Echec de l’action en contrefaçon : la force de l’action en parasitisme 

·

·

Echec de l’action en contrefaçon : la force de l’action en parasitisme 
L’Essentiel : L’échec d’une action en contrefaçon peut être compensé par une action en parasitisme, où la charge de la preuve incombe à la victime. Celle-ci doit prouver que ses modèles ont une valeur économique et que l’auteur des actes fautifs s’en est inspiré pour obtenir un avantage concurrentiel. La société Tolix, pionnière dans le mobilier industriel, a démontré sa notoriété à travers des investissements significatifs en communication et marketing, ainsi qu’une présence dans des musées prestigieux. En proposant des copies de ses produits, un concurrent a indûment profité de ces efforts, justifiant ainsi une condamnation pour parasitisme

Pour parer à l’échec d’une action en contrefaçon pensez à l’action en parasitisme.  En matière de parasitisme, la charge de la preuve incombe à la victime qui doit démontrer, à la fois, que ses modèles représentent une valeur économique individualisée et que l’auteur des actes fautifs s’en est inspiré à titre lucratif, afin de se procurer un avantage concurrentiel indu. Les dépenses de communication et de marketing contient un critère déterminant  pour les juridictions. 

La preuve des investissements

Dans cette affaire, la société Tolix a démontré produire et exploiter ses modèles de chaise et de tabourets depuis près d’un siècle, se présentant, de manière non démentie, comme une pionnière dans la création de ce type de mobilier industriel et robuste. 

Elle démontre en outre, par la production d’une revue de presse particulièrement dense, constituée d’articles issus de la presse régionale, nationale et internationale, s’étalant sur une période de plus de 10 ans, la notoriété de sa chaise «A» et de son tabouret « H » souvent associés, présentés comme des icônes du design industriel français, notoriété confirmée par l’exposition de la chaise « A » dans de grands musées de design en France et dans le monde et notamment au musée [4] à [Localité 3], au Vitra Design Muséum en Allemagne ou au MoMa à New-York.

Dépenses de communication et de marketing conséquentes

La société Tolix justifie également engager chaque année des dépenses de communication et de marketing conséquentes, soit plus de 1,8 millions d’euros durant les dix dernières années, et également participer régulièrement à des événements de portée nationale ou internationale (participation à Masterchef ou Topchef, à des salons à Milan, Stockholm) ou encore avoir édité en 2018 une série de timbres à l’effigie de la chaise «A».

Elle justifie ainsi entretenir la notoriété de sa marque et de ses produits auprès du public comme le démontre la forte présence de ses mobiliers dans de nombreux articles de presse et magazines de décoration notamment, qui mettent en avant également leur qualité.

La chaise «A» et les tabourets « H » et « HPD » sont ainsi représentés à de très nombreuses reprises, associés par ailleurs au nom de la société Tolix, se présentant comme une entreprise française soucieuse de préserver son savoir-faire et défendant une fabrication française de grande qualité de ses produits, connus ainsi pour leur grande durabilité. De très nombreux articles relatent en outre que la société Tolix est victime de la contrefaçon de ses modèles, notamment de la chaise «A», par des produits fabriqués à l’étranger, à bas coût et à moindre qualité.

Ainsi, au-delà de la connaissance du produit lui-même par une partie du public, la société Tolix démontre avoir engagé, depuis de nombreuses années, une politique de communication et de marketing pour mettre en avant, auprès du public, le caractère qualitatif, durable et «made in France» de son produit, fruit d’un savoir-faire ancien.

A cet égard, pour mettre en valeur les conditions de production de ses produits, la société Tolix démontre être labelisée depuis 2006 «Entreprise du patrimoine vivant» distinguant les entreprises françaises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence mais, aussi, avoir entrepris de lourds investissements pour maintenir sa production en France, et modifié ses chaînes de production, de fabrication et de coloration permettant la pérennisation de plus de 50 emplois et ainsi de son savoir-faire spécifique. Cet engagement lui permet ainsi de revendiquer une production «made in France», amplement mise en avant dans sa communication auprès du public et, notamment, à l’occasion d’une rencontre avec le Président de la République en 2019. Elle se présente également comme une entreprise engagée, privilégiant les matériaux durables et réutilisant l’énergie thermique de ses machines pour chauffer ses ateliers, se dotant de nouveaux procédés de fabrication préservant l’environnement et est reconnue comme telle par la presse.

La société Tolix, par le biais de sa gérante, se montre également très active dans la presse pour rappeler l’histoire centenaire de la société qui a failli disparaître suite à une liquidation judiciaire et qu’elle a reprise avec certains des anciens salariés, et défendre les valeurs désormais portées par la fabrication artisanale de ses chaises en France, tout en faisant évoluer ses collections pour s’adapter au marché et aux goûts du public.

Preuve d’une valeur économique individualisée

La juridiction retient, en conséquence, que l’ensemble de ces éléments atteste non seulement d’investissements conséquents consacrés par la société Tolix à la promotion de la chaise «A» et des tabourets « H » et « HPD », mais aussi d’un travail particulier, d’un ancrage sur le territoire français et d’un savoir-faire presque centenaire constamment revendiqués et entretenus, et ainsi caractérise une valeur économique individualisée.

