selon l’article 30 du code civil ?

L’article 30 alinéa 1 du code civil précise que la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français,

lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux articles 31 et suivants du même code.

Dans le cas présent, M. [S] [T] n’étant pas titulaire d’un certificat de nationalité française, il doit prouver sa naissance en France ainsi que celle de l’un de ses parents sur le territoire des départements français d’Algérie.

Quelles sont les dispositions de l’article 23 du code de la nationalité française concernant l’acquisition de la nationalité ?

L’article 23 du code de la nationalité française, dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, stipule que l’enfant légitime ou naturel, né en France,

lorsque l’un de ses parents au moins y est lui-même né, est français. M. [S] [T] revendique cette nationalité en se basant sur cette disposition,

étant né en France de parents nés en Algérie, alors département français. Le tribunal a donc jugé qu’il est français en application de cet article.

Quelles sont les implications de l’article 47 du code civil sur les actes d’état civil ?

L’article 47 du code civil établit que tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi,

sauf si d’autres actes ou pièces établissent que cet acte est irrégulier ou falsifié. Cela signifie que M. [S] [T] doit fournir des actes d’état civil probants pour établir sa nationalité.

Il est également précisé que dans les rapports entre la France et l’Algérie, les actes d’état civil sont dispensés de légalisation,

à condition qu’ils soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l’autorité compétente.

Quelle est la portée de l’article 28 du code civil concernant la mention des actes de nationalité ?

L’article 28 du code civil stipule que mention sera portée, en marge de l’acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l’acquisition,

la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Cela inclut également la mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française.

Dans le cas présent, le tribunal a ordonné que cette mention soit faite, conformément à l’article 28, en raison de la reconnaissance de la nationalité française de M. [S] [T].

Quelles sont les conséquences des demandes accessoires sur les dépens selon le code de procédure civile ?

Selon le code de procédure civile, chaque partie conserve la charge de ses propres dépens lorsque la procédure est engagée dans l’intérêt d’une partie.

Dans cette affaire, le tribunal a décidé que M. [S] [T] conserverait la charge de ses propres dépens, ce qui signifie qu’il ne pourra pas demander le remboursement de ses frais de justice.

De plus, la demande de M. [S] [T] au titre des dispositions de l’article 700 2° du code de procédure civile a été rejetée,

confirmant ainsi que chaque partie doit assumer ses propres frais.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

1/2/1 nationalité A

N° RG 23/02219
N° Portalis 352J-W-B7H-CYX7M

N° PARQUET : 23/305

N° MINUTE :

Assignation du :
11 Janvier 2023

AJ du TJ DE PARIS
du 06 Janvier 2022
N° 2022/045793

M.M.
[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 08 Janvier 2025

DEMANDEUR

Monsieur [S] [T]
[Adresse 4]
[Localité 1] – ALGERIE

représenté par Me Victoire BREVAN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C2319

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/045793 du 06/01/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)

DEFENDERESSE

LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Parquet 01 Nationalités
[Adresse 8]
[Localité 2]

Monsieur [R] [G]
Premier vice-procureur
Décision du 8 janvier 2025
Chambre du contentieux
de la nationalité Section A
RG n° 23/02219

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Maryam Mehrabi, Vice-présidente
Présidente de la formation

Madame Antoanela Florescu-Patoz, Vice-présidente
Madame Victoria Bouzon, Juge
Assesseurs

assistées de Madame Christine Kermorvant, Greffière

DEBATS

A l’audience du 13 Novembre 2024 tenue publiquement sans opposition des représentants des parties, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile par Madame Maryam Mehrabi, Magistrate rapporteure, qui a entendu les plaidoiries et en a rendu compte au tribunal dans son délibéré.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Maryam Mehrabi, vice-présidente et par Madame Christine Kermorvant, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

Vu les articles 56, 455 et 768 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions de M. [S] [T] constituées par l’assignation délivrée le 11 janvier 2023 au procureur de la République, et le bordereau de communication de pièces notifié par la voie électronique le 11 septembre 2023,

Vu les dernières conclusions du ministère public notifiées par la voie électronique le 4 juillet 2024,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 4 juillet 2024, ayant fixé l’affaire à l’audience de plaidoiries du 13 novembre 2024,

MOTIFS

Sur la procédure

Le ministère public sollicite du tribunal de « constater que le récépissé prévu par l’article 1040 du code de procédure civile a été délivré ». Cette demande de « constat », qui ne constitue pas une prétention au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile, ne donnera pas lieu à mention au dispositif.

