Droit du logiciel : 8 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/04285

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Droit du logiciel : 8 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/04285

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023

N° 2023/197

Rôle N° RG 22/04285 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJDCO

SELARL [E] – LES MANDATAIRES

venant aux droits de la SCP [E]

C/

[U] [D]

[K] [A]

[WK] [M]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Bastien BERNARD

Me Sébastien BADIE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Président du TC de nice en date du 15 Mars 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n°2022L00349.

APPELANTE

SELARL [E] – ‘LES MANDATAIRES’

mandataires judiciaires venant aux droits de la SCP [E], représentée par Maître [T] [E] es qualités de liquidateur judiciaire de la SARL VCR à ces fonctions désignée par Jugement du Tribunal de Commerce de Nice du 18 février 2016, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rachid CHENIGUER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

INTIMES

Monsieur [U] [D]

demeurant [Adresse 2]

défaillant

Monsieur [K] [A],

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Bastien BERNARD de la SELARL ASKESIS, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Emmanuelle ASSO, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

Monsieur [WK] [M]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 12], de nationalité française, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 15 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Gwenael KEROMES, Présidente a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre

Madame Muriel VASSAIL, Conseiller

Madame Agnès VADROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Juin 2023 et prorogé au 8 juin 2023.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023,

Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

I – EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

1-1. La société VCR

La Sarl VCR a été constituée le 18 mai 2006 par le groupe Promeo, acteur de la promotion immobilière, pour assurer la gestion et l’exploitation de résidences hôtelières, de tourisme et d’appartements appartenant à des investisseurs, essentiellement des particuliers, lui ayant confié l’exploitation de leur bien immobilier au moyen de la régularisation de baux commerciaux.

Ces opérations immobilières, correspondant au souhait du législateur de développer l’offre d’hébergement en zone touristique en favorisant l’investissement, notamment par des particuliers, permettaient à ceux-ci de bénéficier d’avantages fiscaux. Les campagnes promotionnelles mettaient en avant le fait que l’investissement se paierait seul : par les loyers, par l’avantage fiscal qui permettait de déduire des déficits sur les BIC, et la TVA récupérée, avec des prévisions de rentabilité importante. Face à cette rentabilité promise comme élevée, les prix de vente des résidences se situaient dans la fourchette haute des prix.

Pour exploiter le fonds de commerce que constitue ces résidences hôtelières, un gestionnaire professionnel était mis en place par le promoteur qui exploitait les résidences hôtelières au moyen de baux commerciaux.

A l’origine, le promoteur versait des fonds de concours permettant à l’exploitant de verser aux investisseurs, au moins pendant un temps donné, les loyers qui leur étaient dus, puis à l’arrêt du versement de ces fonds, s’est posée la question de la rentabilité économique de ce montage : l’exploitant s’est trouvé confronté à une important difficulté d’équilibrer les comptes.

Au 1er juillet 2013, l’associé unique de la Sarl VCR, a cédé la totalité de ses parts sociales à la société Mer et Montagne Vacances Résidences, société dont l’objet est la gestion de résidences de tourisme, faisant partie du groupe MMV, groupe spécialisé dans l’exploitation de résidences de tourismes et d’hôtels club.

Historiquement, la SARL VCR a eu pour dénomination sociale successivement Village Center Gestion, puis MMV by Promeo puis enfin VCR.

Le changement de dénomination sociale de la société va coïncider avec les modifications intervenues dans le capital social :

En juillet 2013, les résidences Village Center du Groupe Promeo sont rachetées par le gestionnaire Mer et Montagne Vacances (MMV).

La société MMV Résidences est détenue à 100 % par MMV SA spécialisée dans l’exploitation de fonds de commerce d’hôtellerie et restauration, de résidences de tourisme de résidences de services et activités annexes (exploitation de bars, location de matériels…). La société MMV Résidences va être absorbée par MMV SA en juin 2018, qui sera elle-même absorbée par la société fille MMV Gestion (actuellement MMV).

Le groupe MMV avait pour ambition de traiter les difficultés financières de l’exploitation liées à l’absence de rentabilité des résidences de tourisme.

La société MMV va d’abord tenter de négocier la diminution des loyers des baux commerciaux auprès des particuliers propriétaires (investisseurs privés) avant finalement de renoncer à la gestion de ses 19 résidences de tourisme réparties sur le territoire national et chercher des repreneurs.

L’ensemble des résidences hôtelières va être cédé dans le courant de l’année 2014, à l’exception de deux d’entre elles, dont la société VCR conservera la gestion :

– les Demeures de Massane à [Localité 6]

– le Domaine du Golf de [Localité 11].

La société MMV souhaitant par la suite se désengager totalement de la société VCR, va alors opérer différentes cessions de parts sociales en fin d’année 2014 au profit de trois personnes physiques qui se répartiront le capital social d’un montant de 250.000 € composé de 15.625 parts sociales de 16 euros chacune comme suit :

-Monsieur [WK] [M] » » » »’.. 7.656 parts

-Monsieur [R] [AF] » » » » 7.656 parts

-Monsieur [P] [W] » » » » ». 313 parts

Total » » » » » » » » »..15.625 parts

En juin 2015 deux nouvelles cessions de parts vont être régularisées :

– Monsieur [WK] [M] cède l’intégralité de ses parts sociales à Monsieur [U] [D], pour le prix d’un euro

– Monsieur [P] [W] cède sa participation à la société CL Financial Services.

Ces deux cessions sont toutes deux agréées aux termes d’un procès-verbal d’assemblée générale extraordinaire de la société VCR du 8 juin 2015.

Suite à ces cessions, le capital de la Sarl VCR est donc réparti comme suit :

-M. [U] [D] » » » »’.. 7.656 parts

-M. [R] [AF] » » » » 7.656 parts

– la société CL Financiel Services »…’ 313 parts

Total » » » » » » »’15.625 parts

Monsieur [U] [D] va en outre assurer la gérance de la société VCR à compter du 15 avril 2015 jusqu’à l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Depuis 2006, neuf gérants vont se succéder au sein de la Sarl VCR, dont en particulier

– du 1er juillet 2013 au 19 décembre 2014 : [K] [A]

– du 19 décembre 2014 au 15 avril 2015 : [WK] [M]

– du 15 avril 2015 jusqu’à la liquidation judiciaire : [U] [D]

Vont intervenir diverses cessions au profit de la SAS MMV Résidences à la date du 31 juillet 2014 : la Résidence Le Domaine D’Enserune à [Localité 9] moyennant le prix de 152.312,61 euros et les Demeures du Ventoux à [Localité 7] au prix de 40.301,25 euros ;

En novembre 2015 moyennant l’euro symbolique : cession du site d'[Localité 6] au profit du groupe Vacanceole contre abandon par les propriétaires de leurs arriérés de loyers.

D’autres cessions seront encore révélées au cours des investigations réalisées par l’expert financier désigné par le juge commissaire.

En revanche, s’agissant du Domaine du Golf de [Localité 11], aucun repreneur ne s’est manifesté en l’état du refus des propriétaires de procéder à toute baisse de loyers.

