Compétence et application du droit dans un contexte familial international

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Compétence et application du droit dans un contexte familial international

L’Essentiel : Madame [V] [H] et Monsieur [B] [E] se sont mariés en 2013 et ont deux enfants. En février 2024, Madame [V] [H] a demandé le divorce, mais Monsieur [B] [E] n’a pas constitué avocat. Lors de l’audience d’orientation, le juge a reconnu la compétence française et a établi des mesures provisoires, incluant la résidence habituelle des enfants chez la mère. En septembre 2024, l’affaire a été radiée pour absence de fondement juridique. Finalement, le juge a déclaré la demande de divorce irrecevable, laissant les dépens à la charge de Madame [V] [H].

Contexte du mariage

Madame [V] [H] et Monsieur [B] [E] se sont mariés le [Date mariage 9] 2013 à [Localité 13] (26) sans contrat de mariage, ce qui les soumet au régime légal de la communauté réduite aux acquêts. Ils ont deux enfants : [T] [U] [E], née le [Date naissance 4] 2013, et [S] [E], né le [Date naissance 8] 2015.

Procédure de divorce

Le 05 février 2024, Madame [V] [H] a assigné Monsieur [B] [E] devant le juge aux affaires familiales du Tribunal Judiciaire de Valence pour divorce, sans préciser le fondement de sa demande. Monsieur [B] [E] n’a pas constitué avocat après avoir été régulièrement assigné.

Ordonnance du juge

Lors de l’audience d’orientation du 02 avril 2024, le juge a déclaré la juridiction française compétente et a pris plusieurs mesures provisoires, notamment la constatation de la résidence séparée des époux et l’attribution de la jouissance d’un véhicule à Monsieur [B] [E]. Concernant les enfants, l’autorité parentale a été déclarée conjointe, avec la résidence habituelle chez la mère.

Radiation de l’affaire

Le 20 septembre 2024, une ordonnance de radiation a été rendue en raison de l’absence de fondement juridique dans les conclusions de Madame [V] [H]. Après un nouvel enrôlement, l’affaire a été mise en état le 08 novembre 2024, avec une clôture de la procédure prononcée le même jour.

Prétentions de Madame [V] [H]

Dans ses dernières conclusions, Madame [V] [H] a demandé la reconnaissance de la compétence des juridictions françaises, le prononcé du divorce, et la fixation de la résidence habituelle des enfants chez elle. Elle a également proposé que les droits de visite du père s’exercent en lieu neutre médiatisé, en raison de ses problèmes d’alcool.

Décision du juge

Le juge aux affaires familiales a déclaré la juridiction française compétente et a jugé la demande en divorce de Madame [V] [H] irrecevable, laissant les dépens à sa charge.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la compétence des juridictions françaises en matière de divorce ?

La compétence des juridictions françaises en matière de divorce est régie par le Code de procédure civile, notamment par l’article 1070 qui stipule que « les juridictions françaises sont compétentes pour connaître des demandes en divorce lorsque l’un des époux a son domicile ou sa résidence habituelle en France ».

Dans le cas présent, Madame [V] [H] et Monsieur [B] [E] résident en France, ce qui rend la juridiction française compétente pour statuer sur leur divorce.

De plus, l’article 3 du Code civil précise que « la loi française est applicable aux personnes qui ont leur domicile en France ». Ainsi, la loi française s’applique également à leur situation, ce qui a été confirmé par le juge aux affaires familiales.

Quels sont les fondements juridiques du divorce pour altération du lien conjugal ?

Le divorce pour altération du lien conjugal est prévu par les articles 237 et 238 du Code civil. L’article 237 dispose que « le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque, depuis plus de deux ans, les époux vivent séparés ».

Dans cette affaire, Madame [V] [H] fait valoir que les époux sont séparés depuis le 8 septembre 2023, ce qui dépasse le délai d’un an requis par la loi.

L’article 238 précise que « la séparation de fait des époux doit être constatée pour que le divorce soit prononcé ». Ainsi, le juge doit vérifier que la séparation est effective et que le délai légal est respecté.

Quelles sont les conséquences du divorce sur l’autorité parentale et la résidence des enfants ?

Les conséquences du divorce sur l’autorité parentale et la résidence des enfants sont régies par les articles 373 et suivants du Code civil. L’article 373-2 précise que « lorsque les parents exercent conjointement l’autorité parentale, ils prennent ensemble les décisions importantes concernant l’enfant ».

Dans cette affaire, le juge a décidé que l’autorité parentale serait exercée conjointement par les deux parents, ce qui est conforme à l’article 373-2.

Concernant la résidence des enfants, l’article 373-2-9 stipule que « la résidence habituelle de l’enfant est fixée chez l’un des parents ». Le juge a donc attribué la résidence habituelle des enfants chez la mère, ce qui est également en accord avec les dispositions légales.

Quelles sont les obligations alimentaires des parents après le divorce ?

Les obligations alimentaires des parents sont régies par l’article 371-2 du Code civil, qui dispose que « les parents doivent contribuer à l’entretien et à l’éducation de leurs enfants ».

Dans le cas présent, le juge a constaté l’impécuniosité de Monsieur [B] [E] et l’a dispensé de toute pension alimentaire jusqu’à retour à meilleure fortune.

L’article 373-2-2 précise que « la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants est fixée en fonction des ressources de chacun des parents ». Ainsi, la décision du juge de ne pas imposer de pension alimentaire à Monsieur [B] [E] est conforme à la législation en vigueur, tenant compte de sa situation financière.

Quelles sont les conséquences de la demande de divorce sur les biens des époux ?

Les conséquences de la demande de divorce sur les biens des époux sont régies par l’article 265 du Code civil, qui stipule que « les avantages matrimoniaux consentis par l’un des époux à l’autre sont révoqués de plein droit en cas de divorce ».

Dans cette affaire, Madame [V] [H] a demandé la constatation de la révocation des avantages matrimoniaux, ce qui est conforme à l’article 265.

De plus, l’article 815 du Code civil précise que « les époux peuvent convenir de la manière dont leurs biens seront partagés ». Dans ce cas, Madame [V] [H] a proposé de laisser le véhicule à Monsieur [B] [E], ce qui montre une volonté de régler les intérêts pécuniaires de manière amiable.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCE
AFFAIRES FAMILIALES

JUGEMENT
du 09 Janvier 2025

Code NAC : 20L

DOSSIER : N° RG 24/02904 – N° Portalis DBXS-W-B7I-IJRE
AFFAIRE : [H] / [E]
MINUTE :

Copie exécutoire :
Me Christelle AMIRIAN

Rendu par L.MASSA, Juge aux Affaires Familiales, assisté de G.VAROUX Greffier lors du prononcé du jugement ;

DEMANDERESSE :

Madame [V] [H] épouse [E]
née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 10] (MAROC)
[Adresse 5]
[Localité 7]

représentée par Me Christelle AMIRIAN, avocat au barreau de VALENCE

DÉFENDEUR :

Monsieur [B] [E]
né le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 11] (TUNISIE)
dernier domicile connu :
[Adresse 3]
[Localité 6]

défaillant

DEPOT de DOSSIER :

à l’audience du 21 Novembre 2024

JUGEMENT :

– réputée contradictoire
– en premier ressort
– rendu publiquement
– prononcé par mise à disposition au Greffe
– signé par le Juge aux affaires familiales et par le Greffier

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [V] [H] et Monsieur [B] [E] se sont mariés le [Date mariage 9] 2013 à [Localité 13] (26), sans contrat de mariage ; ils se trouvent donc soumis au régime légal de la communauté réduite aux acquêts.

De leur mariage sont issus deux enfants : [T] [U] [E] née le [Date naissance 4] 2013 à [Localité 13] (26) et [S] [E] né le [Date naissance 8] 2015 à [Localité 12] (38).

Par acte de commissaire de justice délivré le 05 février 2024, Madame [V] [H] a assigné Monsieur [B] [E] devant le juge aux affaires familiales du Tribunal Judiciaire de Valence aux fins de divorce, sans indiquer le fondement de sa demande.

Régulièrement assigné par procès-verbal de recherches infructueuses, Monsieur [B] [E] n’a pas constitué avocat.

À l’issue de l’audience d’orientation du 02 avril 2024, le juge de la mise en état, par ordonnance du 17 mai 2024, a déclaré la juridiction française compétente, dit la loi française applicable au prononcé du divorce, à la responsabilité parentale et aux obligations alimentaires, et a pris les mesures provisoires suivantes :

Constaté la résidence séparée des époux ;Donné acte à l’épouse de ce qu’elle déclare habiter séparément depuis le 8 septembre 2023 ;Fait défense à chacun des époux de troubler son conjoint à sa résidence, sinon les a autorisés à faire cesser le trouble par toutes voies et moyens de droit, même avec l’assistance de la force publique si besoin est ;Attribué à l’époux la jouissance du véhicule automobile de marque Volkswagen Touran ;
Concernant les enfants, le juge a :

Dit que l’autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents ;Dit que les enfants auront leur résidence habituelle chez la mère ;Réservé, en l’état, le droit de visite et d’hébergement du père ;Dit que les parents ont le devoir, en cas de changement de résidence, de se communiquer leur nouvelle adresse ;Constaté l’impécuniosité de Monsieur [B] [E] pour contribuer à l’entretien et l’éducation des enfants et l’a dispensé, par conséquent, de toute pension alimentaire jusqu’à retour à meilleure fortune.
En application de l’article 254 du Code civil, il a été précisé que ces mesures provisoires prennent effet à compter de la date d’introduction de la demande en divorce.

Les parties ont été avisées du droit de l’enfant d’être entendu en vertu de l’article 388-1 du Code civil et aucune demande d’audition n’est parvenue au greffe.

Au visa de l’article 1072-1 du Code de procédure civile, il a été vérifié l’existence d’une procédure d’assistance éducative ouverte par le juge des enfants et aucune procédure n’est en cours.

Le 20 septembre 2024 a été rendue une ordonnance de radiation de l’affaire par le juge de la mise en état, les conclusions de Madame [V] [H] ne contenant pas dans leur dispositif le fondement juridique de sa demande en divorce.

Après nouvel enrôlement, l’affaire a été appelée à la mise en état du 08 novembre 2024.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 08 novembre 2024 et le dépôt des dossiers de plaidoirie a été fixé au plus tard au 21 novembre 2024.

L’affaire a été mise en délibéré au 09 janvier 2025.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par ses dernières conclusions signifiées par procès-verbal de recherches infructueuses du 23 septembre 2024 et transmises au greffe par voie électronique le 27 septembre 2024, Madame [V] [H] demande au juge aux affaires familiales de :

Dire que les juridictions françaises sont compétentes et que la loi française est applicable,Prononcer le divorce de Madame [V] [H] et Monsieur [B] [E] sur le fondement qui sera indiqué lors des premières conclusions au fond,Ordonner la mention du jugement à intervenir en marge de l’acte de mariage des époux [E] et la mention dans leurs actes de naissance, ainsi que tout acte prévu par la loi,Constater que Madame [V] [H] ne sollicite pas de conserver l’usage du nom marital à l’issue du divorce,Constater la révocation des avantages matrimoniaux consentis par l’un des époux envers l’autre, en application de l’article 265 du Code civil,Constater qu’elle a formulé une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux des époux,Fixer la date des effets du divorce au 08 septembre 2023, date de signature du bail de son nouveau logement,Dire n’y avoir lieu à désigner un notaire pour procéder aux opérations de partage en l’absence de bien ou de dette commune,Juger que l’autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents,Fixer la résidence habituelle des enfants chez la mère,Fixer le droit de visite et d’hébergement de Monsieur [B] [E] concernant les deux enfants en lieu neutre médiatisé,Condamner Monsieur [B] [E] à verser à Madame [V] [H] la somme de 100,00 euros par mois et par enfant, soit au total 200,00 euros par mois au titre de la contribution à l’entretien et à l’éducation des deux enfants, avec intermédiation de l’organisme social.
La demanderesse indique être de nationalité marocaine, que Monsieur [B] [E] est de nationalité tunisienne, et que leur résidence ainsi que celle des enfants est en France, rendant la juridiction française compétente et la loi française applicable.

S’agissant du prononcé du divorce, Madame [V] [H] fait valoir, sur le fondement des articles 237 et 238 du code civil, que les époux sont séparés depuis le 08 septembre 2023, date de signature du bail de son nouveau logement et qu’elle est dès lors fondée à solliciter le prononcé du divorce pour altération du lien conjugal, le délai entre la cessation de la communauté de vie entre les époux et la demande en divorce étant supérieur à une année.

S’agissant des conséquences du divorce et plus particulièrement sur la proposition de règlement des intérêts pécuniaires, Madame [V] [H] déclare que les époux n’ont pas d’autre bien commun que le véhicule, qu’elle propose de laisser à Monsieur [B] [E].

S’agissant des enfants, Madame [V] [H] sollicite que la résidence habituelle des enfants soit fixée à son domicile et que les droits de visite du père s’exercent en lieu neutre médiatisé, compte tenu de sa dépendance à l’alcool et des conséquences sur son comportement en découlant.

Par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, le Tribunal se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

[DÉBATS NON PUBLICS – Motivation de la décision occultée]
PAR CES MOTIFS

Le juge aux affaires familiales, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, après débats en chambre du conseil, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DÉCLARE la juridiction française compétente et DIT la loi française applicable au prononcé du divorce, à la responsabilité parentale et aux obligations alimentaires,

DÉCLARE IRRECEVABLE la demande en divorce formée par Madame [V] [H] à l’encontre de Monsieur [B] [E],

LAISSE les entiers dépens de l’instance à la charge de Madame [V] [H].

LE GREFFIER LE JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES


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