ARRÊT N°
N° RG 21/00265 – N° Portalis DBVH-V-B7F-H5IE
CRL/DO/EB
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES
17 décembre 2020
RG :F18/00474
[M]
C/
S.A.S. CDC CONSTRUCTIONS
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 04 AVRIL 2023
APPELANT :
Monsieur [X] [M]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Romain FLOUTIER de la SCP FONTAINE ET FLOUTIER ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.A.S. CDC CONSTRUCTIONS
[Adresse 1]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Noëlle BECRIT GLONDU de la SELARL BECRIT GLONDU NOELLE, avocat au barreau de NIMES
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 10 Janvier 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Madame Emmanuelle BERGERAS, Greffier lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 24 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 04 Avril 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [X] [M] a été engagé par la SAS CDC Constructions selon contrat de travail à durée indéterminée à temps complet du 29 avril 2016, à effet du 02 mai 2016, en qualité d’employé commercial niveau A de la convention collective nationale du bâtiment Etam.
Par lettre recommandée du 3 juillet 2017, M. [M] était convoqué en entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé au 12 juillet 2017 puis reporté au 31 juillet 2017.
Par courrier du 25 août 2017, M. [M] était licencié en raison des motifs suivants : insuffisance professionnelle, non-respect des horaires de travail et cumul d’emploi.
Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, le 28 août 2018, M. [M] saisissait le conseil de prud’hommes de Nîmes en paiement d’indemnités de rupture et de diverses sommes lequel, par jugement contradictoire du 17 décembre 2020, a :
– débouté M. [M] de l’ensemble de ses demandes,
– condamné M. [M], à verser à la société CDC Constructions, la somme de 4500 euros pour procédure abusive,
– condamné M. [M], à verser à la société CDC Constructions, la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– laissé les dépens à la charge du demandeur.
Par acte du 15 janvier 2021, M. [M] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance en date du 26 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 10 janvier 2023. L’examen de l’affaire a été fixé à l’audience du 24 janvier 2023.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 13 décembre 2021, M. [X] [M] demande à la cour de :
– réformer le jugement rendu le 17 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Nîmes en toutes ses dispositions,
– débouter la société CDC Constructions de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Et statuant à nouveau,
– dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamner la société CDC Constructions à lui porter et payer la somme de :
* 2.960,60 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et pour le manquement de la société CDC Constructions à son exécution de bonne foi du contrat de travail,
* 5.952,15 euros à titre de remboursement de ses frais professionnels de déplacement, avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2018, date de saisine de la juridiction prud’homale, capitalisés annuellement,
* 1.366,40 euros bruts à titre de rappel de salaire correspondant au maintien de salaire du mois de juillet 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2018, date de saisine de la juridiction prud’homale, capitalisés annuellement,
* 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.
M. [X] [M] fait valoir au soutien de ses demandes que:
– la clause d’objectif incluse dans son contrat de travail n’était pas réalisable dans la mesure où les prix pratiqués étaient de 15 à 30% supérieurs à ceux de la concurrence et l’employeur adoptait un comportement critiquable vis-à-vis des clients,
– il a été affecté dès son embauche à un poste de développement marketing et communication, et non pas à son poste de commercial, ainsi qu’en attestent les multiples attestations qu’il verse aux débats,
– avant son licenciement, la SAS CDC Constructions ne lui a jamais reproché de ne pas avoir atteint ses objectifs de vente,
– l’employeur invoque des jours d’absence sans préciser lesquels, et ne lui a jamais reproché des retards ou un non respect des horaires avant son licenciement, ce qui s’explique par le fait qu’il effectuait dans la réalité plus d’heures que celles prévues à son contrat,
– l’employeur était parfaitement informé au moment de son embauche qu’il exerçait une activité d’agent général d’assurances, ce qui explique son refus de bénéficier du régime des frais de santé de l’entreprise dès son embauche,
– il a d’ailleurs établi un devis pour le gérant de la SAS CDC Constructions, M. [U], qu’il ne peut verser aux débats en raison du secret professionnel couvrant le document,
– son activité d’agent général d’assurance indépendant n’a été exercée que de manière résiduelle pendant la période où il travaillait pour la SAS CDC Constructions,
– il a subi des violences morales et physiques de la part de son employeur, sous forme de pression et en ne lui réglant qu’après forte insistance ses heures supplémentaires et ses frais professionnels, puis sous forme d’agression le 3 juillet 2017 lorsqu’il a été poussé et griffé pour l’obliger à quitter le site de l’entreprise,
– son employeur lui avait fait miroiter au moment de son embauche qu’il passerait sous un statut cadre à compter de juillet 2017 et qu’il lui céderait 30% des part de la société et lui rembourserait tous les frais engagés, ce qui n’ a pas été le cas, M. [U] ayant abusé de sa crédulité et de son temps de travail,
– il peut prétendre au remboursement à leur coût réel des frais professionnels qu’il a exposé et qui ne sont pas couverts par l’indemnisation forfaitaire prévue à son contrat de travail, ainsi qu’au maintien de son salaire pendant son arrêt maladie du 3 au 28 juillet 2017,
– ses demandes indemnitaires sont fondées
– sa condamnation en première instance à des dommages et intérêts pour procédure abusive est incompréhensible, il n’a commis aucun manquement ou abus.
En l’état de ses dernières écritures en date du 11 octobre 2021, contenant appel incident, la SAS CDC Constructions demande à la cour de :
– dire et juger l’appel mal fondé
– confirmer le jugement critiqué en toutes ses dispositions
– dire et juger le licenciement de M. [X] [M] régulier et bien fondé,
– débouter M. [X] [M] [X] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Tenant sa mauvaise foi, ses allégations mensongères,
– tirer toute conséquence de droit du refus de M. [X] [M] de communiquer ses déclarations de revenus 2015, 2016 et 2017
En cause d’appel,
– le condamner en tout état de cause à lui payer 6 000,00 euros à titre de dommages et intérêts,
– le condamner à payer 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, la SAS CDC Constructions fait valoir que:
– M. [X] [M] n’a réalisé qu’une seule vente en 17 mois de présence au sein de la société, ce qu’il ne conteste pas,
– M. [X] [M] ne lui consacrait pas tout son temps de travail puisqu’il était en même temps agent général d’assurances pour Axa,
– ces deux faits sont en contradiction avec les obligations découlant du contrat de travail,
– M. [X] [M] n’a jamais obtempéré à la demande qui lui a été faite devant le conseil de prud’hommes de produire ses déclarations de revenus pour les années 2015 -2016 et 2017, afin d’établir la réalité de son préjudice financier ensuite de son licenciement,
– son activité d’agent d’assurances est avérée, ainsi qu’en attestent les éléments recueillis sur Infogreffe ou le résultat des recherches sur Google,
– contrairement à ce qu’il soutient, il ne lui a jamais été demandé de moderniser les moyens de communication de la société, activité confiée à des professionnels de ce secteur,
– M. [X] [M] avait été recruté en remplacement d’un commercial parti en retraite et a été le plus mauvais vendeur avec une seule vente en 17 mois, alors que l’objectif d’une vente mensuelle était réaliste ainsi qu’en atteste la liste des marchés signés entre 2006 et 2018,
– les attestations produites par M. [X] [M] ne sont pas probantes, dès lors qu’elles ont été obtenues en trompant leurs signataires sur leur destination, l’appelant les ayant présentées comme étant destinées à être produites au soutien d’une future embauche,
– les faits de violences dénoncés par M. [X] [M] ont été montés de toute pièce pour le dossier prud’homal, et ne reposent sur aucun élément,
– M. [X] [M] n’a jamais présenté d’autre décompte de frais professionnels que ceux correspondant à ses trajets domicile – travail, et a été remboursé sur cette base, sa demande est sans fondement,
– il ne peut prétendre à aucun maintien de salaire dès lors qu’il n’est pas pris en charge par le régime général de la sécurité sociale mais par celui de travailleurs indépendants.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l’audience.
MOTIFS :
Demandes relatives à l’exécution du contrat de travail
* remboursement de frais professionnels
L’article 7 du contrat de travail mentionne que M. [X] [M] déclare posséder un véhicule personnel qu’il utilisera pour ses déplacements professionnels, pour lequel il justifie être assuré au titre de sa profession et indique ‘ Les frais ( assurance, carburant, entretien, …) Et débours que M. [X] [M] engagera pour l’exercice de ses fonctions lui seront remboursés mensuellement sur présentation de justificatifs détaillés et dans la limite d’un montant de 450 euros’
M. [X] [M] sollicite le remboursement de 5.952,15 euros de frais professionnels au motif qu’il a parcouru 30.554 km pour son employeur, représentant une somme de 12.252,15 euros ) mais n’a été indemnisé que de manière forfaitaire à hauteur de 450 euros mensuels. Il produit au soutien de sa demande un tableau indiquant par mois ‘km parcourus’, le montant de l’indemnité kilométrique et le montant des frais.