C’est dans ces conditions que la Société VCR a conservé l’exploitation de la seule résidence Le Domaine du Golf de [Localité 11] située à proximité de [Localité 13].

La majeure partie des fonds de commerce de la SARL VCR, constitués de l’exploitation des résidences de tourisme, va être cédée courant de l’année 2014 pour n’en conserver plus que deux d’entre eux :

– les Demeures de Massane à [Localité 6]

– le Domaine du Golf de [Localité 11].

La motivation économique de ces cessions vise à mettre fin à l’exploitation à perte des résidences considérées.

Ces actes s’inscrivent en outre dans le prolongement de procédures en résiliation de baux initiées soit par les propriétaires bailleurs, soit par la SARL VCR elle-même, situation identiquement retranscrite dans chacune des conventions régularisées.

A l’appui d’un rapport d’audit établi par un cabinet d’experts le Cabinet Deloitte, la Sarl VCR va par suite signer des actes de cession selon des modalités particulières :

– soit les cessions seront régularisées moyennant un prix négatif avec pour conséquence le déboursement de ce prix par les soins de la cédante elle-même, la Sarl VCR, au bénéfice des

cessionnaires’

– soit les cessions seront régularisées moyennant l’euro symbolique en contrepartie d’engagements spécifiques pris par le cessionnaire lui-même et encore rémunérés par la cédante, la Sarl VCR’

Les cessions ci-après ont été portées à la connaissance de la Scp [E],représentée par Maître [T] [E] désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarl VCR par jugement du tribunal de commerce de Nice en date du 18 février 2016

‘ cessions moyennant déboursement d’un ‘prix négatif’ par la SARL VCR elle-même :

– cession du 27 février 2014 à Monsieur [WK] [M] de la Résidence Le Saint-Clair pour compte d’une Sarl Domaine Cap d’Agde Saint- Clair moyennant le prix négatif de 348.750 euros ;

– cessions du 1er mars 2014 à Monsieur [Z] [S] :

‘ pour compte d’une Sarl Domaine de Bacchus, du Domaine de Bacchus (à St Christol) moyennant le prix négatif de 300.000 euros ;

‘ pour compte d’une Sarl Ker Goh Lenn de la Résidence Ker Goh Lenn (à [Localité 14]) moyennant le prix négatif de 514.250 euros ;

– cessions du 26 mars 2014 à Monsieur [V] gérant d’une Sarl Cirena Conseil de:

‘ la Résidence Le Fonserane ([Localité 8]) moyennant le prix négatif de 395.000

euros ;

‘ les Demeures Torrelannes (66) moyennant le prix négatif de 450.000 euros;

– cession du 5 avril 2014 de la Résidence Domaine du Bosquet ([Localité 10]) à Monsieur [I] [O] pour compte de la SAS Domaine du Bosquet moyennant le prix négatif de 88.950,26 euros ;

‘ cessions moyennant l’euro symbolique en contrepartie d’engagements spécifiques pris par le cessionnaire et rémunérés par la SARL VCR

– cession du 17 septembre 2014 du Chalet d’Isard (66) à Monsieur [H] [F] pour compte de la Sarl Tinos moyennant l’euro symbolique en contrepartie d’obligations spécifiques du cessionnaire rémunérées par la SARL VCR à hauteur de 175.000 euros’

Pour les cessions précitées réalisées sur une période 7 mois entre le 27 février 2014 et le 17 septembre 2014, la SARL VCR aurait versé une somme totale de 2.271.950,26 euros au profit de ses cessionnaires

La SCP Pellier, appelante, a en outre eu connaissance des cessions suivantes, mais non des conditions de leur réalisation :

‘ cession à la date du 27 février 2014 de la Résidence Clos du Rocher à Monsieur

[WK] [M] (gérant de la société VCR du 19 décembre 2014 jusqu’au 15 avril 2015)

pour compte d’une Sarl Eyzies Clos du Rocher outre la cession des biens meubles y attachés par acte séparé de même date moyennant le prix de 4.213,66 euros ;

‘plusieurs cessions à la SAS MMV Résidences intervenues à la date du 31 juillet 2014 : de la résidence Le Domaine d’Enserune à [Localité 9] – outre la cession des biens meubles y attachés par acte séparé du 30 septembre 2014 moyennant le prix de 152.312,61 euros ;

: des Demeures du Ventoux à [Localité 7] – outre la cession des biens meubles y attachés par acte séparé du 30 septembre 2014 moyennant le prix de 40.301,25 euros

‘ une cession intervenue en novembre 2015 moyennant l’euro symbolique du site d'[Localité 6] au profit du Groupe Vacanceole contre abandon par les propriétaires de leurs arriérés de loyers.

D’autres cessions seront encore révélées au cours des investigations réalisées par l’expert financier désigné par le juge commissaire.

En revanche, s’agissant du Domaine du Golf de [Localité 11], aucun repreneur ne s’est manifesté en l’état du refus des propriétaires de procéder à toute baisse de loyers.

C’est dans ces conditions que la Société VCR a conservé l’exploitation de la seule résidence Le Domaine du Golf de [Localité 11] située à proximité de [Localité 13].

Cet ensemble immobilier est composé de 218 lots représentant environ 108 villas jumelées données en location en séjours de courte ou longue durée.

La Société VCR met à disposition de ses clients locataires une structure d’accueil qui leur est entièrement dédiée :

– l’accueil, l’entretien et le ménage est assuré par les salariés permanents de la société (7 personnes),

– Piscine, restaurant, entretien des espaces verts : ces activités sont sous traitées à des prestataires

de services.

Sur les quelques 218 propriétaires, 154 auraient repris possession de leurs lots au terme de procédures de résiliation des baux qu’ils auraient initiées.

A l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire La Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités a pris connaissance d’un courriel circularisé directement par le représentant légal de la société VCR auprès des copropriétaires concernés, soumettant fin janvier 2016 à chacun d’entre eux, un projet de protocole d’accord organisant la résiliation amiable et immédiate des contrats de bail contre abandon des charges de loyers arriérés.

Il semblerait que la quasi-totalité des copropriétaires consultés aient signé ces protocoles d’accord quelques temps avant l’ouverture de la procédure de la liquidation judiciaire de la Sarl VCR .

Par suite de difficultés financières persistantes, la société VCR n’a pu successivement:

– assumer le versement des loyers auprès des propriétaires de la seule résidence qu’elle exploitait Domaine du Golf de [Localité 11],

– ni procéder au paiement des salaires de ses 13 employés au titre des derniers mois d’exploitation décembre 2015 et janvier 2016.

C’est dans ce contexte que les propriétaires ont été contraints d’assigner la société VRC en redressement judiciaire devant le tribunal de commerce de Nice.

Parallèlement, le gérant de la société VRC, M. [D] a déposé une déclaration de cessation des paiements et demandé l’ouverture d’un redressement judiciaire.