Le tribunal rappelle toutefois qu’aux termes de l’article 1040 du code de procédure civile, dans toutes les instances où s’élève à titre principal ou incident une contestation sur la nationalité, une copie de l’assignation est déposée au ministère de la justice qui en délivre récépissé.

En l’espèce, le ministère de la justice a délivré ce récépissé le 3 juillet 2023. La condition de l’article 1040 du code de procédure civile est ainsi respectée. Il y a donc lieu de dire que la procédure est régulière au regard de ces dispositions.

Sur l’action déclaratoire de nationalité française

M. [S] [T], se disant né le 9 février 1964 à [Localité 7], revendique la nationalité française par double droit du sol sur le fondement de l’article 23 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973. Il fait valoir qu’il est né en France de parents, Mme [P] [H], née le 21 février 1929 à [Localité 5] (Algérie), et M. [I] [T], né le 16 mars 1926 à [Localité 6] (Algérie), tous deux nés en Algérie alors département français.

Le ministère public ne soulève aucune contestation sur la nationalité française de M. [S] [T] et sollicite du tribunal d’apprécier si celui-ci est français.

Sur le fond

En application de l’article 30 alinéa 1 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de Français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité délivré à son nom conformément aux dispositions des articles 31 et suivants du même code.

Conformément à l’article 17-1 du code civil, compte tenu de la date de naissance revendiquée du demandeur, sa situation est régie par les dispositions de les dispositions de l’article 23 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, selon lequel est français, l’enfant légitime ou naturel, né en France lorsque l’un de ses parents au moins y est lui-même né.

Il appartient ainsi à M. [S] [T], qui n’est pas titulaire d’un certificat de nationalité française, de rapporter, d’une part, la preuve de sa naissance en France, et, d’autre part, de la naissance de l’un de ses parents sur le territoire des départements français d’Algérie, et d’un lien de filiation établi à l’égard de ce dernier, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences de l’article 20-1 du code civil, cet établissement doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur la nationalité.

Aux termes de l’article 47 du code civil en effet, tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française.

Il est précisé à ce titre que dans les rapports entre la France et l’Algérie, les actes d’état civil sont dispensés de légalisation par l’article 36 du protocole judiciaire signé le 28 août 1962 et publié par décret du 29 août 1962 ; il suffit que ces actes soient revêtus de la signature et du sceau officiel de l’autorité ayant qualité pour les délivrer.

Enfin, nul ne peut revendiquer à quelque titre que ce soit, la nationalité française, s’il ne dispose d’un état civil fiable et certain.

En l’espèce, M. [S] [T] est né le 9 février 1964 à [Localité 7] de [I] [T] et de [P] [H] (pièce n°1 du demandeur).

La naissance du demandeur ayant été déclarée par le père, son lien de filiation paternelle est ainsi établi.

Il est par ailleurs justifié de l’état civil de [I] [T] par la production d’une copie de son acte de naissance mentionnant qu’il est né le 16 mars 1926 à [Localité 3] (Algérie) (pièce n°2 du demandeur).

M. [S] [T] justifie ainsi être né en France d’un père né sur le territoire des départements français d’Algérie.

En conséquence, il sera jugé qu’il est français en application de de l’article 23 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973, précité.

Sur la mention prévue à l’article 28 du code civil

Aux termes de l’article 28 du code civil, mention sera portée, en marge de l’acte de naissance, des actes administratifs et des déclarations ayant pour effet l’acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité. Il sera fait de même mention de toute première délivrance de certificat de nationalité française et des décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité. En conséquence, cette mention sera en l’espèce ordonnée.

Sur les demandes accessoires

Sur les dépens

La procédure ayant été engagée dans l’intérêt de M. [S] [T], chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

Sur l’article 700 2° du code de procédure civile

M. [S] [T] conservant la charge de ses propres dépens, sa demande au titre des dispositions de l’article 37 de la la loi du 10 juillet 1991 sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :

Dit la procédure régulière au regard des dispositions de l’article 1040 du code de procédure civile ;

Juge que M. [S] [T], né le 9 février 1964 à [Localité 7], est de nationalité française ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du code civil ;

Rejette la demande de M. [S] [T] au titre des dispositions de l’article 700 2° du code de procédure civile ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Fait et jugé à Paris le 08 Janvier 2025

La Greffière La Présidente
C. Kermorvant M. Mehrabi


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