La SAS CDC Constructions conteste le montant sollicité et renvoie aux bulletins de salaire qui mentionnent le montant des frais remboursés, sur la base des états de frais produits par M. [X] [M], le remboursement des trajet domicile – travail se faisant sur une base forfaitaire mensuelle de 450 euros.
Les bulletins de salaire de M. [X] [M] sont accompagnés des état de frais qu’il a présentés, aucune autre dépense que ses déplacements domicile – travail n’y est mentionnée. Chaque état de frais mensuel porte sa signature et la mention de son acceptation du remboursement forfaitaire de 450 euros, tel que prévu au contrat de travail et accepté par la signature de celui-ci.
Force est de constater que M. [X] [M] ne verse au soutien de sa demande aucun élément qui viendrait établir qu’il a exposé des frais en dehors de ses trajets domicile – travail remboursés forfaitairement sur une base mensuelle de 450 euros.
En conséquence c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [X] [M] de cette demande et leur décision sera confirmée sur ce point.
* dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
L’article L1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
En l’espèce, M. [X] [M] considère que la SAS CDC Constructions n’a pas exécuté le contrat de travail de manière loyale et invoque au soutien de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral en résultant au motif qu’il a été :
– ‘mis en situation d’échec avec des objectifs inaccessibles et une stratégie commercial contradictoire’ :
M. [X] [M] considère qu’il n’était pas en capacité de procéder à une vente mensuelle au motif qu’il avait été placé sur des fonctions de développement marketing et communication par la SAS CDC Constructions et a été amené à créer un logiciel de chiffrage du coût de la construction d’une maison et de sa facturation. Il produit en ce sens:
– les attestations de plusieurs personnes se présentant comme des fournisseurs ( architecte, agenceur de cuisine, dessinateur, ..) Sans authentification de leur signature et sans mention d’une production de l’attestation en justice, qui indiquent avoir travaillé de manière satisfaisante dans leur domaine de compétence avec l’appelant,
– une photographie d’un stand annoté sans qu’il soit possible d’identifier qui en est le concepteur, la seule mention manuscrite apposée par l’appelant n’étant étayée par aucun élément,
– un prospectus et des catalogues sans qu’il soit possible d’en identifier le concepteur,
Pour contester ces affirmations, la SAS CDC Constructions justifie des contrats conclus et des facturations en 2016 et 2017 pour la conception de logos et de plaquettes de présentation, la mise en oeuvre de publicité sur différents sites par des entreprises spécialisées. Elle verse aux débats les attestations de certains des fournisseurs ayant fourni des attestations à M. [X] [M] qui précisent qu’il les avaient rédigées à la demande de ce dernier afin de compléter un dossier en vue d’une embauche.
La SAS CDC Constructions produit également un tableau récapitulatif des ventes conclues sur les années 2006 à 2018, et plus spécifiquement mois par mois sur les années 2014 à 2018 qui font apparaître une seule vente conclue par M. [X] [M] en juillet 2016, ce qui n’est pas contesté, alors que son prédécesseur entre 4 et 6 ventes par an, M. [U] et M. [O] étant sur des volumes équivalents.
Force est de constater que M. [X] [M] n’apporte aucun élément pour remettre en cause les explications et pièces produites par M. [X] [M].
En conséquence, ce grief n’est pas démontré.
– ‘victime d’une agression sur son lieu de travail’ :
Au soutien de cette affirmation, M. [X] [M] produit la copie de son audition par les services de gendarmerie dans le cadre d’un dépôt de plainte en date du 7 septembre 2018 dans laquelle il dénonce des violences sous forme d’une altercation dans les locaux de l’entreprise avec M. [A] [U] qui lui a arraché sa sacoche des mains parce qu’il refusait de lui remettre les effets de la société, et qui le poussait avec son ventre et l’a griffé sans précision de la manière dont cela est arrivé ; et un certificat médical établi le 5 juillet 2018 par son médecin traitant qui mentionne l’avoir reçu en consultation les 3, 5 et 18 juillet 2017 dans un état d’anxiété importante, avec présence d’une griffure sur le poignet, et rapportant une agression physique et verbale sur son lieu de travail.
La SAS CDC Constructions qui conteste l’agression, justifie d’un dépôt de plainte pour dénonciation calomnieuse et produit la copie de l’audition de M. [A] [U] par les services de police dans laquelle il décrit une altercation verbale avec M. [X] [M] lorsqu’il lui a refusé de lui accorder une augmentation de salaire et un statut de cadre en échange de la fin de son activité comme agent d’assurance et une attestation de son épouse, qui occupe le poste de secrétaire dans l’entreprise, confirmant l’absence d’altercation physique.
Force est de constater que M. [X] [M] n’apporte aucun élément en dehors de ses propres affirmations pour établir la réalité de l’agression qu’il décrit.
En conséquence, c’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [X] [M] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral en raison de l’exécution déloyale de son contrat de travail.
* maintien du salaire pendant l’arrêt maladie du 3 au 31 juillet 2017
C’est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. [X] [M] de la demande présentée à ce titre après avoir constaté que celui-ci était affilié au régime social des travailleurs indépendants et non au régime général de la sécurité sociale.
Leur décision sera confirmée sur ce point.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
M. [X] [M] a été licencié par courrier en date du 25 août 2017, rédigé dans les termes suivants :
‘ Monsieur,
A la suite de l’entretien préalable du lundi 31 juillet 2017, qui s’est tenu dans les locaux de la société auquel vous vous êtes présenté assisté d’un conseiller, je vous confirme que nos échanges ne m’ont pas permis de modifier mon appréciation des faits.
Je suis au regret de vous notifier votre licenciement pour les motifs exposés ci-après.
1. Insuffisance professionnelle
En vertu de l’article 5 de votre contrat de travail qui dit :
Article 5 – obligations professionnelles
Monsieur [M] [X] consacrera toute son activité aux tâches qui lui seront confiées par la société.
Il s’engage expressément à respecter les instructions et recommandations qui lui seront données par ses supérieurs hiérarchiques ainsi que, de façon plus générale, par la direction de la société.
Monsieur [M] [X] est strictement tenu au respect du secret professionnel et s’interdit de divulguer à des tiers les secrets de fabrication, les méthodes commerciales, et de façon plus générale, les informations relatives à la société dont il aurait eu connaissance dans le cadre ou l’exercice de ses fonctions.
En outre, pendant le présent contrat, Monsieur [M] [X] devra :
– exercer son activité professionnelle à temps plein,
– se conformer aux conditions de vente, notamment de prix, fixées par la société,
– effectuer, en cas de difficultés avec la clientèle, toutes démarches appropriées pour leur règlement.
A l’issue de la période d’essai, Monsieur [M] [X] devra réaliser au minimum une vente par mois.
Lors de l’entretien professionnel que nous avions eu le 25 janvier 2017 pour faire le point sur votre activité au sein de la société, et conformément aux termes de l’article 5 de votre contrat de travail, vous vous étiez engagé à mettre tout en oeuvre pour réaliser au moins une vente par mois.
Il s’avère qu’à ce jour et depuis votre entrée dans ma société, vous n’avez réalisé en tout et pour tout qu’une seule vente au mois d’août 2016.
Ce point que nous avons bien entendu évoqué lors de l’entretien préalable n’a pas été contesté.
En dépit de vos promesses, vous n’avez donc pas respecté vos engagements contractuels.
2. Le non-respect de vos horaires de travail
En vertu de l’article 4 de votre contrat de travail
Article 4 Durée du travail
La durée hebdomadaire de Monsieur [M] [X] sera de 35 heures soit un horaire mensuel de 151,67 heures. Cette durée sera répartie de la façon suivante :
Le lundi de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 soit 7h.
Le mardi de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 soit 7h.
Le mercredi de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 soit 7h.
Le jeudi de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 soit 7h.
Le vendredi de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 17h00 soit 7h.
Soit un total hebdomadaire de 35 heures.
Lors de l’entretien professionnel que nous avions eu le 25 janvier 2017 pour faire le point sur votre activité au sein de la société, je vous avais également demandé de respecter vos horaires de travail conformément à l’article 4 de votre contrat de travail.
Malgré mes multiples demandes, vous avez persisté à ne pas les respecter et à travailler comme bon vous semble.
Ainsi, certains jours, vous vous êtes absenté sans justificatif et sans autorisation.
Vous avez refusé la mise en place d’un agenda et de justifier de votre emploi du temps.
3. Le cumul d’emploi
En vertu de l’article 5 de votre contrat de travail,
Article 5 – obligations professionnelles
Monsieur [M] [X] consacrera toute son activité aux tâches qui lui seront confiées par la société.
Il s’engage expressément à respecter les instructions et recommandations qui lui seront données par ses supérieurs hiérarchiques ainsi que, de façon plus générale, par la direction de la société.
Monsieur [M] [X] est strictement tenu au respect du secret professionnel et s’interdit de divulguer à des tiers les secrets de fabrication, les méthodes commerciales, et de façon plus générale, les informations relatives à la société dont il aurait eu connaissance dans le cadre ou l’exercice de ses fonctions.
En outre, pendant le présent contrat, Monsieur [M] [X] devra:
– exercer son activité professionnelle à temps plein,
– se conformer aux conditions de vente, notamment de prix, fixées par la société,
– effectuer, en cas de difficultés avec la clientèle, toutes démarches appropriées pour leur règlement.
A l’issue de la période d’essai, Monsieur [M] [X] devra réaliser au minimum une vente par mois.
Or j’ai découvert de manière fortuite que vous étiez agent général d’assurance auprès de la compagnie d’assurances AXA depuis 2015 avec des horaires de travail qui couvrent vos horaires de travail au sein de mon entreprise.
Ce qui peut expliquer votre peu de disponibilité pour consacrer du temps à l’exécution de votre contrat de travail au sein de ma société.
Votre préavis d’une durée d’un mois que nous vous dispensons d’effectuer débutera à la fin de votre période de congés payés soit le mardi 5 septembre 2017.
A l’issue de votre préavis d’un mois, votre certificat de travail votre attestation du Pôle Emploi, ainsi que votre solde de tout compte vous sera envoyé en courrier recommandé.
Vous devrez restituer le matériel de l’entreprise ainsi que les documents en votre possession.
Enfin, vous êtes éligible au dispositif de portabilité des droits à protection sociale complémentaire. Nous vous remettrons le document d’information sur vos droits.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur, l’expression de notre considération distinguée.’
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d’objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse concerne une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n’est pas nécessaire.
Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l’article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce.
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l’employeur est en droit, en cas de contestation, d’invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.
Pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, l’insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Si la preuve est partagée en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse, il incombe à l’employeur d’apporter au juge des éléments objectifs à l’appui des faits qu’il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l’insuffisance professionnelle dont il se prévaut.
L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité objective, non fautive et durable, d’un salarié à accomplir correctement la prestation de travail pour laquelle il est employé, c’est-à-dire conformément à ce qu’on est fondé à attendre d’un salarié moyen ou ordinaire, employé pour le même type d’emploi et dans la même situation.
L’insuffisance professionnelle doit être établie par des éléments objectifs imputables au salarié.
En l’espèce, il ressort des termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, que les griefs invoqués à l’encontre du salarié sont les suivants : .
* insuffisance professionnelle :
la SAS CDC Constructions reproche à M. [X] [M] de n’avoir procédé qu’à une seule vente depuis son embauche, alors qu’il lui était demandé à son contrat de travail d’en effectuer au moins une par mois à l’issue de sa période d’essai.
Au soutien de cette affirmation, qui n’est pas contestée dans sa matérialité, et ainsi que cela a été développé supra au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail, la SAS CDC Constructions produit un tableau récapitulatif des ventes conclues sur les années 2006 à 2018, et plus spécifiquement mois par mois sur les années 2014 à 2018 qui font apparaître une seule vente conclue par M. [X] [M] en juillet 2016, alors que son prédécesseur entre 4 et 6 ventes par an, M. [U] et M. [O] étant sur des volumes équivalents.
Ces données chiffrées ne sont pas remises en cause par M. [X] [M] qui explique la situation par le fait que son objectif était irréalisable, ce qui est contredit par les données chiffrées ainsi rappelées, et qu’il était affecté à des fonctions de développement marketing et communication par la SAS CDC Constructions et a été amené à créer un logiciel de chiffrage du coût de la construction d’une maison et de sa facturation. Il produit en ce sens les attestations de :
– plusieurs personnes se présentant comme des fournisseurs ( architecte, agenceur de cuisine, dessinateur, ..) Sans authentification de leur signature et sans mention d’une production de l’attestation en justice, qui indiquent avoir travaillé de manière satisfaisante dans leur domaine de compétence avec l’appelant,
– une photographie d’un stand annoté sans qu’il soit possible d’identifier qui en est le concepteur, la seule mention manuscrite apposée par l’appelant n’étant étayée par aucun élément,
– un prospectus et des catalogues sans qu’il soit possible d’en identifier le concepteur,
Pour contester ces éléments, la SAS CDC Constructions justifie des contrats conclus et des facturations en 2016 et 2017 pour la conception de logos et de plaquettes de présentation, la mise en oeuvre de publicité sur différents sites par des entreprises spécialisées. Elle verse aux débats les attestations de certains des fournisseurs ayant fourni des attestations à M. [X] [M] qui précisent qu’il les avaient rédigées à la demande de ce dernier afin de compléter un dossier en vue d’une embauche. Ces éléments ne sont pas contestés par M. [X] [M].
Ainsi, la réalité de l’insuffisance professionnelle de M. [X] [M] est démontrée par la SAS CDC Constructions.
* non-respect des horaires de travail
Pour démontrer la réalité de ce grief, la SAS CDC Constructions produit la photographie d’un poste de travail présenté comme étant celui de M. [X] [M] sur lequel est présent un ordinateur dont la caméra est obturée, et un courrier manuscrit de M. [D] [B], accompagné de sa pièce d’identité, prédécesseur de l’appelant, qui décrit des conditions de travail optimales et précise ‘ le dernier commercial que j’ai rencontré et côtoyé était censé prendre ma suite. MR [C] avait carte blanche sur tout. J’ai été très surpris de sa façon de faire, beaucoup de liberté lui était accordée il venait le matin et très rarement l’après-midi. Nous ne savions jamais où il était et il ne signalait pas où il allait contrairement à une pratique imposée dans l’entreprise.’
M. [X] [M] qui conteste ce grief, soutient au contraire avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires.
De fait, les éléments produits par l’employeur ne démontrent pas ce grief. Au surplus, les états de frais annexés aux bulletins de salaire de M. [X] [M] produits par la SAS CDC Constructions mentionnent ses horaires de trajet domicile – travail sans qu’il ne fassent apparaître des manquements significatifs aux horaires prévus au contrat de travail, certaines journées étant comptabilisées comme étant travaillées à plus de 7 heures mais d’autre en deçà.
Il en résulte que la réalité de ce grief n’est pas démontrée.
* cumul d’emploi
Pour démontrer la réalité de ce grief, la SAS CDC Constructions produit un extrait infogreffe concernant M. [X] [M] inscrit en qualité d’agent commercial depuis le 9 septembre 2015, et des extraits d’une recherche ‘google’ le concernant qui indiquent notamment des horaires d’ouverture d’agence du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 14h à 18h.
Pour contester ces éléments, M. [X] [M] soutient qu’il n’exerçait cette activité que de manière ponctuelle depuis son domicile et qu’il a consacré son temps de travail à son employeur. Il explique que ce dernier connaissait cette situation dès la conclusion du contrat de travail.
Pour autant, et sans qu’il soit nécessaire de connaître les circonstances dans lesquelles la SAS CDC Constructions a eu connaissance de l’activité d’agent général d’assurances de son salarié, dès lors que le contrat de travail était signé, M. [X] [M] s’est engagé à exercer son activité pour la SAS CDC Constructions à temps plein, ce qui exclut la possibilité d’exercer sur les mêmes créneaux horaires une autre activité en qualité de travailleur indépendant.
L’absence de justificatif au soutien des affirmations de M. [X] [M] quant au caractère occasionnel de son activité pendant la durée d’exécution de son contrat de travail ne permet pas de remettre en cause les éléments produits par l’employeur.
En conséquence, la réalité de ce grief est établie.
Il résulte de l’ensemble de ces développements que la réalité l’insuffisance professionnelle énoncée par la SAS CDC Constructions dans la lettre de licenciement est établie, laquelle suffit à fonder le licenciement. De plus, le cumul d’emploi qui constitue un manquement aux obligations contractuelles est constitutif d’une cause réelle et sérieuse d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.
En conséquence, c’est à juste titre que les premiers juges ont considéré que le licenciement de M. [X] [M] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et l’ont débouté de ses demandes indemnitaires. Leur décision sera confirmée.
Demande de dommages et intérêts par la SAS CDC Constructions
Force est de constater que la SAS CDC Constructions ne développe aucun argument au soutien de sa demande de dommages et intérêts et par suite ne justifie d’aucun préjudice qui nécessiterait réparation.
Elle sera en conséquence déboutée de sa demande et la décision déférée infirmée sur ce point.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme le jugement rendu le 17 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Nîmes sauf en ce qu’il a condamné M. [M], à verser à la société CDC Constructions, la somme de 4500 euros pour procédure abusive,
Et statuant à nouveau sur ce point,
Déboute la SAS CDC Constructions de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne M. [X] [M] à verser à la SAS CDC Constructions la somme de 1.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [X] [M] aux dépens de la procédure d’appel.
Arrêt signé par le président et par la greffiere.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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