Par jugement en date du 18 février 2016, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l’égard de la Sarl VCR et la date de cessation des paiements a été fixé provisoirement au 11 février 2016 et la SCP [E] devenue la Selarl [E]-Les Mandataires, représentée par Me [T] [E] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Un second jugement rendu le 24 février 2016 a autorisé, sur requête du liquidateur judiciaire, la poursuite d’activité pour une période d’un mois expirant le 23 mars 2016, autorisation de poursuite de l’activité qui a été prolongée par jugements successifs des 31 mars et 25 mai 2016 jusqu’au 18 juin 2016.

Le liquidateur judiciaire estimant que la date de cessation des paiements devait être remontée, le tribunal de commerce a reporté celle-ci à la date du 11 août 2014 (18 mois en arrière).

Par jugement du 22 juin 2016, le tribunal de commerce a arrêté le plan de cession du fonds de commerce de la Sarl VCR au profit de la société Propriétaires Domaine du Golfe pour le prix de 50 000 euros.

Sur assignation du liquidateur judiciaire, le tribunal de commerce de Nice a été saisi d’une action en responsabilité pécuniaire des dirigeants successifs de la Sarl VCR, sur le fondement des dispositions de l’article L 651-2 du code de commerce ; il était reproché aux trois intimés les fautes de gestion :

– le non respect du délai de 45 jours pour déclarer la cessation des paiements,

– une incompétence manifeste des gérants en raison de la poursuite d’une activité qui s’est accompagnée d’une aggravation du passif, notamment :

. des cessions d’actifs à des conditions particulièrement critiquables, tant en ce qui concerne le prix que l’identité des cessionnaires (les résidences Le Saint-Clair et le Clos du Rocher ont été réalisées le 27 février 2014 au profit de sociétés dont M. [M] est le gérant moyennant un prix négatif ou un prix modique.

. des versements opérés par la société VCR en paiement des prix de cession négatifs supérieurs aux montant prévus par les actes de cession,

. une dégradation constante de la situation financière de la société VCR entre 2008 et 2014

. des charges supportées au bénéfice des personnes ayant assumé ou assumant les fonctions de gérant,

– le non respect des règles imparties en matière de droit des sociétés,

– l’opacité de la présentation de comptes sociaux en lien avec leur certification par le CAC

qui ont aggravé l’insuffisance d’actif.

Par jugement du 15 mars 2022, le tribunal de commerce de Nice a :

– débouté la SCP [E] ès qualités de ses demandes dirigées à l’encontre de MM. [U] [D], [X] [L], [B] [J], [C] [Y], [R] [G], [K] [A], [WK] [M],

– débouté les parties de leurs autres demandes, fins et conclusions,

– condamné la SCP [E] ès qualités à payer à chacun des défendeurs la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Suivant déclaration en date du 22 mars 2022, la SCP [E] ès qualités, a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes des ses conclusions d’appelant déposées et notifiées le 8 juillet 2022, la Selarl [E]-Les Mandataires, représentée par Me [E], ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl VCR, demande à la cour de :

-déclarer la Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl VCR recevable et bien fondée en son appel ;

– infirmer le jugement et statuant à nouveau,

– dire et juger que MM. [U] [D], [K] [A] et [WK] [M] ont commis des fautes de gestion plaçant la Sarl VCR en infraction au regard du droit des sociétés et traduisant une incompétence en matière de gestion et une passivité critiquable, qui ont concouru à la réalisation d’un préjudice au titre de l’insuffisance d’actifs dont le montant est proportionnel à leurs initiatives respectives ;

-entendre chacun des intimés en leurs explications sur la déconfiture de la société VCR, son origine et ses causes de difficultés ;

En conséquence,

– condamner MM. [U] [D], [K] [A] et [WK] [M] à régler la somme de 6 6061 337,66 euros à la Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités, au titre de l’insuffisance d’actif ressortant de la liquidation judiciaire de la société VCR dans l’attente d’en connaître le montant définitif lequel ne sera connu qu’à l’issue des audiences de vérification des créances à tenir devant le juge commissaire ;

– donner acte à la SCP [E] ès qualités de ce qu’elle se réserve d’apporter en cours d’instance toutes justifications sur l’accroissement ou la diminution du montant de l’insuffisance d’actif

– condamner chacun des intimés à verser à la Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Elle reproche à MM. [U] [D], [K] [A] et [WK] [M], des fautes antérieures à la liquidation judiciaire qui ont contribué à l’insuffisance d’actif, plus particulièrement :

– le non-respect des règles imparties en matière du droit des procédures collectives par le retard constaté dans la déclaration de cessation des paiements,

– leur incompétence caractérisée en matière de gestion,

– le non-respect des règles imparties en matière de droit des sociétés, consacrée par une passivité critiquable au regard des difficultés rencontrées,

– l’incurie de ces dirigeants successifs.

Sur le non respect du délai de 45 jours pour déclarer la cessation des paiements fixée par jugement du 18 février 2016 au 11 août 2014 ([U] [D] : gérant au moment de l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, [K] [A] : gérant du 1er juillet 2013 au 19 décembre 2014 et [WK] [M] : gérant du 19 décembre 2014 au 15 avril 2015)

L’appelante fait grief au tribunal, concernant M. [U] [D], d’avoir retenu que l’achèvement des opérations de vérifications du passif n’est pas certain et l’insuffisance d’actif n’est pas chiffrée ni actuellement chiffrable, que l’intéressé a déposé la déclaration de cessation des paiements et n’a été gérant que depuis le 15 avril 2015 et qu’il ne peut donc lui être reproché de ne pas l’avoir fait avant le 26 septembre 2014.

Si M. [D] n’était pas encore gérant à la date du 26 septembre 2014, la société était toutefois en état de cessation des paiements à cette date et l’était encore a fortiori lors de la prise de fonction de M. [D] le 15 avril 2015 ; de plus, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif est recevable même si les opérations de vérifications du passif ne sont pas encore achevées dès lors qu’il apparaît à l’évidence que l’actif sera insuffisant pour payer le passif .

S’agissant de M. [A], l’appelante critique le tribunal de commerce qui a estimé qu’à la fin de l’exercice 2014, la Sarl VCR affichait un résultat bénéficiaire de 18 533 euros et qu’elle n’était pas dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ; que l’intéressé ayant démissionné le 19 décembre 2014, il ne peut être responsable d’un procès-verbal postérieur à sa démission.

Or, selon l’appelante, le tribunal avait dans une précédente décision reportant la cessation des paiements au 11 août 2014, retenu que la situation bilantielle s’était dégradée au 30 septembre 2013 (8 129 709 euros de dettes pour 107 070 euros de disponibilités) et au 30 septembre 2014 (13 264 070 euros de dettes pour 20 234 euros de disponibilités) ; que le montant des loyers impayés du 2ème trimestre 2014 s’élève à la somme de 10 157 896 euros et qu’un tel montant impayé consacre un état de cessation des paiements dès le 30 juin 2014.

S’agissant de M. [M], si le tribunal de commerce a relevé que sa gérance a duré très peu de temps (19 décembre 2014 au 15 avril 2015) et que celui-ci n’a accepté sa mission qu’à la condition que la MMV et les propriétaires acceptent une baisse significative du loyer et des charges mais que les engagements pris n’ont pas été tenus, il l’a mis hors de cause pour des motifs peu explicites et expéditifs.

Il n’en reste pas moins que la société VCR était en état de cessation des paiements à la date du 26 septembre 2014 et l’était encore à la date de sa nomination en tant que gérant le 19 septembre 2014 ; le délai écoulé depuis la date de la cessation des paiements fixée au 11 août 2014 a en outre généré un passif nouveau et l’augmentation corrélative de l’insuffisance d’actif ; la condamnation pécuniaire doit être au mieux proportionnée.

Elle reproche à ces trois gérants des fautes de gestion traduisant une incompétence manifeste.

– des cessions des actifs de la société VCR à des conditions particulièrement critiquables quant à la détermination du prix, l’identité des cessionnaires dont un est devenu gérant de la société VCR (M. [M]), au plan des engagements financiers pris par la société VCR ;

– une dégradation constante de la situation financière de la société,

– l’aggravation des charges supportées par VCR au bénéfice de personnes ayant assumé ou assumant la gérance de la société (frais de gestion et commissions au profit d’intervenants chargés de la commercialisation de ces résidences)

– fautes de gestion liées au non respect des règles en matière de droit des sociétés, à la présentation des comptes sociaux en lien avec leur certification par le CAC, la conclusions de conventions ajoutant de l’opacité dans la gestion

– fautes de gestion en lien avec l’emploi des fonds de concours et l’apparence de rentabilité,

– fautes de gestion tenant à la passivité des gérants

Il en résulte que le préjudice tenant à l’insuffisance d’actif est déterminé :

Le passif total déclaré au 8 juillet 2022 s’élève à 10 105 226,61 euros dont :

24 990,76 euros à titre super privilégié,

2 826 656,46 euros à titre privilégié,

837 236,74 à titre chirographaire,

1 181,88 euros à échoir

Passif faisant l’objet d’une contestation : 2 132 724,76 euros

Instances en cours : 288 547,06 euros

Non définitif :2 421 271,82 euros

Rejet : 3 983 888,95 euros

Le préjudice : le passif admis et non contesté s’élève à 6 111 337, 66 euros.

L’insuffisance d’actif peut se situer autour de 6 061 337,66 euros

Ces fautes de gestion ont contribué à l’insuffisance d’actif

***

Aux termes de ses conclusions d’intimé n°3 déposées et signifiées le 15 février 2023, M. [K] [A] demande à la cour de débouter la Selarl [E]-Les Mandataires ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl VCR de ses demandes, de confirmer le jugement entrepris et de condamner l’appelante ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl VCR à lui verser la somme de 2 500 euros au titre l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

M. [K] [A] expose qu’il était directeur général du groupe MMV et a été nommé aux fonctions de gérant non associé de la société VCR, fonctions qu’il a exercées du 1er juillet 2013 au 10 décembre 2014 (soit 15 mois et 10 jours), fonctions pour lesquelles il n’a pas perçu de rémunérations.

Au moment ou le groupe MMV entrait dans le capital de la société VCR, les résidences de tourisme exploitées par celle-ci dégageaient un déficit d’exploitation. En dépit des discussions engagées par VCR avec les différents propriétaires des résidences pour trouver une issue et rétablir l’équilibre financier, les négociations n’ont pas abouti et la société VCR a donc été contrainte de céder certaines résidences.

Le groupe MMV a souhaité ensuite cédé VCR à des professionnels de l’exploitation d’établissements touristiques. A partir du moment où VCR a été cédée, M. [K] [A] n’a plus exercé ses fonctions de gérant au profit des nouveaux exploitants à partir du 19 décembre 2014, soit près de deux ans avant l’ouverture de la procédure collective.

Sur les fautes de gestion qui lui sont reprochées : l’absence de déclaration de cessation des paiements fixée au 11 août 2014, au plus tard le 25 septembre 2014, constitue un simple négligence. Or à la fin de l’exercice 2014, VCR affichait un résultat bénéficiaire (+ 18 533 euros) et il n’est pas démontré que la société était dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

Sur l’endettement de la société : si le passif déclaré semble important (10 105 226,61 euros) il fait l’objet de contestations à hauteur de 9 684 880 euros (96 %) sur lequel 3 983 888,95 euros a fait l’objet d’un rejet et 2 421 271,82 demeure non définitif.

M. [A] conteste être resté passif dans la mesure où il a mandaté le cabinet Deloitte pour effectuer un audit complet de chaque résidence exploitée par VCR, et a tenté de négocier avec les propriétaires de ces résidences des baisses de loyer, sans succès, et a donc pris la décision de céder des résidences dont l’activité est déficitaire et de ne conserver que celles dont l’activité est excédentaire.

Il affirme que les cessionnaires de ces différents sites, ayant des charges moins importantes ont pu dégager des bénéfices et n’ont pas fait l’objet de procédures collectives.

La société VCR a reversé aux différents cessionnaires les subventions d’exploitation prévues par le promoteur pour chaque site cédé pour favoriser la commercialisation en supportant le règlement des loyers aux propriétaires investisseurs.

Les résidences dont la gestion est déficitaire ont été cédées pour 1euro symbolique.

Il a mis en place une politique de restructuration dès son arrivée dans la société VCR.

Sur l’emploi des fonds de concours versés par Proméo, si selon le liquidateur judiciaire ces fonds de concours auraient permis d’attirer les investisseurs en leur faisant miroiter des loyers surévalués et garantis, tout en vouant l’exploitation à un déséquilibre inéluctable en raison d’une exploitation déficitaire depuis 2012, la mise en place de ces fonds de concours sont imputables à Proméo et ont été décidés à une période durant laquelle il n’était pas à la tête de la société VCR. Par ailleurs, ces fonds de concours étaient conformes au modèle économique en vigueur à l’époque.

Sur les fonds propres (article L 223-42 code de commerce) : si du fait des pertes constatées comptablement, les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social et auraient dû conduire à la dissolution anticipée de la société, il fait observer que l’associé unique de VCR avait repoussé cette résolution qu’il était le seul à pouvoir adopter. C’est une décision prise par les associés mais non par le gérant qui a été prise à une époque où M. [A] n’était pas encore gérant ; que de surcroît, le 15 octobre 2014, l’associé unique avait régularisé la situation.

Sur les circonstances dans lesquelles s’est déroulée la démission du CAC, celles-ci ne révèlent rien à charge contre M. [A].

Le rapport spécial du CAC sur conventions réglementées : il est relevé une incohérence entre le rapport du CAC et le PV des décisions des associés du 31 mars 2015 (non produit) selon lequel il n’existerait aucune convention spéciale. Le 1er septembre 2013 un contrat de partenariat (convention de Tour Opérateur) a été conclu avec la société MMV Résidence, associé unique de VCR, en vue de la commercialisation des résidences via MMV aux conditions du marché, avec un taux de commission de 14 %, taux un peu en deçà de ce qui se pratique sur le marché (rapport KPMG : en moyenne de un taux de 22-23 %).

Cette convention ne peut être soumise à l’article 223-19 car l’associé unique ne peut approuver lui-même la convention dans laquelle il est intéressé.

Cette convention de Tour Opérateur avec MMV est une convention courante conclue à des conditions normales et donc échappe à la procédure de l’article L 223-19 du code de commerce.

En effet la société VCR n’ayant pas de salarié hormis le personnel d’exploitation, un comptable et un administratif, cette convention a permis la commercialisation de séjours dans ses résidences pour un montant de 16 M€.

Aucune faute de gestion n’a été démontrée par le liquidateur judiciaire à son encontre.

Subsidiairement, il fait valoir l’absence de démonstration d’un lien de causalité entre les fautes reprochées et le préjudice (l’insuffisance d’actif) et d’autant qu’il y a eu une succession de gérants qui sont intervenus.

Le PV d’approbation des comptes de l’exercice 2013 sous la gérance de M. [A] a fait apparaître un résultat bénéficiaire de 730 013 euros et à la fin 2014, un bénéfice de 18 533 euros avec seulement deux établissements : les Demeures de Massane à [Localité 6] et le Domaine du Golf de [Localité 11]

***

M. [WK] [M], par conclusions récapitulatives déposées et signifiées le 15 février 2023 demande à la cour de :

– confirmer le jugement et débouter l’appelante de ses demandes

A défaut et subsidiairement, ordonner le cantonnement d’une éventuelle condamnation de M [M] à la somme de 12 570 euros du passif non contesté (gestion de 3 % de la durée de vie de la société) ; condamner l’appelante au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction

M. [M] n’a été gérant que 4 mois du 19 décembre 2014 au 15 avril 2015 et ne peut être tenu pour responsable de l’aggravation du passif . S’il a accepté cette mission de gérant, sans salaire ni indemnités, c’est parce qu’il avait obtenu verbalement de la part de MMV et des propriétaires la baisse significative des loyers des 2 résidences.

Les deux résidences avaient besoin pour fonctionner de salariés sur les sites et d’une direction ; c’est cette direction qu’a assuré Manureva Vacances, agence de voyages agréée dont M. [M] est le représentant, avec des honoraires maîtrisés soit 6 000 € HT par mois pour la résidence située à [Localité 6] et 6 500 euros HT par mois pour la résidence de [Localité 11], ce qui représente une économie de charges de fonctionnement plutôt que de recourir à une masse salariale.

Aucune faute de gestion ne peut lui être reprochée. Quant aux cessions d’actifs celles-ci ont été faites avant qu’il ne soit gérant de VCR.

Aucune somme n’a été prélevée sur les fonds de la Sarl VCR. Seuls les fonds de concours délivrés par le promoteurs ont été versés aux acquéreurs.

Sur les commissions et honoraires de Manureva Vacances : M. [M], a facturé pour 80 000 euros pour un an, sur laquelle VCR a réglé la moitié.

Il s’agit dans les faits d’un acte de bonne gestion ; M. [M] ayant mis à contribution son équipe de direction, comptabilité, commercialisation, le logiciel d’exploitation.

Subsidiairement, la condamnation pourra être limitée à 12 570 euros représentant 3% de la durée de vie de la société.

***

Le ministère public par un avis déposé et notifié le 14 février 2023 a requis l’infirmation du jugement et la condamnation de ces trois anciens dirigeants au vu des fautes de gestion qui sont établies à leur encontre :

– l’acceptation de conditions contractuelles défavorables lors des cessions d’actifs (prix négatifs, euro symbolique)

– le maintien d’une activité déficitaire depuis 2012 année où les pertes ont été les plus importantes – 1 980 K€

– paiement d’importantes charges d’honoraires de gestion et de commissions à des intervenants chargés de la commercialisation des résidence qui ne sont autres que des sociétés à la main des dirigeants de VCR

– l’absence de reconstitution de fonds propres en octobre 2014 alors qu’ils étaient inférieurs à la moitié du capital social

– présentation de comptes sociaux sans lien avec les rapports des commissaires au comptes , plus particulièrement le rapport spécial du CAC en 2014 faisant état de 10 conventions spéciales visées à L 223-19 code de commerce, alors que le PV d’AG n’en mentionnait aucune, et 5 conventions qui n’ont pas été rapportées concernant les prestations de MM [AF] (gérant de VCR pour 171 K€, de la société Manureva Vacances représentée par [WK] [M] pour plus de 80 000 euros, et de commercialisation des séjours par le groupe MMV pour 2 285 K€

– la gestion des actifs par l’utilisation des fonds de concours (délivrés par le promoteur de l’opération aux gestionnaires des résidences hôtelières permettant de servir des loyers supérieurs à ceux annoncés pour donner l’illusion d’une rentabilité exceptionnelle), prévus pour 2 à 3 années. L’équilibre financier étant ensuite brutalement rompu à la fin de la manne financière.

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M. [U] [D] n’a pas constitué avocat.

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Le ministère public, aux termes d’un avis déposé le 7 février 2023 a requis l’infirmation du jugement et demande à la cour de retenir les fautes de gestion caractérisées par le liquidateur judiciaire à l’encontre de MM. [A], [M] et [D] :

– l’acceptation de conditions contractuelles défavorables lors des cessions d’actifs (prix négatifs ou conclusion de contrat de partenariat avec des cessionnaires entraînant le paiement par VCR en 2014 et 2015 de 3 953 K€ et 4 744 K€),

– le maintien d’une activité déficitaire depuis 2012,

le paiement par la société d’importantes charges d’honoraires et de commissions pour la commercialisation des résidences se révélant être des sociétés dont les gérants de VCR étaient les dirigeants,

– l’absence de reconstitution des fonds propres en octobre 2014 alors qu’ils étaient devenus inférieur à la moitié du capital social,

– la présentation de comptes sociaux sans lien avec les rapports des commissaire aux comptes,

– la gestion des actifs par l’utilisation des fonds de concours délivrés par le promoteur au gestionnaire des résidences permettant de servir aux propriétaires investisseurs des loyers supérieurs aux loyers annoncés et donnant l’illusion d’une rentabilité.

Il conclut à leur condamnation à supporter le passif de la société VCR à hauteur de 6 061 337,66 euros représentant le passif non rejeté et tenant compte de la réalisation du fonds de commerce pour 50 000 euros.

SUR CE,

Aux termes des dispositions de l’article L651-2 du code de commerce tel qu’issu de la Loi de sauvegarde des entreprises n°2005-845 du 26 juillet 2005, modifié par l’ordonnance n°2010-1512 du 9 décembre 2010, lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables.

En application du texte susvisé, pour que l’action initiée par la société la Selarl [E] – Les Mandataires représentée par Me [T] [E], ès qualités, puisse prospérer il faut que soient établis :

-une insuffisance d’actif,

-une ou plusieurs fautes de gestion imputables à chacun des gérants mis en cause

-un lien de causalité entre la ou les fautes commises et l’insuffisance d’actif.

1/ Concernant l’insuffisance d’actif, il n’est pas nécessaire à la recevabilité de l’action en responsabilité pécuniaire des dirigeants d’une société que le passif soit définitivement arrêté et vérifié dès lors qu’il apparaît de manière manifeste que l’actif sera insuffisant pour payer le passif .

En cela, il apparaît et n’est pas contesté que le passif total déclaré s’établit au 8 juillet 2022 à la somme de 10 105 226,61 euros, dont 24 990,76 euros à titre super privilégié et 2 826 656,46 euros à titre privilégié, 837 236,76 euros à titre chirographaire et 1 181,88 euros

Le passif représentant les créances déclarées et non définitivement rejetées s’élevait à 6 111 337,66 euros ;

quant à l’actif réalisé, il s’élèvait à 50 000 euros.

Il en résulte une insuffisance d’actif de l’ordre 6 061 337,66 euros.

2/ Les fautes de gestion invoquées à l’encontre de MM. [A], [M] et [D] :

Concernant l’absence de déclaration de cessation des paiements dans le délai de 45 jours, soit au plus tard au 26 septembre 2015.

Ce grief est commun aux trois intimés et résulte de la remontée de la date de la cessation des paiements initialement fixée au 26 février 2016 au 11 août 2014 ; en effet, il n’est pas contesté que :

– [K] [A] était gérant de la Sarl VCR du 1er juillet 2013 au 19 décembre 2014,

– [WK] [M], l’ayant été du 19 décembre 2014 au 15 avril 2015,

– et [U] [D] l’ayant été du 15 avril 2015 jusqu’en février 2016, date du dépôt de la déclaration de cessation des paiements par l’intéressé.

La cessation des paiements, au sens de l’article L 631-1 du code de commerce se définit comme l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible.

L’actif disponible s’entend de l’actif réalisable à bref délai : les disponibilités en banque ou en caisse, les découverts autorisés pour la partie non utilisée, les réserves de crédit, les effets de commerce immédiatement mobilisables ; le passif exigible comprend l’ensemble des dettes échues, liquides et certaines, ce qui en exclut les dettes contestées.

Il n’est en revanche pas nécessaire que le passif soit exigé pour constituer l’état de cessation des paiements.

Il ressort des comptes annuels de l’exercice du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 à partir desquels s’est fondé le tribunal de commerce de Nice pour décider du report dans le temps de la date de cessation des paiements au 11 août 2014 que :

– le bilan au 30 septembre 2013 faisait état de 8 129 709 euros de dettes pour 107 070 euros de disponibilités,

– le bilan au 30 septembre 2014 faisait état de 13 264 070 euros de dettes pour 20 234 euros de disponibilités, la situation s’étant dégradée au cours de l’exercice clos le 30 septembre 2014.

Le tribunal a par ailleurs retenu pour caractériser l’état de cessation des paiements, que le montant des loyers impayés du 2ème trimestre 2014, s’élèvait à la somme de 10 157 896 euros, et qu’un tel montant consacrait un état de cessation des paiements dès le 30 juin 2014, mais que compte tenu du délai de report maximum prévu de 18 mois, a fixé celle-ci au 11 août 2014.

Si, comme le relève le tribunal de commerce, M. [D] ayant pris ses fonctions de gérant le 15 avril 2015, il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir déposé une déclaration de cessation des paiements au plus tard le 26 septembre 2014.

Toutefois, peu après sa prise de fonction en avril 2015, M. [D] disposait des mêmes informations que le tribunal de commerce pour apprécier l’état de la trésorerie et des liquidités de la société au regard de l’endettement tel qu’il ressort des éléments de comptabilité ci-dessus rappelés, et à cet égard, la cour relève que M. [D] ne s’est pas opposé devant le tribunal de commerce au report de la date de cessation des paiements jusqu’à 18 mois en arrière.

S’agissant de M. [A], celui-ci était directeur général du groupe Mer et Montagne Vacances (ci-après MMV) lorsqu’il a été nommé aux fonctions de gérant non associé de la Sarl VCR, fonctions qu’il a exercée à titre gratuit, entre le 1er juillet 2013 jusqu’au 19 décembre 2014.

A cet égard, lorsque le groupe MMV est entré dans le capital de la Sarl VCR (en juillet 2013), les résidences de tourisme exploitées par la société VCR dégageaient déjà un déficit d’exploitation et l’entrée du groupe MMV avait pour objectif de résorber les difficultés financières liées à une absence de rentabilité des résidences de tourisme.

Sur ce point, M. [K] [A], comme M. [WK] [M] arguent que le jugement qui a reporté la date de la cessation des paiements au 11 août 2014 n’a pas autorité de la chose jugée en ce qui les concerne, n’ayant pas été tous deux parties à l’instance.

M. [A] objecte que les éléments financiers montraient un actif circulant de 12 570 K€, des dettes à hauteur de 13 264 K€, un chiffre d’affaires de 16 483 K€ et un résultat positif de 713 K€, de sorte que l’état de cessation des paiements n’était pas caractérisé.

Quant à M. [M], celui-ci soutient qu’en raison du résultat net après impôt de 18 532 euros pour l’exercice clos au 30 septembre 2014 (contre 730 012 au 30 juin 2013), l’état de cessation des paiements n’était pas démontré.

Outre le fait que cette affirmation est démentie par l’acte de cession des parts intervenue le 04 août 2015 entre MM. [WK] [M] et [U] [D] (Pièce n° 9 de l’appelante) qui mentionne en page 4 §3 : ‘Situation au 19 décembre 2014. Malgré une situation bilantielle très dégradée, Messieurs [M] et [AF] se décident à se lancer dans le challenge de reprendre VCR’, la notion d’actif disponible ne recouvre pas celle d’actif circulant, dont elle n’est qu’une partie. L’état de cessation des paiements est essentiellement une notion de trésorerie, donc fluctuante.

A cet égard, le tribunal de commerce, par le constat, au vu des documents comptables de la société, que ses disponibilités étaient passé de 107 070 euros au 30 septembre 2013 à 20 234 euros au 30 septembre 2014 alors que les loyers commerciaux impayés du second 2ème trimestre 2014, s’élevaient à la somme de 10 157 896 euros, a caractérisé l’état de cessation des paiements.

A ce jour, le passif représentant les créances déclarées et non définitivement rejetées s’élevait à 6 111 337,66 euros.

En l’état des éléments versés aux débats, l’état de cessation des paiements apparaît manifestement caractérisé à la date du 11 août 2014 et les trois gérants en cause disposaient de toutes les informations comptables nécessaires pour s’en convaincre.

La jurisprudence considère toutefois que le défaut de dépôt d’une déclaration de cessation des paiements dans le délai de 45 jours si elle constitue une négligence, ne suffit pas à constituer une faute de gestion, quand bien même le dirigeant en a-t-il été informé.

Le non respect des règles en matière de droit des sociétés

L’article L 223-42 du code de commerce applicables aux sociétés à responsabilité limitée, oblige, si les capitaux propres de la société deviennent, du fait des pertes constatées, inférieurs à la moitié du capital social, le gérant à provoquer une consultation des associés dans les 4 mois suivant l’approbation des comptes, qui décident s’il y a lieu ou non à dissolution anticipée de la société et à défaut, d’opérer une reconstituer les capitaux propres à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue ; ces mêmes dispositions prévoient des mesures d’avertissement à l’égard des tiers.

Le fait que l’associé unique, la SAS MMV Résidence, ait par une délibération du 15 octobre 2014 fait le choix de ne pas prononcer la dissolution anticipée de la société malgré un actif net inférieur à la moitié du capital social, sans reconstitution des capitaux propres dans les deux ans, est imputable l’associé et ne peut être reprochée au dirigeant de la société.

Ce manquement ne peut donc être retenu à l’encontre de MM. [A].

Concernant la présentation des comptes sociaux en lien avec leur certification par le commissaire aux comptes

Sur ce point, la Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités, fait état du caractère inhabituel de la démission de M. [B] [N], commissaires aux comptes, le 1er avril 2014, et ‘s’interroge légitimement sur les circonstances ayant entouré cette démission’ en stigmatisant une présentation volontairement et manifestement opaque des comptes sociaux, sans toutefois apporter de démonstration d’une absence de comptabilité régulière et sincère caractérisant une faute de gestion à l’encontre de M. [A], de M. [M] dont la gérance a débuté le 19 décembre 2014 pour se terminer le 15 avril 2015, ni à l’encontre de M. [D] dont la gérance n’a débuté que le 15 avril 2015.

Dès lors ce grief ne peut être retenu à l’encontre des intimés.

Concernant les conventions passées entre la société VCR et d’autres entités dans lesquelles sont intéressés MM. [A], [M] et [D] :

La Selarl [E] – Les Mandataires ès qualités considère que la société VCR a supporté des frais de gestion et des commissions payées à divers intervenants chargés de la commercialisation des résidences dont :

– MMV

– la société Manureva Vacances dont M. [M] est le gérant, qui a perçu 80 449,66 euros de commissions au titre de l’exercice clos le 30 septembre 2015

– les sociétés MNRA (ex Manureva) et Clark Mac Millan à la main de M. [U] [D] lesquelles ont perçu respectivement 48 602,12 euros et 9 711,70 euros

S’agissant de M. [A] (1er juillet 2013 au 19 décembre 2014) il n’est pas démontré en quoi les conventions conclues en application de l’article L 223-19 du code de commerce entre MMV Résidences et la Sarl VCR, et plus particulièrement le contrat de partenariat conclu le 1er septembre 2013 entre VCR et MMV SA (convention de tour opérateur), pour la commercialisation des séjours constitueraient des conventions conclues à des conditions anormales ou sans contrepartie ou encore, à des conditions défavorables pour la société VCR, le seul montant des prestations et commissions facturées par MMV SA n’étant pas en soi révélateur d’un abus, d’autant qu’à cette période, la société VCR exploitait encore 19 résidences, ayant rapporté un montant de ventes de séjours de 16 000 000 euros.

S’agissant de la convention conclue entre la société VCR et la société Manureva Vacances dont M. [WK] [M] est le gérant, celle-ci a permis à la société VCR dont le personnel est limité aux sites des établissements, de bénéficier de prestations de comptabilité, d’un logiciel d’exploitation et de l’intervention d’une équipe commerciale pour la commercialisation de séjours dans ces résidences de tourisme.

Quant à M. [D], ce dernier a, à l’instar des précédents, rempli ces mêmes services auprès de VCR à travers les sociétés MNRA et Clark Mac Millan (commercialisation des résidences).

Il n’est donc pas démontré que les sommes versées en exécution de ces conventions de prestations de services, l’ont été sans contrepartie ni que les prestations effectuées ne répondaient pas aux besoins de l’activité de la société VCR.

Ce grief ne sera donc pas retenu.

Sur les cessions des actifs de la société VCR à des conditions critiquables :

En l’espèce, la cour relève que les principaux actes de cession des fonds de commerce des résidences, que le liquidateur judiciaire considère comme ayant été réalisées à des conditions critiquables, en raison de la modicité du prix ou consenties à un ‘prix négatif’ ont été décidées non par les trois derniers gérants mis en cause, mais par l’associé unique de la société VCR, en l’occurrence, la SAS MMV Résidence, les 12 février 2014, 16 juin 2014 et 1er septembre 2014, aux termes de trois délibérations de l’associé unique, autorisant le gérant, qui n’était pas à cette période M. [D] mais M. [A], à procéder aux dites cessions.

Seront ainsi cédées à l’euro symbolique :

– à la Sasu MMV Résidences le 30 septembre 2014 : le mas des Cigales, les Demeures du Ventoux, le Domaine de L’ansérine, le Fontainebleau, le Domaine de la Corniche,

– à la SAS GB Gestion le 30 septembre 2014 : le Domaine de Manon,

Pour d’autres résidences (Le Saint-Clair, le Ker goh lenn, le Domaine de Bacchus, Fonserane, Demeures Torellanes, Domaine du Bosquet), la SCP [E] – Les Mandataires, relève que les actes de cession prévoient que le cessionnaire s’engage dans l’intérêt des propriétaires bailleurs à signer un contrat de partenariat en allotement avec la société MMV SA pour la poursuite de la commercialisation des séjours dans ces résidences.

Enfin, si ces cessions se sont accompagnées du versement de sommes importantes de la part de la société cédante VCR, il n’est pas contesté par le liquidateur judiciaire qu’il s’agit de subventions ou fonds de concours versés par le promoteur pour accompagner le lancement de la gestion locative de ces résidences, afférents aux fonds cédés.

La société VCR ne conservera que deux fonds : les Demeures de Massane à [Localité 6] et le Domaine du Golf de [Localité 11].

M. [M], quant à lui, n’a effectué aucune cession de fonds.

L’unique cession réalisée sous le mandat de M. [U] [D] concerne les ‘Demeures de la Massane à [Localité 6], le 18 novembre 2015 au profit de Vacanceole pour l’euro symbolique, en contrepartie de l’abandon par les propriétaires de leurs arriérés de loyers. Cette cession a été consentie à ces conditions en raison d’une exploitation structurellement déficitaire de ce fonds.

En effet, la Sarl VCR indiquera dans l’acte de cession la difficulté dans laquelle elle se trouve de ne pas parvenir à négocier les conditions d’exploitation avec les propriétaires bailleurs qui se refusent à toute baisse du loyer.

Ces cessions s’inscrivent en outre dans le prolongement de procédures de résiliation de baux engagées par les propriétaires bailleurs ou par la société VCR et font suite à un rapport d’audit établi par le cabinet Deloitte, selon M. [A].

Sur ce point, il n’est pas démontré par la Selarl [E] – Les Mandataires que la cession d’un fonds dont l’exploitation apparaît structurellement déficitaire, aurait pu intervenir à des conditions plus favorables que celle consentie à l’euro symbolique, étant rappelé que n’ont été conservées par VCR que deux résidences sur les dix-neuf, dont la rentabilité semblait être la meilleure.

Concernant les engagements financiers pris par la société VCR sous la gérance de MM. [A] et [D], se traduisant pas des versements effectués par la société VCR dans le cadre des cessions régularisées, il n’est pas démontré en quoi ces versements seraient fautifs, dès lors qu’il est allégué par les intimés et non contesté par le liquidateur judiciaire, qu’il s’agit des subventions ou fonds de concours versés par le promoteur à l’exploitant des résidences pour pérenniser la gestion locative.

Quant à la caractérisation de la poursuite d’une activité déficitaire, la SCP [E] – Les mandataires indique dans ses conclusions (page 17) que la situation financière nette se dégrade depuis 2012, en raison de pertes particulièrement importantes (- 1 980 K€), mais dont l’ampleur s’explique par le changement de date de clôture d’exercice ( 6 mois) et par le fait que le chiffre d’affaires ne tient pas compte de la saisonnalité (les fortes recettes se situant aux mois de juillet et août), pour relever que les résultats des années suivantes n’ont pas été à la hauteur de ce déficit.

En outre, elle s’interroge sur la pratique du versement de fonds de concours par le promoteur immobilier Promeo, permettant de servir aux propriétaires investisseurs, du moins durant les deux ou trois premières années de la commercialisation de ces résidences hôtelières, des loyers d’un montant supérieur à ceux habituellement pratiqués de manière à asseoir une apparence de rentabilité de l’opération et ce n’est qu’à l’arrêt du versement de ces subventions d’exploitation, que la plupart des résidences gérées par VCR vont s’avérer très rapidement déficitaires et conduiront à l’arrêt du paiement des loyers aux propriétaires et à la renégociation du montant des loyers promis aux propriétaires, pour conclure qu’ ‘il appert finalement que tout le système de gestion mis en place au sein de la société VCR était depuis l’origine voué à un déséquilibre financier chronique’.

Or ce modèle économique mis en place par le groupe Promeo, aussi critiquable fut-il, ne peut être imputé aux trois derniers gérants, lesquels n’étaient pas en fonction au moment de la signature des baux entre la société VCR et les propriétaires investisseurs comme au moment de la mise en place des fonds de concours.

Les intéressés ont fait valoir, sans être démentis sur ce point, qu’ils ont été actifs :

– s’agissant de M. [A] : il a dès sa prise de fonction, mis en oeuvre un audit général des résidences hôtelières et engagé des négociations tant avec le groupe Promeo pour obtenir le versement de fonds de concours supplémentaires – ce qui s’est traduit par une augmentation sensible du montant des subventions d’exploitation qui sont passées de 2 206 K€ en 2010, à 7 026 K€ en 2013 et à 6 466 K€ en 2014- qu’avec les propriétaires investisseurs pour obtenir une diminution du montant des loyers, ces dernières n’ayant pas abouti.

– s’agissant de MM. [M] et [D] : il apparaît à la lecture de l’acte de cession des parts du 15 avril 2015 précité (pièce n°9 de l’appelante) entre MM. [M], [AF] (cédants) et M. [D] (cessionnaires), que les cédants, professionnels confirmés dans le tourisme et habitués aux restructurations dans cette branche, malgré une situation bilantielle très dégradée au 31 décembre 2014, avec des facteurs de complexité et de difficultés bien identifiés (les capitaux propres sont négatifs de 931 K€, le cumul des soldes des deux principales banques sont négatifs de 875 K€ en tout, le compte MMV Résidences ressort à 571 K€ dû par VCR), se sont néanmoins lancés dans la reprise de VCR, avec des objectifs et une stratégie de développement de l’activité de VCR qui incluent :

– des perspectives de développement d’un groupe de gestion de résidences de tourisme et une demande à satisfaire,

– les loyers du 4ème trimestre 2014 et 1er trimestre 2015 des deux sites restants d'[Localité 6] et de [Localité 11] sont pratiquement couverts par le solde des fonds de concours versés par Promeopatrimoine, ce qui leur laisse le temps de négocier les baux avant l’été,

– un crédit d’IS de 441 K€ potentiellement récupérable leur permettant de faire face aux dettes fournisseurs,

– certains risques sont couvert par une garantie de passif de Proméopatrimoine.

Face aux obstacles rencontrés, notamment par rapport au règlement des sommes dues à MVV Résidences, principal tour opérateur de VCR, ayant entraîné le nantissement des fonds et faisant obstacle à la renégociation des baux, M. [M] a finalement cédé ses parts à M. [D]. Celui-ci apparaît comme un professionnel averti dans le domaine de la gestion des résidences Hôtelières, dont la société qu’il dirige exploite une résidence de tourisme à Mandelieu dans laquelle MMV est actionnaire (avec qui un protocole sur le versement des sommes dues par VCR est en voie de finalisation permettant de garantir une trésorerie d’exploitation à VCR), ayant l’expérience de la négociation de nouveaux baux avec les propriétaires, et qui dispose des compétences requises pour reprendre la gestion de la société VCR.

S’il ressort qu’à la fin de l’exercice 2013, la situation financière de la société était en régression constante par rapport à 2012, elle affichait encore un résultat de 18 533 euros au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2014 et les perspectives d’une renégociation des baux et d’un accord avec MMV résidences permettant à VCR de disposer d’une trésorerie d’exploitation suffisante, permettaient d’envisager le redressement de la société.

Par ailleurs, ainsi que le souligne M. [A] dans ses conclusions, les gestionnaires des résidences qui ont fait l’objet des cessions de fonds intervenues en 2014 et 2015 sont parvenus à un retour à l’équilibre financier, ce qui tend à démontrer qu’il était possible de ramener la gestion locative de ces résidence à l’équilibre financier.

Comme le lui permettent les dispositions de l’article L

651-2 du code de commerce, le tribunal de commerce, et à sa suite, la cour d’appel apprécient, au regard des circonstances particulières de l’espèce, du rôle effectivement joué par chacun des dirigeants dont la responsabilité pécuniaire est recherchée, de la gravité des fautes de gestion démontrées à leur encontre, si une sanction pécuniaire doit être ou non prononcée à leur encontre, au titre de l’insuffisance d’actif.

Au vu des éléments qui précèdent, le tribunal a pu considérer qu’il n’y avait eu ni enrichissement personnel, ni détournement d’actifs de la part des gérants successifs, appréciation que la cour reprend à son compte, ajoutant que la négligence tenant à la non déclaration de l’état de cessation des paiements établie à l’encontre de MM. [K] [A], [WK] [M] et [U] [D], est insuffisante à caractériser la faute de gestion visée à l’article L 651-2 précité.

Leur implication dans la gestion de la Sarl VCR ne fait pas ressortir de fautes de gestion ayant contribué à l’aggravation de l’insuffisance d’actif.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté la SCP [E] (la Selarl [E] – Les Mandataires) ès qualités de ses demandes à l’encontre de MM. [A], [M] et [D].

Au vu des circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de prononcer de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe ;

Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nice le 15 mars 2022 (n°2022L00349) en ce qu’il a débouté la SCP [E], ès qualités (la Selarl [E] – Les Mandataires, représentée par Maître [T] [E]) de ses demandes à l’encontre de MM. [K] [A], [WK] [M] et [U] [D] ;

Déboute SELARL [E] – ‘Les Mandataires’ venant aux droits de la SCP [E], représentée par Maître [T] [E], ès qualités, de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu à prononcer de condamnation au titre de l’article l’article 700 du code de procédure civile

Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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