Condamnation pour parasitisme

Aussi, en proposant à la vente sur le marché français des copies serviles ou quasi-serviles des chaises «A» et des tabourets « H » et « HPD », M. [D] a entendu nécessairement se placer dans le sillage de la société Tolix et de ses produits au «design iconique» auréolés de leur qualités précitées, pour en capter les retombées, ce qui lui a permis de commercialiser ses produits en s’épargnant tout effort intellectuel, matériel et financier de conception, de promotion ou de commercialisation nécessaire au succès du lancement de ce type de produit d’équipement.

Il a également profité, indûment et intentionnellement, de l’ensemble des investissements et du savoir-faire déployés par la société appelante pour mettre en valeur son produit «made in France» depuis de nombreuses années, alors qu’il ne conteste pas avoir importés ces produits à moindre coût de Chine, ces articles ayant été proposés à la vente au prix de 45 euros, alors que le prix de revient industriel de la chaise «A» est de plus de 58 euros et qu’elle est vendue aux consommateurs au prix moyen de 290€, lui permettant ainsi de générer des profits.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la charge de la preuve en matière de parasitisme ?

La charge de la preuve en matière de parasitisme incombe à la victime, qui doit démontrer deux éléments clés. Premièrement, elle doit prouver que ses modèles possèdent une valeur économique individualisée. Cela signifie que les créations doivent être reconnues comme ayant une valeur distincte sur le marché, souvent liée à leur notoriété ou à leur qualité. Deuxièmement, la victime doit établir que l’auteur des actes fautifs s’est inspiré de ses modèles à des fins lucratives, cherchant à obtenir un avantage concurrentiel indu. Cela implique de prouver que l’auteur a profité de la réputation et des efforts de marketing de la victime sans avoir investi dans le développement de ses propres produits. Les dépenses de communication et de marketing jouent un rôle déterminant dans cette évaluation, car elles témoignent de l’engagement de la victime à promouvoir ses créations.

Comment la société Tolix a-t-elle prouvé sa notoriété ?

La société Tolix a démontré sa notoriété en produisant une revue de presse dense, comprenant des articles de la presse régionale, nationale et internationale sur une période de plus de dix ans. Cette documentation a mis en avant la chaise «A» et le tabouret «H», souvent considérés comme des icônes du design industriel français. De plus, la notoriété de ces produits a été confirmée par leur exposition dans des musées de design prestigieux, tels que le Vitra Design Museum en Allemagne et le MoMa à New York. Ces éléments attestent non seulement de la reconnaissance de la qualité de ses produits, mais aussi de leur impact sur le marché du design, renforçant ainsi la position de Tolix en tant que pionnière dans le mobilier industriel.

Quelles sont les dépenses de communication et de marketing de Tolix ?

Tolix a engagé des dépenses de communication et de marketing significatives, dépassant 1,8 million d’euros au cours des dix dernières années. Ces investissements ont été utilisés pour maintenir et promouvoir la notoriété de la marque, notamment par la participation à des événements de grande envergure comme Masterchef et Topchef, ainsi qu’à des salons internationaux à Milan et Stockholm. En outre, Tolix a lancé des initiatives créatives, comme l’édition d’une série de timbres à l’effigie de la chaise «A» en 2018. Ces efforts visent à renforcer la visibilité de ses produits et à souligner leur qualité, tout en mettant en avant l’héritage français de la marque. La forte présence de ses mobiliers dans des articles de presse et des magazines de décoration témoigne également de l’efficacité de ces stratégies de communication.

Comment Tolix a-t-elle démontré son engagement envers la production française ?

Tolix a été labellisée «Entreprise du patrimoine vivant» depuis 2006, une distinction qui valorise les entreprises françaises possédant un savoir-faire artisanal et industriel d’excellence. Cette reconnaissance souligne l’engagement de Tolix à maintenir sa production en France, ce qui est essentiel pour préserver son savoir-faire spécifique. La société a également investi dans la modernisation de ses chaînes de production, ce qui a permis de pérenniser plus de 50 emplois. En mettant en avant sa production «made in France», Tolix s’efforce de communiquer sur la qualité et la durabilité de ses produits, tout en adoptant des pratiques respectueuses de l’environnement, comme la réutilisation de l’énergie thermique de ses machines.

Quels éléments ont conduit à la condamnation pour parasitisme ?

La condamnation pour parasitisme a été fondée sur le fait que M. [D] a proposé à la vente des copies quasi-serviles des chaises «A» et des tabourets «H» et «HPD». En agissant ainsi, il a cherché à tirer profit de la réputation et des efforts de marketing de Tolix, sans avoir investi dans le développement de ses propres produits. M. [D] a également profité des investissements et du savoir-faire de Tolix, en important des produits à bas coût de Chine et en les vendant à un prix bien inférieur à celui de la chaise «A». Cela lui a permis de générer des profits tout en évitant les efforts nécessaires pour concevoir et promouvoir un produit de qualité, ce qui constitue une exploitation indue des efforts de la société Tolix

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon