L’Essentiel : Mme. [J] a demandé la restitution d’un trop-perçu de loyers de 1 883 euros, contestée par la société Homya, qui a justifié le loyer de 30,50 euros le m² par des travaux d’amélioration. Lors de l’audience, Mme. [J] a soutenu que le loyer était injustifié en raison de la qualité médiocre des rénovations. La décision a condamné Homya à restituer 944 euros pour le complément de loyers, tandis que Mme. [J] a été condamnée à payer 798,95 euros pour le solde des loyers dus. Les dépens ont été partagés, sans application de l’article 700 du code de procédure civile.
|
Contexte de la DemandePar requête reçue le 17 mai 2024, Mme. [J] a demandé la convocation de la société Homya pour obtenir la restitution d’un trop-perçu de loyers s’élevant à 1 883 euros, ainsi que 60 euros pour ses frais. Elle conteste le montant du loyer en raison de non-respect de la réglementation sur l’encadrement des loyers et d’une erreur de classification énergétique de l’appartement. Arguments de Mme. [J]Lors de l’audience du 15 octobre 2024, Mme. [J] a soutenu que le loyer était injustifié, en raison de la qualité médiocre des rénovations effectuées et du remplacement des meubles de cuisine par des modèles de moindre qualité. Elle a demandé une révision du loyer à 25,40 euros le m², ainsi qu’un gel de ce loyer jusqu’à l’isolation complète de l’appartement. Elle a également réclamé le remboursement des loyers pour la période entre la facturation et la remise des clés, ainsi que des frais de déplacement. Position de la Société HomyaLa société Homya a contesté les demandes de Mme. [J] et a demandé le paiement de 795,98 euros pour loyers et charges dus, ainsi que 1 000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile. Elle a justifié le loyer de 30,50 euros le m² par des travaux d’amélioration significatifs réalisés dans l’appartement, incluant une cuisine aménagée et un balcon. Éléments de la DécisionLe contrat de location stipule que Mme. [J] a pris à bail un appartement pour un loyer de 1 464 euros, avec un complément de loyer de 40 euros. Les travaux effectués par la société Homya ont été jugés suffisants pour justifier l’augmentation du loyer, qui ne dépasse pas le plafond légal. La contestation de Mme. [J] sur le montant du loyer principal a été rejetée. Analyse du Complément de LoyerMme. [J] a contesté le complément de loyer en saisissant la commission de conciliation, puis le tribunal. La société Homya a justifié ce complément par la présence d’une cuisine équipée et d’un balcon. Cependant, il a été déterminé que ces caractéristiques ne justifiaient pas un complément de loyer, car elles ne dépassent pas les standards des logements comparables dans la région. Conclusion de la DécisionLa société Homya a été condamnée à restituer à Mme. [J] la somme de 944 euros pour le complément de loyers. En revanche, Mme. [J] a été condamnée à payer 798,95 euros à la société Homya pour le solde des loyers dus. Les dépens ont été partagés entre les deux parties, et aucune application de l’article 700 du code de procédure civile n’a été ordonnée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de réévaluation du loyer selon la réglementation sur l’encadrement des loyers ?La réévaluation du loyer est encadrée par plusieurs dispositions législatives, notamment l’article 3 du décret du 27 juillet 2017, modifié par le décret du 29 juillet 2022, et l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018. L’article 3 stipule que : « Lorsqu’un local vacant fait l’objet d’une nouvelle location, le loyer du nouveau contrat ne peut excéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire. » Cependant, l’article 4 précise que : « Le loyer peut être réévalué lorsque le bailleur a réalisé depuis la conclusion du contrat initial des travaux d’amélioration portant sur les parties privatives ou les parties communes pour un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer, la hausse ne pouvant excéder 15% du coût réel des travaux TTC. » Ainsi, pour qu’une augmentation de loyer soit justifiée, il est nécessaire que les travaux réalisés soient significatifs et que leur coût soit proportionnel au loyer précédent. Comment se justifie le complément de loyer dans le cadre de l’encadrement des loyers ?Le complément de loyer est soumis à des conditions spécifiques, comme le stipule l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018. Cet article indique que : « Dans les territoires où s’applique cette réglementation, le loyer des logements mis en location est librement fixé entre les parties dans la limite du loyer de référence majoré. Un complément de loyer peut être appliqué au loyer de base pour des logements présentant des caractéristiques de confort le justifiant par comparaison avec les logements de même catégorie situés dans le même secteur géographique. » Pour qu’un complément de loyer soit justifié, il doit être fondé sur des caractéristiques de confort qui dépassent celles des logements comparables. Dans le cas présent, la société Homya a tenté de justifier le complément de loyer par la présence d’une cuisine équipée neuve et d’un balcon. Cependant, la décision souligne que ces éléments ne sont pas suffisants pour justifier un complément, car ils ne présentent pas un caractère exceptionnel par rapport aux autres logements de la résidence. Quel est le rôle de la commission de conciliation dans les litiges relatifs aux loyers ?La commission de conciliation joue un rôle crucial dans la résolution des litiges liés aux loyers, comme le précise l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018. Cet article stipule que : « Le locataire qui souhaite contester le complément de loyer dispose d’un délai de 3 mois à compter de la signature du bail pour saisir la commission de conciliation. » Dans cette affaire, Mme. [J] a saisi la commission de conciliation dans le délai imparti, ce qui a permis de rendre sa demande recevable devant le tribunal. La commission a pour mission de tenter de trouver un accord entre le bailleur et le locataire avant que le litige ne soit porté devant la juridiction compétente. Quelles sont les conséquences de la décision de justice sur les demandes de remboursement de loyers ?La décision de justice a des conséquences directes sur les demandes de remboursement de loyers. En l’espèce, le tribunal a condamné la société Homya à restituer à Mme. [J] la somme de 944 euros, correspondant au complément de loyers indûment perçu. En revanche, Mme. [J] a été condamnée à payer à la société Homya la somme de 798,95 euros, représentant le solde des loyers dus. Cette décision illustre le principe selon lequel chaque partie doit prouver ses prétentions et que le tribunal statue en fonction des éléments de preuve fournis. Les dépens ont été partagés entre les parties, ce qui est une pratique courante dans les litiges locatifs. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Le :
Copie conforme délivrée
à :
Copie exécutoire délivrée
à : Mme [J]
Me MOUREAU
Pôle civil de proximité
■
PCP JCP requêtes
N° RG 24/05125 – N° Portalis 352J-W-B7I-C45KN
N° MINUTE :
2/2024
JUGEMENT
rendu le mardi 19 novembre 2024
DEMANDERESSE
Madame [S] [J], demeurant [Adresse 1]
comparante en personne
DÉFENDERESSE
S.A.S. HOMYA M. [W] [Y], dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Maître Fabienne MOUREAU-LEVY de l’AARPI MLP AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #K0073
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Cécile THARASSE, Juge, juge des contentieux de la protection
assistée d’Arjun JEYARAJAH, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 15 octobre 2024
JUGEMENT
contradictoire, en dernier ressort, prononcé par mise à disposition le 19 novembre 2024 par Cécile THARASSE, Juge assistée d’Arjun JEYARAJAH, Greffier
Décision du 19 novembre 2024
PCP JCP requêtes – N° RG 24/05125 – N° Portalis 352J-W-B7I-C45KN
Par requête reçue au greffe le 17 mai 2024, Mme. [J] a sollicité la convocation de la société Homya aux fins d’obtenir la restitution de la somme de 1 883 euros représentant un trop-perçu de loyers pour l’appartement situé [Adresse 1] à [Localité 5], outre 60 euros au titre de ses frais.
A l’audience du 15 octobre 2024 Mme. [J] a fait valoir au soutien de ses demandes que le bailleur n’avait pas respecté la règlementation sur encadrement des loyers et que de surcroît, l’appartement avait par erreur été classé C au titre de la performance énergétique. Elle estime notamment que le supplément de loyer n’est pas justifié et que les meubles de cuisine avaient été changés après la visite pour des meubles de qualité moindre, enfin que la rénovation est de qualité très médiocre.
Elle demande donc que le loyer soit revu pour atteindre au maximum le loyer de référence moyen de 25,40 euros le m² et que ce loyer soit gelé jusqu’à isolation complète à titre de pénalité.
Elle sollicite en outre le remboursement du prorata de loyers entre la date de départ de facturation et la remise des clés ainsi que le remboursement de 4 aller-retours pour se déplacer à la préfecture et au tribunal, soit 140 euros
La société Homya a conclu au débouté de ces prétentions et a sollicité à titre reconventionnel le paiement d’une somme de 795,98 euros au titre des loyers et charges échus au 2 octobre 2024 ainsi que de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. A titre subsidiaire elle demande que le trop-perçu pour le complément de loyer soit fixé à la somme de 944 euros.
Elle fait valoir que compte tenu des travaux importants effectués dans le logement, le loyer a été fixé à la somme de 30,50 euros le m², montant du loyer de référence majoré et que le complément de loyer est justifié par l’existence d’une cuisine aménagée et semi équipée neuve et un balcon orientation Est de 3,99 m².
Vu la requête introductive d’instance et les conclusions déposées par la société Homya à l’audience du 15 octobre 2024, développées oralement lors des débats ;
Il résulte des pièces versées aux débats que selon contrat de location à effet au 24 novembre 2022, Mme. [J] a pris à bail un appartement situé [Adresse 1] à [Adresse 3] d’une surface habitable de 48 m² moyennant un loyer mensuel de 1 464 euros et un complément de loyer de 40 euros.
Il était précisé que le loyer du précédent locataire était de 1 400,89 euros, que le nouveau loyer était fixé en raison des travaux d’amélioration effectués dans le logement et que le complément de loyer était justifié par la pose d’une cuisine équipée neuve et d’un balcon de 3,99 m² orienté Est.
L’article 3 du décret du 27 juillet 2017, tel que modifié par le décret du 29 juillet 2022 prévoit que lorsqu’un local vacant fait l’objet d’une nouvelle location, le loyer du nouveau contrat ne peut exéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire. L’article 4 du même texte édicte cependant que le loyer peut être réévalué lorsque le bailleur a réalisé depuis la conlusion du contrat inital des travaux d’amélioration portant sur les parties privatives ou les parties communes pour un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer, la hausse ne pouvant excéder 15% du coût réel des travaux TTC.
Il résulte par ailleurs de l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018 relatif à l’encadrement des loyers que dans les territoires où s’applique cette règlementation, ce qui est le cas à [Localité 4], le loyer des logements mis en locataion est librement fixé entre les parties dans la limite du loyer de référence majoré. Un complément de loyer peut être appliqué au loyer de base pour des logements présentant des caractéristiques de confort le justifiant par comparaison avec les logements de même catégorie situés dans le même secteur géographique.
Le locataire qui souhaite contester le complément de loyer dispose d’un délai de 3 mois à compter de la signature du bail pour saisir la commission de conciliation.
Sur le loyer principal
En l’espèce, le bailleur justifie avoir effectué à l’automne 2022, après le départ du précédent locataire, des travaux d’un montant de 26 084 euros portant notamment sur la rénovation de l’électricité, la pose d’une serrure de sécurité, la réfection totale de la salle de bains avec pose d’une douche, le ponçage et la vitrification des parquets, la remise en peinture, la fourniture et pose de meubles de cuisine d’une hotte et d’une plaque vitro-céramique, la peinture du balcon.
Ces travaux excèdent notablement la moitié du loyer annuel acquitté par le précédent locataire et constituent pour partie des améliorations. La société Homya était donc fondée à pratiquer une augmentation d’un montant mensuel de 64 euros.
Il apparaît par ailleurs que le loyer de 1 464 euros n’excède pas le loyer plafond lequel est pour la période considérée de 30,50 euros pour 48 m².
Mme. [J] ne saurait donc contester le montant du loyer principal, quand bien même le diagnostic serait sujet à caution, étant observé que rien ne permet d’affirmer que la classe énergétique n’est pas celle relevée par le technicien.
Sur le complément de loyer
En l’espèce Mme. [J] a saisi le 20 janvier 2023 la commission de conciliation d’une contestation concernant le complément de loyer. En l’absence de conciliation elle a saisi la juridiction le 7 avril 2024. Sa demande est donc recevable.
Le bailleur justifie du complément de loyer par la fourniture d’une cuisine équipée neuve et d’un balcon de 3,99 m².
Néanmoins, au sens de la loi sur l’encadrement des loyers, seuls peuvent justifier un complément de loyer des caractéristiques de confort excédant largement les caractéristiques de logements comparables, tels à titre d’exemple une vue exceptionnelle, une terrasse ou jardin privatif, des meubles ou aménagements luxueux au regard de logements équivalents.
Tel n’est pas le cas en l’espèce, puisque l’ensemble des logements de cette résidence de très grande taille comportent des balcons, que l’existence d’un balcon est courante dans les appartements parisiens construits dans les années 1970 et que rien n’établit que la cuisine, d’une valeur d’environ 6 000 euros, soit particulièrement luxueuse.
La société Homya sera par conséquent condamnée à restituer le complément de loyers, à savoir 40 x 23,6 mois = 944 euros.
Sur le solde locatif
La société Homya produit aux débats un relevé de compte à la date du 2 octobre 2024 faisant apparaître un solde locatif de 798,95 euros. Mme. [J], à laquelle il incombe de prouver qu’elle s’est libérée de sa dette, ne justifie en aucune manière du paiement.
La demanderesse ne produit par ailleurs aucun justificatif de la date de remise des clés.
Il convient par conséquent de la condamner à payer la somme de 798,95 euros.
Les dépens seront supportés par moitié par chacune des parties.
Ni l’équité, ni la situation des parties ne commandent de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,
Condamne la société Homya à payer à Mme. [J] la somme de 944 ( neuf cent quarante quatre) euros, à titre de restitution du complément de loyers,
Condamne Mme. [J] à payer à la société Homya la somme de 798,95 euros ( sept cent quatre vingt dix huit euros et quatre vingt quinze centimes) à titre de solde de loyers au 2 octobre 2024,
Déboute Mme. [J] du surplus de ses demandes,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Fait masse des dépens qui seront supportés par moitié par chacune des parties,
Rappelle que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
Fait à PARIS, le 19 novembre 2024
le greffier le Juge
Laisser un commentaire