Élections professionnelles et respect de la mixité : enjeux et interprétations.

·

·

Élections professionnelles et respect de la mixité : enjeux et interprétations.

L’Essentiel : Le 28 novembre 2024, l’Union Locale CGT de [Localité 13] et Messieurs [V], [J] et [R] ont demandé l’annulation des élections du 2ème collège du CSE de POLYREVA, invoquant le non-respect des listes électorales. Ils soulignent que la liste de la CFTC, exclusivement masculine, contrevient à l’article L 2314-30 du code du travail, qui impose une représentation mixte. La CFTC et POLYREVA ont demandé le rejet de cette requête, arguant que la proportion de femmes dans l’entreprise justifiait leur liste. Le tribunal a finalement débouté les demandeurs le 28 janvier 2025, rejetant également les demandes de frais.

Contexte de la Demande

Par une requête datée du 28 novembre 2024, l’Union Locale CGT de [Localité 13] ainsi que Messieurs [V], [J] et [R] ont sollicité l’annulation des élections des membres titulaires et suppléants du 2ème collège du CSE de la société POLYREVA, qui se sont tenues le 22 novembre 2024. Cette demande repose sur le non-respect des listes électorales.

Arguments des Demandeurs

Les demandeurs soutiennent que le Plan d’Action de Prévention (PAP) stipule une répartition de 19,05% de femmes et 80,95% d’hommes au sein du collège, avec deux postes à pourvoir pour les titulaires et deux pour les suppléants. Ils affirment que la liste présentée par la CFTC, composée uniquement d’hommes, contrevient au principe de mixité établi par l’article L 2314-30 du code du travail. Ils renoncent à un argument initial concernant le vote d’un électeur non éligible.

Position de la CFTC

La CFTC a demandé le rejet des demandes des requérants et a proposé, à titre subsidiaire, que l’annulation soit limitée à l’élection de Monsieur [X] en tant que membre titulaire et de Monsieur [N] en tant que membre suppléant. Elle a également réclamé 1500 € pour couvrir les frais irrépétibles, arguant que la proportion de femmes dans l’entreprise permettait d’exclure leur représentation sur les listes.

Arguments de la Société POLYREVA

La société POLYREVA a également demandé le rejet des demandes des requérants, soutenant les mêmes arguments que la CFTC. Elle a plaidé pour que l’annulation se limite à l’élection de Messieurs [X] et [N].

Analyse Juridique

Selon l’article L 2314-30 du code du travail, les listes électorales doivent refléter la proportion de femmes et d’hommes inscrits. Dans ce cas, le 2ème collège comptait 4 femmes et 17 hommes, ce qui représente 19,05% de femmes. Étant donné que le nombre de postes à pourvoir était de 2, le calcul a abouti à une représentation féminine arrondie à 0, permettant ainsi à la CFTC de présenter une liste exclusivement masculine.

Décision du Tribunal

Le tribunal a statué par jugement public, déboutant les demandeurs de toutes leurs demandes et rejetant les demandes relatives aux frais irrépétibles. La décision a été rendue au Palais de Justice de Bobigny le 28 janvier 2025.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le cadre légal concernant la représentation des sexes dans les élections des CSE ?

L’article L 2314-30 du Code du travail précise les règles relatives à la composition des listes électorales pour les élections des Comités Sociaux et Économiques (CSE).

Cet article stipule que :

« Les listes qui comportent plusieurs candidats sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale. »

Il est également mentionné que, dans le cas où l’application des règles de proportionnalité conduit à exclure totalement la représentation d’un sexe, les listes peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues.

Dans le litige en question, le 2ème collège était composé de 4 femmes et 17 hommes, soit 19,05% de femmes et 80,95% d’hommes.

Le nombre de postes à pourvoir étant de 2, le calcul pour le sexe féminin était de 2 x 19,05/100 = 0,38, arrondi à 0, et pour le sexe masculin, 2 x 80,95/100 = 1,61, arrondi à 2.

Ainsi, la CFTC pouvait valablement présenter des listes de candidats composées d’hommes exclusivement, conformément à la législation en vigueur.

Quelles sont les conséquences d’une violation des règles de représentation des sexes ?

En cas de non-respect des règles de représentation des sexes, les conséquences peuvent inclure l’annulation des élections.

Cependant, l’article L 2314-30 du Code du travail précise que si la proportion de candidats d’un sexe est inférieure à 0,5, cela permet d’exclure la représentation du sexe féminin.

Dans le cas présent, la CFTC a présenté une liste composée uniquement d’hommes, ce qui était conforme à la législation, étant donné que le calcul a montré qu’aucune femme n’était requise sur la liste.

Il est important de noter que la sanction ne peut être que l’annulation de l’élection de l’élu du sexe surreprésenté en surnombre, ce qui a été soutenu par la CFTC dans ses arguments.

Dans cette affaire, le tribunal a débouté les demandeurs de toutes leurs demandes, considérant que les élections avaient été menées conformément aux dispositions légales.

Comment les frais irrépétibles sont-ils traités dans ce type de litige ?

Les frais irrépétibles, qui sont les frais engagés par une partie pour la défense de ses droits devant le tribunal, sont régis par l’article 700 du Code de procédure civile.

Cet article stipule que :

« Le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. »

Dans le jugement rendu, le tribunal a décidé qu’il était équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu’elles ont exposés.

Cela signifie que, même si une partie a perdu, elle ne peut pas récupérer ses frais de justice de l’autre partie, ce qui est une pratique courante dans les litiges de ce type.

Ainsi, le tribunal a rejeté les demandes au titre des frais irrépétibles, soulignant que chaque partie devait assumer ses propres coûts.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-
Élection professionnelle
N° du dossier : N° RG 24/12034 – N° Portalis DB3S-W-B7I-2LFB

JUGEMENT DU 28 JANVIER 2025
MINUTE N° 25/00002
—————-

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Monsieur Ulrich SCHALCHLI, Vice-Président
Greffier : Madame Valérie RAJASINGAM

DÉBATS :

Audience publique du 14 Janvier 2025
Affaire mise en délibéré au 28 JANVIER 2025

JUGEMENT :

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe le 28 JANVIER 2025 par Monsieur Ulrich SCHALCHLI, Vice-Président assisté de Madame Valérie RAJASINGAM, Greffier

ENTRE :

Syndicat L’UNION LOCALE CGT DE [Localité 13], dont le siège social est sis [Adresse 8]

représentée par Maître Laurence CAMBONIE de l’AARPI CAMBONIE BERNARD, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB183

Monsieur [D] [U] [V], demeurant [Adresse 6]

représenté par Maître Laurence CAMBONIE de l’AARPI CAMBONIE BERNARD, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB183

Monsieur [L] [F] [J], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne et assisté de Maître Laurence CAMBONIE de l’AARPI CAMBONIE BERNARD, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB183

Monsieur [Z] [R], demeurant [Adresse 9]

comparant en personne et assisté de Maître Laurence CAMBONIE de l’AARPI CAMBONIE BERNARD, avocats au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB183

ET :

Syndicat DEPARTEMENTAL CFTC, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représenté par Me Alexandre DEVILLERS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC 333

Société POLYREVA, dont le siège social est sis [Adresse 11]

représentée par Maître Gaëlle LE BRETON de l’AARPI GOWLING WLG (France) AARPI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0127

Monsieur [H] [M], demeurant [Adresse 5]

non comparant, ni représenté

Monsieur [G] [X], demeurant [Adresse 12]

non comparant, ni représenté

Monsieur [Y] [A], demeurant [Adresse 4]

comparant en personne

Monsieur [P] [N], demeurant [Adresse 10]

comparant en personne

Monsieur [O] [W] [I], demeurant [Adresse 1]

non comparant, ni représenté

Monsieur [E] [B] [T], demeurant [Adresse 7]

non comparant, ni représenté

Copie exécutoire délivrée à : Maître Laurence CAMBONIE de l’AARPI CAMBONIE BERNARD, Maître Gaëlle LE BRETON de l’AARPI GOWLING WLG (France) AARPI, Me Alexandre DEVILLERS
Copie certifiée délivrée aux parties par LRAR
Le 28 JANVIER 2025

EXPOSE DU LITIGE

Par requête du 28 novembre 2024, l’Union Locale CGT de [Localité 13] et Messieurs [V], [J] et [R] demandent que soit annulé le vote des membres titualires et suppléants du 2ème collège du CSE de la société POLYREVA, élections ayant eu lieu le 22 novembre 2024 au regard du non-respect des listes électorales.

Subsidiairement ils demandent que soient annulées les élections de Messieurs [M] et [X] en qualité de membres titulaires du 2ème collège et de Messieurs [A] et [N] en qualité de membres suppléants du 2ème collège.

Ils font valoir que le PAP précise que la répartition au sein de ce collège est de 19,05% de femmes et de 80,95% de’hommes, que le nombre de postes à pourvoir est de deux titulaires et deux suppléants et que la liste de la CFTC comportait 2 hommes pour les titualires et 2 hommes pour les suppléants, violant ainsi le principe de mixité établi par l’article L 2314-30 du code du travail.

Ils renoncent expressément à leur moyen initialement développé relatif au vote d’un électeur n’appartenant pas à l’effectif de l’entreprise.

La CFTC conclut au débouté des demandeurs en leurs prétentions et demande subsidiairement que l’annulation soit limitée à l’élection de Monsieur [X] en qualité de membre titulaire et de Monsieur [N] en qualité de membre suppléant.

Elle demande 1500 € au titre des frais irrépétibles.

Elle fait valoir que compte tenu de la proportion hommes/femmes dans l’entreprise et du nombre de sièges à pourvoir, le nombre de femmes devant figurer sur chaque liste est de 0,38 inférieur à 0,5; ce qui permet d’exclure la représentation du sexe féminin.

Subsidiairement, elle soutient que la sanction ne peut être que l’annulation de l’élection de l’élu du sexe surreprésenté en surnombre.

La société POLYREVA conclut au débouté des demandeurs en leurs prétentions et subsidiairement à la seule annulation de l’élection de Messieurs [X] et [N] en faisant valoir les mêmes arguments que la CFTC.

MOTIFS

Selon l’article L 2314-30 du code du travail, les listes qui comportent plusieurs candidats sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes inscrits sur la liste électorale;

Lorsque l’application des règles de proportionnalité et de l’arrondi à l’entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5 conduit, au regard du nombre de sièges à pourvoir, à exclure totalement la représentation de l’un ou l’autre sexe, les listes électorales peuvent comporter un candidat du sexe sous-représenté, sans que les organisations syndicales y soient tenues;

En l’espèce, le 2ème collège était composé de 4 femmes et 17 hommes, soit 19,05% de femmes et 80,95% d’hommes;

Le nombre de postes à pourvoir étant de 2, le nombre de candidats de sexe féminin devait être de 2×19,05/100= 0,38, arrondi à 0 et le nombre de candidats de sexe masculin de 2X80,95/100=1,61, arrondi à 2;

La CFTC pouvait donc valablement présenter des listes de candidats composées d’hommes exclusivement;

Il est équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu’elles ont exposés;

PAR CES MOTIFS,

Statuant par jugement public, réputé contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

– Déboute les demandeurs de toutes leurs demandes;

– Rejette les demandes au titre des frais irrépétibles;

– Sans frais.

AINSI JUGÉ AU PALAIS DE JUSTICE DE BOBIGNY, LE 28 JANVIER 2025.

LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon