Équilibre entre soins psychiatriques et détention : enjeux de la privation de liberté.

·

·

Équilibre entre soins psychiatriques et détention : enjeux de la privation de liberté.

L’Essentiel : Monsieur [J] a été admis en hospitalisation complète sans consentement, sur décision de la cour d’appel de Rennes, en date du 1er décembre 2023, en vertu de l’article 706-135 du Code de procédure pénale. Le 13 novembre 2024, le représentant de l’État a demandé la prolongation de cette mesure. Bien que l’avis du collège indique une amélioration de son état clinique, Monsieur [J] a commis de nouveaux actes délictueux durant ses permissions de sortie. Le tribunal a finalement décidé de maintenir son hospitalisation complète, décision susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Admission en hospitalisation complète

Monsieur [J] a été admis en hospitalisation complète sans son consentement sur décision de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, en date du 1er décembre 2023. Cette décision a été prise en vertu de l’article 706-135 du Code de procédure pénale, en lien avec des faits d’atteinte aux personnes passibles d’une peine d’emprisonnement d’au moins 5 ans. Le maintien de cette mesure a été confirmé par le juge des libertés et de la détention le 28 mai 2024.

Procédure de prolongation de l’hospitalisation

Le 13 novembre 2024, le représentant de l’État a saisi le juge des libertés et de la détention pour poursuivre la mesure d’hospitalisation complète. L’avis du collège requis par l’article L3211-12 II du Code de la santé publique a également été émis à cette date. Monsieur [J] étant en détention pour exécution de peine correctionnelle, son extraction pour l’audience n’a pas pu être organisée.

Examen des conditions de l’hospitalisation

Selon l’article L3211-12-1 du Code de la santé publique, la poursuite de l’hospitalisation complète au-delà de six mois nécessite un examen par le juge des libertés et de la détention. Ce dernier doit vérifier la régularité de la procédure de soins psychiatriques sans consentement et s’assurer que les conditions de nécessité et de proportionnalité de la privation de liberté sont respectées.

État clinique et avis du collège

L’avis du collège, daté du 13 novembre 2024, indique une amélioration de l’état clinique de Monsieur [J], qui a bénéficié de permissions de sortie. Cependant, durant ces permissions, il a commis de nouveaux actes délictueux, entraînant sa condamnation et son incarcération. Le collège conclut que son état clinique ne justifie plus une hospitalisation en psychiatrie adulte.

Conséquences de la situation

La situation est paradoxale, car Monsieur [J], initialement hospitalisé comme irresponsable pénal, se retrouve sous un régime de détention après avoir commis de nouveaux faits. Le juge, lié par le régime initial, ne peut lever la mesure sans ordonner deux expertises psychiatriques, ce qui n’est pas mentionné dans le dossier. Ainsi, le maintien de la procédure de soins sous contrainte semble inévitable à ce stade.

Décision finale

Le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation complète de Monsieur [J] au CH Universitaire de [Adresse 2]. Cette décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours suivant sa notification. Elle est également assortie de l’exécution provisoire, et les dépens sont laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de la contestation de la saisie-attribution par la SAS MADECAV ?

La recevabilité de la contestation de la saisie-attribution est régie par les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ces articles stipulent que toute contestation relative à la saisie doit être formée dans un délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur.

En l’espèce, la SAS MADECAV a contesté la saisie-attribution par une assignation délivrée le 29 août 2024, alors que la dénonciation de la saisie avait été effectuée le 2 août 2024.

Ainsi, la contestation était recevable jusqu’au 3 septembre 2024.

La SAS MADECAV a justifié l’envoi d’un courrier recommandé à l’huissier le 30 août 2024, ce qui confirme la recevabilité de sa contestation.

Par conséquent, la SAS MADECAV est déclarée recevable dans sa contestation de la saisie-attribution.

Le sursis à statuer est-il justifié dans cette affaire ?

L’article 378 du Code de procédure civile prévoit que « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

Dans cette affaire, la SAS MADECAV a demandé un sursis à statuer en raison de l’appel interjeté contre l’ordonnance du tribunal de commerce.

Cependant, l’ordonnance du 18 juin 2024 est assortie de l’exécution provisoire, conformément à l’article 514 du Code de procédure civile.

Cela signifie qu’elle est exécutoire de plein droit, même si elle n’est pas définitive.

Le fait que la SAS MADECAV ait interjeté appel ne justifie pas un sursis à statuer, d’autant plus que l’appel a été radié.

Ainsi, la demande de sursis à statuer sera rejetée.

Quelles sont les conditions pour ordonner la mainlevée de la saisie-attribution ?

L’article L211-1 du Code des procédures civiles d’exécution stipule que « tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur. »

Dans le cas présent, la créance invoquée par la SAS MAUI est considérée comme certaine, liquide et exigible, et l’ordonnance du tribunal de commerce constitue un titre exécutoire valide.

Les arguments de la SAS MADECAV concernant l’existence de la créance relèvent de l’appréciation des juges du fond et ne peuvent être examinés dans le cadre de cette procédure.

Par conséquent, la demande de mainlevée de la saisie-attribution sera rejetée.

La SAS MADECAV peut-elle obtenir des dommages et intérêts en raison de la saisie ?

L’article L121-2 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que « le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d’abus de saisie. »

Cependant, dans cette affaire, la saisie-attribution est fondée et ne peut être qualifiée d’abusive.

N° RC 24/02089
Minute n°
_____________

Soins psychiatriques
relatifs à monsieur
[E] [J]
________

ADMISSION
SUR DÉCISION
DU REPRÉSENTANT
DE L’ETAT

MINUTES DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
__________________________________

ORDONNANCE
DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION
DU 26 novembre 2024
____________________________________

Juge des libertés et de la détention :
François PERNOT

Greffière :
Claire HALES-JENSEN

Débats à l’audience du 26 novembre 2024 CH SPECIALISE DE [Localité 1]

DEMANDEUR (ayant formalisé l’hospitalisation) :
Le préfet de la Loire-Atlantique

Non comparant, régulièrement convoqué

DÉFENDEUR (personne faisant l’objet des soins) :
Monsieur [E] [J]

Non comparant (détenu), régulièrement convoqué, représenté par maître Samy ROBERT, avocat au barreau de NANTES, commis d’office,

Sous curatelle renforcée confiée à l’UDAF 44

Non comparante, régulièrement convoquée

Théoriquement hospitalisé au CH UNIVERSITAIRE [Adresse 2]

Comparant en la personne de madame [O]

Ministère Public :

Avisé, non comparant,
Observations écrites du 25 novembre 2024.

Nous, François PERNOT, juge des libertés et de la détention, chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés prévues par le Code de la santé publique, assisté de Claire HALES-JENSEN, greffière, statuant en audience publique,

Vu l’acte de saisine émanant de monsieur le PREFET DE LA LOIRE-ATLANTIQUE en date du 13 novembre 2024, reçu au greffe le 13 novembre 2024, concernant monsieur [E] [J] et tendant à la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète dont cette personne fait l’objet sur le fondement des articles L3212-1 et suivants du Code de la santé publique,

Vu les articles L3211-1, L3211-12-1 et suivants et R3211-7 et suivants du Code de la santé publique,

Vu les avis et pièces transmises par le directeur de l’établissement,

Vu les convocations régulières à l’audience du 26 novembre 2024 de monsieur [E] [J], de son conseil, du directeur de l’établissement où séjourne la personne hospitalisée, de sa curatrice, du représentant de l’Etat et l’avis d’audience donné au procureur de la République, qui tend au maintien de la mesure.

EXPOSÉ DE LA SITUATION

Monsieur [J] a été admis en hospitalisation complète sans son consentement sur décision de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes du 1er décembre 2023 sur le fondement de l’article 706-135 du Code de procédure pénale et dans le cadre de faits relevant d’une atteinte aux personnes punie d’une peine d’emprisonnement d’au moins 5 ans. Une décision du juge des libertés et de la détention a maintenu cette mesure le 28 mai 2024.

Par requête reçue le 13 novembre 2024, le représentant de l’État dans la département a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de poursuite de la mesure d’hospitalisation complète ; l’avis du collège exigé par l’article L3211-12 II du Code de la santé publique est en date du 13 novembre 2024.

Monsieur [J] est détenu en exécution de peine correctionnelle et il n’a pas été possible d’organiser son extraction pour la présente audience. Son conseil s’en rapporte à justice sur cette situation.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que les dispositions de l’article L3211-12-1 du Code de la santé publique exigent que la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète au-delà de 6 mois depuis la dernière décision concernant un patient admis dans le cadre des dispositions de l’article 706-135 du Code de procédure pénale fasse l’objet d’un examen par le juge des libertés et de la détention, saisi par le représentant de l’Etat dans le département ;

Attendu que l’article R3211-24 du même code dispose que l’avis médical joint à la saisine du juge des libertés et de la détention doit décrire avec précision les manifestations des troubles mentaux dont est atteinte la personne qui bénéficie de soins psychiatriques et les circonstances particulières qui, toutes deux, rendent nécessaire la poursuite de l’hospitalisation complète au regard des conditions posées par l’article L3213-1 ; que le juge des libertés et de la détention contrôle donc la régularité formelle de l’ensemble de la procédure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l’hospitalisation complète et la réunion des conditions de fond de cette dernière au regard de sa nécessité et de la proportionnalité de la privation de liberté ainsi imposée à la personne hospitalisée ;

Attendu que s’agissant en outre d’une hospitalisation s’inscrivant dans le cadre de l’article 706-135 du Code de procédure pénale pour des faits relevant d’une atteinte aux personnes punie d’une peine d’emprisonnement d’au moins 5 ans, il doit être fait application des dispositions des articles L3211-12 II, L3211-12-1 II et III alinéa 3 du même code qui exigent d’une part que le juge des libertés et de la détention ne statue qu’avec un avis émanant du collège mentionné à l’article L3211-9 et d’autre part qu’aucune main-levée n’intervienne sans deux expertises préalables établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L.3213-5-1 ;

Attendu que la procédure apparaît régulière ;

Attendu sur le fond que l’avis du collège daté du 13 novembre 2024 indique que l’état clinique de monsieur [J] s’était amélioré, qu’il avait bénéficié de permissions de sortir et s’en était octroyé d’autres, au cours desquelles il avait commis des faits délictueux lui ayant valu condamnation et incarcération ; que le collège estime que son état clinique actuel ne relève pas d’une hospitalisation en psychiatrie adulte ;

Attendu que la situation est effectivement curieuse, puisque monsieur [J], hospitalisé en son temps comme irresponsable pénal, semble avoir commis de nouveaux faits pour lesquels sa responsabilité n’a pas été écartée, de sorte qu’au lieu de se trouver sous un régime de soins il se trouve sous un régime de détention…

Mais attendu que le juge, tenu par le régime initial, ne pourrait ordonner la levée de la mesure sous contrainte qu’en ordonnant au préalable deux expertises psychiatriques comme le prévoient les textes, ce qui n’est nulle part évoqué dans le dossier ;

Attendu dès lors qu’à ce stade, il apparaît difficile de ne pas maintenir la procédure de soins sous contrainte ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par décision rendue en premier ressort,

Autorisons le maintien de l’hospitalisation complète de monsieur [E] [J] au CH UNIVERSITAIRE DE [Adresse 2],

Rappelons que cette décision peut être frappée d’appel dans un délai de 10 jours à compter du jour de réception de sa notification ; le recours doit être formé par déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel de Rennes,

Disons que la présente décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

La greffière Le juge des libertés et de la détention

Claire HALES-JENSEN François PERNOT

Copie conforme de la présente ordonnance a été délivrée le 26 Novembre 2024 à :

– [E] [J]
– UDAF 44
– Le Préfet de la Loire-Atlantique
– Me Samy ROBERT
– M. le Procureur de la République
– Monsieur le Directeur du CH UNIVERSITAIRE [Adresse 2]

La greffière,


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon