Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 07 JUIN 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 19/07395 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OMVP
Arrêt n° :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 07 OCTOBRE 2019 du CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER – N° RG F18/00039
APPELANT :
Monsieur [H] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Isabelle DAUTREVAUX de la SELARL CAZOTTES/DAUTREVAUX, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me BOUSQUET, avocate au barreau de Montpellier
INTIMEE :
SA FFSA enseigne LA FOIR’FOUILLE, prise en la personne de son président en exercie domicilé en cette qualité au siège situé :
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Christophe KALCZYNSKI de l’AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 21 Mars 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 AVRIL 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Madame Magali VENET, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.
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* *
EXPOSE DU LITIGE
M. [H] [E] a été embauché le 9 décembre 2013 par la société La Foir’Fouille en qualité de contrôleur de gestion junior, statut cadre, selon contrat à durée indéterminée à temps plein.
La convention collective applicable est celle de l’entreprise de commission , de courtage et de commerce intra-communautaire et d’importation-exportation de France Métropolitaine n°3100.
M. [H] [E] a été placé en arrêt de travail du 2 mars 2017 au 26 juin 2017.
Le 28 juin 2017, lors de la visite de reprise, le médecin du travail a notifié un avis d’inaptitude au poste, et dispensé l’employeur de rechercher un reclassement dans l’entreprise.
Le 29 juin 2017, M. [E] a été placé en arrêt de travail jusqu’au 28 août 2017
Le 22 août 2017, l’employeur a notifié à M. [E] son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.
Le 12 janvier 2018, M. [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Montpellier afin de contester son licenciement et voir condamner l’employeur à lui verser diverse sommes.
Par jugement en date du 07 octobre 2019, le conseil de prud’hommes a débouté M. [E] de l’ensemble de ses demande.
Par déclaration en date du 13 novembre 2019, M. [E] a relevé appel de la décision.
Vu les dernières conclusions de M. [E] en date du 16 février 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.
Vu les dernières conclusions de La Sa La Foir’fouille en date du 20 avril 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions
L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’exécution du contrat de travail:
Sur le harcèlement moral:
L’article L 1152-1 du code du travail dispose que ‘aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel’.
L’article L1154-1 du code du travail précise qu’il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’espèce, M. [E] fait valoir qu’il a été victime de harcèlement moral caractérisé par: une diminution du montant de son bonus annuel, son exclusion des procédures de recrutement des personnels de son service, des appels téléphoniques intempestifs en dehors des horaires de travail , la demande de restitution de son ordinateur portable, l’obligation de rendre compte de son activité quotidienne, la suppression de son numéro de téléphone professionnel, le déménagement imposé de son poste de travail , la publication d’une offre d’emploi pour un poste identique au sien pendant son arrêt maladie. Il précise que ces faits ont entraîné une dégradation de son état de santé à l’origine de son inaptitude.
A l’appui de ses allégations, il verse au débats:
– Son entretien d’évaluation relatif à l’année 2016, laissant apparaître une diminution de son bonus annuel malgré l’augmentation de sa charge de travail liée à l’ouverture de nouveaux magasins.
– des échanges de mails avec le services des ressources humaines qui le consultait en 2015 pour le recrutement de salariés dans son service, un mail laissant apparaître qu’il a été chargé du recrutement d’un stagiaire, puis un nouveau mail relatif à des entretiens de recrutement auxquels il n’a pas été associé en 2017.
– un relevé d’appel téléphonique reçu sur son téléphone portable le 22 février 2017 à 19h03.
– un mail de son supérieur hiérarchique M. [F], lui imposant d’effectuer, à compter de février 2017, un bilan quotidien de son activité.
– des mails justifiant: de la suppression de son numéro de téléphone professionnel du répertoire de la société, dès le 9 mars 2017, de la demande de restitution de son ordinateur portable et du déménagement de son poste de travail imposé par l’employeur en février 2017, ainsi que de la publication d’une offre d’emploi pour un poste similaire au sien dès le 29 mai 2017 pendant son arrêt maladie.
Concernant la dégradation de son état de santé, M. [E] verse aux débats:
– deux certificats médicaux du Docteur [A] [Z]: en date des 28 avril 2017 et 17 mai 2017 faisant état de la dégradation de l’état psychologique de M. [E](état de tristesse, inquiétude , irritabilité, agoraphobie, insomnie avec réveil précoce, idées noires) et de l’évocation par ce dernier, dans le certificat du 28 avril 2017 ‘ de très mauvaises relations professionnelles avec sa hiérarchie à type de harcèlement depuis plusieurs mois et depuis lesquelles son état de santé, en particulier psychologique , s’est dégradé et se dégrade encore, malgré l’arrêt de son activité et la prise de médicaments anti dépresseurs;’
Dans le certificat du 17 mai 2017, le médecin précise: ‘en tout état de cause, j’estime que M. [E] tout à fait incapable de reprendre une activité professionnelle d’autant qu’il s’agit d’un métier où les relations humaines sont importantes. Par ailleurs, la capacité de travail du patient parait également très diminuée.’
– un courrier du docteur [T] , psychiatre en date du 29 mai 2017, adressé au médecin du travail et dans lequel il mentionne que : ‘M. [E] présente des troubles anxio-dépressifs… s’il reprend son travail, son état psychique s’aggravera, ainsi qu’un certificat médical de ce dernier en date du 28 août 2017 dans lequel il atteste que l’état psychique de M. [E] ‘ne lui permet pas d’entrer en contact physique avec son employeur et son entourage’
– des attestations de son épouse et de ses proches témoignant de l’altération de sa santé mentale se traduisant par de l’agoraphobie, des angoisses nocturnes quotidiennes, une perte de poids, un isolement, un repli sur soi-un mal être , un épuisement physique et psychologique et des idées noires.
– les recommandations du médecin du travail lors de la visite de pré-reprise du 6 juin 2017: ‘pas d’avis d’aptitude délivré pendant un arrêt de travail. Son état de santé ne lui permet pas d’envisager la reprise à son ancien poste de travail. Ne pourra plus travailler au contact de cette entreprise ou de cette organisation. A revoir à l’issue de son arrêt de travail pour visite de reprise et avis définitif’.
– les conclusions du médecin du travail lors de la visite de reprise du 28 juin 2017 rédigées ainsi: ‘inapte au poste….son état de santé ne permet pas le reclassement à aucun poste de cette entreprise. Pourrait travailler dans une autre entreprise et dans un autre contexte organisationnel.’
– Les conclusions de l’expertise médicale diligentée le 27 juin 2017 par le Docteur [U], expert désigné par l’assurance maladie selon lesquelles l’état de santé de M. [E] ne lui permet pas de reprendre une activité professionnelle quelconque.
– un certificat médical et des ordonnances, délivrées par le Docteur [T] à M. [E] sur la période de septembre à décembre 2017, attestant que ce dernier continuait d’avoir besoin d’un traitement médical en raison des troubles qu’il présentait.
Ces fait, à l’exclusion des appels téléphoniques intempestifs dont il n’est pas justifié au regard de l’unique appel dont il a été destinataire le 22 février 2017, pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’un harcèlement moral.
Pour prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, l’employeur fait valoir que:
– le contrat de travail de M. [E] prévoyait que le montant du bonus annuel était fixé à la discrétion de l’employeur. La société précise que la réduction du montant alloué en 2017 s’explique par une moindre performance du salarié par rapport aux années précédentes en se reportant à l’entretien d’évaluation au cours duquel il était noté: ‘une année en dent de scie et un ton en de ça de ce que [H] nous avait habitués les années précédentes. Nous lui demandons davantage d’investissement et une régularité dans les efforts fournis’.
Il n’est cependant fait état d’aucun fait circonstancié concernant la diminution de l’implication de M. [E] dans son travail, sachant qu’il était chargé du suivi logistique du stock de la centrale Foir’fouille(import, réaction des commandes et expéditions magasins) et qu’il a fait face en 2016, avec trois autres contrôleurs de gestion et le service de gestion commerciale, a une charge de travail supplémentaire suite à l’ouverture de’augmentation du parc de magasins de la Foir’fouille qui est passé de 33 magasins en 2015 à 42 magasins en 2016. L’employeur minimise cette hausse de travail , tout en reconnaissant cependant que l’augmentation du nombre de magasins impliquait plus de travail quelques jours par mois , en début d’année lors des arrêtés de comptes, et en milieu d’année au moment des inventaires.
De plus, la société ne répond pas aux développements de M. [E] dans lesquels ce dernier explique avoir fait face en 2016, en plus de ses missions du service de contrôle de gestion, à des travaux exceptionnels dont notamment l’acquisition d’une nouvelle plate-forme logistique, nouveau prestataire logistique ….litige avec la société LAP qui a rapporté 225K€ à la Foir fouille, gestion de stocks; comptabilité: automatisation de logiciel…
Il apparaît ainsi que le choix de l’employeur de minorer le bonus annuel de M. [E] concernant une période de surcharge d’activité et de travaux exceptionnels, ne s’est appuyé sur aucun élément objectif.
– La société , qui fait état d’erreurs d’envois, ou de plaisanteries, concernant les mails dressées à M. [E] pour le recrutement de personnels, et précise qu’il était logique qu’il soit exceptionnellement chargé du recrutement d’un stagiaire au sein de l’école de commerce dont il est lui même issu, ne fait état d’aucun argument pertinent pour expliquer son exclusion du processus de recrutement de nouveaux salariés à compter de février 2017, sachant qu’il ne peut être retenu que le recrutement ne relevait pas de ses missions alors que lui même a été recruté et formé dans son poste de contrôleur de gestion, par le précédent titulaire du poste.
Il en découle que l’employeur ne fait état d’aucun élément objectif justifiant de l’exclusion de M. [E] dans le processus de recrutement des personnels de son service à compter de février 2017.
– concernant l’obligation faite à M. [E], d’effectuer auprès de son supérieur hiérarchique un bilan quotidien de son activité à compter du 28 février 2017, l’employeur soutient qu’elle était liée à sa défaillance quant à la remontée d’information sur l’avancée de ses travaux depuis plusieurs semaines, puis qu’il ne s’agissait que d’une demande temporaire liée à un dossier spécifique .
L’employeur ne produit cependant aucun élément justifiant qu’il aurait, préalablement à sa demande de bilans quotidiens, informé M. [E] de ses carences quant aux remontées d’informations sur son activité. Par ailleurs, des échanges de mails font état des interrogations de M. [E] adressées à son supérieur hiérarchique quant à la forme et le contenu des informations qui lui étaient demandées , sans que ce dernier ne lui réponde.
Il en découle que l’employer ne démontre pas que sa demande de bilans quotidiens s’appuyaient sur des éléments objectifs liés aux besoins de l’entreprise.
– De plus , l’employeur ne démontre pas qu’il était justifié, fin février 2017, de retirer à M. [E] l’ ordinateur portable dont il disposait depuis 2015 pour l’ affecter, selon les termes de la société à ‘du personnel itinérant’ non nommément désigné, ni de lui imposer un changement de bureau au motif de faciliter la formation d’une nouvelle recrue, alors qu’il ressort des échanges de mails entre le salarié et son supérieur hiérarchique qu’une telle formation ne s’était jamais précédemment déroulée dans ces locaux.
– Enfin, l’employeur ne verse aux débats aucun élément probant pour justifier de la suppression du numéro de téléphone professionnel de M. [E] du répertoire de la société peu de temps après qu’il soit en arrêt maladie, ainsi que de la publication d’une annonce pour le recrutement d’un salarié au poste de contrôleur de gestion cadre, identique à celui occupé par M. [E], lorsque ce dernier était en arrêt maladie, sachant que ce profil de poste ne correspondait pas à celui d’une autre salariée que la société indique avoir voulu remplacer par ce recrutement.
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que l’employeur ne démontre pas que les faits invoqués par le salarié étaient étrangers à tout harcèlement, de sorte que le harcèlement est établi.
Il ressort des éléments médicaux précédemment détaillés que la dégradation de l’état de santé psychologique de M. [E] est consécutive au harcèlement moral subi par ce dernier, lui occasionnant des angoisses nocturnes quotidiennes, une perte de poids, un isolement, un repli sur soi-un mal être , un épuisement physique et psychologique ainsi que des idées noires, nécessitant qu’il soit placé en arrêt de travail et bénéfice d’un traitement médical pendant plusieurs mois.
Il convient en conséquence d’indemniser le préjudice subi par M. [E] en condamnant l’employeur à lui verser la somme de 8000€ de dommages et intérêts.
La décision sera ainsi infirmée en ce qu’elle a rejeté la demande formée au titre du harcèlement moral.
Sur la violation de l’obligation de sécurité par l’employeur et l’exécution déloyale du contrat de travail:
En application des articles L4121 et suivant du code du travail, l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs .
L’employeur obligé d’en assurer l’effectivité ne peut prendre, dans l’exercice de son pouvoir de direction, des mesures qui ont pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité de ses salariés.
En l’espèce, M. [E] reproche à son employeur de n’avoir pris aucune mesure pour prévenir ou mettre fin au harcèlement dont il a fait l’objet.
Il verse aux débats un compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 26 juin 2017 établi par la direction de la société mentionnant que le personnel a été ‘contrarié par la politique de la société envers M. [E]’, ce à quoi la direction a répondu ainsi:
‘A la suite d’un entretien de recadrage en raison de son comportements à l’égard de certains collaborateurs du service comptabilité et à la non validation d’un contrat à durée indéterminée de Mme [N], apprentie, M. [E] a eu à plusieurs reprises , un comportement inacceptable envers sa hiérarchie.
La Direction lui a expliqué ‘il y avait des limites à ne pas dépasser, sa réponse a été de demander une rupture conventionnelle , qui a été refusée.
Suite à ce refus, M. [E] est en arrêt maladie depuis le 1er mars’.
La société ne justifie cependant pas de la réalité d’un entretien recadrage dont a fait l’objet M. [E], d’un comportement inadmissible de ce dernier ou de sa demande d’une rupture conventionnelle, l’attestation de Mme [D] énonçant avoir été informée par M. [F] d’une demande de rupture conventionnelle de M. [E] ne constituant qu’un témoignage indirect et n’établissant pas la réalité de la demande qu’aurait formulé le salarié. Au contraire, il ressort d’un mail envoyé par ce dernier à son supérieur hiérarchique qu’il n’avait jamais sollicité de rupture conventionnelle.
En tout état de cause, le compte rendu laisse apparaître que la direction de l’entreprise était informée des difficultés évoquées par M. [E] , auxquelles elle n’a pas répondu par la recherche d’une solution permettant de pacifier les relations au sein de l’entreprise dans le respect de son obligation de sécurité, mais en instaurant un rapport de force avec le salarié à la suite duquel ce dernier a été placé en arrêt maladie pendant plusieurs mois.
Il en découle que le manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur et l’exécution déloyale du contrat de travail sont établis , et justifient qu’il soit condamné, au vu du préjudice subi par M. [E], à lui verser la somme de 5000€.
La décision sera infirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes formées à ce titre.
Sur le rappel de salaires au titre du bonus annuel 2016:
En l’espèce, l’article 7 du contrat de travail de M. [E] stipule que ‘la société peut décider d’octroyer à M. [E] un bonus , qui ne fait pas partie de la rémunération contractuelle. Le montant d’un tel bonus et les conditions de son octroi sont à la discrétion de l’employeur. Si un tel bonus est octroyé pendant plusieurs années, il st expressément convenu qu’il ne constituera pas un usage et que M. [E] n’aura pas droit à un tel bonus à l’avenir.’
Il en découle que le bonus annuel versé aux salariés ne relevait d’aucune disposition légale, conventionnelle ou contractuelle de sorte qu’il convient de rejeter la demande de rappel de salaire formée à ce titre.
Sur la rupture du contrat de travail:
En application de l’article L 1152-3 du code du travail : « toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-1 et L.1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ».
Il en découle que le licenciement d’un salarié pour inaptitude, lorsque cette inaptitude est consécutive à un harcèlement moral, est nul.
Plus spécifiquement, lorsqu’il existe un lien certain entre la dégradation de l’état de santé du salarié à l’origine de son inaptitude et le harcèlement moral qu’il a subi, le licenciement pour inaptitude physique doit être déclaré nul.
En l’espèce, Les éléments médicaux précédemment détaillés et les témoignages produits ont fait suffisamment ressortir que ce licenciement pour inaptitude était la conséquence du harcèlement moral subi, de sorte que le licenciement est nul.
Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail:
Sur les dommages et intérêts:
En application de l’article L.1235-3-1 du code du travail, lorsque le licenciement est entaché de nullité, le juge lui octroie une indemnité , à la charge de l’employeur qui ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois.
En cas de nullité, l’employeur s’expose à réintégrer le salarié ou à avoir à lui verser une indemnité d’un montant minimum de 6 mois de salaires, cumulables avec les dommages et intérêts attribués au titre du harcèlement moral subi.
En l’espèce, lors du licenciement, M. [E] était âgé de 30 ans. Il disposait d’une ancienneté de 3 ans et 8 mois dans une entreprise de plus de 11 salariés et son salaire brut s’élevait à 2900€ par mois.
Suite à la rupture du contrat de travail, après une période de carence de 6 semaines, il a bénéficié des allocations chômage à hauteur de 1526€ par mois.
Il est co-gérant avec Mme [S] [B] de la SARL Prohabitat immatriculée en 1989 ainsi que de la Sarl MPM dont l’activité a débuté le 15 février 2021 et de la SCI [E] dont l’activité a débuté en 2019.
Au regard de ces éléments , il convient de condamner l’employeur à lui verser des dommages et intérêts d’un montant de 17400€.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis :
En raison de la nullité du licenciement, M. [E] a droit à l’indemnité compensatrice de préavis dont il n’a pas bénéficié.
L’article 12 de la convention collective applicable prévoit en l’espèce un préavis de trois mois pour les cadres.
Il convient en conséquence de condamner l’employeur à verser à M. [E] la somme de 8700€ au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 870€ au titre des congés payés y afférent.
Sur la délivrance des documents salariaux:
Il convient d’ordonner la remise des bulletin de salaires rectifiés ainsi que la remise des documents de fin de contrat en conformité avec la présente décision, sans qu’il n’y ait lieu d’assortir la condamnation d’une astreinte.
Sur les frais irrépétibles et les dépens:
Il convient de condamner la société la For’Fouille à verser à M. [E] la somme de 2500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour, par décision contradictoire et en premier ressort
Infirme le jugement rendu le 07 octobre 2019 par le conseil de prud’hommes de Montpellier en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau:
– Dit que le licenciement notifié le 22 août 2017 par la société La Foir’Fouille à M. [H] [E] est nul.
– Condamne la société la Foir’Fouille à verser à M. [H] [E] les sommes suivantes:
– 8000€ au titre du harcèlement moral
– 5000€ au titre du manquement à l’obligation de sécurité et l’exécution déloyale du contrat de travail
– 17400€de dommages et intérêt pour licenciement nul
– 8700€ au titre de l’indemnité de préavis
– 870€ au titre des congés payés afférents
– Ordonne la remise, par la société la Foir’Fouille, des bulletins de salaires rectifiés ainsi que la remise des documents de fin de contrat de M. [H] [E] en conformité avec la présente décision, sans qu’il n’y ait lieu d’assortir la condamnation d’une astreinte.
Y ajoutant:
– Rejette la demande formée au titre du rappel de salaire pour le bonus de fin d’année 2016
– Condamne la société la Foir’Fouille à verser à M. [H] [E] la somme de 2500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– Condamne la société la Foir’Fouille à verser à M. [H] [E] aux entiers dépens de la procédure.
Le greffier Le président
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